jeudi 25 avril 2024
AccueilActualitésSantéLes tests salivaires plus efficaces face à Omicron ?

Les tests salivaires plus efficaces face à Omicron ?

Publié le

Alors que la vague Omicron n’en finit plus de déferler sur Monaco, une étude préliminaire démontre que le test salivaire serait fiable à 100 % pour détecter ce variant, contre 86 % pour un test nasal. Face à ces chiffres, le gouvernement monégasque se dit « attentif ».

Cette fois, c’est l’inverse. Alors qu’on pensait que les tests PCR présentaient la meilleure fiabilité possible, une étude préliminaire publiée par une équipe de Cape Town  (1) vient mettre à mal cette certitude. Ce qui était vrai avec le variant Delta, ne l’est plus forcément avec Omicron, qui se comporte différemment des variants précédents. Face à Delta, le test nasopharyngé serait fiable à 100 %, contre 71 % pour un test salivaire. Mais pour le variant Omicron, c’est l’inverse : le test salivaire serait fiable à 100 %, contre 86 % pour un test nasal. « Un deuxième article, publié par une équipe de New-York (2), compare en milieu professionnel la performance d’un test antigénique avec prélèvement nasal, équivalent à un autotest, et d’une PCR réalisée sur prélèvement salivaire sur des personnes asymptomatiques. Cette étude montre que pendant deux jours, et malgré des charges virales parfois très élevées, le test antigénique nasal ne se déclenche pas toujours, alors que la personne est contagieuse », indiquent d’une voix le département des affaires sociales et de la santé du gouvernement monégasque, la direction de l’action sanitaire (DASA), et la responsable du centre de dépistage, Julie Malherbes. Face à ces premières conclusions, le gouvernement monégasque se dit « attentif » et indique qu’il « regardera les avis des sociétés savantes à venir ».

Face au variant Delta, le test nasopharyngé serait fiable à 100 %, contre 71 % pour un test salivaire. Mais pour Omicron, c’est l’inverse : le test salivaire serait fiable à 100 %, contre 86 % pour un test nasal

Tests RT-PCR

En France, un avis publié le 22 janvier 2021 par la Haute Autorité de santé (HAS), qui est une autorité indépendante, a ouvert la voie aux tests de dépistage du Covid-19 à partir de prélèvements salivaires. La HAS a alors estimé que la sensibilité des détections par RT-PCR sur salive était satisfaisante. Pour le grand public, un espoir est né. En effet, tout le monde a alors vu dans cette ouverture un moyen d’être testé de manière moins invasive qu’avec un test PCR classique. Dans la foulée, un objectif a pris forme : un test Covid-19 serait considéré comme positif, à partir du moment où l’on constate un retour positif sur une analyse réalisée par RT-PCR, qu’elle soit basée sur un prélèvement nasopharyngé ou salivaire. Dans la foulée, la HAS devait publier un autre avis, qui devait notamment dresser la liste des exigences techniques pour la réalisation de ces tests salivaires. Car il restait encore à clarifier un certain nombre de points : à qui doivent s’adresser ce type de tests, quel matériel utiliser, mais aussi comment prendre en charge l’énorme quantité d’échantillons recueillis ? En février 2021, une nouvelle étude de la HAS a été publiée. Elle traitait, cette fois, de la fiabilité des tests RT-PCR par prélèvements nasopharyngés, comparés à ceux obtenus à l’aide de prélèvement salivaire. Résultat, la sensibilité des tests RT-PCR nasopharyngés a été de 92 %, en moyenne, même si un prélèvement mal réalisé peut aboutir à de « faux négatifs ». En ce qui concerne les tests RT-PCR sur prélèvements salivaires, la HAS explique qu’ils « induisent une perte de sensibilité limitée (mais significative d’un point de vue statistique) de 3 à 13 %, par rapport aux RT-PCR nasopharyngés. » Cette « perte de sensibilité » a toutefois été jugée comme étant « acceptable et conforme aux exigences de performance clinique établies » par la HAS. À partir de ces chiffres, cette instance a estimé qu’il fallait continuer à utiliser des tests PCR nasopharyngés pour le grand public, tout en conseillant l’utilisation de tests salivaires dans les écoles et dans les universités. Mais un autre problème s’est rapidement posé avec l’utilisation de tests salivaires à très grande échelle. Et ce frein est logistique, comme le soutiennent Lulla Opatowski, professeure en modélisation des maladies infectieuses à l’université de Versailles, et Laura Temime, professeure au conservatoire national des arts et métiers, dans un article publié en mars 2021 sur le site Internet The Conversation (3) : « Ces tests nécessitent le recours à du personnel de laboratoire formé, ainsi qu’à du matériel spécifique. »

