vendredi 26 avril 2024
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Incendies dans des bus électriques « Je ne suis pas inquiet »

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Le 29 avril 2022, la RATP a annoncé que, suite à deux incendies, elle suspendait l’utilisation de 149 bus électriques. Alors que fin mars  2022 (1) Monaco a déployé ses premiers bus 100 % électriques, faut-il s’inquiéter  ? Monaco Hebdo a posé la question à Roland de Rechniewski, directeur d’exploitation de la Compagnie des Autobus de Monaco (CAM).

L e 29 avril 2022, la RATP a indiqué qu’elle procédait au retrait temporaire de ces 149 bus électriques Bolloré Bluebus, soit 30 % de sa flotte électrique. La RATP dispose d’environ 4 700 bus au total. Les autres fournisseurs de la RATP sont Heuliez et, de façon plus anecdotique, Alstom. En cause, un incendie dans l’un des bus de la ligne 71, du côté de la Bibliothèque nationale de France, dans le XIIIème arrondissement. Un autre incendie avait complètement détruit un autre bus 100 % électrique le 4 avril 2022, sur le boulevard Saint-Germain, dans le Vème arrondissement cette fois. Dans les deux cas, aucun blessé n’est à déplorer. Interrogée par l’AFP, Île-de-France Mobilités a immédiatement demandé que la RATP fasse « toute la lumière » sur ces incendies, et que « toutes les mesures de précaution nécessaires » soient prises. De son côté, sur Twitter, l’Association des usagers des transports Île-de-France a estimé que ces deux incendies étaient « préoccupants », avant de demander « des actions correctrices rapides de la part du constructeur, en lien avec la RATP ». La RATP a indiqué à l’AFP avoir demandé « une expertise complète au constructeur Bolloré, afin de donner les explications sur les causes de ces incidents, et proposer un plan d’action pour permettre une remise en exploitation de ces bus en toute sécurité ». Selon des informations publiées par Les Échos le 5 mai 2022, une source au siège de la RATP a indiqué que, pour le premier incendie sur le boulevard Saint-Germain, « l’enquête menée a permis d’identifier l’origine de l’incendie. Un correctif a été mis en place par le constructeur, et déployé sur l’ensemble des bus de cette série ». Quant au deuxième incendie, les causes n’étaient pas connues, alors que Monaco Hebdo bouclait ce numéro, le 10 mai 2022. Mais il semblerait que le correctif en question n’ait pas fonctionné. Mis en service en mai 2021, et vérifié par les services techniques de la RATP le 20 avril 2022, ce bus électrique a pris feu neuf jours plus tard. « La maintenance des batteries n’est pas sous la responsabilité de la RATP. Nous n’intervenons pas sur elles, et elles sont garanties jusqu’à leur remplacement à mi-vie du véhicule, soit sept ans et demi », a souligné la RATP aux Échos, renvoyant ainsi la responsabilité à Bolloré. Questionné par Ouest-France, Bluebus a expliqué que toutes ses équipes « sont mobilisées pour coopérer activement avec la RATP et les organismes compétents, afin notamment de déterminer l’origine du sinistre », alors qu’un porte-parole a précisé que « les premiers incidents de la RATP datent du 4 avril [2022 — NDLR], alors que cela fait six ans et demi que les Bluebus bretons circulent sans problème ».

« Les bus électriques parisiens n’utilisent pas la même technologie que les bus que nous avons ici, à Monaco »

Roland de Rechniewski. Directeur d’exploitation de la Compagnie des Autobus de Monaco (CAM)

« Procédure »

En principauté, la Compagnie des autobus de Monaco (CAM) a commencé à déployer ses bus 100 % électriques le 28 mars 2022. La CAM a décidé de faire confiance à Heuliez et à son bus GX 137 Elec, produit dans les Deux-Sèvres, et équipé d’un moteur électrique de 160 kW. Les batteries sont installées sur le pavillon et dans le compartiment arrière. Informé de ces deux incendies à Paris, le directeur d’exploitation de la CAM, Roland de Rechniewski, a réagi : « Sur les véhicules que nous avons, nous n’avons pas de retours avec des problèmes d’incendies. Le risque zéro n’existe bien sûr pas. Mais le risque zéro n’existe pas, non plus, avec un véhicule classique. Il s’agit d’une nouvelle technologie, il faut que l’on s’y adapte. À nous d’avoir un suivi régulier sur l’entretien et de rester attentifs. C’est ce que nous faisons. Nos bus sont surveillés en permanence, donc je ne suis pas inquiet. » Reste à comprendre pourquoi ces bus 100 % électriques ont pris feu, alors que le 29 avril 2022 un autre bus électrique a brûlé, près d’un pont de la SNCF à Carcassonne (Aude), là encore sans faire de victimes. « Si les batteries ont été endommagées par un choc, elles se mettent en court-circuit. Elles peuvent alors prendre feu et enflammer les autres batteries. Il faut laisser les enquêteurs travailler pour comprendre ce qu’il s’est passé avec les bus électriques de la RATP », glisse Roland de Rechniewski.

« Il s’agit d’une nouvelle technologie, il faut que l’on s’y adapte. À nous d’avoir un suivi régulier sur l’entretien et de rester attentifs. C’est ce que nous faisons. Nos bus sont surveillés en permanence »

Roland de Rechniewski. Directeur d’exploitation de la Compagnie des Autobus de Monaco (CAM)

En tout cas, les bus 100 % électriques de la CAM ne sont pas des Bolloré Bluebus, ce qui contribue à tranquilliser le directeur d’exploitation de ce réseau de transport : « Les bus électriques parisiens n’utilisent pas la même technologie que les bus que nous avons ici, à Monaco. À Paris, les bus électriques fonctionnent avec des batteries chaudes, avec une chimie qui nécessite que la batterie soit toujours maintenue autour de 65 °C. Du coup, l’élévation de température pour atteindre le seuil où tout s’emballe est beaucoup plus faible que sur des batteries classiques, comme celles que nous avons en principauté. » Les bus électriques Heuliez ne fonctionnent pas comme les Bolloré Bluebus, qui sont fabriqués à Ergué-Gabéric (Finistère), près de Quimper, comme l’explique Roland de Rechniewski : « Nos batteries ne dépassent généralement pas 50 °C. Quand on atteint 50 °C, on commence progressivement à couper le courant des cellules. Et à partir de 65 °C, le parc de batterie est isolé, pour le laisser redescendre en température. C’est une procédure qui est très bien documentée chez notre fournisseur. Il faut savoir qu’un emballement thermique de batterie, c’est au-delà de 185 °C. Il y a donc une marge énorme. Nous faisons un gros travail autour de ces questions avec les services de l’État, et plus particulièrement avec les pompiers de Monaco, qui sont très attentifs. »

1) À ce sujet, lire notre article Les premiers bus 100 % électriques mis progressivement en service.