vendredi 26 avril 2024
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Leonardo Jardim débarqué,
Robert Moreno lui succède

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Renouer avec son ex est rarement une bonne idée, et cela s’est une nouvelle fois vérifié avec l’AS Monaco.

Leonardo Jardim a été évincé pour la deuxième fois en un peu plus d’un an par la direction du club monégasque.

Il a été remplacé par l’ancien sélectionneur intérimaire de l’Espagne, Robert Moreno. Un novice en tant qu’entraîneur de club, qui arrive en principauté avec beaucoup d’ambition.

La dernière victoire éclatante en championnat 5 buts à 1 contre Lille au stade Louis II, juste avant la trêve, ne lui aura pas permis de sauver sa peau. Moins d’un an après son retour en urgence sur le banc de l’ASM pour une opération maintien, Leonardo Jardim a une nouvelle fois été démis de ses fonctions d’entraîneur du club monégasque le 28 décembre 2019. Le Portugais a été remplacé par l’ancien sélectionneur par intérim de l’Espagne, Robert Moreno.

Limogé deux fois en un peu plus d’un an

Il était revenu au chevet de l’ASM en janvier 2019 pour succéder à Thierry Henry [qui avait succédé au coach portugais en octobre 2018 — N.D.L.R.], alors que le club de la principauté pointait à une inquiétante 18ème place. Après un maintien acquis très difficilement, Leonardo Jardim, qui avait mené l’AS Monaco au titre de champion de France et aux demi-finales de la Ligue des Champions en 2017, abordait ce nouvel exercice avec la volonté de retrouver les sommets de la Ligue 1 (L1). Particulièrement dépensiers lors du dernier mercato estival [140 millions d’euros ont été investis pour l’arrivée de joueurs tels que Wissam Ben Yedder, Guillermo Maripan, Benjamin Lecomte ou encore Ruben Aguilar — N.D.L.R.], les dirigeants monégasques n’avaient d’ailleurs pas caché leur ambition de retrouver la Ligue des Champions, et donc de finir sur le podium à la fin de la saison. À mi-parcours, la situation comptable des Monégasques est loin d’être catastrophique. Actuellement septième, le club de la principauté (28 points) pointe à 5 points du troisième Rennes (33 points), et 10 de l’Olympique de Marseille (OM), deuxième (38 points), avec un match en moins pour les Monégasques [l’ASM doit affronter le Paris Saint-Germain (PSG) en match en retard au stade Louis II, mercredi 15 janvier 2020 — N.D.L.R.]. Mais le coach portugais paie notamment son début de saison chaotique : 3 points et 14 buts encaissés en 6 journées.

Des résultats jugés insuffisants par la direction

Si depuis, les Monégasques ont bien redressé la barre [25 points pris les 12 journées suivantes, soit une moyenne de 2,08 points pris par match – N.D.L.R.], les résultats ont malgré tout été jugés insuffisants par la direction comme l’a rappelé Oleg Petrov en conférence de presse. Si le vice-président du club princier a d’abord tenu à rendre hommage au coach portugais qui « a grandement participé au maintien du club (la saison dernière) », il a ensuite reconnu que « le remercier une seconde fois a été difficile mais nous avons pensé que cela valait le coup ». Oleg Petrov a enfin rappelé les objectifs élevés du club pour justifier l’éviction du technicien portugais et la nécessité d’« opérer des changements » en cours de saison. « La raison sont les résultats du club. Comme vous le savez. Nous sommes septièmes au classement et les objectifs du club étaient très clairs. Monaco est un top club du championnat français et je pense que nous méritons un meilleur classement et c’est notre objectif. Il y a différentes raisons qui expliquent cette situation : le début de saison a été difficile dû notamment à un mercato tardif. » Si les résultats du club ont donc été avancés par la direction pour justifier le licenciement de Jardim, certains médias nationaux ont aussi évoqué des relations devenues compliquées, évoquant même une « rupture », avec le vice-président et les supporteurs qui réclamaient son éviction. Le discours d’Oleg Petrov au soir de la victoire éclatante contre Lille (5-1) le samedi 21 décembre 2019 ne laissait d’ailleurs guère de place au doute quant à l’avenir du technicien lusitanien sur le banc monégasque : « Nous croyons que nous devons faire mieux. Dans la période qui vient, on va faire des ajustements », avait annoncé le dirigeant russe. Le sort de Leonardo Jardim sera définitivement scellé une semaine plus tard, à la veille de la reprise de l’entraînement.

