jeudi 18 avril 2024
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Gouvernement et conseil national : nouveau consensus ?

Publié le

SBM, logement, budget rectificatif et relations avec le gouvernement… En conférence de presse le 15 septembre, le président du conseil national et les élus de la majorité ont brossé les dossiers chauds de la rentrée.

 

Gouvernement et conseil national semblent avoir enterré la hache de guerre… Souvenez-vous, avant la trêve estivale, le président Laurent Nouvion tirait à boulets rouges sur la « méthode » du gouvernement. Méthode qu’il résumait peu ou prou ainsi : absence de dialogue et de concertation, et informations livrées au compte-gouttes sur les gros dossiers de l’Etat. Bref, un conseil national relégué au rang de « chambre d’enregistrement » entérinant « les décisions du gouvernement sans discussions. » Le discours a aujourd’hui radicalement changé. Un rabibochage entre les deux institutions a manifestement eu lieu durant les récentes séances privées.

 

Déclic

Séances durant lesquelles, gouvernement et conseil national ont étudié au peigne fin le budget rectificatif 2014. « On a perçu une grande écoute de la part du gouvernement. Ce qui est le début du respect. Nous avons eu des discussions très constructives. J’ai la très nette sensation qu’un déclic s’est opéré. C’est probablement dû aussi à une meilleure maîtrise des dossiers de notre part et un meilleur travail collégial de la majorité. Je n’ai aucune honte à l’avouer, a expliqué Laurent Nouvion en conférence de presse. Nous sommes donc rentrés dans le cadre d’un rééquilibrage politique. Le conseil national est en train de revenir dans son rôle institutionnel. Pas de sensationnel, pas de sur-communication, pas de politicaillerie, pas d’effets de manche, mais du travail sérieux. Les affaires de l’Etat ne peuvent pas être assumées seules par le gouvernement. D’ailleurs, lorsqu’il a essayé de le faire, le fonctionnement institutionnel s’est grippé. »

Même analyse pour le vice-président Christophe Steiner. « J’ai retrouvé quelque chose que j’avais connu à l’époque d’Henry Rey. C’est le premier budget depuis longtemps où les choses ont été clairement mises sur la table et où d’ailleurs le logement n’est plus LA question, mais l’une des questions fondamentales. L’avenir se joue ailleurs aussi. Sur d’autres frontières. »

 

Parkings à Monte-Carlo

Si consensus il y a sur la méthode, tout n’est pas réglé pour autant. Lors de ces huit-clos, gouvernement et conseil national ont évidemment évoqué les sujets litigieux. Parmi lesquels l’inéluctable Société des bains de mer (SBM). « C’est un très gros sujet de préoccupation », a insisté Laurent Nouvion. Malgré les résultats convenables des jeux sur l’exercice 2013/214 clos au mois de mars, « et bien que les résultats des jeux soient convenables à fin août, cela nous préoccupe car il n’y a pas de diversification des nouveaux joueurs et pas d’informations sur le nouveau “plan jeux”. » Le conseil national se dit aussi inquiet par rapport à la période « de traversée du désert » qui s’annonce sur la place du Casino, liée aux énormes chantiers du Sporting d’hiver et de l’Hôtel de Paris.

Les discussions en séances privées ont aussi porté sur le manque de places de parking. « Dans ce quartier, il faut des infrastructures de parkings supplémentaires. Les listes d’attente sont énormes. Nous attendons des propositions du gouvernement. Nous avons demandé au moins 300 à 400 places supplémentaires », a ajouté Laurent Nouvion, qui a filtré, au passage, deux autres petites informations sur la SBM. La première : il y aura bel et bien un cinéma dans le quartier de Monte-Carlo. Par ailleurs, lors de la réunion tripartite du 17 septembre avec la SBM, la création de l’école des jeux devrait être annoncée… A suivre donc.

