samedi 20 avril 2024
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Circulation : les automobilistes voient rouge

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Bouchons routier
© Photo Monaco Hebdo

Mauvais aménagements internes, réseau ferroviaire peu fiable, voiture ultradominante… La mobilité urbaine est un cauchemar du quotidien impactant la vie économique du pays et la qualité de vie des salariés et résidents. Monaco Hebdo analyse les causes de cette asphyxie sur les routes et les solutions en cours d’étude.

Les années passent et le constat empire : Monaco est un véritable goulot d’étranglement. Et pour cause. Les compteurs atteignent des sommets. Poids lourds, scooters ou voitures… Pas moins de 103 000 véhicules entrent et sortent par jour du territoire monégasque. Soit le trafic d’une agglomération de 70 000 habitants. Avec des quartiers frôlant l’asphyxie. « Sur les 103 000 véhicules, 43 000 se rendent à Fontvieille, ce qui représente 40 % des déplacements », explique Christophe Cauvin, chef de section au centre intégré de gestion de la mobilité (CIGM). Au-delà des contraintes topographiques, reste donc à gérer la manne humaine qui afflue chaque jour. « Si l’on cumule le public et le privé, Monaco accueille au total 54 000 salariés. A cela, il faut ajouter 35 000 résidents qui ont vocation à se déplacer. Sans oublier les 5 millions de touristes par an, dont une partie vient en voiture. Le tout doit cohabiter dans 2 km2 », explique le conseiller pour l’équipement Gilles Tonelli. Sans surprise, la circulation cristallise tous les mécontentements dans l’opinion publique. Selon les sondages commandés par le trio d’experts français sur l’image de Monaco, 71 % des résidents la jugent non satisfaisante. Imbriquée dans la thématique « qualité de vie », la circulation est même devenue un enjeu électoral pour les élus.

Infrastructures lourdes

En matière de circulation, pas d’angélisme de la part du gouvernement. « Il ne faut pas espérer un jour avoir une circulation fluide à Monaco, essentiellement aux heures de pointe », reconnaît Gilles Tonelli. Tout en rappelant son objectif : « Ramener la tranquillité dans les quartiers pour les résidents, et réussir à maintenir l’activité économique à son plus haut niveau. » Et c’est dans les infrastructures lourdes que le gouvernement cherche des solutions. Véritable colonne vertébrale de la Principauté, la dorsale souterraine et les derniers tronçons ouverts aux automobilistes sont un véritable bol d’air. Fin décembre?2008, le tronçon donnant un accès direct à la moyenne corniche a permis d’alléger de 25 % le trafic sur la rue Grimaldi. Alors qu’un autre tronçon ouvert en mars dernier offre un accès direct à Fontvieille.
Au final, le schéma de déplacement imaginé par le gouvernement à long terme ressemblerait peu ou prou au suivant : la dorsale comme axe central de la ville avec des “parkings relais” faisant office de réceptacles pour les voitures. Et un tunnel routier à sens unique descendant, de 1 700 mètres de longueur, allant du boulevard du Jardin Exotique au boulevard Charles III, qui bouclerait la boucle. Le tout relié à un réseau de transport en commun en site propre (voir interview Gilles Tonelli page 44). Bref, selon certains, Monaco semble vouloir faire sienne la formule, restée célèbre, de Georges Pompidou : « Il faut adapter la ville à la voiture. » A tel point que certains fustigent ce qu’ils appellent « un appel à la voiture ».

Auto-asphyxie

« Ce tunnel descendant est une complète hérésie. Aucune ville dans le monde ne concevrait un projet pareil, assure le président de l’association MC2D, Raoul Viora. Une stratégie visant à faciliter la sortie des voitures, comme la dorsale ou le tunnel sortant, c’est un vrai ballon d’oxygène. Mais faciliter l’entrée des voitures en centre-ville est une aberration. Arrêtons de donner de la place à la voiture ! Le tunnel n’améliorera la situation que du jardin exotique à Fontvieille. En plus il est dangereux car il a été conçu en descente ».
Même son de cloche du côté de Anne Poyard Vatrican, élue de la majorité UP et présidente de la commission de l’environnement et du cadre de vie. « Il y a beaucoup trop de voitures par rapport à une ville de 30?000 habitants. Tout ce qui va favoriser l’afflux de véhicules vers la Principauté n’est pas une piste d’avenir. D’ailleurs dans les autres agglomérations européennes, la propension est davantage de sortir les voitures du centre-ville. A Monaco, on fait exactement l’inverse. Si la livraison de la dorsale devrait faciliter les choses, elle est loin d’être terminée ». Et avec la politique de grands travaux engagée par Monaco et la métamorphose des quartiers qui l’accompagne, certains élus déplorent un « manque d’anticipation du gouvernement » qui risque de rendre le quotidien très difficile.

