vendredi 26 avril 2024
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Nouvel Hôpital?: Cap à l’Est

Publié le

CHPG
© Photo Monaco Hebdo

C’est décidé?: le futur hôpital sera construit in situ. Monaco est donc reparti pour 4 ans d’études avec une livraison en 2025. Coût de l’opération?: 550 millions d’euros. Pour le moment…

Le verdict a été annoncé le 9 juin dernier. L’hôpital sera construit… à l’emplacement actuel du centre hospitalier princesse Grace (CHPG). Ou plus exactement juste à côté, à l’Est. Bref, un véritable retour à la case départ. Car, le suspense n’était pas franchement haletant. Personne n’aurait parié un kopek sur Testimonio ou l’Annonciade, deux sites en lice pour accueillir le nouvel établissement. Et deux réserves foncières permettant d’accueillir des résidences de luxes ou un centre d’affaires. Le doute subsistait encore sur les délaissés SNCF, hypothèse recueillant un temps la faveur du conseiller Stéphane Valeri, avant d’être évacuée en avril. Pour autant, selon le ministre d’Etat, rien n’était joué d’avance?: « Autour d’un café, tout le monde peut choisir le meilleur site pour construire ce nouvel hôpital. Mais le gouvernement a fait un choix basé sur des études sérieuses et objectives, réalisées par des experts », assure Michel Roger.

Compteurs à zéro

C’est en juin 2010 que le gouvernement avait décidé de remettre les compteurs à zéro. Et d’enterrer le projet du cabinet Vasconi/Iosis, lauréat de l’appel d’offres en 2008 (1). « Le projet Vasconi/Iosis est estimé à 705 millions. Personne ne peut dire aujourd’hui quel sera l’état de l’économie dans deux ans et si nous allons retrouver un budget à l’équilibre. Tous les pays réduisent leurs dépenses de santé. C’est pourquoi le gouvernement a décidé de ne pas s’engager davantage et de ne pas commander les études de l’avant-projet Vasconi », avait ainsi justifié le ministre d’Etat il y a un an, quasiment jour pour jour. Avant d’annoncer l’élaboration d’un nouveau programme médical, redimensionné, et la mise en branle d’étude sur 4 sites potentiels?: le CHPG actuel, les délaissés, Testimonio et l’Annonciade.

Etudes complémentaires

Une fois le projet médical échafaudé, en décembre 2010, le cabinet Icade, filiale de la caisse des dépôts et consignations française, planche sur les différents sites. En avril, le bureau d’études rend sa copie. Le gouvernement se rend alors à l’évidence?: seul le site actuel du CHPG est acceptable. Deux projets sont alors examinés?: l’un sur la partie Est du site, l’autre sur la partie Ouest. Icade passe au peigne fin ces deux hypothèses. Le hic?? Le coût exorbitant de ces projets, situés entre 650 et 725 millions d’euros. « En avril, nous avons été déçus. Car après tous les efforts faits pour revoir ce programme à la baisse, on arrive presque aux prix du projet Vasconi réactualisé (720 millions d’euros) », avoue le conseiller pour les Affaires sociales Stéphane Valeri. Avant de glisser?: « C’est ce qui nous laisse penser que le projet Vasconi était sous-estimé. Il aurait pu monter à 800 millions voire un milliard d’euros?! » C’est aussi à ce moment-là que le gouvernement décide de réduire la voilure en diminuant les surfaces à construire (75?000 m2 au lieu de 86?000 m2). Ce qui passe par des chambres individuelles plus petites que dans le projet Vasconi – avec un ratio qui reste tout de même supérieur aux standards français.

