samedi 27 avril 2024
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COP28 : Monaco va intensifier son engagement climatique

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Alors que la COP28 se déroule à Dubai du 30 novembre au 12 décembre 2023, le prince Albert II a pris la parole le 1er décembre. Il a annoncé sa volonté d’amplifier sa politique de transition énergétique en principauté.

L’ouverture de la 28ème conférence mondiale pour le climat (COP28) à Dubaï (Emirats arabes unis) le 30 novembre 2023 a été marquée par une décision espérée, mais quelque peu inattendue. À cette date, les représentants des 198 Etats ont en effet validé ce qui sera le cadre autorisant le fonctionnement d’un fonds destiné à financer les « pertes et dommages », c’est-à-dire les dégâts, pour certains irréversibles, provoqués par le dérèglement climatique pour les pays les plus vulnérables. On se souvient que la décision de mettre sur pied ce type de fonds est attendue depuis 1993. Mais le feu vert a été donné en 2022, à l’occasion de la COP27 à Charm El-Cheikh (Egypte). Pendant quatre années, ce fonds sera intégré à la Banque mondiale. Les pays riches participeront sur une base qui sera celle du volontariat. Dès le premier jour de cette COP28, le 30 novembre 2023, l’Union européenne (UE) a évoqué une participation à hauteur de 225 millions d’euros, dont 100 millions venus de l’Allemagne. Les Emirats arabes unis devraient, quant à eux, verser 100 millions, le Royaume-Uni 50,5 millions, les Etats-Unis 17,5 millions d’euros, et le Japon 10 millions. Il fallait dépasser un minimum de 200 millions pour permette à ce fonds de fonctionner et ce montant a donc très largement été dépassé. Mais l’effort à fournir est immense. En effet, les dégâts touchant les infrastructures, les récoltes, ou encore les mouvements de population suite à des catastrophes naturelles ont été estimés entre 290 milliards et 580 milliards de dollars (entre 265 milliards et 532 milliards d’euros) par an d’ici 2030. D’autres pays pourraient faire des annonces de versement à ce fonds dans les jours à venir. Interrogé par Monaco-Matin, la direction des relations extérieures et de la coopération de la principauté n’a pas fermé la porte à une participation financière de Monaco : « Nous l’envisagerons peut-être à l’avenir, une fois le fonds opérationnel. En revanche, le gouvernement a souhaité apporter son soutien financier en vue de prévenir les pertes et préjudices liés au changement climatique subis par les pays les plus vulnérables. » Et cela débutera dès l’année prochaine, promet-on du côté du gouvernement monégasque : « Nous accorderons dès 2024 une contribution financière à l’initiative Climate Risk and Early Warning Systems (CREWS), qui vise à déployer des systèmes d’alerte précoce dans les pays les moins avancés, et les petits Etats insulaires en développement. Ces systèmes permettent de sauver des vies face aux événements climatiques extrêmes, et de limiter les dommages. » Toujours au rayon financement, les Émirats arabes unis ont annoncé le lancement d’un fonds climat. Doté de 30 milliards de dollars, il permettra d’injecter de l’argent dans des solutions climatiques à l’échelle mondiale.

« J’en appelle à tous mes homologues, afin que cet exercice ne se limite pas à un constat d’échec. Nous devons saisir la dernière occasion qui nous est donnée de limiter le réchauffement à 1,5 °C »

Le prince Albert II
COP28 Prince Albert II
« Si nous ne signalons pas le déclin final de l’ère des combustibles fossiles telle que nous la connaissons, nous entamerons notre propre déclin final. Et nous le paierons avec des vies humaines. » Simon Stiell. Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies. © Photo Axel Bastello / Palais Princier

« Promesse collective »

