samedi 20 avril 2024
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Le nouveau procureur installé

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Jean-Pierre Dréno
Jean-Pierre Dréno © Photo Charly Gallo / Centre de Presse.

Lors de son installation, le 6 mai dernier, le nouveau procureur général de Monaco Jean-Pierre Dréno a rappelé les missions du parquet. Ainsi que les nouvelles mesures concernant la garde à vue.

En tant que procureur de la République à Perpignan, Jean-Pierre Dréno avait déjà eu l’occasion de le dire aux journalistes?: « Je ne suis pas directeur général des pompes funèbres et je ne suis pas là pour enterrer les affaires. Ce serait la négation même de mon travail. J’essaie de ne pas voler mon salaire à la fin du mois. » Cette philosophie, le nouveau procureur général, remplaçant Jacques Raybaud, parti à la cour de cassation, compte bien la conserver à Monaco. Car si aujourd’hui, en raison de l’évolution de la jurisprudence européenne, les procureurs sont « mis à l’index », Jean-Pierre Dréno défend bec et ongles la mission qui lui est confiée. Surtout dans le contexte d’« annus horibilis » que vient de vivre le Ministère public français?: « Nous avons appris, par un arrêt de la CEDH du 23 novembre 2010 (France Moulin contre France) que nous n’étions pas des magistrats habilités par la loi à exercer des fonctions judiciaires et la cour de cassation a affirmé que le ministère public n’est pas une autorité judiciaire au sens où l’entend la convention européenne des droits de l’homme, faute de présenter des garanties d’indépendance et d’impartialité. Cette désillusion jurisprudentielle s’est accompagnée d’une désillusion médiatique?: […] le ministère public dépendrait du seul bon vouloir du pouvoir exécutif, lequel s’immiscerait dans le cours de nos procédures et solliciterait de notre part des services », a analysé le chef du parquet lors de son discours d’installation, le 6 mai dernier, devant les magistrats et avocats monégasques. S’il juge la critique médiatique infondée, cela n’empêche pas Jean-Pierre Dréno de prendre en compte la jurisprudence de Strasbourg?: « Je n’ai jamais envisagé un instant ignorer les contours et le contenu de la notion de procès équitable tels qu’ils sont définis par les juges de Strasbourg », a-t-il affirmé devant ses pairs.

Droit de se taire

Car à Monaco aussi, il faudra « tirer les conséquences d’une telle décision et trouver une formule qui permet de satisfaire les exigences de la cour européenne et nos traditions juridiques. » A l’heure où la France réfléchit à remplacer son système inquisitoire (de droit romano-germanique) par une procédure accusatoire, typiquement anglo-saxonne, Monaco ne s’est pas encore lancé dans ce débat?: « Je ne pense pas qu’un changement soit envisagé pour le ministère public », a juste indiqué le nouveau chef du parquet qui, pour l’heure, avoue être « un étudiant en droit monégasque », en plein apprentissage des 1?312 pages du code monégasque.

En revanche, depuis son arrivée, le procureur général a pris à bras-le-corps le sujet épineux de la garde à vue. « J’ai demandé à ce que la sûreté publique notifie les droits exigés par la cour européenne qui sont dans la philosophie du projet de loi sur la garde à vue, déposé prochainement au conseil national. » La police devra donc désormais notifier au gardé à vue le droit de se taire (et donc de ne pas s’incriminer), lequel pourra bénéficier de l’assistance d’un avocat lors de la garde à vue. Ce qui n’était pas gagné. Juste après l’affaire Mosashvili, qui avait consacré le droit au silence, le directeur André Muhlberger avait en effet affirmé qu’il n’était pas question d’aller au-delà de l’application de la loi monégasque. Une tension entre justice et police qui semble révolue. Pour Jean-Pierre Dréno, « tout ça se fait en pleine concertation et non de manière conflictuelle. C’est une chaîne pénale. On va faire en sorte que les procédures ne soient pas fragilisées. C’est capital pour la sécurité juridique. »