vendredi 26 avril 2024
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Révolutionnaire Pina Bausch

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Sacre du printemps de Pina Bausch
L'interprétation de Pina Bausch du Sacre du printemps est devenu un monument de l'art chorégraphique. © Photo Zerrin Aydin Herwegh.

Du 17 au 19 décembre, la compagnie Tanztheater Wuppertal a subjugué le public monégasque avec Café Müller et Le Sacre du Printemps de la célèbre chorégraphe et danseuse allemande Pina Bausch, décédée en 2009.

Par Noémie Montalbano.

Pour Jean-Christophe Maillot, il n’y a pas de doute?: Pina Bausch a marqué l’histoire de la danse contemporaine. Par son talent mais aussi son énergie. « Je ne connais pas les différences mais je connais la principale similitude entre elle et moi?: la passion, l’amour de ce que l’on fait », déclare le directeur artistique des Ballets de Monte-Carlo. A Monaco, cela faisait 30 ans que les passionnés attendaient de voir les chorégraphies de Pina Bausch, de son vrai prénom Philippine, décédée en 2009. « Le public était vierge, mais tellement excité et impatient de voir ses productions, précise Jean-Christophe Maillot. Il y a même des gens de Paris qui sont descendus pour le spectacle. » En effet, « Pina Bausch sélectionnait minutieusement les lieux de représentation, explique Dominique Mercy, danseur dans la troupe de Pina. Et « elle n’avait jamais arrêté son choix sur Monaco. »

Ainsi, le spectacle regroupait « deux évènements et non des moindres », selon le directeur artistique. Café Müller, une des œuvres fondamentales de Pina Bausch, nous plonge directement au cœur de l’enfance de la chorégraphe. Ses parents tenaient un bar hôtel à Solingen en Allemagne, et Pina, sous les tables du café, regardait défiler les adultes en prise avec les émotions et les inquiétudes de leur époque. Café Müller est également une œuvre emblématique du mouvement Tanztheater dont Pina fut une figure majeure. Le second spectacle proposé au Grimaldi forum, le Sacre du printemps, a représenté un défi pour la chorégraphe. Son interprétation est devenu un monument de l’art chorégraphique. Son Sacre du printemps se déroule sur une scène recouverte de terre, qui accentue la puissance du moindre mouvement, où les danseurs évoluent et s’opposent jusqu’à épuisement dans une lutte violente.

« Elle était différente des autres »

En parallèle, le public pouvait découvrir une exposition de dessins, esquisses et décors du scénographe Rolf Borzik, grand ami et complice de Pina, avec qui elle a travaillé pendant près de 7 ans. Malou Airaudo, ancienne danseuse du Tanztheater et chorégraphe, précise qu’ensemble, « Pina et Rolf créaient de l’art, le vrai. Ils cherchaient la même chose, marchaient sur la même route. » Mais aussi les photographies de Walter Vogel, qui a réussi à révéler la beauté de Pina. Quand l’heure est à la confidence, le photographe allemand raconte qu’il la connaît depuis les bancs de l’école?: « Elle était différente des autres, c’est ce qui m’a attiré. Ma toute première photo d’elle date de l’école quand elle-même se donnait en spectacle. Quand je l’ai vu, j’ai décollé de mon siège, et je suis tombée amoureux?! »

Sans oublier que, comme le rappelle Jean-Christophe Maillot, Pina Bausch était une chorégraphe révolutionnaire qui a décidé un jour « de créer une sorte de rupture dans son travail, en essayant d’oublier la danse pour mieux la retrouver et pour explorer une dimension plus théâtrale. Elle prenait tout ce qu’il y avait à sa disposition, le digérait et parfois même improvisait. » Elle était aussi l’une des premières « à solliciter le danseur lui-même ». Des danseurs qu’elle aimait par-dessus tout, et avec lesquels elle entretenait une sorte de relation amoureuse. D’ailleurs, « Pina ne manquait que très rarement une représentation, mais, quand elle n’était pas là, c’était très dur pour la troupe », confie Malou Airaudo. Rendre hommage à cette chorégraphe est une bien belle manière de clôturer le centenaire des Ballets Russes, qui a regroupé près de 70 spectacles, « certains appréciés, d’autres décriés », comme le reconnaît Jean-Christophe Maillot. Un Maillot qui n’exclut pas que le Tanztheater Wuppertal puisse revenir un jour à Monaco avec d’autres œuvres de Pina Bausch.

Pina Bausch en quelques dates
1940 : naissance à Soligen en Rhénanie-du-Nord-Westphalie
1958 : Pina obtient son diplôme de la Folkkwang Hochschule avec mention et obtient une bourse pour partir étudier à la prestigieuse Juilliard School of Music à New York
1961 : elle est embauchée par le Metropolitan Opera de New York et rejoint le New American Ballet
1973 : le directeur du théâtre de Wuppertal la nomme directrice du Wuppertal Ballet qu’elle rebaptise Tanztheater Wuppertal.
1975 : sa chorégraphie pour Le sacre du printemps d’Igor Stravinsky marque les esprits.
1995 : Pina Bausch reçoit le prix allemand de la Danse
2003 : elle est faite Chevalier de la Légion d’Honneur.
2004 : elle reçoit le prix Nijinski décerné par le Monaco Dance Forum.
2009 : Pina Bausch décède, cinq jours après avoir appris qu’elle souffrait d’un cancer généralisé.
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