vendredi 26 avril 2024
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Charles Leclerc : « Ce sera très difficile de monter sur le podium à Monaco »

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Crise sanitaire oblige, le pilote monégasque Charles Leclerc a répondu aux questions de la presse locale à distance, via l’application Zoom.

À quelques jours du Grand Prix de Monaco, le pilote de 23 ans estime que sa Ferrari n’est pas suffisamment compétitive face à Mercedes et Red Bull pour espérer un podium dans les rues de la principauté.

Vous arrivez à Monaco en étant 5ème [voir le classement des pilotes par ailleurs — NDLR] du championnat : avant le début de la saison vous auriez signé pour débarquer en principauté dans cette position ?

Je n’aurais pas signé, parce que j’espère toujours faire mieux. Mais avant le début de cette saison 2021, c’est le mieux qu’on pouvait espérer pour cette année, après une année 2020 très compliquée. Depuis, on a beaucoup progressé. On est sur la bonne voie. On travaille bien, donc c’est positif. Pourtant, je n’aurais pas signé pour une 5ème place. J’aurais signé pour la première place au championnat. C’est la seule place pour laquelle j’aurais signé. Parce que même quand je commence une saison où je sais que ça va être compliqué, je crois toujours à la gagne. En tout cas, jusqu’à maintenant, c’est une saison positive. On a toujours maximisé le potentiel de la voiture, ce qui est le plus important dans une année comme celle-ci, où on est encore un petit peu en dessous de nos attentes. Malheureusement, on essaie toujours de récupérer le retard pris après 2019. Ça fait partie du processus. Et on donne tout.

« C’est parfois difficile, surtout quand on fait tout parfaitement, que ce soit la stratégie ou les réglages, mais que la voiture n’est pas suffisamment performante pour aller chercher les premières places »

Depuis le début de cette saison 2021, Ferrari a sensiblement progressé, tant en qualifications qu’en course : à quoi est-ce dû ?

Je pense que c’est grâce à la façon dont on a travaillé tout au long de l’année dernière. La première partie de l’année 2020 a été compliquée, parce qu’il fallait accepter d’avoir fait un pas en arrière. Ce n’est jamais facile d’accepter cette situation-là. Mais une fois qu’on l’a acceptée, on a commencé à vraiment bien travailler, et de façon constructive. On a tout de suite vu de petits progrès. Après, bien sûr, en une année il est compliqué de faire des miracles. Surtout que de 2020 à 2021, il y a eu des restrictions techniques. Du coup, on ne pouvait pas faire ce qu’on voulait avec la voiture. Mais on a bien bossé. Et aujourd’hui, on le montre en piste. Alors, bien sûr, on veut se battre pour des victoires. Mais pour ça, il y a encore pas mal de boulot. On travaille dans la bonne direction. Il n’y a pas un point particulier de la voiture qui s’est amélioré beaucoup plus que les autres. C’est un “package” [un ensemble — NDLR] global, que ce soit le moteur, l’aérodynamisme ou le châssis. Nous avons fait un pas sur ces trois points, ce qui fait que nous sommes plus compétitifs cette année qu’en 2020. En course aussi, nous avons fait un bon pas en avant.

Est-ce une frustration de terminer au pied du podium cette saison ?

Je ne parlerai pas de frustration. Bien sûr, c’est parfois difficile, surtout quand on fait tout parfaitement, que ce soit la stratégie ou les réglages, mais que la voiture n’est pas suffisamment performante pour aller chercher les premières places. Car tout le monde donne absolument tout, pour finalement faire une 4ème ou une 5ème place. C’est toujours encourageant, vu la situation dans laquelle on est. Mais si on prend la photo globale de la Scuderia Ferrari, ce n’est clairement pas là où on veut se battre. Pourtant, il faut passer par là. Ça fait partie de la reconstruction de l’équipe. On a fait des progrès. C’est le plus important, pour l’instant. Et j’espère que, très bientôt, on pourra se battre pour la gagne.

