jeudi 18 avril 2024
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Laurent Nouvion annonce
sa feuille de route

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Budget, fonds de réserve, projets de loi… Invité du Monaco Press Club le 22 mars dernier, Laurent Nouvion, nouveau président du conseil national, n’a éludé aucune question. L’occasion pour Monaco Hebdo d’en tirer quelques enseignements.

Quand on lui demande d’où lui vient sa motivation pour entrer en politique, et postuler à la présidence du conseil national, Laurent Nouvion évoque un souvenir d’enfance en guise de réponse. « Quand j’avais 8-10 ans, c’était le début de la période Atari, cette console de jeux qu’on branchait sur nos écrans noir et blanc. Mes copains passaient leur temps dessus, alors que moi, je regardais les débats politiques français avec mon beau-père (Jean-Charles Rey, N.D.L.R.) ». Un intérêt pour la chose publique qui n’a cessé de grandir avec le temps. « C’est comme un virus qui vous rattrape », lâche le nouveau président de l’assemblée, qui doit aujourd’hui s’atteler à la réorganisation du conseil national. « Ce n’est pas simple, c’est une machine de 30 personnes, avec les règles de la fonction publique que je découvre, pour certaines, et qui ont leur rythme, différent du mien… » Depuis son élection le 21 février à la tête du conseil, sa première action a été le lancement de la cellule de veille de la priorité nationale, censée être opérationnelle d’ici à la fin mars. Une cellule qui aura pour but d’alerter le gouvernement en cas de manquement au respect de la priorité nationale, que ce soit en matière d’emploi ou de marchés publics. Chapeautée par des élus, elle vérifiera la véracité des dénonciations avec, à la clé, « une intervention de notre part auprès du gouvernement. » Cependant, Laurent Nouvion prévient : « Il ne faut pas partir du principe que du moment qu’on est monégasques, tout nous est dû. »

Un tiers des dépenses pour l’équipement
Au vu de l’incertitude internationale qui plane sur l’économie monégasque, c’est bien évidemment sur les questions liées aux finances publiques qu’est attendu le nouveau président de l’assemblée. Surtout que lors de la campagne électorale, Laurent Nouvion évoquait un objectif de hausse des recettes de l’Etat à 1 milliard d’euros (contre 900 millions en 2012). Une augmentation qu’il planifie aujourd’hui pour les années 2014-2015. Une autre promesse électorale de Horizon Monaco était de consacrer un tiers des dépenses budgétaires à l’équipement et l’investissement. Comment concilier cette hausse des dépenses d’équipement avec le sacro-sainte règle de l’équilibre budgétaire ? « Il faut respecter le budget triennal, amoindrir les rapports de crédit qui rendent invisible la perception du budget de l’Etat. Dans le cadre du rectificatif, nous allons proposer un certain nombre de choses au gouvernement pour relancer les investissements publics et revenir au 1/3 du budget en équipement pour la section 7. J’ai le sentiment personnel que nous allons avoir, si nous prenons bien le tournant, presque 15 ou 20 ans de prospérité avec des équipements à la pointe », répond Laurent Nouvion. Le président du conseil national veut voir « les choses à moyen ou long terme, et non pas comme un comptable à court terme. Ce qui est important de savoir, c’est la nature du déficit. » L’équilibre des finances publiques étant alors calculé en prenant en compte le budget de l’Etat bien évidemment mais aussi le fonds de réserve constitutionnel, qui « n’a pas à être utilisé pour combler les failles ou les faiblesses du budget de l’Etat mais peut l’être pour un certain nombre d’opérations exceptionnelles. »

