vendredi 29 mars 2024
AccueilActualitésSportLa L1 contre 200 millions ?

La L1 contre 200 millions ?

Publié le

Nouvel épisode dans l’affaire qui oppose la Ligue de Football Professionnel et l’ASM avec cette somme de 200 millions d’euros qui aurait été demandée par la FFF. Les instances du foot français et le club se renvoient la balle par communiqué et voie de presse interposés. Tour d’horizon sur la situation et ses possibles issues.

On en était resté à une réunion de conciliation qui devait être organisée par la Fédération Française de Football (FFF). C’est ce qui était ressorti d’un communiqué lâché par la FFF après que son comité exécutif a examiné le recours envoyé par l’ASM. Jusqu’alors, rien ou presque n’avait filtré sur une éventuelle date de rencontre entre tous les acteurs du dossier. Alors que le terrain avait repris le dessus dernièrement, une nouvelle « péripétie », comme la qualifie Jean-Pierre Louvel, président de l’Union des Clubs Professionnels de Football (UCPF), est intervenue le week-end dernier. Vendredi 3 mai, Dmitry Rybolovlev, de retour d’un voyage aux Etats-Unis, rencontre Noël Le Graët, président de la FFF. Ce rendez-vous se plaçait dans le cadre de négociations en vue de trouver une solution au litige qui oppose le club à la Ligue, depuis que cette dernière a voté un texte allant à l’encontre du club monégasque. Monaco n’étant pas disposé à déplacer son siège social en France, l’idée de la compensation financière avait déjà fait son chemin, et se lisait en filigrane sur le communiqué de la Fédé. Mais cette idée ne daterait pas d’hier, à en croire Philippe Piat, président de l’Union Nationale des Footballeurs Professionnels (UNFP) et vice-président à la LFP. « Au départ, avant le vote qui portait sur le déplacement du siège social en France, on était en conseil d’administration, et on s’est demandé quelle action mener. La majorité était sur l’idée du siège, mais quelques-uns avaient déjà en tête une indemnité », confie cet ancien attaquant ayant évolué en principauté lors de la saison 1966-1967.

Entrevues
En se plaçant comme le médiateur de la situation, Noël Le Graët vient peut-être de la dynamiter. C’est du moins ce que l’on peut penser en voyant la réaction du club, qui s’est fendu d’un communiqué rageur dimanche en fin de matinée. La proposition de payer 200 millions d’euros, qui, selon le club, vient de la FFF, est jugée « totalement inacceptable ». Cependant, cette somme a ouvert la porte à un communiqué de la FFF qui précise que ce montant « a été avancé par l’AS Monaco » au cours de « discussions préliminaires (qui) avaient été entamées avec des dirigeants de l’AS Monaco ». En ce jour du seigneur, la bataille des communiqués a continué avec une déclaration de Jean-Louis Campora à l’AFP, dans laquelle il balaye cette affirmation : « Le chiffre de 200 millions d’euros a bien été demandé par la Fédération Française de Football. Le club AS Monaco FC n’a jamais fait de proposition financière à la FFF ni à la LFP ». La position du club se veut ferme sur ce point. Mais un détail n’échappe à personne dans la déclaration de la FFF, « des discussions préliminaires ». On comprend donc qu’avant l’entrevue entre Noël Le Graët et le président Rybolovlev, des échanges ont déjà eu lieu entre les instances et le club. Des échanges qui n’étaient jusqu’alors pas apparus au grand jour. Une idée corroborée par Jean-Pierre Louvel. « J’étais au courant qu’il y avait des discussions. Après, Noël Le Graët ne va pas m’appeler à chaque fois pour me dire ce qu’il se passe lors des entretiens », nous a-t-il confié. Si Philippe Piat, avoue « ne pas être au courant du tout » de la démarche du président de la « 3F », il avoue également que Frédéric Thiriez, lors du dernier conseil d’administration de la LFP (le 18 avril dernier, N.D.L.R.) « a laissé entendre à mot couvert que le contact était pris avec Monaco pour dire que dans les jours qui viennent, il y aurait des contacts précis et des négociations avancées ».

