jeudi 25 avril 2024
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L’Homme et l’Océan, la bouteille à la mer du prince Albert II

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Le prince Albert II signe son premier ouvrage dans l’édition française, avec la sortie de L’Homme et l’Océan chez Flammarion. Le souverain y livre ses pensées et ses projets pour la protection de la planète, qui passe par celle des océans et du monde marin. Comme une bouteille à la mer, à l’approche de la conférence des Nations unies qui se déroulera à Lisbonne du 27 juin au 1er juillet 2022, et de la COP 15 pour la biodiversité qui devrait se tenir à la fin de l’été, ou au début de l’automne 2022.

Le premier ouvrage du prince Albert II, L’Homme et l’Océan, est paru mercredi 8 juin 2022, aux éditions Flammarion (1). La date n’a pas été choisie au hasard, puisqu’il s’agissait de la journée mondiale des océans. À travers ce livre, le prince s’est en effet consacré à la protection des océans et des fonds marins. Sur 144 pages, le souverain partage sa vision de la défense de l’environnement. Pour étayer son propos, aux côtés de travaux scientifiques, le prince Albert II réfléchit aux moyens de parvenir à un meilleur équilibre entre vie humaine et vie marine pour préserver l’environnement, le défi de toute une génération à ses yeux. « Ce livre ne vise évidemment pas à m’approprier la cause de la défense de l’environnement. Ce n’est pas un combat solitaire. Les scientifiques, les entrepreneurs, les citoyens, les responsables politiques… Quelles que soient nos responsabilités, nos engagements personnels, nos valeurs, le lieu où nous vivons, chacun doit participer à ce combat pour avancer collectivement, écrit le prince. La protection de l’environnement et plus particulièrement de l’océan est le grand défi de notre génération. Notre responsabilité vis-à-vis des générations futures est engagée. Elle est immense. Je souhaite que ce combat incarne la « philosophie » de mon règne. Ce livre est le témoignage sincère de mes convictions dans ce domaine. »

« Quelles que soient nos responsabilités, nos engagements personnels, nos valeurs, le lieu où nous vivons, chacun doit participer à ce combat, pour avancer collectivement »

Le prince Albert II

Au cœur de l’avenir

À l’occasion de la journée mondiale des océans, et de la sortie de son livre, le prince Albert II s’est exprimé dans une vidéo, publiée sur les réseaux sociaux de sa fondation prince Albert II de Monaco : « Année après année, cette journée prend une importance croissante dans l’agenda international. Nos contemporains saisissent peu à peu la nécessité de mieux préserver les océans face aux nombreuses menaces qui pèsent sur eux : le réchauffement et la pollution, bien sûr, mais aussi l’acidification des eaux, la surpêche, certaines formes d’aquacultures irresponsables, l’exploitation de ressources minières et des hydrocarbures qu’ils recèlent, ainsi que la perte de biodiversité qui résultent le plus souvent des maux que je viens d’évoquer. » Face à l’importance des enjeux climatiques et environnementaux, le prince estime également que « les institutions multilatérales se préoccupent désormais de réguler ces zones immenses qui, jusqu’à présent, avaient été laissées sans règles véritablement protectrices. Les océans, de plus en plus, sont au coeur des négociations collectives sur notre avenir. » Plusieurs rendez-vous importants à l’international sont ainsi à prévoir tout au long de l’année 2022, notamment la conférence de Lisbonne du 27 juin au 1er juillet 2022, où seront abordées toutes les formes de menaces qui portent atteinte aux océans. Puis la COP 15, à Kunming, en Chine, qui devait se tenir initialement entre le 25 avril et le 8 mai 2022, avant d’être décalée à fin août, suite au rebond épidémique de Covid-19. Un événement de taille, puisque cette conférence mondiale sur la biodiversité se consacrera notamment aux aires marines protégées, qu’il faut « développer rapidement et de manière ambitieuse », selon le prince Albert II, qui appelle à ce que ces rendez-vous entre États soient l’occasion de faire avancer des mesures concrètes, comme « la limitation de l’utilisation plastique, l’amélioration du traitement des eaux usées, la réglementation de la pêche, la protection des systèmes les plus fragiles. » Le prince Albert rappelle également que la préservation des océans permet de répondre à toute une série d’objectifs de développement durable (ODD) fixés par les Nations Unies en 2015. À savoir, l’objectif 13 contre le changement climatique, mais aussi l’objectif 1 contre la pauvreté, et les objectifs 2, 6 et 7, consacrés à la faim, l’accès à l’eau et à l’énergie.

