vendredi 19 avril 2024
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Statut des fonctionnaires : le tribunal suprême rejette le recours des syndicats

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Dans une décision rendue le 10 mars 2023, le tribunal suprême a rejeté un recours lancé par l’Union des syndicats de Monaco (USM) et le syndicat des agents de l’Etat et de la commune (SAEC). Ils réclamaient l’annulation de la loi n° 1527 du 7 juillet 2022 modifiant la loi n° 975 du 12 juillet 1975 sur le statut des fonctionnaires. « Entérinant une pratique déjà ancienne, la loi du 7 juillet 2022 prévoit désormais que seuls les Monégasques occupant des emplois permanents de l’Etat pourront avoir la qualité de fonctionnaire, à l’exception des étrangers occupant des emplois relatifs à la sécurité et à l’ordre public au sein de la direction de la sûreté publique. Pour tous les autres emplois, les ressortissants étrangers seront recrutés en qualité d’agent contractuel de l’Etat », rappelle le tribunal suprême dans un communiqué. Les syndicats estimaient que ce texte allait au-delà de la priorité constitutionnelle reconnue aux Monégasques pour l’accession aux emplois publics et privés. Celle-ci est inscrite dans l’article 25 de la Constitution, qui dit que « la priorité est assurée aux Monégasques pour l’accession aux emplois publics et privés, dans les conditions prévues par la loi ou les conventions internationales ». Le tribunal suprême a estimé que la loi attaquée par les syndicats n’a ni « pour objet, ni pour effet, compte tenu des caractéristiques démographiques de la principauté, d’interdire l’accès aux emplois publics de personnes n’ayant pas la nationalité monégasque » et que « aucune disposition de la Constitution n’interdit au législateur de réserver aux nationaux la qualité de fonctionnaire ». Par ailleurs, la loi du 7 juillet 2022 complète le statut des fonctionnaires pour interdire les discriminations au sein de la fonction publique « en raison du genre, des opinions politiques, philosophiques, religieuses ou syndicales, de l’orientation sexuelle, de l’état de santé, du handicap, de l’apparence physique ou de l’appartenance ethnique », rappelle le tribunal suprême.

Par contre, ce texte autorise que des « distinctions soient faites entre fonctionnaires en vue de répondre à des « exigences professionnelles essentielles et déterminantes », notamment afin de tenir compte de la nature des fonctions ou des conditions de leur exercice. De telles distinctions sont exceptionnellement permises entre les sexes, si elles sont commandées par la nature des fonctions ». C’est ce point qui a été attaqué par les syndicats, qui pensent que cela pourrait permettre des discriminations pourtant interdites. Le tribunal suprême a rejeté cette demande, estimant que « le principe constitutionnel d’égalité, qui interdit toute discrimination au sein de la fonction publique, s’impose à l’administration sans que la loi ait besoin de le rappeler. Dès lors, le fait que certains motifs de discrimination puissent ne pas être mentionnés dans la loi n’est pas contraire à la Constitution […]. Le statut de la fonction publique doit être interprété comme n’autorisant pas que des distinctions soient fondées sur des caractéristiques personnelles sans lien avec la nature des fonctions ou les conditions de leur exercice ». Enfin, dans le cadre des procédures lancées à l’encontre de fonctionnaires, les syndicats estimaient que les dispositions prises par la loi de 2022 ne permettaient pas de garantir les droits de la défense du fonctionnaire. Ce texte prévoit à ce sujet que le fonctionnaire peut avoir accès à son dossier individuel, avant le prononcé d’une sanction disciplinaire. Seules certaines pièces ne sont pas consultables. La liste des pièces en question sera définie par une ordonnance souveraine. « Le principe général des droits de la défense impose déjà, et sans que la loi ait besoin de le prévoir, que tout fonctionnaire a droit à la communication des pièces de son dossier à l’occasion du prononcé de toute mesure prise en considération de la personne » a répondu le tribunal suprême, tout en précisant que « le droit d’obtenir communication des pièces de son dossier comporte, pour l’agent concerné, celui d’en prendre copie ». Quant à l’ordonnance souveraine à venir, elle devra « fixer des critères objectifs, dans le respect du principe constitutionnel des droits de la défense », et pourra être contestée, si nécessaire, devant le tribunal suprême. Reste désormais à savoir si l’USM et le SAEC vont poursuivre le combat, et lancer de nouvelles procédures judiciaires