Pour la variante Est

Après des études complémentaires, le gouvernement opte pour la variante Est. « Le site Ouest est assez étroit. Ce qui oblige à construire un bâtiment tout en longueur et qui n’est pas idéal pour la fonctionnalité d’un hôpital », explique Marie-Pierre Gramaglia, la conseillère pour l’Equipement. Mais l’argument massue de l’option Est (550 millions d’euros contre 570 millions d’euros pour l’hypothèse Ouest) demeure sans nul doute son timing de livraison?: « Cette hypothèse permet de transférer les 3/4 du programme dès la fin de la première phase du chantier », souligne Stéphane Valeri. « C’était le choix le plus pertinent, confirme le directeur de l’hôpital Patrick Bini. Cette option permet de transférer les services de médecine et une partie des blocs opératoires dès 2021. » Dans la variante Ouest, seulement 1/4 des surfaces auraient été disponibles en 2019. « Ce paramètre représente des dizaines de millions d’euros économisés grâce à une livraison plus tôt », jauge le conseiller pour les affaires sociales. Or, des économies, le gouvernement en aura besoin en cette période de restrictions budgétaires.

Risque de dérapages

« A quelques millions près, le budget sera respecté », garantit le ministre d’Etat, Michel Roger. Une promesse qui n’a pas suffi à rassurer les élus. « On a tellement été échaudés par le passé qu’il est présomptueux de garantir aujourd’hui un budget de 550 millions d’euros. Surtout connaissant les difficultés géotechniques de ce terrain », s’inquiète Anne Poyard-Vatrican. Et la présidente de l’UP (Union pour la Principauté) de soulever un lièvre?: « Il va falloir casser le contrat avec le cabinet Vasconi et en faire un autre?: ça a un coût?! » Du côté de la majorité parlementaire, l’enthousiasme est plus franc pour l’option Est – qui favorise l’opération domaniale Tamaris – mais la prudence est également de rigueur?: « Le sujet de l’hôpital n’est pas clos sur le plan budgétaire dans la mesure où nous considérons qu’il y aura encore des efforts à fournir sur l’enveloppe globale. En effet, les nombreuses incertitudes sur les perspectives économiques de la Principauté appellent de la part de tous à une grande vigilance sur les dépenses d’équipements publics. Il sera nécessaire de prévoir un échéancier assorti de provisions pour mener à bien ces futures opérations », indiquent les élus UDM (Union des Monégasques) dans un communiqué.
Le président du conseil d’administration de l’hôpital, lui, redoute que « le coût de 550 millions d’euros soit augmenté de 30 à 40 %. » « J’ai eu l’habitude d’étudier les grands projets de Monaco au conseil national et tous les coûts ont toujours progressé de cette mesure à la livraison », a déclaré Jean-Joseph Pastor à Monaco-Matin.

588 millions d’euros

Une réaction de suspicion d’autant plus logique que les 550 millions d’euros annoncés ne sont pas exhaustifs. En effet, un mur antibruit, indispensable par ailleurs, a déjà été budgété à 9 millions d’euros. Tandis que dans les 6 prochains mois, le gouvernement devra se prononcer sur l’intégration de l’Institut monégasque de médecine du sport (IM2S) dans les locaux du futur hôpital. Une intégration qui aurait le mérite de garantir une meilleure mutualisation des moyens des économies de gestion pour l’Etat. Mais dont le coût a été estimé à 29 millions d’euros par Icade. Ce qui ferait monter l’enveloppe budgétaire du futur hôpital, en tout, à 588 millions d’euros avant même la fin de l’année 2011. Qui dit mieux??

(1) Avec une enveloppe de 630 millions d’euros – au départ -, l’établissement signé par le groupe OTH Ingénierie/Vasconi associés/Patrick Raymond/Ingerop, vainqueur du concours, comprenait 482 lits répartis sur une surface totale de 80?000 m2 (dont 28?000 m2 pour les parkings).