“L’Annonciade, un cauchemar”

Premier point d’inquiétude : l’Annonciade et sa vertigineuse tour Odéon. « Nous avons demandé à connaître le flux de circulation du quartier qui va être un vrai cauchemar. D’autant plus si la perspective d’avoir un hôpital sur l’Annonciade se confirme. Nous n’avons eu aucune réponse du gouvernement », déplore Laurent Nouvion. Autre inquiétude soulevée par l’élue UP Anne Poyard-Vatrican : le centre de gérontologie clinique. « Le gouvernement va le livrer sans qu’il y ait eu d’anticipation sur les places de parking. Alors qu’il va y avoir 210 lits, 300 personnels soignants, plus les familles. Il faut impérativement que le gouvernement propose des solutions sur ce sujet ». Et de tacler les mauvais aménagements internes, notamment au niveau des sorties de la gare SNCF. « La sortie de la gare de Monaco au niveau du pont de Sainte Dévote a été mal conçue et sort du mauvais côté de la route obligeant tous les passagers à traverser et à couper le trafic en surface. Compte tenu de la complexité des chantiers qui sont réalisés à Monaco, faire un escalier roulant du bon côté de la route devrait être possible et permettrait de fluidifier le trafic », explique encore Anne Poyard-Vatrican. Une piste qui aura peu d’impact selon le gouvernement. « Par expérience, on sait que ces passages ne fonctionnent pas. Tout simplement parce que les gens ne les empruntent pas. Mais en ce qui concerne la sortie de la gare, notamment au boulevard princesse Charlotte, on étudie tout de même la possibilité de construire un passage souterrain qui amènerait les usagers devant le boulevard de Suisse », réplique Gilles Tonelli.

Aménagement interne : les incohérences

Reste que beaucoup de résidents pestent contre l’aménagement du quotidien. Des incohérences ici et là qui ne font que favoriser une circulation en accordéon. « La bretelle d’accès de l’avenue d’Ostende à la dorsale a été supprimée. Le tunnel Est, sous le Rocher, est réduit à une seule voie, au lieu de deux. Ce qui permettait d’aller sur la gauche à Fontvieille, sur la droite vers l’ouest et le tunnel montant. Enfin, un trottoir de 6 mètres de large instauré à la sortie haute de la gare empêche d’accéder directement au boulevard de Suisse », déplore Philippe Ortelli, président de la fédération patronale. Qui conteste également l’aménagement des couloirs et arrêts de bus sur certaines voies.
Même constat pour Anne Poyard Vatrican qui estime que « sur certains arrêts de bus, il n’y a pas de dépassement possible en voiture notamment au boulevard du Jardin exotique ou encore à Fontvieille à l’arrêt pour Carrefour. Ce qui bloque immanquablement la circulation.?»
Autre point de mécontentement?: les aménagements à la Condamine sur le haut de la rue Grimaldi où un giratoire provisoire à la Place d’armes sera d’ailleurs testé pendant un an. « L’ancienne configuration fonctionnait très bien. La voie de gauche était fluide pour les véhicules qui voulaient partir sur la gauche et pour ceux qui allaient au Rocher. Ce qui permettait à l’agent de police d’effectuer son travail de bloquer les voitures puisqu’il y avait un stop. Cette ligne blanche est un vrai merdier », explique Laurent Nouvion pour qui le gouvernement est « dogmatique » et non « pragmatique ».
Autre erreur de conception selon l’élu?: la voie montante avenue de la Madone qui a été supprimée. « Avant il y avait une voie de droite fluide avec un feu clignotant qui remontait vers le boulevard des Moulins. A la place, ils ont agrandi un trottoir où il n y a jamais personne. C’est un flop complet ». Une réalité que reconnaît d’ailleurs volontiers le conseiller Tonelli…