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© Photo Scuderia Ferrari Press Office

« Mercedes a plus de puissance et une meilleure voiture, en général. Cette année, avec Ferrari, on a fait une voiture assez équilibrée. Que ce soit pour le moteur ou l’aérodynamisme »

Quelles conditions faudrait-il pour que vous puissiez monter sur le podium chez vous, à Monaco ?

Honnêtement, je crois que ce sera très difficile de monter sur le podium à Monaco, parce que la voiture n’est pas assez compétitive pour cela, pour le moment. Il y a les Mercedes et les Red Bull qui restent beaucoup plus fortes que nous. Et ils le sont depuis le début de cette saison 2021. Et ils le seront encore à Monaco. Parce qu’il n’y a aucune raison qu’une voiture plus forte que nous ne le soit que sur un seul circuit. Donc je crois que ce sera difficile. Qu’il pleuve ou non, cela ne changera pas grand-chose : l’objectif sera toujours de maximiser ce que nous avons. Donc monter sur le podium, ce sera difficile, mais on ne sait jamais. Si on fait de bonnes séances de qualifications, à Monaco tout est possible. J’essaierai de faire le maximum, et on verra. Mais si les conditions de course restent normales, il sera difficile d’atteindre le podium pour notre voiture.

Monaco est un circuit urbain : quel type de circuit préférez-vous ?

Je préfère les circuits urbains. J’adore rouler à la limite de la voiture, sans jamais aller au-delà de cette limite, parce qu’avec les murs, on n’a pas le droit à l’erreur. C’est le challenge que j’aime en tant que pilote. C’est pour ça que j’aime autant Monaco. Même si on enlève le fait que je suis Monégasque, que j’ai grandi ici, Monaco resterait ma piste préférée. Le ressenti qu’a un pilote est incroyable quand on roule à ces vitesses-là, dans une ville comme Monaco.

La préparation pour un circuit urbain est très particulière ?

La préparation pour un circuit urbain n’est pas forcément très différente. En revanche, la semaine du Grand Prix est assez différente à Monaco, comparée aux autres, parce qu’ici on a les essais libres le jeudi. Ensuite, on fait une pause le vendredi. Le samedi et le dimanche ça reprend, et c’est la seule fois de l’année où c’est organisé comme ça. Du coup, le vendredi, on en profite pour se poser avec les ingénieurs. On analyse beaucoup plus que sur un autre Grand Prix, car on a donc plus de temps pour le faire. Sinon, la préparation avant le Grand Prix reste exactement la même, avec du simulateur, et ensuite des rendez-vous avec les ingénieurs, pour savoir quelle direction prendre pour les réglages de la voiture.

© Photo Scuderia Ferrari Press Office

« Il faut vraiment qu’on réussisse à progresser, au niveau du moteur, du châssis et de l’aérodynamisme pour 2022, parce que désormais, c’est trop tard pour 2021. En effet, toutes les équipes sont déjà concentrées sur 2022, car il y aura un changement de règlement qui sera très important »

Finalement, qu’est-ce qui sépare Mercedes de Ferrari aujourd’hui ?

Mercedes a plus de puissance et une meilleure voiture, en général. Cette année, avec Ferrari, on a fait une voiture assez équilibrée. Que ce soit pour le moteur ou l’aérodynamisme, on n’est pas beaucoup plus fort dans l’un que dans l’autre, contrairement à 2019. Il faut vraiment qu’on réussisse à progresser, au niveau du moteur, du châssis et de l’aérodynamisme pour 2022, parce que désormais, c’est trop tard pour 2021. En effet, toutes les équipes sont déjà concentrées sur 2022, car il y aura un changement de règlement qui sera très important (1). En interne, on sait sur quoi travailler, mais je ne donnerai pas de détails ici. On se focalise donc sur certains points, pour essayer de récupérer le retard sur Mercedes.

À Monaco, le circuit ne permet-il pas de réduire quelque peu les différences entre les écuries, avec des pilotes qui sont davantage décisifs ?

