mardi 23 avril 2024
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Accord Monaco-UE
Ça avance, mais doucement

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Après la réunion du 17  juillet dernier, le gouvernement et le Conseil national semblent avoir levé un certain nombre d’ambiguïtés. Néanmoins, les élus de la majorité promettent de rester extrêmement vigilants, pendant que le gouvernement se dit raisonnablement optimiste, sans présager pour autant de la durée que prendront les négociations.

Finalement, il ne s’est rien passé. Quatre ans après le début des négociations, aucun accord d’association n’a été signé entre Monaco et l’Union européenne (UE) au mois de mai dernier. Le président de la commission européenne, Jean-Claude Juncker avait émis le souhait de parvenir à une signature avant son départ, après les élections européennes du 26 mai 2019. Il avait indiqué cela au prince Albert, lors d’une rencontre à Bruxelles le 19 février 2019. Ce qui a déclenché une certaine inquiétude dans les rangs du Conseil national, où il a été envisagé que la principauté pourrait signer un accord en juin. « Nous nous devions d’être vigilants à l’égard de la notion floue d’un accord de principe intermédiaire, initialement annoncé dans un communiqué officiel pour le mois de juin 2019. A l’occasion de la commission plénière d’étude organisée avec l’ensemble des membres du gouvernement et des élus, le 17 juillet 2019 à la demande du Conseil national, nous avons eu la confirmation qu’il n’en serait rien, comme nous le souhaitions. En effet, un accord intermédiaire aurait enfermé la négociation dans une position sur laquelle il aurait été difficile de revenir », estime le président de la commission pour le suivi de la négociation, Fabrice Notari.

Marché intérieur

En réponse, le conseiller-ministre pour les relations extérieures, Gilles Tonelli a assuré à plusieurs reprise que ni le palais princier, ni le gouvernement ne s’étaient engagés à signer quoi que ce soit. Et une réunion a donc été organisée le 17 juillet, afin de lever tous les doutes soulevés par les élus, notamment en séance publique. « Pas question d’être mis devant le fait accomplis ! », avait tonné Stéphane Valeri devant les conseillers nationaux le 12 juin dernier. Et surtout, pas question d’accepter la signature d’un accord intermédiaire, qui pourrait être ensuite remis en cause si une seule des fameuses « lignes rouges » étaient franchies. On pense notamment à la priorité nationale pour les Monégasques en ce qui concerne l’emploi, le logement et les aides sociales, mais aussi le maintien d’une autorisation avant de pouvoir installer une entreprise ou un particulier en principauté. Sans oublier, et ça a été un dossier porté par le Comité Monégasque des Professions réglementées (CMPR), la question de l’accès exclusivement réservé à des Monégasques pour certains métiers, comme avocat ou architecte, par exemple. « Il n’a jamais été dit que nous allions signer quoi que ce soit à la fin du mois de juin 2019, a lancé Gilles Tonelli en séance publique devant les élus du Conseil national, le 12 juin dernier. Le 19 février 2019, le prince Albert II a rencontré le président Juncker. Ce dernier a dit qu’il souhaitait que la négociation aboutisse d’ici fin juin. Ces propos n’ont jamais été repris par la principauté. » De toute façon, sans assurance donnée par l’UE concernant le respect absolu des « lignes rouges définies par le prince Albert II », rien n’était possible, assure le gouvernement. Pas question de lâcher sur des points essentiels, comme la priorité nationale pour les Monégasques. Pas question non plus de perdre l’un des objectifs majeurs de cet accord : un accès au marché intérieur européen et à ses quelques 500 millions de consommateurs.

Scénario

Si cette négociation a débuté en 2015 et que le gouvernement assure que les discussions avancent plus rapidement depuis quelques mois, personne ne se hasarde à un pronostic. Quand cet accord sera-t-il signé ? Est-ce qu’il sera possible d’aboutir à un texte équilibré entre les grands principes européens et les intérêts les plus essentiels pour Monaco ? Et que se passera-t-il si, finalement, aucun accord n’est possible avec l’UE ? Sur cette dernière hypothèse, les avis diffèrent. Le gouvernement estime que cet accord d’association serait très utile, sans être totalement décisif, pour l’avenir de Monaco. En cause, le lien qui unit la France à la principauté qui ne permet plus d’assurer à cette dernière une véritable tranquillité. En effet, la France partage une partie de ses pouvoirs avec l’Europe, ce qui peut obliger Monaco à communiquer directement avec l’UE. En revanche, la majorité Priorité Monaco (Primo !) du Conseil national n’est pas effrayée par un scénario qui se conclurait par un échec. Primo ! se dit en effet « pas pressé, ni proche d’aboutir à un accord » par la voix du président de la commission pour le suivi de la négociation, Fabrice Notari (lire son interview ici). Avant d’ajouter, confiant : « Comme l’a dit le président Stéphane Valeri, nous ne sommes pas pressés. Notre modèle se passe très bien d’un accord pour prospérer. » Sur le volet le plus technique, notamment le fonctionnement de cet accord, les choses avancent. En revanche, et ce n’est évidemment pas une surprise, les discussions sont beaucoup plus délicates lorsqu’il s’agit d’évoquer les quatre libertés fondamentales de l’Europe, à savoir la libre circulation des biens, des capitaux, des services et des personnes. Comment rendre soluble ces impératifs dans le contexte monégasque ? Comme l’a indiqué Gilles Tonelli, Monaco a émis une série de propositions, sans retour, pour le moment, de la part de l’UE. Les négociations vont donc se poursuivre dès la rentrée et cela ne s’annonce pas simple. De plus, il faudra composer avec de nouveaux négociateurs imposés par le résultat des élections européennes de mai 2019. « Cette nouvelle commission reflétera forcément la poussée de ce centre au sein du parlement européen. Et donc, probablement, nous aurons une commission avec un état d’esprit, je l’espère, différent de ce à quoi nous avons été habitués dans les dernières années », a indiqué le ministre d’Etat, Serge Telle, devant les élus, en séance publique, le 12 juin 2019. Du côté des élus, on n’attend pas de miracle quant à la durée de ces négociations : « Contrairement à ce qu’espérait le gouvernement il y a 4 ans, les négociations seront longues et difficiles », prévoit Fabrice Notari, qui promet que sa majorité restera « vigilante » sur ce dossier sensible. Tout en rappelant qu’au final, ce sera au Conseil national d’autoriser, ou non, par un vote de l’assemblée, la ratification de cet éventuel traité. Un pouvoir décisif que le président du Conseil national, Stéphane Valeri, présente comme une chance, expliquant que les négociateurs peuvent s’appuyer sur la fermeté des élus pour négocier au mieux avec Bruxelles.