Les eaux monégasques ont été le théâtre d’un exercice de simulation de pollution en mer. Dans ce scénario, alors que deux bateaux viennent de se percuter, les équipes françaises, monégasques et italiennes doivent réagir ensemble.
Cet exercice d’ampleur en Méditerranée avait été planifié depuis un an. Dans cette fiction, impossible de connaître les conditions en mer le jour J. Et ce mercredi 27 avril, la mer est très agitée, donnant à la simulation un air de challenge. Un mètre quatre-vingt de creux à la sortie du port Hercule, jusqu’à trois mètres dès que l’on s’éloigne, un vent qui souffle jusqu’à 35 nœuds… « Il est intéressant de tester les limites même dans la fiction », explique le capitaine de frégate Yann Bizien. Le scénario prévoit la collision d’un pétrolier et d’un roulier à sept nautiques (13 kilomètres) des côtes monégasques. A la place du pétrole lourd, ce sont des balles de riz qui sont rejetées à la mer. Immédiatement, le plan Ramogepol est activé. Cet exercice de lutte anti-pollution vise à tester les équipes françaises, italiennes et monégasques de l’accord Ramoge signé entre les trois pays en 1976. En 1970 déjà, le Prince Rainier III annonçait sa volonté de créer « une zone pilote qui constituerait un laboratoire d’idées en matière de protection de l’environnement marin ». Quarante ans plus tard, la coordination semble efficace. Des centaines de personnes réparties sur terre ou sur mer ont participé à la simulation, de l’Italie jusqu’à la Côte d’Azur sous la direction de la France, leader de l’opération ce jour-là.
« Imprévisible »
« Nous enregistrons le transport de 25 millions de tonnes de marchandises dangereuses, notamment du pétrole brut ou des produits chimiques, chaque année sur le canal de Corse entre l’île d’Elbe et Bastia, 10 millions de tonnes dans les bouches de Bonifacio et 7 millions à Sète. Ce trafic marchand élevé correspond à la mondialisation des échanges. Nous avons le devoir de présumer des risques liés ensemble. Les trois états côtiers doivent être prêts à faire face », insiste le capitaine Bizien, également porte-parole de la préfecture maritime basée à Toulon. Mercredi, le travail consistait en un remorquage d’urgence des navires en difficulté et d’une opération de lutte antipollution. Sur place, le Jason, bateau spécialisé, joue le rôle de navire amiral pendant que l’Abeille Flandre s’occupe du remorquage. En tout, une vingtaine de navires des trois pays ont pris part à l’exercice. La zone a aussi été survolée en avion et en hélicoptère pour aider le Jason à procéder aux systèmes de confinement des faux hydrocarbures et ainsi commencer le pompage du polluant en mer. « La pollution ne connaît pas de frontières en mer, elle peut se déplacer au gré des courants et des vents. A un moment, si les conditions sont très mauvaises en mer, on ne peut plus lutter » rappelle le capitaine de frégate Yann Bizien.
« Imprévisible »
Cette situation tendue, les forces d’intervention de Ramogepol l’ont entraperçue quelques jours auparavant. En cause : la rupture d’un pipeline qui a provoqué la fuite de 500 m3 de pétrole brut à Gênes. « Si la réaction opérationnelle italienne n’avait pas mis en place une force de frappe significative, la pollution aurait pu passer entre les mailles du filet. Et cette pollution aurait pu longer nos côtes pendant plusieurs semaines, souligne Yann Bizien. Ce week-end, on était dans la réalité opérationnelle ». Une actualité qui a montré le bon fonctionnement du déclenchement du plan Ramogepol. Le Jason avait d’ailleurs été préventivement installé à Nice en cas de besoin. « Cette coopération régionale a apporté la preuve de sa pertinence, de son efficacité et pourra certainement servir de modèle dans d’autres zones maritimes sensibles » s’est exprimé le Prince Albert II plaidant pour « une gestion raisonnée de notre patrimoine maritime commun ». « La mer reste un milieu dangereux et imprévisible. Dans le cadre de l’accord Ramoge, nos trois Etats regardent en face les réalités maritimes et les risques associés. Il n’est donc pas imaginable de présumer des risques de pollution en mer sans se préparer ensemble à y faire face » met en avant le vice-amiral Yves Joly, le préfet maritime de la Méditerranée. Au large de Monaco, l’exercice s’est révélé « satisfaisant » mettant en lumière la mise en mouvement de tous les acteurs potentiels de façon « rapide, professionnel et efficace ».