test salivaires covid-19 adulte
© Photo DR

Pour les tests RT-PCR sur prélèvements salivaires, la HAS explique qu’ils « induisent une perte de sensibilité limitée (mais significative d’un point de vue statistique) de 3 à 13 %, par rapport aux RT-PCR nasopharyngés. » Cette « perte de sensibilité » a toutefois été jugée comme étant « acceptable et conforme aux exigences de performance clinique établies » par la HAS

Écoles

À Monaco, les tests salivaires sont utilisés depuis plus d’un an dans les écoles. Au départ, les échantillons collectés étaient envoyés en France pour y être analysés. Désormais, Monaco est devenu autonome. Le centre de dépistage de la principauté et le centre scientifique de Monaco (CSM) réalisent les tests PCR salivaires pour les écoles monégasques. Ce type de test est réservé aux enfants du niveau primaire et collège « pour des raisons de meilleure tolérance et de confort », expliquent les autorités monégasques. « Il y a deux techniques possibles pour la réalisation de ces tests salivaires, détaille la responsable du centre de dépistage, Julie Malherbes. Soit l’enfant est capable de cracher, et il crache directement dans un pot de recueil. Ensuite, l’infirmier transvase à la pipette le nombre adéquat de gouttes de salive dans le tube de prélèvement qui sera mis en analyse. Soit l’enfant n’arrive pas à cracher, et on lui place alors dans l’intérieur de la joue une sorte de petite éponge qui va se gonfler de salive. L’éponge est ensuite placée dans une grosse seringue et « pressée » pour mettre le nombre de gouttes de salive adéquat dans le tube qui sera ensuite mis en analyse. » En ce qui concerne les stocks de tests salivaires, pas d’inquiétude à avoir, assure le gouvernement monégasque. Monaco a gagné en autonomie sur ce sujet, depuis que le CSM est capable de prendre en charge ces tests salivaires. « Afin d’être compatible avec l’appareil d’analyse, le centre de dépistage utilise des tubes spécialement préparés par le CSM manuellement, et régulièrement livrés par leurs techniciens. Tant que les tests salivaires ne concernent que les jeunes enfants, les quantités restent limitées. Actuellement, entre 30 tests, et jusqu’à 80 tests salivaires, sont réalisés par jour. Le centre dispose d’un stock suffisant d’avance », assure le département des affaires sociales et de la santé.

À Monaco, les tests salivaires sont utilisés depuis plus d’un an dans les écoles. Au départ, les échantillons collectés étaient envoyés en France pour y être analysés. Désormais, Monaco est devenu autonome

Garanties

Face à cette cinquième vague de Covid-19, les scientifiques ne désarment pas, et de nouvelles informations sont assez régulièrement publiées sur Omicron. Selon une étude réalisée au Japon (4) et rendue publique le 5 janvier 2022, une personne contaminée avec Omicron serait plus contagieuse entre le troisième et le sixième jour après l’apparition des symptômes. Quant aux asymptomatiques, ils ne seraient plus contagieux après cinq jours. Mais ce n’est pas tout. D’après les données préliminaires des autorités sanitaires américaines, les tests antigéniques, cette fois, seraient moins sensibles au variant Omicron qu’aux variants précédents. Ce qui provoque la crainte de voir le nombre de « faux négatifs » se multiplier davantage avec Omicron qu’avec ses prédécesseurs. La durée d’incubation d’Omicron change aussi la donne. En général, depuis le début de la pandémie de Covid-19, en mars 2020, on estimait entre 5 et 7 jours le temps qui s’écoulait avant d’être malade. Avec Omicron, ce temps peut se réduire à seulement deux ou trois jours. Il arrive donc que même un test PCR soit négatif au tout début des symptômes, alors qu’un test antigénique peut nécessiter plusieurs jours avant de se révéler positif. Du coup, la question se pose : faut-il désormais déconseiller l’utilisation de tests antigéniques pour détecter Omicron, voire les abandonner ? Pas forcément, répond le département des affaires sociales et de la santé de la principauté : « Les rares tests antigéniques qui fonctionnent intrinsèquement moins bien avec Omicron ont été retirés du marché européen. Les charges virales observées avec Omicron expliquent que la sensibilité des tests antigéniques se soit améliorée, avec une meilleure concordance avec la PCR naso-pharyngée. » Pour les autorités monégasques, le test PCR reste invariablement celui qui offre le plus de garanties, et ce, malgré la multiplication des variants : « Aujourd’hui, le test de référence demeure le test PCR. La principauté s’adapte régulièrement, en fonction des données scientifiques, pour ajuster, si nécessaire, ses techniques de test. Sachant que la politique en ce domaine demeure de tester largement, pour empêcher le développement des chaînes de contamination. » À moins que de nouvelles études ne viennent encore une fois changer la stratégie de dépistage.