Le bourbier SNCF
Chaque jour, pas moins de 14 000 voyageurs montent ou descendent en gare de Monaco. « Il n’y a malheureusement qu’environ 11 % de la population active qui prend le train. Un chiffre trop faible. Beaucoup de salariés continuent de privilégier la voiture car le train n’est pas suffisamment fiable. Avec tout l’argent investi par Monaco avec les nouvelles rames, le résultat est très décevant », estime Anne Poyard Vatrican. Car la facture est effectivement salée : 50 millions d’euros investis par le gouvernement pour le financement de 5 nouvelles rames. Et un quotidien chaotique malgré 41 % de circulation supplémentaire (en 2007, 73 trains s’arrêtaient en gare de Monaco contre 103 aujourd’hui). Mais sur le terrain, entre grèves et travaux, les pendulaires restent à quai. Et la colère monte. Alors que la région Paca a réclamé 10 millions d’euros d’indemnités à la SNCF en 2009, Monaco n’est pas encore en mesure de faire pression. « Les pénalités ne peuvent s’appliquer qu’une fois le contrat signé entre les parties pleinement exécutoire. Or, ceci n’intervient que dès lors que la livraison des rames est effectuée en totalité et que le coût d’acquisition définitivement réglé après une période de test. Tel n’était pas le cas jusqu’alors », explique Gilles Tonelli.
1,3 km de bouchons sur la moyenne corniche
Le tronçon est quotidiennement saturé. Et sur la moyenne corniche, à la sortie de l’autoroute A8, la galère des pendulaires n’est pas prête de s’arrêter. Le centre intégré de gestion de la mobilité (CIGM), en charge de l’exploitation des deux feux sur cette voie, avoue son impuissance. «?Lorsque l’on a pris en charge cette exploitation en 2005, il y a avait en moyenne 1,3 km de bouchons aux heures de pointe. Des bouchons qui remontaient jusqu’au tunnel autoroutier. On a optimisé le fonctionnement, et on a réussi à tombé à 110 mètres de circulation pendant 3 ans », explique Christophe Cauvin. Une amélioration de courte durée, car aujourd’hui le trafic est repassé à 1,3 km de bouchons en moyenne. « C’est comme une pompe d’appel. Les usagers sachant que la circulation était plus fluide sur la moyenne corniche sont passés de nouveau par cette route. On est parvenu à redonner de la capacité pendant 3 ans. Mais depuis 2 ans, retour au point de départ. En revanche, on n’arrivera plus à retomber à 110 mètres. Les feux sont également à leur capacité nominale maximale. » Résultat : les trois axes, basse moyenne ou haute corniche, sont et resteront complètement saturés. A moins d’un funiculaire ?

Un bison futé monégasque

Il est l’organe central de la régulation du trafic à Monaco. Visite guidée au sein des trois cellules du centre intégré de gestion de la mobilité (CIGM) (1).

Aux manettes du CIGM, pas moins de 22 hommes postés derrière les écrans de contrôle veillent à la régulation du trafic à Monaco. Gestion du trafic en temps réel 24h/24, organisation des plans de circulation, ou cellule de réflexion pour le gouvernement… Le CIGM assure une gestion complète de la chaîne des déplacements. (2) Un travail dans l’ombre, sans personnel physiquement présent sur le terrain. Cet antre du trafic urbain abrite trois cellules aux missions bien distinctes. La plus active : la “cellule exploitation” fonctionne 24h24 en temps réel. « Concrètement, elle s’occupe aux carrefours des feux tricolores, des panneaux d’information électroniques sur la voirie, ou encore de la sécurité des tunnels routiers », précise Christophe Cauvin, chef de section au CIGM. La deuxième cellule baptisée « maîtrise de l’espace public », prend en charge tout ce qui va avoir un impact sur le domaine public. Travaux, déménagements de grue, convois exceptionnels opérés de nuit… Cette cellule gère pas moins de 5 000 opérations par an dont 400 convois exceptionnels, et 700 opérations qui nécessitent soit des fermetures de voie ou de tunnels routiers. Sans oublier la conception des plans de circulation et autres modifications d’itinéraires. Enfin, la cellule “ingénierie des déplacements”, composée de deux salariés est un pôle de réflexion pour le gouvernement à court ou moyen terme. Projet d’études en cours : la Zac Saint-Antoine.