Hôpital trop cher??
Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le coût affiché par le cabinet Icade. Surtout si l’on compare avec la construction de l’hôpital Pasteur II à Nice. Un chantier qui représente 100?000 m2 et 720 lits pour 350 millions d’euros TTC. « Ce n’est pas très différent des 380 millions d’euros TTC prévus pour le NCHPG, se défend Stéphane Valeri. Le terrain choisi pour le NCHPG est très complexe, situé entre éboulis et collines. Il y aura des travaux spéciaux supplémentaires qui coûteront des dizaines de millions supplémentaires. Par ailleurs, notons que le prix de la place de parking sera de 70?000 euros. Et on réalise 585 parkings. » « 550 millions d’euros, toutes dépenses confondues, c’est le juste prix en principauté de Monaco », ajoute le directeur de l’hôpital Patrick Bini. Un Patrick Bini qui a vu passer les dossiers des deux projets d’hôpitaux sur son bureau. Et pour cause. Avant de rejoindre le CHPG en 2008, en tant que directeur général adjoint du CHU de Nice, il avait élaboré le programme de Pasteur II. Juste avant qu’Icade prenne la maîtrise d’ouvrage du chantier.

Nouvel-Hopital-Implantation-Est
Après des études complémentaires, le gouvernement a opté pour la variante Est. « Cette option permet de transférer les services de médecine et une partie des blocs opératoires dès 2021 », souligne le directeur du CHPG Patrick Bini.

Jusqu’en 2025…

Le choix du site du nouvel hôpital permet de relancer les projets gelés et suspendus à la décision gouvernementale. Annonciade, Testimonio, délaissés… Tour d’horizon des chantiers à venir.

14 ans de travaux dont plus de 4 ans d’études… Il faudra attendre 2025 – du moins on l’espère – pour voir le chantier de l’hôpital complètement achevé. Et voir un chapitre des atermoiements de l’administration monégasque enfin refermé. Encore faut-il que le timing avancé par Icade soit respecté. Et mené à pas cadencé. « L’hôpital est au bout du rouleau, commente Anne Poyard-Vatrican. Le CHPG n’est pas à la hauteur des exigences de l’attractivité de Monaco. Il faut agir au plus vite. »
Pour le gouvernement, la première étape est aujourd’hui de faire le point avec le groupement de maîtrise d’œuvre, Vasconi/Iosis. Un groupement « dans l’attente d’informations », selon l’architecte monégasque Patrick Raymond, associé au projet Vasconi, qui pourrait craindre que l’aventure se termine définitivement. C’est en effet ce qui se murmure dans les couloirs de l’administration depuis la mort de l’architecte emblématique en décembre 2009.

Programme technique détaillé

« Nous allons ensuite réaliser avec Icade un programme technique détaillé », a annoncé le ministre d’Etat. « C’est un passage obligé, indique le directeur de l’hôpital Patrick Bini. Nous allons consulter les chefs de services pour valider le projet final. » Les questions à trancher?? Le nerf de la guerre. A savoir le nombre de lits mais aussi de m2 octroyés par services ainsi que leur localisation au sein de l’hôpital, les flux de circulation, etc. « Cela prendra 6 mois. C’est capital, nous n’avons pas le droit à l’erreur. Tout découlera de ce programme », insiste Patrick Bini. Si Monaco est reparti pour 4 ans d’études, c’est avant la fin de l’année que le gouvernement devra choisir le mode de construction?: maitrise d’ouvrage public ou conception-réalisation. « C’est-à-dire si on va déléguer à une entreprise générale tous les corps d’Etat et les phases du chantier », explique le conseiller Stéphane Valeri. Avec le risque que la solution conception-réalisation impacte l’ensemble des entreprises de construction à Monaco. Aujourd’hui très affectées par la chute des travaux et de leur chiffre d’affaires, elles craignent que cette opération aussi tombe entre les mains d’une multinationale. Quelle que soit l’option choisie, le chantier devrait durer 10 ans. Soit 6 ans pour la première phase et 4 ans pour la deuxième. Du moins en principe. En juin 2010, le gouvernement affirmait que malgré le gel du projet Vasconi, la livraison du nouvel hôpital prévue en 2018/2020 ne souffrirait d’aucun retard (1)… On sait maintenant que c’était impossible.

