vendredi 26 avril 2024
AccueilPolitiqueMandature 2023-2028 : le Conseil national s’organise, dans l’union

Mandature 2023-2028 : le Conseil national s’organise, dans l’union

Publié le

Le 16 février 2023, le Conseil national a élu à sa tête Brigitte Boccone-Pagès. Le lendemain, les élus en charge des 12 commissions et groupes mixtes de travail ont aussi été désignés par un vote à l’unanimité des 24 conseillers nationaux.

Une fois encore, le moment a été historique. Le 16 février 2023, un peu avant 18 heures, Brigitte Boccone-Pagès est devenue la première femme élue à la présidence du Conseil national par ses pairs, après avoir très facilement remporté l’élection nationale du 5 février 2023. Cela dans un contexte qui a vu la participation chuter de près de 13 points, à 57,25 %, par rapport à l’élection nationale de février 2018. La doyenne, Maryse Battaglia, a donc rapidement laissé le fauteuil de la présidence à Brigitte Boccone-Pagès, qui commence à avoir ses habitudes, puisqu’elle occupe cette fonction depuis le 6 octobre 2022. Pour assister à cette installation, le public est venu nombreux. Des anonymes, mais aussi des personnalités, comme l’ancien président du Conseil national, Stéphane Valeri, le maire de Monaco, Georges Marsan, l’archevêque de Monaco, Monseigneur Dominique-Marie David, ou encore l’ambassadeur de France en principauté, Laurent Stefanini.

Conseil National de Monaco
« Monaco et les Monégasques savent ce qu’ils doivent à mon prédécesseur [Stéphane Valeri — NDLR], je le sais au centuple, et il sait ma gratitude pour tout ce qu’il a accompli pour notre communauté nationale, et pour moi, pour m’avoir permis de gravir les échelons à ses côtés, pas à pas, de la présidence de la commission de l’éducation et de la jeunesse à l’époque, à la place que j’occupe aujourd’hui. » Brigitte Boccone-Pagès. Présidente du Conseil national. © Photo Conseil National

« Je deviens la première femme à présider le Conseil national suite aux élections nationales. L’union nationale est le résultat des urnes cette fois, et non plus seulement le fait de rapprochements responsables et utiles au pays »

Brigitte Boccone-Pagès. Présidente du Conseil national
Conseil National de Monaco
Après être devenue la première femme dans l’histoire de Monaco à être élue au Conseil national en tant que tête de liste le 5 février 2023, Brigitte Boccone-Pagès a été élue à l’unanimité des élus présents à la présidence du Conseil national le 16 février 2023. © Photo Conseil National

Femmes

C’est d’ailleurs par un hommage à son prédécesseur, Stéphane Valeri, que Brigitte Boccone-Pagès a débuté son discours : « Je deviens la première femme à présider le Conseil national suite aux élections nationales. L’union nationale est le résultat des urnes cette fois, et non plus seulement le fait de rapprochements responsables et utiles au pays. Je suis donc, grâce à mes compatriotes et grâce à notre représentation nationale, la première femme à succéder à ces grands hommes qui ont marqué l’histoire politique de notre pays et la présidence de cette institution. De grands présidents ont dirigé le Conseil national. Je pense essentiellement à Louis Aureglia (1892-1965), puis à Jean-Charles Rey (1914-1994) bien sûr, à Jean-Louis Campora ensuite, et enfin à Stéphane Valeri. » C’est ensuite les droits des femmes qu’a immédiatement évoqué Brigitte Boccone-Pagès, estimant que « tant d’avancées ont vu le jour, notamment en matière de droits des femmes, avec le début du long chemin vers l’égalité ». C’est une première décision, symbolique, qu’a ensuite pris la présidente du Conseil national, en proposant de supprimer le mot « femme » de l’appellation de la commission spéciale chargée de ce sujet, pour qu’elle devienne « commission des droits de la famille et de l’égalité ». Lucide, Brigitte Boccone-Pagès a néanmoins souligné qu’il restait encore beaucoup de travail à accomplir, afin de tendre davantage vers l’égalité femmes-hommes. Et cela, dans tous les domaines, « notamment en recherchant tous les moyens de parvenir à l’égalité de traitement dans la rémunération du travail, entre les femmes et les hommes. L’égalité salariale sera ainsi le grand chantier de fond de cette commission ».

