jeudi 28 mars 2024
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Il “touchait” ses employées?: deux ans avec sursis

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Tribunal
© Photo Monaco Hebdo.

Le patron d’un salon de coiffure-esthétique à Monaco a été condamné, la semaine dernière, à deux ans de prison avec sursis pour atteinte à la pudeur sur trois de ses employées.

Après huit ans de procédure, l’affaire est passée, la semaine dernière, devant le tribunal criminel. Un employeur comparaissait pour atteinte à la pudeur envers cinq de ses anciennes employées. Seules trois d’entre elles avaient poursuivi leur action jusqu’au bout. L’homme, qui possède un salon de coiffure-esthétique à Monaco, avait été condamné en 2003 en correctionnelle à 18 mois de prison avec sursis et une amende. Il avait fait appel, s’était pourvu en révision, avant d’être renvoyé devant le tribunal criminel. Durant deux jours d’audience, les ex-employées, exclusivement des esthéticiennes, ont évoqué « l’enfer » vécu aux côtés de leur ancien patron. Les faits s’étendent de 1996 à 2003. L’homme, un franco-libanais d’une soixantaine d’années, est présent à Monaco depuis plus de vingt ans. « Il attendait qu’il n’y ait plus de clients dans le salon », a précisé une employée. « Quand je répondais au téléphone, il se mettait derrière moi. Il me touchait les seins, me caressait les hanches et les fesses. Quand j’étais à la caisse, il venait se frotter contre moi », a-t-elle raconté. Une autre a dénoncé le voyeurisme de son ex-patron. « Nous devions mettre du papier dans les serrures car il nous regardait nous changer et nous mettre en blouse ». Les trois anciennes esthéticiennes évoquent aussi des massages imposés « deux à trois fois par semaine » dans les cabines du salon. Leur ancien employeur, nu et « le sexe en érection », laissait « balader ses mains » sur leurs cuisses et les « forçait à lui masser l’entrejambe », mais elles résistaient. L’homme était allé jusqu’à lécher l’aisselle d’une de ses salariées et avait tenté d’en embrasser une autre en 2005, non sans l’avoir isolé. Aussi leur proposait-il ouvertement « des nuits » à l’Hôtel de Paris. Elles n’ont rien dit par peur de perdre leurs emplois.

Les témoignages d’anciens coiffeurs se sont succédé. Ils n’avaient rien vu mais entendu « des bruits ». Et aussi des propos « crus » et « salaces » tenus à longueur de journée par leur ancien patron à l’égard des esthéticiennes, tels que « je te boufferai le c… jusqu’à la m…?». D’autres indiquaient avoir entretenu « des relations cordiales » avec le prévenu ou encore que les ex-employées « jouaient » avec lui. Le patron du salon de coiffure et d’esthétique, s’exprimant dans un français difficilement compréhensible, a nié les faits en bloc. « Ce ne sont que des mensonges. Il y a un complot contre moi. Si j’avais fait ça, elles pouvaient se défendre », a-t-il déclaré. Ce « complot » aurait été fomenté par un ex-coiffeur du salon, qui aurait mal pris une remarque sur son homosexualité et qui aurait par la suite couché avec l’« amie » du patron dans le but de récupérer la gestion du salon. Cette « amie » avait acheté le commerce pour le prévenu.

« Faits précis, actes graves »

Les parties civiles étaient représentées par Me Lorenzi-Martarello, Me Ballerio et Me Lecuyer. « C’est un comportement inadmissible, il a réduit ces femmes à des objets. Il a porté atteinte à leur dignité », a martelé Me Lorenzi-Martarello. Me Ballerio a lui évoqué « la cabine de toutes les sévices, de toutes les peurs ». « Le prévenu ose se poser en victime avec une théorie du complot évolutive. Les faits sont précis et les actes graves », a-t-il martelé. Quant à Me Lecuyer, il a mis en exergue « le mode opératoire machiavélique » de l’ex-patron. « Il a choisi cette profession pour satisfaire ses pulsions le plus quotidiennement possible », a-t-il conclu. Au total, 50?000 euros de dommages et intérêts ont été demandés.

Le procureur Jean-Jacques Ignacio a requis quant à lui deux ans de prison assorties ou non du sursis. « Nous sommes en présence d’attentats à la pudeur commis avec violence. On est pas dans la tentative de viol mais dans le quotidien lourd et sale. Les accusations portées sont parfaitement confortées. Le prévenu est coupable », s’est exclamé le ministère public. « Mon client est présenté comme un avatar à mi-chemin entre le marquis de Sade et la Barbe Bleue. La gravité des faits a été exagérée voir pipeautée. Le nombre de plaintes ne fait pas le bien-fondé de la vérité », a plaidé Me Licari, l’avocat du prévenu, en demandant la relaxe. Le patron du salon de coiffure et d’esthétique a finalement écopé de deux ans de prison avec sursis et d’une somme totale de 29?000 euros de dommages et intérêts.