 

ASM : « inscription infondée »

Autre point litigieux abordé en séance privée : la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires. « Il y a normalement deux revalorisations par an. Une début janvier et une autre au mois de juillet. Cette dernière n’a pas eu lieu. Nous avons donc demandé, étant donné les recettes exceptionnelles de l’Etat, qu’il y ait un geste pour les fonctionnaires et agents de l’Etat, car ces recettes, c’est aussi grâce à eux », a expliqué Laurent Nouvion. Pour l’heure, fin de non recevoir du gouvernement. L’inscription substantielle de 25 millions d’euros pour le centre d’entrainement de l’ASM a aussi fait débat. La position de la majorité a été claire sur le sujet : « Cette inscription ne nous parait pas fondée. »

 

Accélération de l’Engelin

Côté logements domaniaux, il y a du nouveau pour l’opération l’Engelin. Le conseil national aurait en effet obtenu une accélération des travaux. Objectif : palier le creux de livraisons domaniales en 2016 et 2017. « Cette accélération va évidemment impliquer un surcoût budgétaire, d’environ 10 % », a précisé le président de la commission logement Jean-Michel Cucchi. Résultat : la livraison devrait donc intervenir dans les premiers mois de 2018. De façon à organiser une commission d’attribution à la rentrée, septembre/octobre 2017.

 

Diversification des recettes

Lors des séances privées, gouvernement et conseil national ont aussi souligné la bonne santé des finances publiques. « La conjoncture nous a amené près de 110 millions d’euros de recettes supplémentaires. Cela ne s’est pas passé depuis 15 ans… », ont rappelé les élus de la majorité. Tout en soulignant, toutefois, quelques bémols. « Bien évidemment on ne peut pas se plaindre que les recettes aillent mieux. Ce serait indécent. Mais il faut avoir une vision à plus long terme. Ces recettes sont-elles suffisamment diversifiées ? Il faut reconnaître les difficultés que l’on a depuis quelques décennies à trouver une autre poule aux œufs d’or que la TVA immobilière », a nuancé Jean-Michel Cucchi. Le conseil national rejoignant ici l’analyse faite quelques mois plus tôt par la commission supérieure des comptes (CSC). Lors de la conférence de presse mensuelle du gouvernement le 10 septembre, Michel Roger a d’ailleurs détaillé le budget rectificatif 2014 qui présente « un résultat remarquable » par rapport au contexte économique européen. « C’est la première fois que l’État dépasse le milliard d’euros de recettes », s’est félicité le ministre d’Etat. Les recettes totales du budget rectificatif sont en effet portées à 1 milliard et 67 millions d’euros.

 

UE : le conseil national demande une étude d’impact économique

Le conseil national compte bel et bien s’impliquer dans l’épineux dossier des relations entre Monaco et l’Union européenne (UE). « J’ai demandé à ce que le conseil national soit associé aux négociations à des moments clés. Le ministre d’Etat s’est engagé, avant de commencer les négociations, à venir nous voir dès qu’il a l’ossature de la feuille de route », a expliqué Laurent Nouvion. Pour mesurer l’impact du droit européen sur l’arsenal juridique monégasque, le conseil national va d’ailleurs prochainement recruter une personne spécifique. « Nous l’avons demandé au gouvernement. Il faut que l’on ait notre propre expertise. » Autre requête du conseil national sur ce dossier : obtenir une étude d’impact d’ordre économique, secteur par secteur. « Quel est l’impact par exemple pour l’industrie pharmaceutique ou les transports ? Est-ce que cela va tripler leur chiffre d’affaires ? Je crois que cela n’a pas été fait pour l’instant. Pour l’heure, il y a eu surtout une étude au niveau de l’acquis communautaire et l’impact qu’il pourrait y avoir sur nos textes. Il faut avoir une vision globale. Je ne vois pas comment on peut aller négocier si l’on n’a pas tous ces éléments en main », a souligné le président de la commission finances Marc Burini. Et Laurent Nouvion de conclure : « C’est un dossier qui nous inquiète beaucoup. Rappelons qu’ils sont 370 millions et que nous sommes 9 000… A titre personnel, j’ai été élevé, et je l’assume complètement, dans le refus de rentrer dans l’Union européenne, qui, à l’époque était la CEE, et je vois qu’en 2014, Monaco ne s’en tire pas si mal… »