« Je dis à ceux qui s’amusent avec les chiffres d’une participation meilleure qu’attendue dans le contexte électoral que nous avons connu, à ceux qui n’ont que l’aigreur comme moteur, que nul n’empêche les compatriotes de se présenter aux élections démocratiques de leur pays. Encore faut-il en avoir le courage et un début de légitimité pour oser franchir le pas »

Brigitte Boccone-Pagès. Présidente du Conseil national

« Courage »

Le sujet suivant a été celui de l’élection nationale du 5 février dernier. Remportée par la liste de Brigitte Boccone-Pagès L’Union avec 4 348 votants sur 7 594 inscrits, soit plus de 89 % des suffrages, la participation a été de seulement 57,25 %, contre 70,24 % en 2018, et 74,47 % en 2013. Du jamais vu depuis très longtemps. Et du jamais vu tout court depuis la mise en place du vote par correspondance et sur Internet [à ce sujet, lire notre article Vote électronique : après une série d’élections invalidées en France, faut-il encore l’appliquer à Monaco ?, publié dans ce numéro de Monaco Hebdo — NDLR]. Dans un tel contexte, la question de la représentativité a été posée par un certain nombre de Monégasques, ce qui n’a pas échappé à Brigitte Boccone-Pagès : « Je dis à ceux qui s’amusent avec les chiffres d’une participation meilleure qu’attendue dans le contexte électoral que nous avons connu, à ceux qui n’ont que l’aigreur comme moteur, que nul n’empêche les compatriotes de se présenter aux élections démocratiques de leur pays. Encore faut-il en avoir le courage et un début de légitimité pour oser franchir le pas. » La présidente du Conseil national s’est fixé pour objectif de travailler « dans l’amplitude la plus absolue du rôle qui doit être le nôtre. Celui de représenter, avec les sensibilités et les opinions de chacune et de chacun, les attentes et les besoins légitimes de nos compatriotes, dans la recherche constante de l’intérêt général ».

C’est une première décision, symbolique, qu’a pris la présidente du Conseil national, en proposant de supprimer le mot « femme » de la commission spéciale chargée de ce sujet, pour devenir commission des droits de la famille et de l’égalité

Priorité

Evoquant ensuite l’Europe et la négociation d’un éventuel accord d’association avec l’Union européenne (UE) débutée en mars 2015, Brigitte Boccone-Pagès a promis que les élus de L’Union seront là pour que « Monaco ne courbe pas l’échine ». Avant d’insister, une nouvelle fois : « Nous serons là pour protéger notre communauté nationale de toute atteinte à ce qui fait son ADN, nous serons là pour défendre pied à pied chaque élément constitutif de notre modèle économique et social, ce modèle envié de beaucoup, et forcément parfois incompris. Les lignes rouges ont été rappelées à plusieurs reprises par le prince souverain. Le Conseil national sera à ses côtés pour les défendre. » Priorité nationale pour les Monégasques concernant notamment l’emploi et le logement, mais aussi libre installation en principauté pour les nationaux, accès aux professions réglementées pour les Monégasques… Sur ces sujets, et sur bien d’autres, L’Union a rappelé qu’elle ferait bloc. « Nous devons tenir nos positions pour qu’aucun accord qui serait de nature à attaquer ce modèle ne fasse l’objet d’une éventuelle autorisation de ratification par le Conseil national. Autrement dit, c’est en amont que nous devons agir », a estimé la présidente de l’Assemblée, avant d’ajouter : « Je ne veux pas croire que le gouvernement pourrait nous déposer un projet de loi non conforme à cette préservation indispensable. Nous demandons, en outre, à être associés aux informations relatives à l’évolution de cette négociation. L’unité des institutions doit naturellement être étendue à la problématique de l’UE, comme cela doit être le cas avec Moneyval. »

« L’économie monégasque est en bonne santé, et elle est vivace. Nous devons en être fiers. Mais que représente-t-elle face aux États-Unis, à la Chine, ou même face aux pays voisins ? » 

Pierre Dartout. Ministre d’Etat

« Souveraineté »