Nouveau jackpot en vue pour Jardim

Après ce deuxième licenciement en un peu plus d’un an, se pose une nouvelle fois la question des indemnités que va percevoir le coach portugais. Pour rappel, après son premier licenciement en octobre 2018, le Portugais avait empoché un joli chèque estimé à huit millions d’euros. Le deuxième devrait, lui aussi, être conséquent. Rappelé en janvier 2019 pour sauver le club de la relégation, Leonardo Jardim en avait profité pour signer un juteux contrat d’une durée de deux ans et demi, soit jusqu’en juin 2021, aux conditions légèrement meilleures que le précédent. Son salaire mensuel était estimé à environ 330 000 euros, sans compter les divers bonus et primes d’objectifs. Nul doute que le maintien acquis la saison dernière a dû faire partie du deal… Mais alors à combien vont s’élever les futures indemnités de Leonardo Jardim ? Si les négociations concernant la rupture de contrat sont en cours, le vice-président du club Oleg Petrov a d’ores et déjà reconnu en conférence de presse que « le licenciement du coach (Jardim) pour la seconde fois est un gâchis financier ». Même si les indemnités seront inférieures à huit millions d’euros selon la direction du club, le coach portugais devrait encore toucher le pactole. Car, son contrat courant jusqu’en juin 2021, 18 mois ne seront pas honorés. À raison d’un salaire mensuel estimé à environ 330 000 euros, les dirigeants monégasques devront, au minimum, verser 5,9 millions d’euros à Jardim. Une coquette somme qui s’ajoute aux huit millions d’euros touchés en octobre 2018. En un peu plus d’un an, le technicien portugais aura donc empoché près de 14 millions d’euros. De quoi s’assurer une retraite tranquille et regarder sereinement son successeur, Robert Moreno, tenter d’atteindre les objectifs du club.

« Robert Moreno est un entraîneur moderne, qui a de solides compétences techniques, de bonnes qualités de management, une grosse ambition, une grosse capacité de travail : toutes les qualités dont a besoin Monaco »

Oleg Petrov. Vice-président de l’AS Monaco

Le pari Robert Moreno

Laurent Blanc, Marcelino, Unai Emery, Mauricio Pochettino, ou encore l’ancien de la maison, Marcelo Gallardo… Plusieurs noms ont été avancés pour prendre la succession de Leonardo Jardim. Les dirigeants monégasques ont finalement misé sur un novice en tant qu’entraîneur de club, Robert Moreno, qui arrive en principauté avec un staff tout neuf : un adjoint (Dani Guindos), un préparateur physique (Juanjo del Ojo), un entraîneur des gardiens (José Sambade) et un psychologue sportif (Marc Sellarés). Après Thierry Henry, il s’agit donc d’un nouveau pari pour le club monégasque : « C’est un entraîneur moderne, qui a de solides compétences techniques, de bonnes qualités de management, une grosse ambition, une grosse capacité de travail : toutes les qualités dont a besoin Monaco », a déclaré Oleg Petrov à propos du nouvel entraîneur espagnol, avant de concéder qu’il « n’était pas facile de trouver le coach idéal en cours de saison, mais je pense qu’on y est parvenu ». L’ancien sélectionneur par intérim de l’Espagne, 42 ans, qui s’est engagé jusqu’en juin 2022 avec le club de la principauté, a tenu pour sa part à rappeler en conférence de presse que « cela fait vingt-huit ans que j’entraîne ». À Monaco, Robert Moreno se voit offrir l’opportunité qu’il attendait : devenir enfin entraîneur principal après avoir été durant de nombreuses années l’adjoint de Luis Enrique. Passer de l’ombre à la lumière n’effraie pas outre mesure l’Espagnol : « Mon rêve a toujours été d’être entraîneur principal […]. Cela va changer peu de choses pour moi. Les neuf années pendant lesquelles j’ai été assistant dans des clubs professionnels, j’ai participé à tous les processus de décision au sein d’équipes de haut niveau. La seule différence était que la face visible était un autre ».

Un « novice » aux dents longues

L’« autre » en question, c’est Luis Enrique, son ancien mentor, avec lequel les relations se sont rafraîchies depuis le retour d’Enrique à la tête de la « Roja » [nom donnée à l’équipe nationale espagnole – N.D.L.R.]. Pourtant, l’histoire entre les deux hommes avait bien commencé. Diplômé de commerce international, Robert Moreno n’a pas eu de carrière de joueur professionnel. Mais très tôt, à l’âge de 14 ans, il décide de devenir entraîneur dans des clubs modestes. Plus tard, il intégrera le FC Barcelone en tant que recruteur avant d’être repéré par Luis Enrique. Ce dernier lui proposera alors d’intégrer son staff tout d’abord à l’AS Rome (2011-2012), au Celta Vigo (2013-2014), à Barcelone (2014-2017) et enfin en sélection nationale [il reviendra à Vigo en 2017-2018 dans le staff de Juan Carlos Unzué — N.D.L.R.]. Alors que Luis Enrique doit précipitamment prendre du recul avec la Roja pour des raisons personnelles en mars 2019, Robert Moreno est nommé à la tête de la sélection. Sa mission : qualifier l’Espagne pour le prochain Euro. Un objectif qu’il remplira aisément et brillamment avec 7 victoires et 2 nuls en 9 matches, soit une moyenne de 2,5 points par match. Un bilan qu’il convient toutefois de relativiser compte-tenu de l’adversité rencontrée par la sélection espagnole au cours de cette campagne de qualification [le groupe de l’Espagne était composé de la Roumanie, des Îles Féroé, de la Norvège, de la Suède et de Malte — N.D.L.R.]. La brouille entre les deux Catalans surviendra au moment du retour de Luis Enrique à la tête de la Roja, en novembre 2019. Accusé de trahison par son ancien mentor, Robert Moreno annoncera son départ de la sélection le 28 novembre 2019. Car, si le nouveau coach monégasque avait déclaré début septembre « s’il veut revenir, je lui laisserai la place », en évoquant un éventuel retour de Luis Enrique, Robert Moreno aurait souhaité à l’automne prolonger l’aventure de sélectionneur jusqu’au prochain Euro. Un souhait qui ne sera malheureusement pas exaucé par la fédération espagnole qui privilégie finalement le retour de Luis Enrique aux commandes. Ce dernier n’a guère apprécié l’ambition de Moreno, le qualifiant publiquement de « déloyal » et l’accusant de vouloir devenir calife à la place du calife, alors même qu’il l’avait lancé dans le métier. Interrogé à ce sujet en conférence de presse, Robert Moreno n’a pas souhaité en rajouter : « Pour moi, ce qui s’est passé ces dernières semaines, c’est du passé », a simplement répondu le technicien.