Une commission de placements des fonds en avril
Sur le FRC justement, l’objectif affiché par Laurent Nouvion est la création « d’une équipe dédiée, sous la tutelle du département des finances. Nous avons demandé la convocation d’une commission de placement de fonds mi-avril, pour commencer à bosser là-dessus. » Car pour lui, assurer la gestion à deux ou trois personnes d’une réserve de deux milliards d’euros n’est pas possible. « Il faut une équipe basée à Monaco avec un certain nombre de professionnels. C’est un moyen aussi de créer des vocations, et j’espère que le gouvernement sera sensible à nos arguments. On ne peut pas continuer avec ce système qui est artisanal. Ça me paraît le moment de commencer à grandir. Il ne s’agit pas de faire des investissements n’importe comment comme certains de nos opposants ont pu le dire. » Une pique adressée directement au camp d’en face, dont la personne visée allait être rapidement connue. « C’est drôle parce que M. Pasquier, pour ne pas le citer, va faire partie de la commission de placement de fonds, à nos côtés, et on va pouvoir voir sa capacité en termes pratiques à proposer et à comprendre qu’on ne peut plus rester dans la gestion de la ménagère. » Un fonds qui est le garant de l’indépendance de Monaco, d’après le président de la Haute assemblée. « Ce fonds de réserve doit rester tel qu’il est et qu’il continue à se développer. Il doit être notre gage d’indépendance, notamment vis-à-vis de nos partenaires et de nos amis français. »

Séance législative en juin
S’agissant du calendrier législatif, Laurent Nouvion a annoncé que deux séances publiques devraient avoir lieu dans le courant du mois de juin. Avec au menu la loi d’organisation judiciaire, et la modification du code de procédure pénale en matière de garde à vue. Deux autres propositions de loi pourraient être étudiées, relatives au report de crédit, et au monde judiciaire. La loi sur le handicap devrait quant à elle être votée aux alentours de décembre, si l’on en croit Laurent Nouvion, qui amène quelques précisions sur ce point. « Il faut être très prudent, notamment pour l’immobilier privé : il ne faut pas mettre trop de règles qui pourraient être trop strictes (concernant l’accessibilité, N.D.L.R.). En revanche, pour les bâtiments publics, qui doivent montrer l’exemple, nous serons sûrement beaucoup plus fermes. » L’autre gros projet du conseil national est le projet 907, déposé en décembre, qui concerne la modernisation de l’économie. La majorité compte demander au gouvernement de voter ce texte de 360 articles par thématiques. « On ne veut pas aborder le texte dans sa globalité. Ce projet de loi est organisé en différents livres. Le premier concerne le droit des sociétés, et nous souhaiterions, pour aller assez vite, organiser une consultation de l’ensemble des acteurs économiques. La réflexion a été menée par le gouvernement, par l’intermédiaire du professeur Mestre, un éminent juriste français, qui ne connaît pas très bien nos spécificités. Pas mal de choses lui ont échappé. Or, on voudrait être prêt pour le printemps prochain à voter le livre qui est très attendu. »

Commission de Venise le 11 avril à Monaco
Laurent Nouvion ne pouvait éluder la question européenne, corde sensible chez le nouveau président du conseil national. « Les observateurs du conseil de l’Europe sont venus pendant les élections pour nous surveiller, et viennent nous demander en privé au conseil national la veille du scrutin de savoir si la saisine de la commission de Venise n’a pas été une excuse pour pouvoir faire une politisation de la campagne… Or, c’est bien le Conseil de l’Europe, qui a décidé de venir nous auditer comme si on était le Belarus ou un pays peu recommandable… Et ils voulaient qu’on se taise. Mais on ne l’a pas fait. » Et d’en remettre une couche sur les juristes de la commission de Venise qui viendront le 11 avril à Monaco. « Nous les accueillerons avec beaucoup de délicatesse et de courtoisie, je serai ravi d’engager un dialogue avec ces techniciens. Ils disent que leur analyse n’a aucune valeur, alors pourquoi on nous fait un foin pareil avec ça ? Quand on étudie la définition de la commission de Venise : ils sont là pour engager une analyse parce qu’on ne répond pas aux standards démocratiques. Alors il va falloir qu’il changent de lunettes, ou qu’ils se mettent un sonotone, parce que je n’ai pas l’impression de vivre en dictature. »

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