vendredi 29 mars 2024
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Collège, lycée : les élèves sont-ils débordés ?

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Journées de classe trop longues, emplois du temps surchargés ou trop d’options proposées… Parents et élèves se plaignent de rythmes scolaires trop soutenus au collège et au lycée. A qui la faute ? A l’Education nationale… ou aux parents eux-mêmes ?

Quasiment 100 % de réussite chaque année au bac. L’argument est brandi fièrement chaque année par l’Education nationale pour attester « de l’excellence » de l’enseignement scolaire. Difficile, en effet, de faire un procès au système scolaire monégasque qui marche à plein régime… Pour autant, derrière ce tableau idyllique, de nombreux parents et élèves du secondaire — collège et lycée — expriment quelques doléances. Pêle-mêle : plannings scolaires surchargés, voire mal organisés, journées de cours qui se finissent très tardivement, pléthore d’options proposées aux élèves… Le tout agrémenté par des devoirs imposés à la maison, souvent effectués « après le dîner, faute de temps avant », dixit les élèves… « Ce rythme très soutenu engendre stress, fatigue et manque de temps libre pour effectuer des activités extrascolaires, pourtant indispensables à l’épanouissement des enfants, regrette cette mère de famille d’un élève de seconde. J’ai le sentiment que mon ado a un rythme de vie plus soutenu qu’un adulte qui travaille, alors qu’il n’a que 15 ans. »

« Emplois du temps incohérents »
Entre des cours qui se finissent parfois à 18h (avec dans une même journée, des grosses coupures) des activités périscolaires et des devoirs s’ajoutant le soir… Sommes-nous en train de presser les élèves du secondaire comme des citrons ? Pour ce père de famille, le « point noir » de l’Education nationale monégasque sont les « incohérences importantes » dans les emplois du temps, au collège et au lycée. Exemple ? Entrée des élèves à 12h et sortie à 18h, sans cours le matin ; cumuler 3 heures de permanence pour ensuite finir à 17h ou à 18h, avec seulement un cours dans la demi-journée. Sans oublier les grosses disparités des horaires entre groupes différents d’une même classe… « Les exemples de ce type foisonnent, regrette-t-il. Ces heures perdues en permanence ainsi que les horaires décalés, de même que le temps gâché entre les allers-retours école-maison, rallongent considérablement le temps passé dans l’enceinte de l’établissement. Ces heures étant malheureusement très mal mises à profit par la plupart des enfants pour s’avancer dans leur travail. Car ce ne sont pas des universitaires. Toutes ces heures «perdues» devront ainsi être rattrapées plus tard en soirée et le week-end, notamment pour les enfants qui ont moins de facilités que d’autres à apprendre. »
« Gestion problématique des options »
Les emplois du temps sont-ils devenus pour l’administration scolaire « un véritable casse-tête » à gérer, selon la formule d’Ingrid de Bruyn présidente de l’association des parents d’élèves de Monaco (APEM) ? Il faut dire qu’en plus des enseignements classiques, l’éducation nationale doit parvenir à caser une foultitude d’options (théâtre, langue monégasque, religion, latin…). Une équation très complexe à résoudre car il faut tenir compte des disponibilités des professeurs mais aussi répondre aux volontés d’un nombre pléthorique d’élèves. Ce qui interroge ce père de famille : « Sommes-nous arrivés à totale saturation des établissements en termes d’effectifs (12 ou 13 classes par niveau) ? Faut-il prévoir l’embauche de personnel enseignant ? La gestion des très nombreuses options est-elle problématique ? »

Plus d’heures à Monaco qu’en France
Sollicitée par Monaco Hebdo, l’éducation nationale nous a transmis des réponses écrites sur le sujet. Le gouvernement reconnaît que dans le secondaire, en plus du volume horaire prévu par discipline par les programmes français, « Monaco propose des heures supplémentaires en français et en mathématiques. » Objectif : « permettre aux élèves du collège de progresser dans leur scolarité avec des compétences assurées dans ces deux disciplines. » Autre constat : contrairement aux élèves du primaire, les emplois du temps des collégiens et lycéens peuvent connaître de fortes variations en fonction des filières et des options choisies. Sans oublier les éventuelles heures de soutien. Ainsi, à titre d’exemple, l’emploi du temps d’un élève de Seconde peut varier de 30,5 à 37,5 heures, voire… 40,5 heures (!) si l’on intègre l’option internationale, l’enseignement du monégasque et une option facultative. Concernant les classes de Première en enseignement général, le volume horaire hebdomadaire peut fluctuer de 31 à 38 heures. L’amplitude est encore plus accentuée pour les classes de Terminale, dont les emplois du temps varient, en fonction des choix effectués par les élèves, de 27h à 35h. Pour ce qui est du collège, même grosse disparité. L’horaire hebdomadaire d’un élève de 6ème peut ainsi varier de 24h à 31h.