Monopoly chamboulé

Le choix du site du nouvel hôpital relance également les projets gelés voire abandonnés dans les sites en lice pour accueillir l’hôpital. L’an passé, le gouvernement s’était lancé dans un véritable « monopoly » de logements domaniaux. Remplaçant la centaine de domaniaux prévus à Testimonio issue de l’échange de terrains entre Agave II et Testimonio avec le promoteur Patrice Pastor – annulée – avec celle de 120 appartements à Tamaris et dans la continuité de l’îlot Rainier III, à la place de… la médiathèque. Un bâtiment culturel sacrifié dont on ne sait toujours pas où ni quand il réapparaîtra.
Il faudra attendre la présentation du budget primitif 2012 pour en savoir davantage. « S’agissant de la poursuite des opérations prévues sur les sites Testimonio, Annonciade et îlot Pasteur, le gouvernement présentera l’ensemble des dispositions retenues dans cadre du budget et plus particulièrement du programme d’équipements triennal 2012-2014, qui précisera les orientations et les éléments du planning envisagés », indique ainsi la conseillère Marie-Pierre Gramaglia. En attendant, Monaco Hebdo a décidé de faire un tour d’horizon des orientations possibles.

(1) Les travaux du projet Vasconi devaient initialement débuter en 2010 pour prendre fin à l’horizon 2020.

Annonciade, le Défense monégasque relancé??
Estimé à un coût de 720 à 740 millions d’euros, le projet de l’Annonciade a été logiquement mis de côté dès avril. « Le foncier aurait au plus tôt été libéré en 2?017. Ce qui retardait trop la construction du nouvel hôpital. En plus, c’est un site très enclavé », a ainsi expliqué Marie-Pierre Gramaglia.
Mais l’Annonciade, ça devait être surtout, selon l’ancien ministre d’Etat Jean-Paul Proust, un nouveau centre d’affaires à Monte-Carlo, notamment pour la place financière. Un petit La Défense à la Monégasque qui aurait comme fer de lance la fameuse Tour de l’Odéon, de 52 étages, ainsi que deux autres « tours effilées », de moins de 40 étages, à l’emplacement de la cour de récréation du collège Charles III. Est-ce toujours d’actualité??
Un complexe à Testimonio??
Ce n’est pas son coût (oscillant entre 690 et 710 millions d’euros) qui a fait tirer un trait sur ce projet. Mais sa volumétrie incompatible avec la vocation résidentielle du quartier. En plus de la complexité du dossier et du phasage nécessaire pour construire sous le boulevard du Larvotto. Ce qui obligeait de couper la circulation.
Aujourd’hui, le projet de complexe Testimonio, lui aussi gelé, sera peut-être relancé en 2012. « C’est l’un des derniers endroits à urbaniser dans la Principauté. Il faut être vigilant », signalait Gilles Tonelli, alors conseiller pour l’Equipement. Un appel d’offres restreint avait été lancé. 4 ou 5 groupements avaient été sélectionnés pour prendre part à ce concours d’architectes. Le programme Testimonio contenait des logements publics et privés, une crèche, un centre de secours de pompiers, l’école internationale, des surfaces bureaux et un parking de grande capacité. La résidence hôtelière, un temps projetée, a été abandonnée. Il avait même été envisagé que les bureaux administratifs de la SBM soient relogés à Testimonio dans l’hypothèse où des travaux soient engagés au Sporting d’hiver mais il semble qu’une autre solution interne à la SBM soit aujourd’hui envisagée, nous avait indiqué Gilles Tonelli en 2009. Ce programme était très voire trop dense. Le restera-t-il en 2012??
Un nouveau collège sur les délaissés
Lui aussi estimé à une fourchette entre 690 et 710 millions d’euros, ce projet de NCHPG n’a pas été retenu pour une raison pratique?: « Comme le terrain est étroit, la fonctionnalité n’est pas très bonne. Le bâtiment construit serait tout en longueur. Sur le plan de l’insertion urbanistique, il aurait caché la falaise du jardin exotique », a expliqué Marie-Pierre Gramaglia. Sans compter que cette localisation aurait remis en cause un projet phare pour Monaco?: le nouveau collège.
En plus d’un lycée technique de 600 places, de 250?000 m2 de bureaux et d’une crèche de 55 berceaux, le collège Charles III sera bien rapatrié en plein cœur de Monaco. Un collège dont l’architecture contemporaine devait « marquer les esprits », conçu sur deux ou trois bâtiments plutôt qu’une barre inesthétique. Reste à voir si ce choix architectural sera maintenu. Quant à la médiathèque, déprogrammée sans ambages l’an passé, elle pourrait ressusciter. Mais où sur des délaissés décidément très sollicités??