Prince Albert II
© Photo Roberto Cassi (AIEA)

« L’essentiel est que la détermination prenne le pas sur les autres sentiments. Pour les océans, notamment, il faut agir, et vite »

Le prince Albert II

Une histoire de famille

Dans une interview accordée au Journal du dimanche (JDD), publiée le jour de la sortie de L’Homme et l’Océan, Albert II raconte sa vision d’avenir pour les océans, qu’il décrit dans son ouvrage, alors qu’il a relancé les missions d’exploration de la principauté, dont la prochaine aura lieu dans l’océan Indien. Dans cette interview, Albert II revient également sur le lien qui unit historiquement la famille princière à la mer et aux océans : « Il y a l’histoire d’une famille génoise qui, dès le XIIIème siècle, a conduit des expéditions maritimes en Méditerranée et jusqu’en mer Noire. Il y a la géographie — à Monaco, la mer est incroyablement présente, elle nous entoure. Et puis il y a les hommes comme mon père, ou comme mon trisaïeul, le prince Albert Ier (1848-1922) […] qui a mené de nombreuses expéditions scientifiques et s’est passionné pour les mers. Il a compris la nécessité de penser le monde dans une forme d’interdépendance. Se préoccuper de la paix de ses voisins pour assurer sa propre sécurité, protéger les mers pour garantir la vie sur terre, ou empêcher le crime de s’exporter, c’est une même vision que l’on dirait aujourd’hui connectée. » Au-delà de sa famille et de son trisaïeul, d’autres personnages liés à la mer ont marqué le prince, comme le commandant Jacques-Yves Cousteau (1910-1997), « qui dirigeait le musée océanographique de Monaco lorsque j’étais enfant, et qui m’a appris beaucoup de choses. » Mais c’est bien une photographie prise par le prince Albert Ier qui est utilisée dès le début du livre. Cette dernière, prise par son trisaïeul au Spitzberg, au début du siècle, se confronte à celle prise par le prince Albert II, au même endroit, cent ans plus tard : « Sur l’une, la glace est partout, dominante et même menaçante. Sur l’autre, la roche a pris le dessus, et la glace a presque disparu. Le contraste raconte le dérèglement du climat, la fragilité de la planète. Les pôles nous permettent de comprendre ce genre de choses plus que n’importe quel autre endroit. » À ce sujet, le prince avoue ressentir « une grande tristesse et une grande détermination. L’essentiel est que la détermination prenne le pas sur les autres sentiments. Pour les océans, notamment, il faut agir, et vite ! »

L'Homme et l'Océan

« Nous ne sommes pas parfaits, mais nous progressons de manière significative, et nous avons de grandes ambitions »

Le prince Albert II

« Nous ne sommes pas parfaits »

Agir, mais comment ? Sur les actions à mener, le prince Albert II développe ses solutions : « Il faut une transformation à tous les niveaux. Individuel, par nos choix de vie, mais aussi collectif, par une autre manière de gérer ensemble les ressources naturelles, de les protéger par des règles qui souvent ne peuvent être qu’internationales. » Mais des signes encourageants permettent toutefois, selon le souverain, de ne pas désespérer : « Les mobilisations des jeunes pour le climat à travers le monde, montrent que les esprits changent à une vitesse inédite. Et les progrès technologiques nous donnent des moyens chaque année plus importants pour agir. » Qu’en penser, cependant, alors qu’une certaine contradiction oppose l’engagement en faveur de l’environnement, et le train de vie monégasque visible en principauté : « Nous ne sommes pas parfaits, mais nous progressons de manière significative, et nous avons de grandes ambitions, répond le prince Albert II dans l’interview accordée au JDD. En matière de transparence fiscale, nous sommes sortis de toutes les listes grises internationales. En matière environnementale, nous développons les énergies renouvelables, nous accroissons l’efficacité énergétique de nos bâtiments, nous accélérons sur le traitement des déchets, mais aussi sur la mobilité propre. Bien sûr, il reste des voitures polluantes. Mais d’ici la fin de l’année, 15 % de notre parc de véhicules sera électrique, les transports en commun le seront intégralement en 2025, et la collecte des déchets l’est d’ores et déjà. » Quant au yachting, réputé polluant, pourtant bien présent à Monaco, des signes encourageants sont à relever, également : « J’observe, là aussi, un mouvement important vers des solutions plus durables, grâce à l’utilisation de bois et de matériaux issus d’une gestion responsable ou la promotion d’énergies décarbonées », développe le prince Albert II, qui rappelle dans cette interview l’objectif qu’il a fixé de réduction des émissions de gaz à effet de serre à 55 % d’ici 2030, la fin du fioul pour le chauffage, et le déploiement de boucles thalassothermiques, afin de diminuer de 7 % les émissions à très court terme. Ainsi que le déploiement de panneaux solaires en principauté « mais aussi en France, des fermes solaires et éoliennes ». Tout n’est pas parfait, mais « nous sommes aujourd’hui dans les clous pour respecter nos engagements. »

1) L’Homme et l’Océan, prince Albert II de Monaco (Flammarion), 144 pages, 10 euros.

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