C’était le cas à une époque. Ça l’est encore un petit peu. Mais, malheureusement, aujourd’hui il y a tellement de différences, et on est tellement bien préparé pour des circuits comme celui de Monaco, que si le pilote peut faire la différence, c’est uniquement sur deux ou trois dixièmes. Les écarts entre Red Bull, Mercedes et les autres sont tels, que c’est très compliqué pour nous, pilotes, de faire la différence. Surtout qu’il n’y a pas de mauvais pilotes chez Mercedes et chez Red Bull. Ils sont aussi très bons. Donc il est difficile de faire la différence avec Lewis Hamilton et Max Verstappen, qui disposent, en plus, de meilleures voitures. Après, on ne sait jamais. En qualifications, tout est sur un tour. Je donnerai tout. J’espère vraiment faire un résultat. Mais il faut être réaliste : si tout va bien de leur côté, ce sera compliqué pour nous d’être compétitifs face à eux.

Une tribune porte désormais votre nom à Monaco : que représente-t-elle pour vous ?

Je suis très content. C’est la première fois que j’ai une tribune à mon nom, car en 2020, le Grand Prix de Monaco a été annulé. De plus, Monaco sera le premier Grand Prix où on aura un peu de public. À Barcelone, il y en avait très peu. Ici, en principauté, à la maison, savoir qu’il y aura du public me fait plaisir. Cette tribune Charles Leclerc représente beaucoup pour moi. Depuis que je suis tout petit, je regarde le Grand Prix de Monaco, en espérant un jour être en Formule 1 (F1). Maintenant j’y suis, en plus chez Ferrari, avec une tribune à mon nom, et avec des personnes qui me soutiennent. Ça me fera plaisir de voir ça. Depuis plus d’un an et demi, on n’a plus de public. Même si je fais ce que j’aime, et que je suis très chanceux de pouvoir voyager dans une situation pareille, ça sera très agréable de revoir des gens qui nous soutiennent dans les tribunes. Ça nous fait espérer un retour à la vie normale très bientôt.

« En 2022, il y aura une belle opportunité, car les voitures changeront complètement. Donc c’est l’occasion pour Ferrari de faire quelque chose de bien »

Le 11 mai 2021, vous avez déclaré sur RTL que l’ambiance était différente depuis l’arrivée de votre coéquipier Carlos Sainz Jr. : qu’est-ce qui a changé par rapport à ce que vous avez connu avec Sebastian Vettel ?

Avec Sebastian Vettel, c’était un peu différent. Sebastian avait beaucoup d’expérience. Lorsque je suis arrivé chez Ferrari, il connaissait très bien l’équipe. Quand Carlos Sainz Jr. est arrivé, c’était tout nouveau pour lui. Ensuite, on est tous les deux très jeunes [Charles Leclerc est né le 16 octobre 1997, Carlos Sainz Jr. est né le 1er septembre 1994 et Sebastian Vettel est né le 3 juillet 1987 — NDLR]. C’est la première année de Carlos chez Ferrari, donc il y a beaucoup d’enthousiasme, beaucoup de motivation. De plus, on n’est pas dans la même situation qu’il y a deux ou trois ans avec Sebastian. Ferrari arrivait alors d’une période pendant laquelle ils étaient assez forts, pendant laquelle ils réussissaient à se battre pour le titre. Aujourd’hui, nous sommes plus dans une phase de reconstruction. Nous avons donc beaucoup de motivation pour essayer de revenir au niveau où nous voulons être, c’est-à-dire se battre pour le titre de champion du monde. Les améliorations sur la piste nous laissent beaucoup d’espoir. Donc je pense que ce n’est pas seulement Carlos. C’est aussi la situation qui s’y prête et qui fait qu’il y a davantage de motivation dans notre équipe.

À partir de 2022, une nouvelle manche du championnat du monde de F1 se disputera à Miami : que pensez-vous de ce nouveau rendez-vous ?