“Un an de travail titanesque”

Mais c’est durant les grands évènements culturels ou sportifs à Monaco, que le CIGM est aux premières loges. Si le Grand prix de Formule 1 (F1) est un exercice désormais rodé, sa préparation nécessite tout de même trois mois de préparation en amont. « C’est un énorme travail collégial avec la police, les pompiers, les parkings publics, l’aménagement urbain ou la direction des ports. En terme de volume pendant les 4 jours du Grand prix, ça représente entre 90 000 et 100 000 véhicules qui transitent par Monaco chaque jour avec une centaine d’autocars de tourisme, et près de 150 poids lourds », explique Christophe Cauvin. Autre gros évènement : l’organisation du tour de France en juillet dernier. Une grande première pour le CIGM et « un an de travail titanesque », explique le chef de section. « Etant donné que l’événement était à l’initiative de Monaco, il a fallu que le CIGM réalise tous les plans de circulation y compris dans les communes limitrophes. On attendait entre 100 000 et 200 000 personnes. La caravane représentait près de 400 véhicules. Il fallait également gérer l’arrivée de 600 à 700 camping cars », précise-t-il. Sans oublier la collaboration avec la SNCF et les autocars interurbains pour augmenter les cadencements. Et détail non négligeable… la mise en place de kilomètres de barrières.

(1) Depuis 2004, le CIGM est une section du service des titres de circulation. Une évolution du centre de régulation du trafic crée en 1993.

(2) Etat du trafic en temps réel sur www.infotrafic.com.

Solutions : monsieur circulation ou funiculaire ?

Transports alternatifs, projet de funiculaire ou “parking relais” dans les communes limitrophes, une myriade d’initiatives naissent pour désengorger les routes. Plus ou moins réalisables. Gouvernement, élus et associations livrent leurs pistes

Désengorger le trafic intra-muros et autour de Monaco… Tout le monde en rêve. Mais comment y parvenir ? Selon Gilles Tonelli, « il n’y a pas de réponse unique à la problématique des déplacements » mais « un faisceau d’initiatives ». Et en matière d’initiatives, il suffit de piocher. Alors que certains vont jusqu’à plaider la dissuasion radicale avec l’instauration de « péages urbains aux frontières est et ouest », côté politique, la majorité parlementaire prêche depuis des années pour l’instauration d’un “Monsieur Circulation”, « chargé de coordonner tout ce qui peut avoir un impact sur la circulation : travaux de voieries, enchaînement des manifestations, cohérence des tracés. Car la gestion de la circulation est un domaine transversal qui se décline au quotidien tout au long de l’année?», explique Anne Poyard-Vatrican. Dans l’opposition, Laurent Nouvion mise sur la construction tous azimuts de parkings. « Ça nous rapporte près de 30 millions d’euros entre le budget et le fonds de réserve chaque année. De toute manière, prendre des mesures dissuasives ne marcherait pas. Nous sommes dans un pays latin et nous n’acceptons pas les choses imposées », estime l’élu. C’est pourquoi, de son côté, le covoiturage opère une percée… limitée. La barre des 1 000 inscrits a été dépassée.

Covoiturage dynamique

Pour les adeptes, des tarifs préférentiels sont pratiqués dans les parkings (de 99?euros par mois pour un abonnement classique, contre 25 euros l’abonnement mensuel par “covoituré”). Mais avec le lancement du “covoiturage dynamique”, Bernard Fautrier, chargé de mission auprès du gouvernement pour des démarches environnementales, souhaite passer la vitesse supérieure. Une formule plus souple testée à la rentrée auprès d’une centaine de volontaires dans 3 établissements : SBM, Monaco Télécom et CHPG. Le mode opératoire est simple?: fournir une offre en temps quasi réel. La personne souhaitant effectuer un itinéraire en covoiturage contacte un service quelques minutes avant son départ. Le service va alors chercher le conducteur adéquat qui est en mesure d’offrir l’itinéraire demandé. A suivre donc…