Valeri Roger Gramaglia CHPG- nouvelle implantation
« Il y aurait eu un chantier tout proche de l'hôpital, au niveau des immeubles HBM, qu'il fallait détruire. Là, c'est un hôpital qu'on construit à côté du CHPG. » © Photo Charly Gallo / Centre de Presse.

« L’estimation d’Icade est réaliste »

Le juste prix du futur hôpital fait déjà débat. Mais pour le conseiller pour les Affaires sociales Stéphane Valeri, le coût annoncé n’est ni surestimé, ni sous-estimé. Interview relue et amendée.

M.H.?: Compte tenu de la crise et des restrictions budgétaires prévues, a-t-il été question d’abandonner le projet de nouvel hôpital??

S.V.?: On a pu entendre cette position ça ou là. C’était un débat légitime. Avec le nouveau contexte budgétaire, faut-il encore construire un nouvel hôpital?? La réponse est oui pour deux raisons majeures. D’abord pour des raisons médicales évidentes?: des structures vieillissantes et multipavillonnaires n’offrent pas la même qualité de soins pour la prise en charge des patients qu’un établissement ultramoderne étudié pour la médecine actuelle et future, concentré dans son exploitation, et donc beaucoup plus fonctionnel. Même ceux qui étaient contre la construction d’un nouvel hôpital ne peuvent soutenir le contraire.

M.H.?: Mais pour des raisons budgétaires??

S.V.?: La question était effectivement de savoir si on pouvait faire l’économie de 550 millions d’euros, somme nécessaire pour la construction. Il faut regarder sur le moyen et le long terme. Il n’est pas difficile de comprendre que le fait de conserver le CHPG actuel coûterait plus cher que de construire un nouvel hôpital efficace et fonctionnel. N’oublions pas que chaque année, l’Etat investit environ une dizaine de millions d’euros pour maintenir le CHPG à un haut niveau. Une partie concerne le matériel, mais en moyenne, 5 millions concernent l’entretien des bâtiments vieillissants. Par ailleurs, le système de Tarification à l’activité (T2A) arrive à Monaco à l’horizon 2014-2015. Or, faire fonctionner en T2A un hôpital multipavillonnaire, avec des services qui ne sont pas partout organisés autour de 14 lits – comme l’exige une organisation rationnelle de gestion des personnels –, avec 6 sites opératoires au lieu d’un seul regroupé, est hors de prix. Le nouvel hôpital permettra au moins 10 millions de dépenses en moins chaque année pour le fonctionnement. Si vous ajoutez l’entretien des bâtiments, ça fait une quinzaine de millions d’économies par an. En 40 ans, on arrive à 600 millions d’économies. Ce qui signifie qu’en 40 ans, on a dépensé plus en gardant l’ancien hôpital qu’en construisant un hôpital neuf. Je l’affirme?: le vrai bon choix budgétaire, c’est de refaire un nouvel hôpital.

