vendredi 26 avril 2024
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Coupe du monde de football au Qatar — Ian Rush : « S’il fallait faire quelque chose, c’était il y a 10 ans »

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Soupçons de corruption, négation des droits de l’homme, atteintes à l’environnement… L’organisation de la Coupe du monde au Qatar fait couler beaucoup d’encre. À tel point que, depuis quelques mois, de nombreuses voix s’élèvent pour appeler au boycott de la compétition. Mais pour Ian Rush, qui accompagnera la sélection galloise pendant ce Mondial, il est « trop tard » pour s’insurger. L’ancienne gloire de Liverpool s’est confiée à Monaco Hebdo à l’occasion des Sportel Awards, en octobre 2022.

Ian, vous avez pris votre retraite sportive à l’âge de 38 ans, lors de la saison 1999-2000 : que devenez-vous aujourd’hui ?

Je suis ambassadeur pour le club de football de Liverpool et j’ai aussi un rôle de conseiller auprès de la fédération galloise.

Vous allez justement accompagner la sélection galloise durant la Coupe du Monde : quel sera votre rôle ?

Je vais me rendre sur place, au Qatar, avec l’équipe galloise. Mon rôle est d’encadrer cette jeune génération et de leur apporter mon expérience.

« Nous savons depuis de nombreuses années que le tournoi se déroulera au Qatar. Subitement, à la dernière minute, tout le monde lève les bras. Mais il faut faire avec. Nous avons pris cette décision, et il faut l’accepter »

L’organisation de ce Mondial 2022 suscite de nombreuses polémiques et des appels au boycott : quel est votre point de vue ?

Nous savons depuis de nombreuses années que le tournoi se déroulera au Qatar. Subitement, à la dernière minute, tout le monde lève les bras. Mais il faut faire avec. Nous avons pris cette décision, et il faut l’accepter. C’est bizarre de penser que la finale sera au mois de décembre, et non pas en juillet, comme d’habitude.

Comprenez-vous ces prises de position ?

Chacun a le droit d’avoir sa propre opinion. Mais je trouve que c’est un peu tard maintenant de se manifester, de se réveiller, et de se rendre compte que ce Mondial 2022 va se dérouler au Qatar. Nous le savons depuis dix ans.

Fallait-il attribuer l’organisation de cette Coupe du monde au Qatar ?

La Fédération internationale de football (FIFA) a pris la décision de l’organiser au Qatar. Et ce n’est pas à moi de dire si cette décision a été bonne, ou pas. Mais s’il fallait faire quelque chose, c’était à l’époque. Plus maintenant.

Le Pays de Galles va participer à son premier Mondial depuis 1958 : quel sentiment vous anime à la veille de cette grand-messe du football ?

C’est absolument incroyable. Jamais je n’aurais cru vivre ça de ma vie. Moi, je n’ai jamais pu participer à une Coupe du monde, mais de voir ces jeunes y participer, c’est absolument fabuleux. Et c’est très important que le Pays de Galles soit maintenant reconnu en tant que pays. Auparavant, j’ai rencontré des gens au Moyen-Orient qui pensaient que le Pays de Galles faisait partie de l’Angleterre. Ils ne savaient pas que le Pays de Galles avait sa propre équipe.

Que peut espérer la sélection galloise dans cette compétition ?

Le simple fait de participer à cette Coupe du monde est déjà une réussite. En regardant la composition du groupe [la sélection galloise affrontera l’Angleterre, l’Iran, et les États-Unis dans le groupe B — NDLR], il n’est pas exclu que le Pays de Galles accède au deuxième tour. Pour moi, ce serait déjà une bonne chose.

Quel regard portez-vous sur l’évolution du football gallois ?

En tant que conseiller auprès de la fédération, une partie de mon rôle est de promouvoir le football gallois, de faire en sorte qu’il soit reconnu, puisque nous avons fait des avancées fulgurantes depuis 2016 [le Pays de Galles avait atteint les demi-finales de l’Euro 2016 — NDLR]. Pour la Coupe du monde, c’est bien de promouvoir ces jeunes joueurs. Et nous, nous avons un rôle de pédagogie, de transmission et d’inciter le monde, et les jeunes joueurs gallois, à s’attendre à de belles choses de l’équipe galloise.

Vous n’avez pas participé à une Coupe du Monde dans votre carrière : est-ce un regret ?

Oui, c’est même le seul regret que j’ai. Je regrette de ne pas avoir pu représenter mon pays au sein d’un tournoi mondial. J’ai fait plein d’autres choses dans ma carrière, j’ai remporté de nombreux titres avec Liverpool, mais je regrette de ne pas avoir pu qualifier le Pays de Galles.

« Cette Coupe du Monde sera très ouverte. Il n’y a pas vraiment de favori à mes yeux »

Quels sont vos favoris pour ce Mondial 2022 ?

Cette Coupe du monde sera très ouverte. Il n’y a pas vraiment de favori à mes yeux. Les équipes sud-américaines ne sont pas mal, surtout au Qatar, où les conditions météorologiques seront un peu extrêmes. En Europe, il y a certaines équipes, comme l’Espagne, avec des jeunes joueurs, qui peuvent bien s’en sortir. La Belgique a une bonne forme, mais elle tombe toujours au dernier moment, et elle nous déçoit toujours. L’Angleterre, pourquoi pas. Il y a de bons joueurs, ce n’est pas exclu. Aucune équipe africaine n’a encore gagné la Coupe du monde, et je ne pense pas que ce sera le cas. Personnellement, je mise sur le Brésil.

Et la France ?

La France, c’est un peu comme l’Angleterre. Il manque quelque chose, mais je ne saurais dire quoi.

Quel regard portez-vous sur le football moderne, par rapport à votre époque ?

C’est complètement différent. Aujourd’hui, le football est plus professionnel. Sur le terrain, le jeu va plus vite, le ballon et les chaussures sont plus légers, donc ça augmente aussi la vitesse. Le football est, en général, plus rapide.

Qui sont vos attaquants préférés aujourd’hui ?

Étant un peu chauvin vis-à-vis de Liverpool, je ne peux que mentionner Mohamed Salah. Robert Lewandowski est, pour moi, le meilleur joueur cette année. Si je regarde en Angleterre, Harry Kane aussi.

Karim Benzema a été sacré Ballon d’or 2022 : que pensez-vous de ce choix ?

Il mérite tout à fait ce Ballon d’Or, surtout à son âge, 33-34 ans. Normalement, c’est toujours Messi ou Ronaldo. C’est bien de voir ce trophée aller à quelqu’un d’autre. Surtout quand on voit ses performances récentes.

Un mot sur votre club de cœur Liverpool : comment voyez-vous l’évolution de ce club mythique ?

Liverpool a réalisé une très belle saison la saison dernière. L’équipe était en lice pour quatre trophées, elle en a gagné deux. Ce qui n’était pas mal. Cette saison commence plus lentement, c’est un peu une déception. Mais les compétitions ont commencé très, très tôt à cause de la Coupe du monde. Les joueurs sont peut-être un peu fatigués. Il faut juste attendre que les choses se mettent en place et qu’ils reprennent du poil de la bête.

Quel impact cette Coupe du monde en hiver peut avoir sur la suite de la saison ?

Les joueurs sont des êtres humains, ce ne sont pas des robots. Ils n’ont pas des batteries rechargeables. Il faut vraiment s’en occuper et les soigner. Pour ceux qui ne participent pas [au Mondial], ça ira. Mais ceux qui vont y participer seront éreintés.

Les joueurs jouent-ils trop de matches aujourd’hui ?

Oui. Il y en a trop.