Dans les communes limitrophes

D’aucuns misent sur des projets au-delà des frontières monégasques. « On estime qu’il y a environ 20?000?à 25?000 salariés qui viennent de communes non limitrophes : Antibes, Saint Laurent du var, Nice ou encore les communes italiennes proches… Il faudrait ainsi que ces communes qui jalonnent le tracé du train créent des parkings relais de manière à ce que les salariés puissent déposer leurs véhicules à la gare et prendre le train?», suggère Anne Poyard-Vatrican. Une solution évidemment étudiée par le gouvernement mais Gilles Tonelli rappelle que la difficulté réside dans le fait que «?les terrains appartiennent à Réseau ferré de France, et que cette entité n’a peut-être pas l’ambition de vendre ces terrains pour créer des parkings…?»
Autre solution?: le développement des logements pour actifs dans les communes limitrophes. «?On est dans un rapport gagnant-gagnant. Car les communes manquent de financement, Monaco manque d’espace et les salariés gagneraient en qualité de vie en étant proche de leur travail, tout en consommant sur place?», souligne encore l’élue UP. Le gouvernement, lui, se montre plus nuancé en rappelant que «?pour l’instant on reste sur des volumes très faibles. L’Etat monégasque a par exemple acheté un immeuble sur le terrain de Roquebrune-Cap-Martin et va acheter des droits d’occupation pour des salariés de Monaco. Ce ne sont que des opérations de 20 à 40 appartements mais il faut continuer sur cette lancée. L’idéal étant évidemment de trouver des logements à proximité des gares?», précise Gilles Tonelli. En attendant, le gouvernement continue d’étudier d’autres pistes. Du funiculaire baptisé “Les liaisons express” aux “plans de déplacement entreprises” (PDE). Sans oublier, le réseau de transport en commun en site propre qui ne sera réalisable qu’une fois l’infrastructure des terrains SNCF réalisée. Soit à l’horizon 2016 / 2018. Objectif?: relier les frontières Est et Ouest de la Principauté par une ligne principale et structurante, autour de laquelle viendront s’intégrer les lignes de bus et autres systèmes de rabattement. Liaisons expresses ou mécaniques.

Un réseau en site propre

« Cette liaison transversale viendra en jonction des territoires et réseaux français (Roquebrune/CARF à l’Est et Cap d’Ail/CANCA à l’Ouest), mais également, en complément et en continuité des réseaux intercommunautaires (Conseil Général et Régional), notamment la ligne de bus 100 et 100Xpress. La capacité et la faisabilité de prolongation en dehors de la Principauté sera étudiée », précise le gouvernement. Solutions souterraines ou de surface, métro automatique, tramway, bus à haut niveau de service… « Toutes les technologies d’infrastructures pourront être envisagées. De type bus?: en site propre ou mixte, guidée ou non. De type ferrée : tramway, VAL, métro, monorail. De type câblée : sous forme de funiculaire ou télécabine, » Les résultats de l’étude de tracé seront disponibles à l’automne 2010.

En marche toute

C’est ce que l’on appelle la “mobilité douce”. Avec un réseau de 28 liaisons par ascenseurs, 7 liaisons par escalators et des dizaines d’escaliers offrant des raccourcis piétonniers, (chiffres de Monaco Malin 2009), la plupart des déplacements à Monaco peuvent être réalisés sans trop de peine… à pied. Encore faut-il connaître toutes les subtilités du réseau. Sur ce point, les élus de la majorité réclament depuis des années «?une meilleure signalétique sur site?», estimant que « le cheminement piéton en Principauté et notamment tous les ascenseurs qui facilitent les liaisons verticales sont peu connues et très mal indiquées ». Côté bus monégasques, le réseau reste très actif. Près de 7?millions de voyages ont été enregistrés en 2009, soit une augmentation de plus de 4 % par rapport à 2008. En revanche, la majorité souhaiterait que se développe une « billettique à quai » qui permettrait au chauffeur de bus de se consacrer à la conduite et de fluidifier le trafic. Exigence restée sans réponse.

Après le TEM… le REM

Le projet sera présenté en juillet dans l’hémicycle du Conseil national après avoir été récemment remis aux hautes sphères de l’Etat. L’association MC2D et son président, Raoul Viora, proposent le Rapide Eze Monaco (REM). Le successeur du “Turbie express Monaco” abandonné en raison des difficultés relatives à l’utilisation de la carrière de la Cruelle. Un projet de funiculaire imaginé depuis déjà 5 ans. Et la tête pensante de cette initiative, Philippe Mondielli, directeur scientifique de la fondation prince Albert II est formel sur sa faisabilité technique. « Des entreprises de génie civil souterrain et des concepteurs de funiculaires croient en ce projet et nous ont donné gratuitement leur expertise. C’est un projet très écologique qui n’aura aucun impact sur le paysage?». Concrètement de quoi s’agit-il ? « C’est une liaison par navettes, circulant principalement en souterrain, reliant un parking situé à la sortie du tunnel autoroutier (les terrains de la Brasca sur la commune d’Eze) à une station située, soit au centre de Monaco, au niveau de l’ancienne gare, soit en bout du futur transport en commun en site propre monégasque, côté Cap d’Ail ». Selon leurs estimations, 800 à 1?200 véhicules durant l’heure de pointe s’arrêteraient au parking. Avec deux à trois personnes occupant un véhicule, ce serait alors 2?400 personnes maximum qui se présenteraient au REM à l’heure de pointe. Avec un véhicule d’une capacité de 400 passagers, une vitesse maxi de 13 m/s (47 km/h), et un mode de fonctionnement en va-et-vient assuré 365 jours par an et 20 heures par jour.