M.H.?: Mais peut-on fonctionner avec le CHPG jusqu’à la fin du chantier en 2025?? Quels travaux seront alors nécessaires pour maintenir l’actuel CHPG à un niveau performant??

S.V.?: Jusqu’en 2021, on continuera effectivement d’investir dans l’entretien du CHPG pour le maintenir à niveau. Mais seulement jusqu’en 2021. Une des raisons majeures du choix gouvernemental pour l’option in situ à l’Est du CHPG actuel, est que la quasi-totalité des services de médecine et une partie des blocs opératoires, seront en fonctionnement dès la fin de la phase 1 du chantier, soit en 2021. Grâce aux phasages précis fournis par ICADE, nous savons qu’il restera notamment des services administratifs, ainsi que l’hémodialyse, la radiothérapie et des services de chirurgie, à basculer à la fin de la phase 2 en 2025.

M.H.?: Reste que ce chantier est toujours onéreux. Avant même de parler du projet Vasconi, la dernière étude de 2005 évoquait un prix de 230 millions d’euros HT. Comment expliquez-vous cette différence??

S.V.?: Le projet final retient un hôpital de 75?000 m², plus le service de psychiatrie maintenu au sein du Pavillon Louis II, soit 409 chambres en tout. Tout ça pour 550 millions d’euros toutes dépenses confondues. Attention, je pourrais vous dire que le nouvel hôpital c’est 319 millions d’euros. C’est le coût hors taxes. Nous avons un devoir de transparence, à commencer par les bases de comparaison. Alors, comparons les prix avec un étalon identique. Voici les chiffres. Notre nouvel hôpital coûtera 319 millions hors taxes, 380 millions toutes taxes comprises, auxquels il convient d’ajouter les études, les honoraires d’architectes, les assurances et l’équipement, ce qui aboutit à un chiffre de 550 millions d’euros toutes dépenses confondues (TDC). Ce sont les estimations d’ICADE, le cabinet d’études qui participe à la construction du plus grand nombre d’hôpitaux aujourd’hui en France. Ils nous donnent de vrais chiffres fiables. J’en déduis que les 720 millions d’euros du projet Vasconi avec 100 chambres et plus de 30?000 m² supplémentaires, étaient largement sous estimés. Icade ne sous-estime pas aujourd’hui le coût. Leur estimation est réaliste.

M.H.?: Comment expliquez-vous la différence avec l’estimation de Pasteur II (312 millions d’euros TTC)??

S.V.?: Selon les revues hospitalières, Pasteur II, c’est 100?000 m² et 720 lits pour 350 millions d’euros TDC. La différence provient du terrain choisi pour le nouveau CHPG, qui est géologiquement très complexe, situé entre éboulis et collines. Il y aura des travaux spéciaux qui coûteront des dizaines de millions supplémentaires. Par ailleurs, notons que le prix de la place de parking se monte à 70?000 euros, et il y aura 585 places. Mais une raison essentielle concerne la qualité de construction. Nous avons une responsabilité. Soit on fait du bas de gamme, soit on respecte les malades et personnels. Nous avons choisi la responsabilité. C’est un choix politique ambitieux pour la qualité des soins au sein de notre hôpital public. Comme l’est celui de financer l’hôpital avec plus de la moitié d’un budget national.

M.H.?: Mais encore??

S.V.?: Le choix de la qualité responsable guide toute notre décision. Par exemple, pour le nouvel hôpital, le ratio de m² par lit est très élevé. Il est de 154 m² par lit, contre 110 m² par lit reconstruit en France et 138 m² dans les CHU comme à Pasteur. L’explication est simple?: d’abord, nous avons plus de personnel. Le CHPG est à près de 4 personnels médical et paramédical par lit contre environ 2 en France. Cela impacte le nombre de m² supplémentaires pour la buanderie, en vestiaires, en logistique, en parkings, etc. Ensuite, nous pensons au confort des patients, et des personnels, notamment avec des chambres plus spacieuses et des parties communes plus grandes.