200 millions pour quoi faire ?
Dans une interview accordée à L’Équipe du lundi 5 mai, Le Graët, qui n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations, n’aborde pas l’origine de cette demande, mais en précise le contenu. On comprend ainsi qu’un échéancier sur 6 saisons est prévu, à hauteur de 30 millions par an, pour les centres de formation et de préformation. Jean-Pierre Louvel, joint lundi, nous précise également qu’il était question de « recruter en France », en plus de ces deux critères sur la formation. Des calculs auraient ainsi été faits afin de chiffrer la différence qu’il y aurait chaque saison entre Monaco et le reste des clubs. Lorsque le président de la FFF fait allusion à « des discussions bien avancées », on comprend ainsi que plusieurs entrevues ont dû avoir lieu. Mais c’est surtout en présentant cet échéancier relativement précis que le doute subsiste autour de cette proposition. En le détaillant ainsi, difficile de croire que la Fédé ou la Ligue n’en est pas à l’origine, contrairement à ce que dit le communiqué de la « 3F ».

Discussion
Quoi qu’il en soit, l’issue du problème pourrait bien se régler face à la justice. Même si les instances fédérales ne veulent pas en arriver là. Comme nous l’a expliqué le président de l’UCPF, « on est dans une volonté de trouver une solution et de discuter. » Louvel ne change d’ailleurs pas de ligne directrice lorsqu’il est question d’évoquer les présidents prêts à ne pas jouer contre l’ASM si jamais la situation venait à ne pas changer. « Pour l’instant, on veut le dialogue et la discussion, j’espère que la sagesse l’emportera ». Du côté de l’UNFP, Philippe Piat avance dans la même direction. « Quoi qu’on fasse, il vaut mieux arriver à une négociation », précise l’un des vice-présidents de la LFP. Et des discussions, Piat est certain qu’il y en aura, voire même avant la réunion voulue par la FFF la semaine du 20 mai : « Je ne sais pas qui sera convié, mais ce qui est sûr, c’est que des coups de fils « secrets » vont se passer, ça va discuter dur ». Cependant, cette réunion qui se profilerait pour la semaine du 20 mai pourrait bien se tenir après qu’un recours en justice soit déposé par le club. Annoncé dans leur communiqué, « après consultation de ses conseils juridiques, l’ASMFC n’a pas d’autre choix que d’intenter une action en justice afin d’obtenir un règlement judiciaire du litige », les dirigeants ont donc choisi de passer à l’attaque.
La suite se jouera donc devant la conseil d’Etat, com- me l’explique Patricia Moyersoen, avocate du club dans cette affaire. « Nous allons saisir le conseil d’Etat puisque c’est lui qui est compétent de la légalité de la décision prise par la Ligue. Nous allons demander l’annulation de la décision, ainsi qu’un référé suspension pour demander au conseil d’Etat, dans l’attente de son jugement, de suspendre cette décision. » Le recours étant en cours de finalisation, il sera déposé dans les prochains jours, le club n’ayant que jusqu’au 21 mai pour le déposer. Si de nombreux protagonistes de cette histoire souhaitent un dénouement qui arrangera tout le monde, il est peu probable que l’issue, vu le chemin sur lequel tous s’engagent, satisfasse l’ensemble des parties.

Monaco, une exception parmi d’autres

Si Monaco fait figure d’épouvantail dans le championnat de France du fait de sa non appartenance géographique au territoire hexagonal, le club de la Principauté n’est le seul dans ce cas en Europe. Parmi les exemples que l’on peut citer, on trouve le FC Vaduz, club du Lichtenstein, qui évolue en Suisse, ou encore Swansea, club gallois jouant dans le championnat anglais. Des clubs qui, en cas de qualification en compétition européenne, auraient pu jouer les coupes d’Europe, comme Monaco l’a déjà fait par le passé.

Aulas, soutien versatile ?

Dans L’Équipe du lundi 6 mai, Jean-Michel Aulas, président de l’Olympique Lyonnais, s’est un peu plus éloigné des positions de ses semblables. Il a d’ailleurs déclaré : « J’aurais préféré qu’on négocie avant de prendre des décisions ». Et de rajouter : « Il doit y avoir moyen de trouver, quand on est de bonne volonté, des accords, peut être pas à 200 millions, mais un petit peu moins. Il est fondamental pour le football français d’avoir des investisseurs ». Malgré cela, le président rhodanien avait tout de même voté le texte, qui fut adopté à l’unanimité. Mais ce nouveau virage pris par Aulas pourrait bien être du à sa volonté de vendre certains de ses joueurs à l’ASM la saison prochaine, puisque sont régulièrement annoncés Gonalons, Gourcuff et Lisandro Lopez sur le Rocher depuis quelques semaines.

portrait de Jean-Pierre Louvel

« Une menace qu’il ne faut pas négliger »

Président de l’Union des Clubs Professionnels de Football (UCPF) Jean-Pierre Louvel est également membre du conseil d’administration de la Ligue de Football Professionnel (LFP). Partisan de ceux qui veulent que l’ASM change de siège social, il a accepté de revenir sur les derniers événements pour Monaco Hebdo.