Vélos électriques : pédalage dans le vide ?

Les plus sceptiques qualifient l’initiative de «?politique gadget?» avec «?des vélos qui n’arriveront pas à monter l’avenue Ostende?», ironise l’élu d’opposition Laurent Nouvion. Monaco s’est lancé dans le déploiement de vélos électriques. Une trentaine au total, pour l’heure encore en phase de test. Mais difficile d’imaginer à Monaco un engouement réel pour ce mode de déplacement. D’autant que «?le territoire très exigu de la Principauté ne permettra pas de créer des pistes cyclables?», précise Christophe Cauvin du CIGM. Et que les rares qui existent n’ont manifestement pas été suffisamment pensées. «?Au boulevard du Larvotto par exemple, la piste est du mauvais côté de la route?!?», lance Anne Poyard Vatrican qui défend quand même bec et ongle l’initiative. «?Ce ne sera pas forcément un moyen de transport quotidien. Mais une alternative pour des déplacements ponctuels. Comme faire une course par exemple. A Monaco, il y a des populations très différentes. Certaines sont prêtes à faire l’effort de choisir d’autres moyens de transport. Toutes les alternatives doivent donc être étudiées et proposées.?» Un temps caché dans les parkings, ces vélos seront bientôt remontés à la surface. «?Trois stations au total seront à l’air libre. Une près de l’entrée de la Villa Sauber au Larvotto, la seconde dans la petite voie piétonne près de Décathlon à Fontvieille, et la troisième sur le quai Albert 1er?», précise Roland de Rechniewski, directeur de la CAM, entreprise en charge de ces vélos.

“Je ne crois pas à la contrainte”

Gilles Tonelli, conseiller de gouvernement pour l’équipement, détaille les différentes pistes actuellement étudiées par le gouvernement pour désengorger les routes. Interview relue et amendée.

Monaco Hebdo : Vous dites vouloir ramener « la tranquillité dans les quartiers ». Comment y parvenir ?
Gilles Tonelli : Les solutions sont notamment dans les infrastructures lourdes. A l’image de la dorsale et du futur tunnel descendant. L’objectif est d’arriver à modifier le schéma des déplacements à Monaco en faisant en sorte qu’aucune circulation de transit ne passe dans les quartiers. D’où l’utilité de créer un tunnel descendant branché sur la dorsale qui desservirait tous les quartiers de Monaco et tous les parkings importants. Via ce tunnel, les véhicules pourront ainsi s’arrêter dans des parkings «?relais?» puis repartir de Monaco par le tunnel montant, déjà existant, qui permet de rejoindre directement la moyenne corniche.

M.H.: Dans cette logique d’une dorsale comme axe central et point de ralliement de la circulation, combien de parkings “relais” vont être créés ?

G.T.: Il existe déjà 15?000 places de parkings publics et presque autant de parkings privés. Pour une ville de 35?000 habitants, c’est peu commun. Des parkings complémentaires vont être créés à l’entrée Ouest de Monaco. Sur la Zac Saint Antoine, on est en train de réaliser un parking qui contiendra 600 à 700 places, situé près de l’arrivée du tunnel descendant, et qui sera finalisé à l’automne 2012. Un autre sera réalisé sur l’îlot Charles III sur les terrains SNCF et abritera environ 1?000 places. Il sera opérationnel à l’horizon 2020. En attendant, fin 2011, début 2012 nous avons également les parkings du lycée technique et de l’îlot Rainier III qui totalisent près de 1?000 places. Il faut penser aussi à tous les parkings de Fontvieille, comme celui du stade Louis II, qui seront situés à proximité du tunnel descendant et qui seront donc plus facilement accessibles. Au niveau piéton, il est aussi envisagé de mettre en liaison ces parkings «?relais?» avec le réseau de transport en commun en site propre que l’on réalisera une fois que le chantier sur les terrains SNCF sera fini.

