vendredi 19 avril 2024
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Faut-il taxer les Monégasques qui travaillent à domicile ?

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Le surloyer appliqué aux Monégasques exerçant leur activité à domicile a été l’objet de vifs échanges entre les membres du Conseil national et le conseiller-ministre des finances et de l’économie, Jean Castellini.

La représentation nationale a de nouveau vivement regretté l’application d’un surloyer (50 euros par mois les trois premières années, puis 200 euros par mois) pour la domiciliation d’activité dans les appartements domaniaux et demandé la suspension de cette « mesure injustifiée et contre-productive, dont l’impact est insignifiant pour les recettes de l’État ». « Dans un pays qui manque cruellement d’espaces, pourquoi pousser des Monégasques qui sont dans des domaines et qui paient déjà un loyer, à partir pour occuper un local ailleurs, dont ils n’ont pas besoin […]. On ne se comprend pas sur ce sujet. Quand vous payez un loyer, pourquoi devez-vous payer un deuxième loyer, alors que vous n’utilisez pas un deuxième local ? », s’est agacé Stéphane Valeri face à l’obstination du gouvernement.

Une « question de principe » pour Jean Castellini

En réponse, le ministre des finances et de l’économie et conseiller du gouvernement, Jean Castellini a affirmé ne pas en faire une question financière : « Nous avons en effet chiffré à environ 140 000 euros le gain. » Mais le conseiller-ministre a justifié le maintien de cette « taxe » par une « question de principe ». « Donner un handicap à ceux qui se lancent et qui essaient d’être productifs pour la société est un principe détestable », a vivement réagi Guillaume Rose, élu Priorité Monaco (Primo !) président de la commission environnement et qualité de vie. Si Christophe Robino, élu Primo !, admet que « chacun a le droit de défendre ses principes », le président de la commission des intérêts sociaux et affaires diverses, « ne voit pas très bien, au nom de la libre entreprise, pourquoi il faudrait les taxer en plus. En sachant que dans le secteur privé, si vous le faites, même sur une période limitée, il n’y a aucune taxe supplémentaire. Chacun est libre d’avoir ses principes mais sur ce point, je ne vois pas très bien ce qui le justifie ». Jean Castellini a alors justifié sa position : « On exerce une activité, source de rémunération par rapport à d’autres Monégasques qui ne font qu’habiter chez eux […]. On se dit qu’il y a une activité génératrice de revenus pour certains et un loyer pour certains autres qui ne génère aucune rémunération, car il n’y a pas d’activité. Et donc on se permet de prélever un montant symbolique aujourd’hui mais cela n’avait suscité aucun commentaire particulier jusqu’à ces dernières années ».

La menace de Stéphane Valeri

Face à l’incompréhension du Conseil national, le ministre des finances et de l’économie a toutefois annoncé réfléchir à des pistes avec « une forme de progressivité qui pourrait être d’une nature différente de l’actuelle, voire d’un démarrage sans qu’il y ait de frais, et de voir ensuite en fonction de la réussite, du chiffre d’affaires, du développement de l’activité s’il y a la possibilité malgré tout de percevoir une redevance mensuelle liée à l’exercice d’une activité à domicile ». Mais pour Stéphane Valeri, pas question de transiger. Le président du Conseil national souhaite l’abandon pur et simple de cette mesure : « Pourquoi vous taxez les Monégasques ? Laissez-les tranquilles […] ! Il n’y a pas de raison de taxer les Monégasques qui veulent travailler dans un local qu’ils louent déjà […]. De toute façon, votre projet de loi, on l’amendera comme on le veut. Et si vous ne le voulez pas, vous le retirerez et on vous dira ce que l’on en pense ».

Le projet de loi discuté en décembre

Le ministre d’État, Serge Telle, a tempéré : « Regardons les situations. Et s’il faut faire évoluer cette position, faisons-le. Il n’y a pas de dogme ». Il a ensuite invité les membres de son gouvernement et ceux du Conseil national à « réfléchir sur le modèle de société. Est-ce que la gratuité de tout, tout le temps, va nous donner un modèle de société à 3, 4, 5, ou 10 ans permettant à des citoyens monégasques de devenir responsables de ce qu’ils font dans leur propre pays ? Ça tourne plus autour de cette problématique, plus que de l’argent ». « Nous avons la chance d’avoir des finances publiques excédentaires et d’avoir beaucoup d’argent. Doit-on gaspiller cette chance à rendre tout gratuit, tout le temps ? Ou pouvons-nous faire autre chose avec l’argent du travail de tous pour un futur qui ne soit pas simplement le futur de la gratuité de tout ? », s’est ensuite interrogé le chef du gouvernement. Alors que les élus souhaitent la transformation en projet de loi de la proposition n° 238, votée à l’unanimité du Conseil national au printemps 2018, Jean Castellini a annoncé une réunion vendredi 11 octobre pour « mettre un point final au projet de loi », qui sera ensuite « soumis à l’examen et au vote du Conseil national ». Les discussions sur le projet de loi prévues en décembre prochain promettent d’ores et déjà d’être animées.