vendredi 26 avril 2024
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Venturi : de Monaco à la Lune

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Fin mars 2023, le groupe monégasque Venturi a annoncé la signature d’un accord de lancement avec SpaceX. Son rover, baptisé « Flex », sera déposé sur la Lune en 2026.

La principauté de Monaco et la Lune sont certes séparées de quelque 384 000 kilomètres, mais, mi-2026, la première rendra visite à la seconde. Le groupe Venturi a en effet dévoilé, le 31 mars 2023, en compagnie de sa filiale suisse Venturi Lab et de son partenaire américain Venturi Astrolab, la signature d’un accord de lancement avec SpaceX. Le mégalanceur Starship va ainsi déposer à proximité du pôle Sud de l’astre lunaire le rover Flex (Flexible Logistics and Exploration). Lequel constituera « le plus grand et le plus performant de l’histoire des véhicules lunaires », selon Venturi. Ce rover — ou, pour être plus précis, cette astromobile — de plus de deux tonnes, cargaison comprise, est le fruit d’une collaboration poussée entre les trois entités liées à Venturi. Ainsi, sur le site de Fontvieille, les équipes monégasques se consacrent aux batteries de haute performance. La filiale américaine, Venturi North America (située dans l’Ohio) se charge ensuite de la phase de test, en synergie avec les étudiants en ingénierie mécanique de l’Ohio State University. Venturi Lab crée pour sa part, en Suisse, dans le canton de Fribourg, les matériaux résistants aux conditions extrêmes (basses températures et radiations) nécessaires au rover, ainsi que des panneaux solaires hautes performances, des roues déformables et des systèmes de contrôle électrique. Ce sont eux qui doivent assurer la résistance du Flex aux conditions environnementales, plus que difficiles, qui règnent sur la Lune. Enfin, au sud de Los Angeles, à Hawthorne, Venturi Astrolab s’occupe de l’architecture du véhicule, de sa structure primaire et de ses mécanismes. C’est aussi cette entreprise, partenaire de Venturi, qui développe le logiciel et l’avionique du Flex, l’assemble et effectue les tests de validation. Elle « profite » ainsi de la proximité du désert californien, dont la topographie peut évoquer celle de la Lune. Chris Hadfield, astronaute canadien, était notamment présent pour ces essais. Il fait, du reste, partie du conseil consultatif de la structure. Quant à la conception esthétique du rover, elle a été confiée à Sacha Lakic, le designer « historique » du groupe Venturi. On lui doit toutes les créations de la marque, ainsi que le showroom de Fontvieille.

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Ce rover — ou, pour être plus précis, cette astromobile — de plus de deux tonnes, cargaison comprise, est le fruit d’une collaboration poussée entre les trois entités liées à Venturi. Ainsi, sur le site de Fontvieille, les équipes monégasques se consacrent aux batteries de haute performance

Venturi Astrolab
© Photo Barry Hathaway / Venturi

« Venturi dans les livres d’histoire »

« Au cours des deux dernières décennies, nous avons mis au point des véhicules électriques très performants et vraiment uniques, rappelle Gildo Pastor, président de Venturi et co-fondateur de Venturi Lab. Le moment est venu d’aller plus loin et d’inscrire le groupe Venturi dans les livres d’histoire. » Et pas n’importe comment. « À l’issue de cette mission, ce rover sera le plus grand et le plus performant jamais envoyé sur la Lune, poursuit le dirigeant. J’accomplis là le grand projet de ma vie professionnelle, une vie qui a toujours été caractérisée par l’innovation, l’aventure et la réalisation de rêves dont on m’avait dit qu’ils étaient impossibles à réaliser. » Car d’une innovation, il en s’agit bien d’une. A son arrivée sur la Lune, le Flex devra se déplacer de manière semi-autonome. Il devra aussi pouvoir être piloté par les astronautes à son bord, et être commandé depuis une future station en orbite lunaire. Mais aussi, depuis la Terre, à plusieurs centaines de milliers de kilomètres de là. Le tout, dans un environnement marqué par des températures comprises entre -90 °C et -230 °C, soumis à des radiations ou encore, plongé pendant quinze jours dans l’obscurité du pôle Sud de la Lune. Malgré ces contraintes, les équipes du groupe Venturi et de Venturi Astrolab se montrent confiantes. « Nous avons créé bien plus qu’un rover destiné à être utilisé sur la Lune ou sur Mars, assure ainsi Jaret Matthews, fondateur et PDG de Venturi Astrolab. Flex est un système logistique capable de gérer une grande variété de cargaisons. Nous pensons que cette approche permettra d’établir un avant-poste lunaire permanent sur la Lune à moindre coût et en moins de temps que prévu. » Pour cela, le Flex, d’une longueur de 3,8 mètres pour 2,6 mètres de large, utilisera un bras robotisé, qui lui permettra de changer ses équipements et de manœuvrer des charges utiles et de les déployer au sol. Doté de quatre roues directrices pouvant quasiment tourner sur elles-mêmes, d’une suspension adaptative et de 3 m² de panneaux, il pourra déplacer 1 000 kg de charge utile. Son pilotage par les astronautes se fera en position debout, en corrigeant par-là certaines erreurs du passé : lors du programme Apollo, la Nasa s’est aperçue, trop tard, que les pilotes avaient du mal à monter sur la jeep lunaire. S’asseoir était un vrai casse-tête sur la Lune, sans parler de la procédure pour caler les pieds. Sur le rover Flex, la marche à monter ne sera que de trois centimètres, avec une attache par la partie ventrale du scaphandre. Simple comme bonjour, même avec une gravité lunaire de 1,62 m/s² — contre 9,807 m/s² sur la Terre. Cette coopération avec SpaceX n’est que le début de l’aventure spatiale du groupe. Venturi Lab va en effet proposer des nouvelles technologies spatiales à l’European Space Agency (ESA), en collaboration avec Thalès-Alénia à Cannes et Beyond Gravity (Zurich). Venturi Astrolab va, pour sa part, participer à l’appel d’offres de la Nasa pour le Lunar Terrain Vehicle (LTV), une astromobile qui sera utilisée à partir de la mission Artemis 5 — prévue pour septembre 2029, celle-ci constituera le troisième atterrissage en équipage du programme Artemis de la Nasa. Si elle devait être choisie, elle emporterait, elle aussi, un peu de Monaco en direction de la Lune.

Programme : les ambitions spatiales de Venturi

C’est en 2019 que le programme de rover lunaire électrique a été imaginé, puis mis en place. Une entité suisse, Venturi Lab, a été créée en 2021 par Gildo Pastor et Antonio Delfino à Corminboeuf, dans le canton de Fribourg (Suisse). Parallèlement, un partenariat stratégique voyait le jour avec Astrolab, une entreprise basée à Los Angeles. L’équipe de Venturi Lab, qui est chargée des principaux matériaux du rover, est composée d’ingénieurs, de chimistes et de physiciens, qui détiennent plus de 250 brevets cumulés dans les domaines de l’électromobilité, des piles à combustible, de la science des matériaux, des matériaux composites, des procédés, du génie logiciel, de l’informatique, de la mobilité spatiale et de la science des polymères. « Chaque ingénieur possède plus de 20 ans d’expérience dans les technologies appliquées, précise-t-on chez Venturi. Ensemble, ils conçoivent et fabriquent de nouveaux composants et matériaux de mobilité spatiale résilients aux conditions environnementales extrêmes de la Lune et de Mars. »