M.H.?: Pour autant, on sait déjà qu’il il n’y aura pas assez de parkings, notamment avec les 210 lits supplémentaires du centre gérontologique Rainier III??

S.V.?: La transparence, c’est aussi dire qu’on va doubler le nombre de places. Je m’explique. On construit 585 parkings alors qu’aujourd’hui, il y en 475 hors Lou Clapas. C’est un choix ambitieux, c’est vrai, mais insuffisant avec les 300 personnels supplémentaires du centre gérontologique. C’est pourquoi, dès 2012, en concertation avec ma collègue de l’Equipement, Marie-Pierre Gramaglia, nous mobiliserons environ 300 places du parking construit à l’ilot Rainier III et si ce n’est pas suffisant, nous pourrons aussi utiliser une partie de celui de la ZAC Saint-Antoine. Des navettes seront mises en place par le CHPG aux heures d’arrivée et de départ des personnels, pour un ramassage des salariés. Ainsi, comme je le disais, nous disposerons avec le nouvel hôpital de près de 900 places, soit près du double qu’à l’heure actuelle. D’ores et déjà, le service des parkings a mis à disposition des places aux parkings de la gare et du stade pour les personnels qui remplacent les départs à la retraite. Nous libérons ainsi progressivement des places pour les visiteurs.

M.H.?: Et le plan de déplacement d’entreprise pour les salariés??

Tout cela est à replacer dans une démarche d’éco-responsabilité. Nous sommes en train de développer un plan de déplacement d’entreprise, là où on peut le faire, pour aller chercher en bus les salariés du CHPG sur leur lieu de résidence et les amener sur le lieu de travail et réciproquement. C’est l’occasion de souligner la parfaite collaboration entre mon département et celui de Mme Gramaglia, sur ce sujet comme sur l’ensemble du projet, qui a permis, sous l’autorité du Ministre d’Etat, d’aboutir à la meilleure proposition, celle que l’on connaît aujourd’hui.

M.H.?: Il y a un projet de faire une architecture d’envergure comme pour le projet Vasconi?? Ce sera un cube??

S.V.?: Non, ce sera un hôpital?! Mais oui, nous restons ambitieux et le projet architectural sera nécessairement de qualité. Je tiens d’ailleurs à préciser qu’Icade n’a fait pour l’instant qu’une étude volumétrique. Le gouvernement va consulter des architectes, bien évidemment des professionnels compétents et réputés. Que les choses soient claires?: on ne peut pas comparer l’architecture du projet Vasconi avec le projet dessiné par le bureau d’étude Icade, qui se contente de fixer des volumes et ressemble pour le moment à un rectangle un peu cubique. Tout le travail architectural va venir après et rendra le projet plus esthétique.

M.H.?: Quel est le calendrier qui sera mis en place à l’automne?? Le ministre a indiqué qu’il y aurait 4 ans d’études, un appel d’offres et un concours d’architectes.

S.V.?: On ne construit pas un hôpital aussi vite qu’une maison?! La première étape est de faire le point avec le groupement de maîtrise d’œuvres, Vasconi-Raymond-Iosis. De toute manière, le décès du regretté architecte Vasconi est un élément important, qui amenait à repenser la réalisation du projet. Il va y avoir ensuite un programme technique détaillé (PTD), élaboré entre les départements de l’Equipement et des Affaires Sociales et de la Santé, en liaison avec la direction de l’hôpital. Les études préliminaires vont être lancées.

M.H.?: C’est long quatre ans d’études??

S.V.?: Est-ce que vous imaginez les contraintes d’un tel projet?? On ne veut pas gagner un record de vitesse, non, nous voulons le meilleur hôpital pour les Monégasques et les résidents. Le temps passé dans les études aujourd’hui, c’est paradoxalement du temps gagné demain. Et beaucoup d’argent. Car une étude imparfaite amène des changements en cours de chantier dramatiques en temps et en coût. 4 années d’études sont nécessaires. Le gouvernement va devoir choisir un bureau d’études pour nous accompagner. Puis, d’ici la fin de l’année, il faudra choisir le mode de construction, maitrise d’ouvrage public ou conception-réalisation.