Je suis vraiment content du retour de Miami au calendrier du championnat du monde en 2022. J’aime beaucoup les Etats-Unis. Il y a vraiment là-bas une ambiance particulière, qui fait que c’est vraiment cool d’y aller. Surtout à Miami. J’ai hâte.

Vous aimeriez voir le retour de l’Afrique du Sud au calendrier du championnat du monde ?

J’aimerais beaucoup voir l’Afrique du Sud faire son retour au calendrier du championnat du monde. Mais, très honnêtement, je ne connais pas du tout le tracé. Donc ce serait davantage pour me rendre en Afrique du Sud, parce que je n’y suis jamais allé, que pour le tracé, que je ne connais malheureusement pas. Mais s’il y a un circuit que j’aimerais beaucoup faire en F1, c’est celui de Macao, que j’avais fait en Formule 3 (F3). Comme je le disais, j’adore les circuits urbains. Macao, c’est l’un des meilleurs circuits que j’ai fait de toute ma vie. Donc le faire en F1, ce serait quelque chose d’incroyable.

« Aujourd’hui il y a tellement de différences, et on est tellement bien préparé pour des circuits comme celui de Monaco, que si le pilote peut faire la différence, c’est uniquement sur deux ou trois dixièmes. Les écarts entre Red Bull, Mercedes et les autres sont tels, que c’est très compliqué pour nous, pilotes, de faire la différence »

Le patron de la Scuderia Ferrari, Mattia Binotto, a dit le 6 juin 2020 à propos de vous : « Chez Ferrari, nous voulons qu’il devienne le meilleur pilote jamais vu en F1 » : où en êtes-vous par rapport à cet objectif ?

C’est un objectif très élevé. La barre est très haute. Mais bien sûr, ça fait très plaisir de l’entendre, parce que ça montre que Mattia Binotto a confiance en moi. Après, très honnêtement, je me concentre sur moi-même, et sur la route qu’il reste à faire. J’ai encore énormément de travail. Je suis jeune, j’essaie de me concentrer sur ce que j’ai à faire, sans trop penser à toutes ces choses-là. C’est sûr que les éloges, ça fait toujours plaisir. Mais à la fin, ce sont les résultats qui comptent. Sur ça, j’ai encore pas mal de boulot à accomplir. Pour le moment, la seule chose sur laquelle je suis focalisé, c’est d’essayer de ramener Ferrari là où ils méritent d’être, c’est-à-dire se battre pour le titre de champion du monde. C’est un challenge incroyable. Il y a un an, nous étions dans une position très différente de la position que nous occupons aujourd’hui. Comparé à 2020, on est bien meilleur. Ce serait top si on parvenait à se battre à nouveau pour les premières positions dans les prochaines années. Ensuite, ce sera à moi de faire la différence, et de faire le “job” quand on s’affrontera pour le titre, bien que j’essaie de le faire dès maintenant. Même si on se bat pour des positions moins excitantes.

Vous pensez pouvoir viser la victoire « très bientôt » : mais quand exactement ?

« Très bientôt », en F1 ça veut dire davantage en 2022. En 2022, il y aura une belle opportunité, car les voitures changeront complètement. Donc c’est l’occasion pour Ferrari de faire quelque chose de bien. Surtout que cette nouvelle voiture restera pendant quatre ou cinq ans. Du coup, il sera important de réussir les bases de cette nouvelle voiture. En revanche, pour 2021, comme les équipes sont déjà très tournées vers 2022, il n’y aura pas de très grosses améliorations sur la voiture. Je ne m’attends donc pas à des miracles en 2021. Mais on va essayer de maximiser ce qu’on peut faire, avec la voiture qu’on a.

1) Pour limiter les écarts de performances entre Mercedes, Aston Martin Red Bull Racing, Ferrari et les autres écuries de F1, mais aussi pour assurer davantage de spectacle et limiter les dépenses, la fédération internationale de l’automobile (FIA) a décidé d’appliquer une nouvelle réglementation technique à partir de 2022.