Dans un discours d’une quinzaine de minutes, le ministre d’Etat, Pierre Dartout, a lui aussi abordé le dossier européen. Il s’est longuement attardé sur ce sujet, rappelant au passage « l’importance, pour la principauté, d’un bon accord d’association qui doit permettre d’établir un partenariat durable, solide et bénéfique avec l’UE et l’ensemble de ses 27 Etats membres ». Mais il a aussi été clair, afin de tenter de tordre le cou, une bonne fois pour toutes, aux craintes de certains en principauté : « La Commission européenne, comme le Conseil national et la population, ont été informés dès le départ [en mars 2015 — NDLR] qu’aucun accord ne sera signé sans que les Monégasques ne soient assurés de continuer à vivre, travailler et se loger dans leur pays. Dire ou penser que les négociateurs monégasques ne défendraient pas cet impératif est inexact. Il en va de notre responsabilité commune de ne pas jouer avec les craintes qui peuvent s’exprimer autour de nous. Nous devons au contraire les apaiser, pour que ces négociations continuent à se dérouler sereinement. » Puis, s’appuyant sur la guerre en Ukraine et l’invasion de ce pays par la Russie, Pierre Dartout a lancé : « Les nombreux déplacés ukrainiens accueillis en principauté peuvent en témoigner. Pour ne pas subir la loi du plus fort, il faut trouver des partenaires fiables, qui partagent les mêmes idéaux, et dialoguer avec eux. Comme Mario Draghi a pu le dire dans un autre contexte : « Il n’y a pas de souveraineté dans la solitude ». C’est notamment en concluant des accords internationaux que l’on affirme son existence et que l’on consolide sa place dans le concert des nations, en conservant son identité, ses idées et ses valeurs. » Evoquant la nécessité pour Monaco de se doter d’un cadre institutionnel et juridique plus sûr pour permettre à l’Etat monégasque de faire respecter cette souveraineté « si chèrement acquise au fil des siècles et des alliances », le ministre d’Etat a jugé que la logique à suivre est la même en matière économique, qui exige, selon lui, « la coopération et la négociation ». Avant de lancer : « L’économie monégasque est en bonne santé, et elle est vivace. Nous devons en être fiers. Mais que représente-t-elle face aux États-Unis, à la Chine, ou même face aux pays voisins ? ». Rappelant que « plusieurs » conventions bilatérales avec la France ont trouvé leurs limites alors qu’elles permettaient aux entreprises de vendre librement leurs produits sur le marché européen, Pierre Dartout a souligné que ces difficultés se sont accrues avec « la dématérialisation des démarches administratives et le développement de l’économie numérique ».

Le ministre d’Etat a indiqué aux conseillers nationaux qu’il avait demandé une une étude prospective sur les conséquences d’un échec des négociations avec l’UE, « sur les plans politique, économique et juridique ». Les résultats de cette étude sont attendus pour la fin du printemps 2023 et ils seront discutés avec les élus

Foncière d’Etat

Mais comme gouverner c’est prévoir, et qu’il ne faut potentiellement rien exclure, le ministre d’Etat a indiqué aux conseillers nationaux qu’il avait demandé une étude prospective sur les conséquences d’un échec des négociations, « sur les plans politique, économique et juridique ». Les résultats de cette étude sont attendus pour la fin du printemps 2023, et ils seront discutés avec les élus, a-t-il promis. Enfin, pour répondre aux attentes de Brigitte Boccone-Pagès, Pierre Dartout a conclu sur ce sujet en rappelant que la « responsabilité de l’exécutif est de négocier, dans le respect des lignes édictées par le prince souverain, je le cite, le meilleur accord d’association pour l’avenir de Monaco, et de soumettre à la représentation nationale un texte qu’elle soit en mesure d’approuver. C’est dans cette optique qu’une délégation restreinte du Conseil national continuera d’être étroitement informée de l’avancée des discussions, comme du contenu de l’accord. » Au-delà de la question internationale, ce sont aussi les finances de l’Etat et les deniers publics qui ont occupé une partie de cette soirée d’investiture. Se disant préoccupée par le développement de nouvelles recettes pour l’Etat monégasque, Brigitte Boccone-Pagès a confirmé que L’Union déposerait « prochainement » une proposition de loi pour créer une foncière d’Etat, pour que l’Etat « valorise enfin pour lui-même et pour son compte chaque mètre carré disponible ». Cela passera aussi par la modernisation des comptes publics, a-t-elle assuré, et aussi, par un changement au sein de la commission des finances et de l’économie nationale. Désormais présidée par Franck Julien, en remplacement de Balthazar Seydoux, elle disposera de deux vice-présidence. L’une pour le commerce et l’attractivité, avec Corinne Bertani, et une deuxième pour les entreprises et l’innovation, avec Roland Mouflard. D’autres sujets, comme la transition numérique ou la problématique de la mobilité en principauté ont aussi été évoqués par une Brigitte Boccone-Pagès souriante, rappelant au passage que « l’union nationale est en marche » et que « l’union nationale, c’est la capacité à se rassembler sur l’essentiel ». Symbole de cette capacité à se « rassembler sur l’essentiel », deux anciens membres du groupe politique Union Monégasque (UM), Jean-Louis Grinda et Christophe Brico, ont pris du galon. Le premier a été élu à la vice-présidence du Conseil national, pendant que le second a pris la tête de la commission pour le suivi du fonds de réserve constitutionnel et la modernisation des comptes publics. Et pour enfoncer le clou, l’ancienne tête de liste en 2018 d’Horizon Monaco (HM), Béatrice Fresko-Rolfo, s’est vue proposer la présidence de la délégation à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Conseil National de Monaco
Mathilde Le Clerc a été élue présidente de la commission pour l’éducation, la jeunesse, et les sports.© Photo Conseil National