La faute aux parents ?
L’éducation nationale dit faire au mieux pour gérer ces emplois du temps et éviter ces « trous. » Tout en notant toutefois que les fameuses options sont souvent très demandées — voire imposées — par les parents eux-mêmes. Bref, le message sous-jacent est clair. A eux aussi de ne pas « charger la mule » de leur propre enfant… Pour alléger les rythmes scolaires, chacun y va de sa petite proposition. Certains préconisent par exemple une réduction des vacances d’été au profit d’un allègement des journées de travail durant l’année scolaire. « Deux mois de vacances, c’est beaucoup trop long. Cette période d’inactivité et de déconnexion est d’ailleurs dommageable car l’élève risque d’oublier tout ou partie du programme scolaire de l’année précédente », indique une enseignante. Alors que d’autres proposent de tester des journées « à l’allemande ». Avec des enseignements concentrés sur la matinée et du sport et autres activités durant l’après-midi. Les parents soulignant que les élèves n’y sont pas plus « bêtes » qu’ailleurs…
Pour la petite histoire, sachez qu’en France, le volume horaire annuel des élèves est considéré comme l’un des plus important, des pays de l’OCDE… A ce niveau-là, Monaco se situe donc encore au-dessus. Le prix à payer, sans doute, pour atteindre la fameuse « excellence ? »…

Et le primaire dans tout ça ?

Tous les élèves du primaire ont 27 heures d’enseignement par semaine. Le tout réparti sur 9 demi-journées (lundi, mardi, mercredi matin, jeudi et vendredi). « La Principauté applique depuis plusieurs années la journée de 6 heures. 3 heures par demi-journée. La journée de classe débute à 8h30 et s’interrompt à 11h30 pour la pause déjeuner. La reprise des cours s’effectue à 13h30 jusqu’à 16h30, explique le gouvernement. Ce volume horaire journalier s’explique par le fait qu’en principauté, sont intégrés aux emplois du temps hebdomadaires, des cours d’anglais, de langue monégasque, mais également d’instruction religieuse, qui complètent l’horaire de classe hebdomadaire. »

« Collégiens et lycéens se plaignent de journées très remplies »

3 questions à Ingrid De Bruyn, présidente de l’association des parents d’élèves de Monaco (APEM).

Monaco Hebdo : Les emplois du temps des élèves scolarisés en principauté sont-ils globalement plus chargés que ceux des élèves français ?
Ingrid de Bruyn : Les emplois du temps semblent plus chargés car il y a en effet des matières enseignées en principauté qui ne le sont pas en France. Dans les deux cas, des parents nous disent que les enfants ont de longues journées. De nombreux pays voisins pratiquent des journées de travail plus courtes. Il semblerait que cette problématique concerne en tout cas plutôt le collège et le lycée.

M.H. : Certains parents déplorent des grosses coupures dans les emplois du temps, de longues heures de permanence et des cours qui se finissent, du coup très tardivement, vers 18h… Les plannings des élèves sont-ils selon vous suffisamment bien organisés ?
I.D.B : L’organisation des plannings au collège et au lycée semble un casse-tête pour les établissements car on trouve parfois des plages horaires de permanence au milieu des demi-journées ce qui entraîne en effet une fin de cours tardive. Je suis convaincue que les chefs d’établissements font de leur mieux pour éviter cet inconvénient mais ce n’est certainement pas toujours évident.

M.H. : N’y a-t-il pas un trop-plein d’options ? Ce qui rend forcément difficile l’organisation des emplois du temps pour l’administration scolaire ?
I.D.B : Pour ce qui concerne les options, il faut savoir que ce sont souvent les parents qui sont en demande, et cela rend effectivement difficile l’organisation des plannings. Les collégiens et lycéens se plaignent de journées très remplies mais il semble difficile de faire autrement. D’autant plus lorsqu’ils optent pour plusieurs options. Les résultats aux examens en Principauté sont toujours excellents ce qui démontre donc une qualité de l’enseignement indiscutable. Les rythmes scolaires évolueront probablement dans le temps et là encore nous aurons à débattre.