En attendant, l’urgence à agir est plus que jamais là. Le 30 novembre 2023, l’Organisation météorologique mondiale a annoncé qu’en 2023 les températures moyennes mondiales ont excédé d’environ 1,4 °C les valeurs de la période de référence préindustrielle. Du coup, pour avoir un chance de parvenir à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C, les experts scientifiques, mais aussi l’Agence internationale de l’énergie, ont recommandé une très forte baisse de la production et de la consommation d’hydrocarbures. Mais, à rebours, de cet appel, les Emirats arabes unis envisagent une production à la hausse. Cité par Le Monde, le secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies, Simon Stiell, a été clair : « Si nous ne signalons pas le déclin final de l’ère des combustibles fossiles telle que nous la connaissons, nous entamerons notre propre déclin final. Et nous le paierons avec des vies humaines. » Le 1er décembre 2023, à la tribune de la COP28, le prince Albert II est allé dans le même sens. « Il y a huit ans, l’accord de Paris marquait notre promesse collective de bâtir un avenir vivable et durable pour tous. Depuis, notre détermination a été mise à l’épreuve par de multiples crises — économique, sanitaire et géopolitique, sapant l’élan de certains. Pourtant, les signaux d’alarme sont parfaitement clairs : nos actions actuelles sont insuffisantes, a-t-il commencé. Les terribles catastrophes qui ont frappé aux quatre coins du globe au cours des derniers mois ne représentent que les prémices des bouleversements à venir, si nous ne reprenons pas le contrôle de notre destin climatique. Aussi, nous avons l’obligation impérieuse de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour rectifier la trajectoire. » Pour Albert II, il n’est donc pas question de fléchir : « Cette conférence verra l’aboutissement d’un processus multilatéral historique : le premier bilan mondial de l’accord de Paris. J’en appelle à tous mes homologues, afin que cet exercice ne se limite pas à un constat d’échec. Nous devons saisir la dernière occasion qui nous est donnée de limiter le réchauffement à 1,5 °C. » De son côté, le président français, Emmanuel Macron a rejoint les rangs des dirigeants les plus offensifs en faveur du climat. « Nous devrons définitivement tourner la page d’ici à 2040-2045 du pétrole et 2050 du gaz, a-t-il lancé. Le G7 a une responsabilité majeure. Tout comme la Chine, qui est désormais le deuxième pays émetteur historique, et qui a donc changé en quelque sorte de statut. » Mais attention aux solutions mises en œuvre, a prévenu Emmanuel Macron : « On doit permettre aux émergents le rattrapage économique, c’est un élément de justice. Mais ce rattrapage ne doit pas se faire sur la base des énergies qui sont carbonées et en particulier du charbon […]. Les centrales existantes, qui se concentrent largement en Asie aujourd’hui, émettront, à elles seules, suffisamment de CO2 pour que nous excédions la cible de 1,5 °C. »

« Les terribles catastrophes qui ont frappé aux quatre coins du globe au cours des derniers mois ne représentent que les prémices des bouleversements à venir si nous ne reprenons pas le contrôle de notre destin climatique. Aussi, nous avons l’obligation impérieuse de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour rectifier la trajectoire »

Le prince Albert II
COP28 Prince Albert II
© Photo Axel Bastello / Palais Princier

« [À Monaco – NDLR], un vaste plan de mutation de la consommation d’énergies fossiles bâtimentaires vers des énergies propres sera prochainement lancé dans tous les bâtiments émettant plus de 50 tonnes de gaz à effet de serre par an. Trois nouveaux réseaux thalassothermiques vont alimenter prochainement 50 bâtiments chauffés au fioul. Cela va permettre de réduire de plus de 10 % nos émissions de gaz à effet de serre »

Le prince Albert II

Aller plus loin

Evoquant plus directement le cas de Monaco, le prince a rappelé que des mesures ont été prises, avec pour objectif de réduire les émissions de CO2 de 55 % d’ici 2023, et d’atteindre la neutralité carbone en 2050. « Seuls les combustibles liquides à minimum 30 % d’origine biogénique peuvent être consommés à Monaco et nous incorporons déjà 10 % de biométhane dans le gaz distribué sur le territoire, a souligné Albert II. Un vaste plan de mutation de la consommation d’énergies fossiles bâtimentaires vers des énergies propres sera prochainement lancé dans tous les bâtiments émettant plus de 50 tonnes de gaz à effet de serre par an. Trois nouveaux réseaux thalassothermiques vont alimenter prochainement 50 bâtiments chauffés au fioul. Cela va permettre de réduire de plus de 10 % nos émissions de gaz à effet de serre. » L’année 2024 débutera avec l’interdiction des plastiques dans « certains récipients pour aliments ». Mais le prince Albert II a profité de cette COP28 pour annoncer sa volonté d’aller plus loin et de revoir à la hausse l’engagement climatique de la principauté « dans le cadre de notre contribution déterminée au niveau national en 2025, en accord avec le mécanisme d’ambition établi par l’accord de Paris ». Rappelant que « le soutien financier accordé par la principauté aux efforts de lutte contre le changement climatique dans les pays en développement n’a cessé de croître depuis 2015 », Albert II a indiqué que, « cette année encore, la principauté a augmenté de 10 % sa contribution au fonds vert pour le climat, alors même qu’elle en est déjà le premier bailleur per capita. Aujourd’hui, la dimension climatique fait partie intégrante des objectifs de la politique d’aide publique au développement monégasque, qui met l’accent sur le renforcement des capacités d’adaptation des communautés vulnérables ». Finissant son intervention sur une note optimiste, Albert II a estimé que l’adoption du nouveau cadre mondial de la biodiversité et de l’accord sur la diversité biologique en haute-mer « suscitent de l’espoir », et que « les solutions fondées sur la nature sont nos meilleures alliées pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris ». Un premier bilan pourra être fait le 12 décembre 2023, lorsque cette COP28 prendra fin.