M.H.?: C’est-à-dire??

S.V.?: C’est-à-dire qu’il faut décider si on va déléguer à une entreprise générale tous les corps d’Etat et les phases du chantier. Par exemple, sur un terrain vierge comme les délaissés, où il n’y a pas de phasage, l’unanimité se ferait sur la conception-réalisation. Cela irait plus vite, coûterait certes un peu plus cher, mais il n’y aurait pas de dérapage des coûts, car l’entreprise perçoit un forfait. Si c’est l’Etat qui conduit le chantier en maîtrise d’ouvrage public, c’est l’Etat qui paie le moindre dérapage. Mais le terrain in situ est compliqué. Il y a deux phases. C’est un chantier de 10 ans, 6 ans pour la première phase et 4 ans pour la deuxième. Alors, on peut s’interroger. Comme l’entreprise perçoit une somme forfaitaire, et que c’est un chantier long et compliqué, elle pourrait vouloir compenser les risques d’aléas. La conception-réalisation pourrait alors être beaucoup plus coûteuse… C’est pourquoi ce n’est pas un choix évident. Le bureau d’études choisi pour nous accompagner nous donnera un avis éclairé.

M.H.?: Comment sera démoli le CHPG après la phase 1?? N’y a-t-il aucun risque pour le nouveau bâtiment et quelles seront les nuisances potentielles pour les patients, personnels de l’hôpital??

S.V.?: Il existe aujourd’hui des techniques nouvelles de démolition. Ce sont des grignoteuses de béton qui limitent les nuisances et le bruit. Cette technique a été utilisée rue de la Colle, sur l’ilot Rainier III. Ce sont des engins à bras munis de pinces performantes. Le département de l’Equipement s’entourera d’études de structures, qui vont garantir la sécurité absolue des zones à côté de l’Hôpital.
Je tiens à signaler que de toute manière il y aurait eu un chantier tout proche de l’hôpital, au niveau des immeubles HBM, qu’il fallait détruire. Là, c’est un hôpital qu’on construit à côté du CHPG. Il faut bien sûr protéger l’hôpital actuel des nuisances, avec la création d’un mur antibruit transparent, tout près des façades, constitué de feuilles de plexiglas de 15 à 20 mm d’épaisseur fixées sur un châssis. Cela crée une seconde peau agissant comme un double vitrage. Et ça marche. Tout le monde peut le vérifier avec le collège Charles III, tout près du chantier Odéon.

M.H.?: Mais les résidents à côté du chantier de l’Odéon se plaignent??

S.V.?: Le mur antibruit ne protège que le collège Charles III, car c’est très onéreux. A titre d’exemple, le Gouvernement va investir 9 millions d’euros pour protéger la façade de l’hôpital. C’était une mesure hélas financièrement irréaliste pour l’appliquer dans l’immense périmètre du chantier de l’Annonciade.

M.H.?: Que devient l’IM2S?? Sera-t-il intégré au projet de nouvel hôpital pour récupérer du foncier avenue d’Ostende??

S.V.?: La décision du gouvernement sera le fruit d’une concertation entre tous les départements et sera prise avant la fin de l’année. Là encore, il s’agit de responsabilité dans la définition de notre politique de santé publique. Si on prend en compte uniquement des critères médicaux, le département des Affaires sociales et de la Santé est favorable à l’intégration de l’IM2S. Ce serait la garantie d’une mutualisation des moyens avec le CHPG, qui permettrait des économies de gestion à IM2S et une complémentarité maximale des deux structures. Le coût d’une intégration a été estimé à 29 millions d’euros par Icade. Je le répète, la décision sera prise avant la fin de l’année, et je suis certain que cette décision sera la bonne.