Monaco Hebdo : Que savez-vous de la réunion qui s’est tenue vendredi dernier entre le président Rybolovlev et Noël Le Graët ?
Jean-Pierre Louvel : C’est une réunion qui avait pour but de poursuivre les discussions existantes. Elle s’est à la fois mal et bien passée. Mal, parce que le président Rybolovlev a entre guillemets claqué une porte, et bien, parce que des contacts courtois ont été menés. Mais ce genre de négociations est toujours difficile. L’important dans tout ça est que des liens soient entretenus entre toutes les parties.

M.H. : Il se dit que le chiffre de 200 millions d’euros avait déjà été évoqué dans les couloirs de la Ligue ou de la Fédération. Qu’en est-il réellement ?
J-P.L. : Ce chiffre est le fruit de discussions sur un certain nombre de critères, d’éléments, et sur plusieurs années. Il y a eu des discussions avec différentes personnes de l’ASM et Noël Le Graët. Ces discussions n’ont pas forcément abouti. Ensuite, les clubs n’ont pas encore pris position. Mais je trouve dommageable que ce soit mis sur la place publique.

M.H. : Vous parlez de critères. Quels sont-ils ?
J-P. L. : Globalement, ce chiffre prend en compte la formation, les centres de préformation, le recrutement de joueurs en France. Là encore, il faudrait entrer dans le détail, mais comme on n’est pas sur des discussions abouties, le chiffre de 200 millions ne sera peut être pas celui-là à la fin. L’essentiel est que les discussions aient lieu et qu’elles continuent.

M.H. : Il se murmure que certains clubs seraient prêts à ne pas jouer leurs matchs contre l’ASM l’an prochain. Est-ce vrai ?
J-P.L. : Ça a été évoqué par un certain nombre de clubs. Aussi bien d’y aller que de recevoir l’ASM. C’est une menace qu’il ne faut pas négliger. Il y a un nombre suffisant de clubs qui sont prêts à ne pas jouer pour que cela pose problème. Mais encore une fois, nous prônons le dialogue avant tout.

M.H. : Pensez-vous que la démarche de Noël Le Graët a été préjudiciable à ce dossier ?
J-P.L. : Je ne pense pas que sa démarche porte préjudice, c’est surtout la position de l’ASM qui pose problème. Le communiqué de l’ASM pourrait être une fin de non recevoir, et j’espère que ce n’est qu’un communiqué et un claquement de porte dans une négociation globale. Il ne faut pas reprocher à Noël Le Graët de vouloir mener une négociation. Ça arrive de claquer la porte et de reprendre la discussion après, et cela m’est d’ailleurs déjà arrivé de le faire moi-même… C’est une péripétie, et il faut très vite retrouver les liens du dialogue.

M.H. : Quelles solutions sont envisageables ?
J-P.L. : Notre position est claire : le siège social doit être en France, sinon, sauf à avoir un ordre de l’Etat, nous maintiendrons notre position. On ne peut pas partir sur un championnat avec 20 sociétés dont une qui a un différentiel aussi important et qui met en déséquilibre les 19 autres.

M.H. : On parle d’une réunion la semaine du 20 mai. Qu’en est-il ?
J-P.L. : Nous avons en effet envisagé une réunion avec toutes les parties, la fédération, la ligue, l’UCPF, Monaco, qui permettrait peut-être de trouver ou élaborer des solutions possibles. Elle serait bien aux alentours de cette date, mais rien n’a encore été arrêté.

photo du match facde à Caen

Ajustements à prévoir

L’ASM a déjà laissé passer deux chances de valider son billet pour la L1. Il lui reste tout de même encore quelques cartouches. Mais le match face à Caen a livré quelques enseignements pour la saison prochaine, notamment sur les ajustements à prévoir dans l’effectif.

