jeudi 25 avril 2024
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Le Grand Prix de Monaco (encore) menacé ?

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Et si c’était le dernier Grand Prix de Monaco ? Comme pendant l’été 2010  (1), la menace de disparition ressort à nouveau du chapeau de Formula One, alors que des négociations sont en cours pour la signature d’un nouveau contrat.

C ’est toujours la même rengaine. À chaque renégociation de contrat avec Formula One, les organisateurs du Grand Prix de Monaco se voient menacés d’assister à la der des ders de la course mythique en principauté. Alors que le contrat actuel se termine à la fin de la saison 2022, le Grand Prix de Monaco n’a pas encore la garantie ferme et définitive d’être maintenu au calendrier 2023, tout comme le Grand Prix de France, de Belgique, et du Mexique. Stefano Domenicali, qui tient les rênes de Liberty Media, le nouveau propriétaire de la Formule 1 (F1), a expliqué pourquoi : « L’arrivée d’offres de la part de nouveaux promoteurs est un avantage pour la F1, puisque cela incite les organisateurs actuels à élever la qualité de leur travail, en termes d’offre pour le public, d’infrastructures, et de gestion de l’événement. Ce n’est plus suffisant d’avoir un héritage fort. Vous devez également montrer que vous êtes au niveau. » Entre les lignes, cette déclaration indique que c’est l’aspect économique qui joue essentiellement en la défaveur de Monaco, comparé aux organisateurs du Moyen-Orient et des États-Unis, qui ont les reins solides, et où la F1 connaît un véritable regain de notoriété depuis le succès du documentaire-série Drive to Survive, diffusé sur Netflix depuis 2019. Liberty Media ne se cache pas. L’objectif est de conquérir de nouveaux marchés rentables. Et ce n’est pas un hasard si ce groupe américain a annoncé l’organisation d’un Grand Prix à Las Vegas dès la saison prochaine. Face à la menace, les organisateurs du Grand Prix de Monaco devront donc probablement sortir le chéquier pour survivre. Rien de nouveau sous le soleil de la principauté.

« Ce n’est plus suffisant d’avoir un héritage fort. Vous devez également montrer que vous êtes au niveau »

Stefano Domenicali.
Président de la Formule 1

Même discours qu’en 2010

Déjà pendant l’été 2010, c’était le même scénario. Plusieurs pays dont l’Inde, la Russie, et les États-Unis rivalisaient alors pour obtenir l’organisation d’un Grand Prix, et le circuit de Monaco se voyait menacé. Pourquoi en 2010 ? Parce que le contrat arrivait à expiration, et le patron d’alors, le « grand argentier » Bernie Ecclestone, n’hésitait pas à faire monter les enchères : « Je pense qu’on peut réaliser le prochain championnat sans Monaco. Ses organisateurs ne paient pas assez, déclarait-il alors à la presse, en juillet 2010. Les Européens vont devoir verser plus d’argent, ou nous serons obligés d’aller voir ailleurs. » Jusqu’à présent, Monaco aurait payé 13 millions d’euros par an à Liberty Media pour organiser son Grand Prix. Loin derrière les 650 millions de dollars versés sur dix ans par l’Arabie saoudite pour le Grand Prix de Jeddah, puis de Quiddiya, selon les chiffres révélés par le quotidien britannique The Guardian. Quant au nouveau Grand Prix de Las Vegas, le montant est estimé à 117 millions d’euros par course, sur dix ans. Soit un “deal” à plus d’un milliard d’euros, en passe de devenir le plus juteux de la F1, selon le Daily Mail.

Ronronnant

Mais il n’est pas question que d’argent. Outre son image glamour et son aura mythique, le Grand Prix de Monaco souffre tout de même d’une image ronronnante. Il est difficile de doubler dans les rues de la principauté et le tracé ne permet pas non plus de grandes pointes de vitesse, contrairement à d’autres circuits plus modernes. Du coup, certains estiment que Monaco est un Grand Prix pendant lequel on s’ennuie. C’est ce qu’a avoué le patron de McLaren, Zak Brown, devant la presse : « Je pense que Monaco doit s’aligner sur les mêmes termes commerciaux que les autres Grands Prix, et aussi penser à comment adapter le tracé, puisque nos monoplaces sont devenues plus grosses, et cela rend la course plus difficile. Je préfère avoir Monaco au calendrier que de ne pas l’avoir. Mais comme le sport est plus grand que n’importe quel pilote ou écurie, je pense qu’il est aussi plus grand que n’importe quel Grand Prix. » Sur l’ensemble des Grands Prix, celui de Monaco n’est pas celui qui offre le plus de spectacle, en témoigne l’édition précédente, vierge de tous dépassements. Sans oublier que les nouvelles monoplaces ont gagné en poids et en taille, ce qui risque de ne pas favoriser les dépassements davantage. Pour se maintenir au-delà de 2023, les organisateurs du Grand Prix devront probablement revoir leur copie aussi, pour tenter d’y insuffler un peu plus de spectacle.

« Discussion »

Mais l’Automobile Club de Monaco (ACM), qui chapeaute l’évènement, n’envoie pas de signaux qui vont dans ce sens. Questionné au sujet d’une possible disparition du Grand Prix de Monaco, le président Michel Boeri s’est juste voulu confiant face à ce qui ne s’apparenterait qu’à des rumeurs, selon lui : « Je veux faire allusion à ce qu’on a pu lire dans la presse, où l’on évoque des difficultés après cette édition 2022, c’est-à-dire dès l’année prochaine, pour continuer à organiser des Grands Prix. Il était sous-entendu que les prix demandés par Liberty étaient trop excessifs pour Monaco et que le Grand Prix ne se ferait plus. C’est faux. Nous sommes toujours en discussion avec eux, et nous devons désormais concrétiser par la signature d’un contrat. Je peux vous garantir qu’après 2022, le Grand Prix continuera d’avoir lieu. Je ne sais si le contrat portera sur 3 ou 5 ans, mais c’est du détail », avait-il expliqué à la presse monégasque. Mais, même en cas de prolongation de contrat, le Grand Prix de Monaco devra quand même se renouveler pour survivre.

1) À ce sujet, lire notre article Vers la fin du Grand Prix de Monaco ?, publié dans Monaco Hebdo n° 709.

Lire l’interview de la journaliste Anne Giuntini, qui réagissait en 2010 aux premières menaces d’annulation du Grand Prix de Monaco

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