Quel style de jeu avec Moreno ?

À la tête de la sélection espagnole, Robert Moreno présente un bilan très positif et des statistiques plutôt flatteuses, avec notamment 29 buts marqués pour seulement 4 encaissés en 9 matches. Faut-il donc s’attendre à une formation monégasque ambitieuse tournée vers l’offensive ? En conférence de presse, le technicien espagnol a indiqué vouloir « s’adapter aux caractéristiques de mes joueurs et du championnat ». Un championnat de France que Robert Moreno « ne connaît pas autant que la Liga [le championnat espagnol – N.D.L.R.] », mais suffisamment pour savoir qu’il s’agit « d’un championnat où la force, la vitesse et les phases de transition sont très importantes ». Le coach espagnol souhaite en tout cas s’inspirer de ce qu’a fait le PSG ces dernières saisons, avec « un style basé sur le contrôle du jeu ». Un style que Robert Moreno connaît bien pour avoir fréquenté la maison barcelonaise et la sélection espagnole. Quant à la formation que le technicien souhaite utiliser en principauté, celui qui a écrit un livre sur le 4-4-2 [Mi receta del 4-4-2, Futbol De Libro, sorti en mai 2013 – N.D.L.R.], dans lequel il décrypte ses préférences tactiques, avoue ne pas faire « une obsession » pour ce système. Le coach espagnol, qui avait d’ailleurs préféré le 4-3-3 en sélection espagnole, entend s’adapter aux joueurs et « occuper les espaces pour exploiter au mieux les qualités individuelles des joueurs ». Enfin, en termes d’objectifs, Robert Moreno estime qu’ils doivent être « les plus hauts possibles » sans les définir précisément. Mais nul doute que l’objectif podium fixé par les dirigeants monégasques en début de saison résonne dans sa tête. Pour l’atteindre, l’Espagnol sait qu’il faudra « gagner des matches » en commençant par le prochain contre le PSG, dimanche 12 janvier, à 21h au Parc des Princes.

Leonardo Jardim règle ses comptes après son éviction

Quelques jours seulement après son licenciement, le coach portugais a accordé une interview à nos confrères de L’Équipe, parue vendredi 3 janvier 2020. Si Leonardo Jardim défend son bilan sportif au cours de cet entretien, il égratigne aussi le vice-président du club, Oleg Petrov. Morceaux choisis :

À propos du début de saison raté :

« La saison actuelle est très mal partie, nous n’avons constitué l’équipe qu’à la fin août et mis à la poubelle la pré-saison, comme tout le monde le sait. Même le vice-président du club a pris la responsabilité de ce mercato tardif […]. Si on avait préparé l’équipe dès le mois de juin, Monaco serait aujourd’hui deuxième ou troisième de Ligue 1 (L1), facile. »

À propos d’une éventuelle démission après le mauvais début de saison :

« À la mi-août, j’ai demandé à partir parce que je ne voulais pas disputer une deuxième fois le maintien […]. Le président voulait que je continue. Il est toujours resté droit avec moi, je n’ai rien à lui reprocher. »

À propos de son licenciement pour manque de résultats :

« Après cinq journées à deux points pris, il y a eu treize matches de Ligue 1, nous avons pris vingt-six points, soit deux points par match. C’est pour ça que je reste étonné par la décision qui a été prise à Noël. Sportivement, nous étions en situation d’atteindre l’objectif, à savoir le podium […]. Il (Oleg Petrov) m’a dit que c’était à sa demande que le président avait pris cette décision. »

À propos de ses relations avec le vice-président, Oleg Petrov :

« Sincèrement, de mon côté, je n’ai jamais senti que j’étais son entraîneur. À ses yeux, j’ai toujours été l’entraîneur du président et peut-être de Vadim [Vasilyev, ancien vice-président de l’ASM – N.D.L.R.] »

À propos de ses indemnités :

« J’ai sans doute été le moins cher des trois derniers entraîneurs de l’ASM, si on rapporte les sommes versées au nombre de mois travaillés. Là aussi, on évoque des sommes qui ne sont pas exactes […]. La vérité, c’est que j’ai coûté moins cher que d’autres. »

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