vendredi 19 avril 2024
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Romain Cannone : « Je n’étais pas une surprise complète »

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Premier médaillé d’or français aux Jeux Olympiques à l’escrime et en individuel depuis 2004, Romain Cannone a souvent été présenté comme la surprise de Tokyo 2020 à l’issue de cette compétition. Pourtant, ce jeune athlète rappelle qu’il n’a pas atteint le haut niveau par hasard. Il se confie à Monaco Hebdo, à l’occasion de son passage aux Sportel Awards.

Maintenant que vous êtes champion olympique, vous devez confirmer votre niveau ?

C’est ça. On est reparti à l’entraînement pour continuer à s’améliorer. Je suis arrivé dix minutes avant cette interview, car j’étais à l’entraînement tout à l’heure, et je repars demain [cette interview a été réalisée le mardi 5 octobre 2021 — NDLR] pour continuer la préparation de Paris 2024 et la saison à venir. Du coup, l’objectif, c’est de continuer à progresser, et de faire en sorte qu’il n’y ait pas de surprises pour 2024.

C’est une pression, que de devoir vous maintenir si haut ?

Non, je ne dirais pas que c’est une pression, mais plutôt un nouveau rythme. Notamment d’être ici, par exemple. Je ne suis pas très habitué. Ce sont des choses qui s’ajoutent, mais je n’ai pas la pression de la compétition, peut-être parce qu’elle n’a pas encore repris. Mais je sens que j’ai fait le travail, et je continue le travail. C’est ce qui me permet de garder les pieds sur terre.

Vous n’en avez pas marre d’être toujours présenté comme la surprise des derniers Jeux Olympiques (JO) ?

C’est vrai que j’ai créé la surprise. Mais il ne faut pas oublier que ceux qui sont qualifiés aux JO figurent souvent parmi les meilleurs. Et, la différence, c’est de « performer » le jour J, ce qui est très dur à faire. Mais je n’étais pas une surprise complète. J’avais déjà un certain niveau, surtout en France. Et quand on est qualifié en France, ça montre que l’on a un certain niveau sur le plan mondial. Alors, bon, être présenté comme une surprise, je le prends gentiment. Mais je connaissais mon niveau pour « performer ».

Vous avez découvert l’escrime aux États-Unis, à 9 ans : la culture américaine vous a façonné ?

Je pense que oui. Dans la culture américaine, il y a l’idée de ne rien lâcher, de ne pas regarder les autres. Certains avaient de sacrés palmarès, mais, comme je le disais, il faut « performer » le jour J, et tout devient alors possible. J’ai vraiment cette mentalité qui consiste à ne rien lâcher, à retourner au travail, car c’est ce qui fait la différence. Alors, en France je pense qu’il y a la même façon de penser. Je pense qu’il y a une mentalité universelle, propre à ceux qui veulent devenir de bons sportifs. Mais c’est vrai que cette mentalité-là [à l’américaine — NDLR] est bien ancrée en moi.

Votre vie a changé depuis les JO ?

Oui, totalement. Je suis présent sur beaucoup plus d’événements, je fais aussi de la promotion pour les JO de 2024, car il ne faut pas que l’engouement descende trop. Ça va quand même être à la maison, et ce sera des Jeux extraordinaires, des Jeux pas comme les autres, dans la manière dont ils sont organisés. C’est quelque chose qu’il faut continuer à promouvoir, pour garder l’anticipation pour les fans, et même pour la France. Pour le reste, je reprends les études, comme tout le monde [Romain Cannone suit un master 2 Auditing, management accounting & information systems à la SKEMA business school de Suresnes — NDLR]. J’ai fait ma rentrée de classe, je finis mon mémoire, et je recommence l’entraînement, comme tout le monde aussi.

« Pourquoi pas revenir au club de Monaco pour partager mon expérience ? Et pourquoi pas “tirer” s’ils le souhaitent ? »

Avez-vous été approché par la fédération monégasque d’escrime, pour des projets futurs, peut-être ?

On m’a contacté pour passer au club, pour rencontrer le maître d’arme et les tireurs, les escrimeurs. Malheureusement, je dois prendre le premier avion après les Sportel Awards pour reprendre l’entraînement. Mais je vais essayer d’y retourner dans les mois prochains. Car, tous les mardis, une fois par mois, on essaie de promouvoir l’escrime d’une certaine façon, avec la Fédération française d’escrime (FFE). Alors, pourquoi pas revenir au club de Monaco pour partager mon expérience ? Et pourquoi pas « tirer », s’ils le souhaitent ?

Pour inspirer de nouvelles vocations ?

C’est ça. Je n’ai pas eu la chance de rencontrer un champion quand j’étais jeune escrimeur. Mais je pense que c’est important, surtout quand on est jeune, de comprendre le mode de fonctionnement d’un sportif de haut niveau. On s’imagine mal quel type d’être humain il est. Ce n’est pas un extraterrestre, ça reste une personne comme les autres. Quand j’étais plus jeune, je m’étais toujours imaginé que les champions olympiques étaient justement des extraterrestres, car je ne les avais jamais rencontrés. Je pense que partager un peu l’expérience, c’est comme une conférence en business : ça reste de l’expérience à acquérir.

Quels sportifs vous ont inspiré ?

En escrime, ce serait Fabrice Jeannet, ou le Coréen Heo Jun. Ce sont deux escrimeurs qui, pour moi, sont un peu le Graal dans l’escrime. J’aime beaucoup aussi Martin Fourcade [biathlète français, quintuple champion olympique — NDLR], car c’est quelqu’un de très naturel, notamment dans ses interviews. Ce que j’aime beaucoup chez lui, c’est qu’il m’a fait aimer son sport, que je ne connaissais pas. Et je pense que c’est la qualité d’un grand sportif : être quelqu’un qui te fait aimer son sport et qui te donne envie de l’essayer. En plus, sa discipline demande énormément d’efforts, c’est très complet. Je l’avais même essayée pour un stage, et j’avais adoré.

Vidéo : notre interview du champion olympique Romain Cannone au Sportel 2021

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