vendredi 26 avril 2024
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Une maison d’édition familiale renaît

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La maison d’édition Imperiali Tartaro reprend le cours de son histoire. Le résident monégasque Marc Imperiali a décidé de faire renaître cette aventure familiale commencée au XVIIème siècle. Trois premiers ouvrages seront diffusés aux formats papier et numérique en mars prochain.

Il a fait renaître de ses cendres l’une des plus vieilles maisons d’édition européennes… Celle de sa famille. Génoise d’origine(1). C’est au XVIIème siècle, en 1690, que le Cardinal Giuseppe Renato, un protecteur remarqué des artistes et des penseurs en son temps, commence à imprimer en Italie les œuvres de plusieurs auteurs et savants. « En 1705, il a également créé une académie littéraire et scientifique. Malheureusement, quelques décennies plus tard, l’activité a décliné car les héritiers n’ont pas poursuivi les volontés du fondateur. En 1827, la maison d’édition est rachetée par le banquier Vincenzo Valentini et l’activité s’est complètement éteinte. La maison d’édition est alors rentrée dans un long sommeil », explique l’un des descendants du Cardinal, Marc Imperiali. Plus de trois siècles plus tard, ce résident monégasque, un Belge de 39 ans, a décidé de faire renaître cette ancienne maison d’édition familiale. Un projet qu’il murit depuis déjà 10 ans. « J’avais 29 ans lorsque j’ai eu l’idée de remettre sur pied cette maison d’édition. Mais j’étais encore un peu jeune. J’avais besoin de plus d’expérience, de maturité et du réseau nécessaire. La plupart des personnes qui se lancent ce genre de défi sont des anciens de l’édition. Ce n’est pas vraiment mon cas… » Et pour cause. Marc Imperiali est un expert international de la lutte contre la contrefaçon pharmaceutique.
Des grands groupes pharma’… aux maisons d’éditions, il y a un grand pas, que ce passionné de livres a décidé de franchir.

Monsieur Univers 1959
Une fois les autorisations administratives monégasques obtenues en juin 2012, dès septembre, l’homme se lance de plain-pied dans la course aux diffuseurs et aux distributeurs. « Cela a été pour moi le plus grand défi. Pour les petites maisons d’édition, c’est le nerf de la guerre. » Après avoir conclu un contrat avec le diffuseur français Ced Cedif, le distributeur Daudin, et plus récemment avec Numilog, un diffuseur français de livres numériques, Marc Imperiali consacre désormais 90 % de son temps à cette maison d’édition, basée pour l’heure à son domicile, au Palais de la Scala.
Dès mars prochain, trois ouvrages seront déjà mis en vente. Parmi ses coups de cœur : l’écrivain et auteur de bande-dessinées monégasque Patrice Woolley avec La dame des Brumes (Collection Spaey.) Un roman diffusé à 1 000 exemplaires qui parle d’amour, des relations hommes/femmes… et de la mort. « C’est l’histoire d’un homme plaqué par sa maîtresse, qui décide de tout abandonner par amour et de se donner la mort. Mais à chaque tentative de passage à l’acte, un évènement réel ou imaginaire vient retarder, avec humour et avec raison, l’échéance fatale », explique l’éditeur. Autre personnalité bien connue en principauté, Guy Mierczuk, ex-Mister Univers 1959, qui a signé de sa plume Ma vie de Monsieur Univers, de l’Ukraine à la Principauté de Monaco (Collection Francavilla). « J’ai voulu mettre en lumière cette histoire extrêmement belle d’un homme venant des pays de l’Est arrivant à Monaco et qui a trouvé ici le succès. » Dernier coup de cœur littéraire de l’éditeur : Jean-Claude Perrier, Chevalier des arts et des lettres en 2012, et auteur d’une trentaine d’ouvrages qui livre ici un carnet de voyage illustré baptisé Les Comptoirs de l’Inde (Collection Genua), « avec une écriture extrêmement fluide et limpide », assure encore son éditeur (2).

« Partager les bénéfices »
Au-delà de l’histoire familiale, c’est aussi la philosophie générale de cette maison d’édition qui en fait sa singularité. Les éditions Imperiali Tartato s’engagent en effet à respecter « une charte éthique stricte. » Avec trois engagements clés. D’abord, partager proportionnellement les bénéfices avec les auteurs. « Si on enlève la part du distributeur, du diffuseur et du libraire, il reste entre 25 et 30 % pour l’éditeur. L’objectif est de partager le plus proportionnellement possible ces pourcentages restants avec l’auteur. On est légèrement au-dessus de ce qui se pratique dans les maisons d’édition classiques », explique Marc Imperiali. Autre ambition : reverser un minimum de 5 % du montant de chaque livre vendu, à l’association Imperiali Tartaro. Créée de manière concomitante à la maison d’édition, cette structure a pour objectif, entre autres, d’aider la recherche scientifique en faveur des enfants handicapés. Dernier engagement de l’éditeur : l’eco-responsabilité. En clair, la maison d’édition s’engage à utiliser les énergies alternatives pour promouvoir les livres et les auteurs. Exemples : faire appel à des imprimeurs utilisant du papier écolo, pour les déplacements, privilégier le train plutôt que l’avion… et enfin se lancer dans le pari du livre numérique qui « dans les 10 à 20 ans à venir prendra une place considérable », selon Marc Imperiali.

Révolution numérique
Résolument tournée vers l’avenir, la maison d’édition mise donc aussi sur les « e-readers. » Les trois ouvrages qui sortiront au mois de mars version papier, le seront aussi au format numérique. « Le livre numérique ne signifie pas la mort des libraires, ni des éditeurs. Il suffit de s’avoir s’adapter à temps à cette nouvelle donne. Ce n’est pas une reconversion mais une adaptation aux nouveaux comportements des lecteurs. Beaucoup de libraires aujourd’hui ont déjà anticipé ce mouvement. 90 libraires en France ont déjà intégré le numérique dans leur offre. Même chose pour les cinq plus grands libraires belges. Au Canada, au Québec, à Montréal, en Suisse et au Luxembourg, c’est aussi le cas. »
Côté budget, Marc Imperali, discret sur les sommes investies de sa poche, assure simplement avoir un « capital suffisant » lui permettant de faire vivre la maison d’édition, « même si elle n’a pas de marge bénéficiaire durant plusieurs années. » « Mon objectif est d’avoir au moins une balance à l‘équilibre, de réinvestir sur les auteurs et surtout de faire vivre l’association. Je n’ai pas non plus comme objectif à terme de devenir un des pontes de l’édition. Je veux garder ce côté familial. » Une maison d’édition qui laissera sa chance aussi aux jeunes plumes ou aux plumes méconnues. Alors, graines d’écrivains, n’hésitez pas à envoyer vos manuscrits.

(1) « La famille Imperiali faisait partie des huit plus grandes familles génoises avec les Grimaldi, les Doria ou encore les Spinola », assure Marc Imperiali.
(2) Dans un premier tirage, l’ouvrage de Jean-Claude Perrier sera diffusé à 2000 exemplaires et les ouvrages de Patrice Woolley et Guy Mierczuk à 1 000 exemplaires.