Covid-19 : Quels sont les tests remboursés à Monaco ?

Tests RT-PCR : quel que soit le mode de prélèvement réalisé (nasopharyngé, oro-pharyngé, salivaire) : ces tests sont intégralement pris en charge par le régime de sécurité sociale du patient, à condition de présenter une prescription médicale.

Tests antigéniques : ces tests sont pris en charge par le régime de sécurité sociale, avec application du ticket modérateur s’il y a lieu, et sans prescription médicale.

Les tests réalisés au centre de dépistage situé à l’auditorium Rainier III sont gratuits pour les personnes affiliées à un régime de sécurité sociale monégasque (caisses sociales de Monaco et service des prestations médicales de l’Etat).

Tests salivaires rapides : « Des performances trop hétérogènes », estime la HAS

En France, en janvier 2021, la Haute autorité de santé (HAS) s’est prononcée sur EasyCOV, un autre type de test salivaire, qui utilise la RT-LAMP au lieu de la RT-PCR. Ce type de test fonctionne avec une analyse moléculaire rapide, sans passage en laboratoire, contrairement au RT-PCR. Créé par le laboratoire Sysdiag, et commercialisé par Skillcell, ce test qui permet d’obtenir un résultat en 40 minutes, présentait des incertitudes concernant sa sensibilité, avait estimé la HAS en novembre 2021. Du coup, en cas de test EasyCOV positif, il fallait faire un test PCR pour confirmer cette positivité. « En l’attente de données complémentaires prochaines sur ses performances chez les personnes asymptomatiques, l’indication recommandée du test EasyCov est inchangée : utilisation chez les patients symptomatiques, pour lesquels le prélèvement nasopharyngé est difficile, voire impossible », avait alors conseillé la HAS. Puis, dans un avis rendu en juillet 2021, la HAS a publié de nouvelles données de performances, obtenues à partir de quatre tests : Genelyzer FII distribué par Canon Medical, ID NOW distribué par Abbott Diagnostics, EasyCov distribué par Skillcell, et OptiGene distribué par l’entreprise du même nom. Ces tests ont obtenu des résultats « de 97 % à 99 % » lorsqu’il s’agit de déterminer qu’une personne saine n’est pas positive. En revanche, la HAS a jugé que « les données de sensibilité [la capacité à déterminer qu’une personne contaminée est positive — NDLR] sont problématiques, puisque ces tests [RT-LAMP — NDLR] présentent des résultats très hétérogènes, variant de 30 % à 90 %, sans véritable explication ». Du coup, la HAS a décidé de suspendre sa recommandation de prise en charge, concernant ces tests RT-LAMP sur prélèvement salivaire. Seuls les tests salivaires RT-PCR réalisés en laboratoire, contrairement aux tests RT-LAMP, peuvent donc encore être remboursés en France. La même logique a été retenue à Monaco. La HAS recommande de réserver l’utilisation de ces tests « aux personnes pour lesquelles l’acceptabilité du test nasopharyngé est aujourd’hui la plus faible (enfants, personnes âgées, personnes présentant des troubles psychiatriques), ou chez qui le test sur prélèvement nasopharyngé est contre-indiqué ». Les autotests vendus en pharmacie, et qui ne sont pas remboursés, mais aussi les tests antigéniques avec un prélèvement nasal moins profond que le test nasopharyngé, peuvent remplacer les RT-LAMP, sans être plus invasifs, a conclu la HAS.

1) Cette étude est consultable ici : https://www.medrxiv.org/content/1

2) Cet article est à lire ici : https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2

3) Covid-19 : Comment les autotests pourraient changer la donne, The Conversation, à lire ici : https://theconversation.com/covid-19-comment-les-autotests-pourraient-changer-la-donne-156263 (mars 2021).

4) Cette étude japonaise est disponible ici : https://www.niid.go.jp/.html.