Commissions

Le lendemain, le 17 février 2023, les présidences de commission et tous les postes de délégués ont donné lieu à un vote à l’unanimité des 24 conseillers nationaux [voir notre encadré, par ailleurs — NDLR]. Les 12 commissions ont été attribuées, et on note quelques changements par rapport à la mandature 2018-2023. Vice-président du Conseil national et président de la commission des finances et de l’économie nationale pendant la mandature 2018-2023, Balthazar Seydoux a été remplacé sur ces deux fonctions. C’est Franck Julien qui lui succède à la tête de la commission des finances. Le président 2018-2023 de la commission du logement, Franck Lobono, a pris la direction de la commission des intérêts sociaux et des affaires diverses. Il remplace Nathalie Amoratti-Blanc qui a pris la présidence de la commission environnement et qualité de vie. Elle sera appuyée par deux vice-présidentes : Karen Aliprendri pour les questions liées à la mobilité, et Jade Aureglia pour ce qui relève de l’urbanisme durable et des grands travaux. Laissée vacante suite au départ de Franck Lobono, la très importante commission du logement est revenue à Maryse Battaglia. Guillaume Rose a quitté la commission environnement et qualité de vie, pour s’intéresser désormais à la culture et au patrimoine. Franck Julien étant désormais en charge des finances, il a été remplacé par un nouveau venu, Nicolas Croesi, à la tête de la commission pour le développement du numérique. Autre arrivant : l’avocat Régis Bergonzi a été chargé de la commission pour le suivi de la négociation avec l’UE, en remplacement de Fabrice Notari, qui a rejoint la commission des relations extérieures. La présidence de de l’éducation, de la jeunesse et des sports n’est plus occupée par Marine Grisoul. Elle a été remplacée à cette fonction par une autre femme, Mathilde Le Clerc. L’avocate Christine Pasquier-Ciulla a pris la suite de Nathalie Amoratti-Blanc à la présidence de la commission des droits de la famille et de l’égalité. Au total, quatre hommes dirigent les quatre commissions permanentes, à savoir la commission des finances et de l’économie nationale, la commission des intérêts sociaux et des affaires diverses, la commission de législation, et la commission des relations extérieures. Les femmes occupent quatre présidences et trois vice-présidences. Plus largement, au total, huit présidents et quatre présidentes ont donc désormais la charge d’animer ces douze commissions jusqu’en 2028. Et cela, dans l’union.

Conseil National de Monaco
De gauche à droite : Nathalie Amoratti-Blanc, Mathilde Le Clerc, Christine Pasquier-Ciulla, et Béatrice Fresko-Rolfo. © Photo Conseil National

Conseil national mandature 2023-2028 : les présidences des 12 commissions et groupes mixtes de travail

Les commissions permanentes :
• Commission des finances et de l’économie nationale
Président : Franck Julien
Vice-Présidente pour le commerce et l’attractivité : Corinne Bertani
Vice-Président pour les entreprises et l’innovation : Roland Mouflard
• Commission des intérêts sociaux et des affaires diverses
Président : Franck Lobono
• Commission de législation
Président : Thomas Brezzo
• Commission des relations extérieures
Président : Fabrice Notari
Les commissions spéciales :
• Commission de l’éducation, de la jeunesse et des sports
Présidente : Mathilde Le Clerc
• Commission du logement
Présidente : Maryse Battaglia
• Commission des droits de la famille et de l’égalité
Présidente : Christine Pasquier-Ciulla
• Commission de la culture et du patrimoine
Président : Guillaume Rose
• Commission environnement et qualité de vie
Présidente : Nathalie Amoratti-Blanc
Vice-Présidente pour les mobilités : Karen Aliprendi
Vice-Présidente pour l’urbanisme durable et les grands travaux : Jade Aureglia
• Commission pour le développement du numérique
Président : Nicolas Croesi
• Commission pour le suivi de la négociation avec l’Union européenne
Président : Régis Bergonzi
• Commission pour le suivi du fonds de réserve constitutionnel et la modernisation des comptes publics
Président : Christophe Brico