Après Sedan, c’est donc Caen qui a freiné l’ASM dans son obtention définitive du ticket pour la L1. Tout était pourtant réuni pour que la fête soit belle. Plus de 7 000 personnes étaient présentes, le soleil était au rendez-vous et les banderoles d’encouragement et de soutien (notamment face à la guerre qui oppose le club à la ligue, voir p. 18) étaient de sortie. Cependant, la victoire a fui les Monégasques (voir p. 8). Mais plus qu’un rendez-vous manqué avec son billet pour l’élite, ce sont surtout des évidences qui sont apparues lors de ce match.

Gâchette
Si l’attaque est bien pourvue (Germain, Touré, Rivière, Ribas, Salli), le manque de réussite d’Ibrahima Touré, muet depuis la trêve hivernale, a mis en lumière une carence à la pointe de l’attaque asémiste. Le club du Rocher ne dispose pas d’un vrai « tueur » devant le but. Germain, malgré sa bonne saison, se positionne plus comme un neuf et demi, et non pas comme une véritable pointe. Sa capacité à bien garder le ballon pour le transmettre proprement est une vraie qualité, mais il n’a pas ce côté renard des surfaces qui a trait aux grands buteurs. Le départ programmé de Ribas, dont le prêt (blanc ?) se terminera en même temps que le championnat, libérera une place. Les rumeurs vont bon train quant à l’arrivée d’un grand nom (Falcao, Tévez, Cavani ou des revenants comme Ménez et Adebayor), mais difficile de savoir ce qui arrivera au Louis II. C’est d’ailleurs ce que pense Alexandre Alain, spécialiste L2 à SoFoot.com : « Il y a de bons attaquants, mais il en faut un de calibre international, un poids lourd ». Une telle gâchette sera donc indispensable pour tenir le carnet de route fixé, à savoir obtenir un billet pour la Ligue des Champions (LDC) dès l’an prochain.

Arrière-garde
L’autre priorité de recrutement de l’ASM se situe en défense. Et surtout sur les côtés. Difficile de s’en prendre à Gary Kagelmacher qui n’est pas un spécialiste du poste, mais qui a su s’en acclimater au fil des matchs. L’Urugayen s’est même montré plutôt convaincant, mais risque d’être léger pour l’étage supérieur, ses errements sur le replacement pourraient coûter cher. Le constat est différent pour Tzavellas. Bon guerrier, et habile sur coup de pied arrêté (en témoignent ses coups francs sortis par Perquis ou la barre face à Caen), le Grec joue beaucoup trop avec les nerfs des arbitres. Son côté râleur et ses fautes pourraient lui coûter plus que de simples avertissements en L1. De plus, il n’est pas toujours le plus tranchant défensivement, comme en témoigne son dernier match face à Caen. Coupable sur le but caennais dû à son mauvais alignement, le « spartiate », comme le surnomment les supporters n’a pas marqué beaucoup de points… Côté défense centrale, Medjani et Raggi ont connu leur première défaite depuis qu’ils sont associés. Leur expérience et leur combativité suffisent pour la L2, mais leur manque de vitesse pourrait vite s’avérer préjudiciable. « L’axe central est costaud, mais c’est assez lent. Un Chedjou serait parfait, il est rapide, costaud et connaît la L1 », précise le journaliste de SoFoot.com. Une piste d’autant plus sérieuse que le Lillois figurerait sur une short-list avec Nkoulou et Sakho.

Terre du milieu
L’animation offensive devra être meilleure l’an prochain, et « gagner en fluidité », comme l’explique Alexandre Alain. Si la jeunesse d’Ocampos et de Ferreira-Carrasco laissent entrevoir de belles choses pour l’avenir, et que Dirar peut avoir une belle carte à jouer en L1, il manque tout de même cet électron qui peut accélérer le jeu. Obbadi avait bien réussi à poser le ballon lors de son arrivée, mais il manque de percussion et joue parfois trop à contre-temps. Un milieu relayeur d’expérience serait une bonne pioche. D’après le Journal du Dimanche daté du 5 mai, l’ASM se serait positionné sur le jeune Montpelliérain Rémy Cabella. Espoir du foot français qui réalise une belle saison, ce dernier pourrait amener la touche de fantaisie qu’il manque encore à l’équipe de Ranieri.