M.H.: Au niveau du calendrier, où en est le projet de tunnel descendant ?

G.T.: Les travaux préparatoires ont déjà été réalisés cette année. En revanche, je ne peux rien confirmer sur le début officiel des travaux. En 2011 ou en 2012. C’est un tunnel qui coûte 93?millions d’euros. Il y a en amont des arbitrages budgétaires à faire. La durée des travaux est elle estimée à 48 mois. Pour l’heure, un appel d’offres a été lancé pour ce chantier. Et l’on est en train d’étudier les offres des entreprises.

M.H.: Certains contestent l’utilité de ce tunnel descendant en estimant qu’il n’améliorera d’aucune façon la circulation autour de Monaco?? Que répondez-vous ?

G.T.: On a une bande de terrain de 3,5?km de long sur 50 à 500 mètres de large qui doit être irriguée par une voie dorsale. Si l’on ne fait pas ce tunnel descendant, on continuera à avoir une circulation de transit et perturbante sur au moins 3 quartiers. Celui des Moneghetti, la Condamine et Fontvieille. Mais évidemment, avec ce tunnel, on ne désengorgera pas la partie ouest à la sortie du tunnel autoroutier.


M.H.: Pour cet axe, on parle depuis des années d’un projet de funiculaire : où en est-on ?

G.T.: Récemment, on a lancé une étude de faisabilité qui durera 6 mois. C’est un projet que l’on a baptisé “les liaisons express”. Il y aurait comme point de départ un parking de 2?000 à 3?000 places. Ensuite un funiculaire souterrain aboutirait soit à la gare SNCF, soit sur l’îlot Charles III. Concernant les parkings, 3 sites ont été imaginés. A savoir, Eze à la sortie du tunnel autoroutier, la Cruella à la Turbie et un troisième situé au-dessus de l’autoroute. On a reçu l’aval de toutes les communes limitrophes et du Conseil général pour lancer cette consultation auprès des bureaux d’études spécialisés. On est donc plutôt dans une perspective de réalisation.

M.H.: D’autres pistes pour optimiser les déplacements domicile/entreprise ?

G.T.: Il y a 4 ou 5 mois, on a lancé une étude sur un projet appelé “Plans de déplacement entreprises” (PDE). L’établissement pilote est le CHPG. L’idée est d’abord d’observer précisément quelles sont les origines géographiques des salariés qui viennent travailler dans une même entreprise. Puis faire en sorte de donner à ces salariés des modes communs de déplacements, comme des navettes. L’objectif est de limiter les besoins en parking et limiter au maximum le schéma traditionnel du salarié venant seul avec sa propre voiture. Cela a déjà été mis en place dans un hôpital de Villejuif, ou encore dans des grosses entreprises à Paris comme TF1. Et les besoins en parkings ont été réduits de moitié. Si c’est concluant au CHPG, ce dispositif pourrait être appliqué à d’autres entreprises à Monaco.

M.H. : La plupart des agglomérations développent les transports en commun et multiplient les mesures dissuasives pour éviter au maximum la voiture en centre-ville. On a le sentiment que les mesures engagées tendent au contraire à un “appel à la voiture” ?

G.T.: Non ce n’est pas exact. Un exemple significatif : les abonnements des parkings publics sont moins élevés pour les résidents qui n’utilisent pas leur voiture en semaine ! Mais dans l’opinion, tout le monde s’accorde à dire qu’il faut diminuer l’usage de la voiture. Or dans les faits, peu de monde est réellement prêt à le faire car chacun a de bonnes raisons de prendre son auto tous les jours malgré les congestions de circulation. De fait, je ne crois pas à la contrainte. Je crois plus à des contreparties, c’est-à-dire à précéder la contrainte de dispositifs de substitution. Si l’on prend seulement des mesures drastiques, les salariés n’auront plus envie de venir travailler à Monaco. Et les patrons seront moins à enclins à y installer leur entreprise. En revanche, une fois que l’on aura mis en place des moyens de mobilité plus confortables et plus performants, rien ne nous empêchera d’engager des mesures dissuasives. Comme augmenter le prix des parkings pour rendre les moyens alternatifs plus compétitifs. Le gouvernement soutient donc les actions favorisant l’usage des transports en commun.