samedi 20 avril 2024
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Géopolitique
Dans les coulisses de l’OSCE

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Albert II et John Mc Cain
Albert II et John Mc Cain © Photo Gaetan Luci/Palais Princier

Le Grimaldi Forum accueillait la 21ème assemblée de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) du 5 au 9 juillet.

Le Grimaldi Forum s’est, cinq jours durant, transformé en Diplomatie Forum. Le centre des congrès monégasques a reçu les délégations de 54 pays à l’occasion de la 21ème assemblée de l’OSCE. Cinq jours de débats inaugurés par le discours du ministre d’Etat Michel Roger qui a appelé « au dialogue et à l’action permanente dans un monde en mutation permanente ». Suivi par celui du président du conseil national, Jean-François Robillon, pour qui « l’ère du « village global » et le règne des marchés financiers sur l’économie réelle, la crise financière internationale et la résurgence de tensions politiques de par le monde appellent à une profonde refonte de nos modes de gouvernance ». Traite des êtres humains, racisme, libertés, parité des sexes et des minorités, terrorisme, énergies renouvelables, les sujets abordés ont couvert l’ensemble des thèmes de société. L’un des rapporteurs pointait notamment « la difficulté d’obtenir des données fiables sur les incidents racistes dans les pays de l’OSCE ». Le projet de résolution sur la parité notait des progrès réalisés par de nombreux Etats tant dans la mise en œuvre des droits pour les minorités que dans l’amélioration de l’égalité des sexes. L’intitulé des débats se focalisait parfois sur une seule nation, comme l’Ukraine et le Bélarus. Dans le premier projet, les parlementaires appelaient à la libération des prisonniers politiques à l’instar de l’ex-premier ministre ukrainienne Yulia Tymoshenko. Le second dénonçait les multiples restrictions de libertés et inégalités dont fait l’objet la population biélorusse, réprimée par la dictature.

Le soutien de Mc Cain aux opposants russes
Le Russe Sergei Magnitsky fut l’autre opposant politique à avoir été placé au centre des débats. Avocat russe, il fut arrêté pour des motifs d’ordre politique, torturé et tué dans une prison en novembre 2009. Le projet de résolution le concernant faisait clairement référence à la question des droits de l’Homme en Russie. Il demandait aux pays de l’OSCE des sanctions en matière de visas et les gels des avoirs des responsables du décès de Magnitsky. Un point qui a reçu le soutien appuyé du sénateur républicain et ex-candidat à la Maison Blanche en 2008, John Mc Cain. « Le meurtre de Sergei Magnitsky est un exemple de l’omniprésente et systémique corruption au sein du gouvernement russe. A ce jour, personne n’a été tenu pour responsable de sa mort […] Sergei Magnitsky inspire maintenant de plus en plus de citoyens russes. Ils se lèvent et se prononcent en faveur de la liberté, de la démocratie et de lois. Comme nous, ils ne veulent pas d’une Russie faible et instable. Ils veulent un pays efficace, juste et légal », a déclaré John Mc Cain, qui a rencontré Albert II et Michel Roger lors de son déplacement en principauté.
La Russie, justement, portait un projet sur l’amélioration de la surveillance électorale dans les Etats participants de l’OSCE. Un débat des plus suivis puisque le texte a été étudié et discuté paragraphe par paragraphe. « Nous n’avons pas de méthode commune sur la surveillance électorale », pointait un membre de la délégation russe, Valéry Raschkin. Mais des voix se sont élevées, ne souhaitant pas d’un « accord consensuel qui tuerait l’observation ». Par conséquent, plusieurs paragraphes du projet ont été rejetés lors du vote de la résolution.

Une assemblée au cœur des conflits
L’assemblée donnait aussi à voir une cartographie des conflits existants sur la planète, qu’ils soient gelés ou en cours. Avec en toile de fond, le cas syrien « préoccupant » pour l’OSCE. Plusieurs guerres de « territoires » subsistent en Europe. En témoignaient notamment les joutes verbales musclées entre délégations azérie et arménienne, dont les pays se disputent la région du Haut-Karabakh malgré un cessez-le-feu datant de 1994. Autre exemple, cette intervention, dans le même débat, d’un membre de la délégation turque qui affirmait « ne pas reconnaître la nouvelle présidence de l’Union européenne ». A savoir Chypre. L’île est en effet occupée par la Turquie au nord depuis 1974 et par la Grèce sur le reste du territoire. Plusieurs pays se sont, eux, inquiétés d’une cyber-criminalité en progression. Virus, cyber-attaques entre Etats, la guerre diplomatique se transpose en effet de plus en plus sur le web. « La cyber-sécurité est un des défis majeurs de demain », a résumé un parlementaire portugais.
Printemps arabe
Les parlementaires se sont offerts une parenthèse traitant des répercussions des révoltes du printemps arabe. Après les élections en Tunisie et en Egypte qui ont vu les victoires respectives du parti Ennahda et des Frères musulmans, c’était au tour de la Libye de s’exprimer démocratiquement le week-end dernier. Une élection remportée par les libéraux. « Nous sommes très heureux de passer de la révolution à la démocratie. S’il n’y a pas de sécurité à travers le monde, personne ne peut être libre », indiquait en conférence de presse, Mohamed Abdul-Aziz, député ministre des affaires étrangères de Libye. Bernard Sabella, qui dirigeait la délégation de l’Autorité palestinienne, a, lui, affirmé que « les Palestiniens aspiraient à la paix et à être partenaires de l’Europe ». L’Autorité nationale palestinienne s’est vue par ailleurs octroyer le statut de partenaire méditerranéen pour la coopération. L’élu monégasque et vice-président de l’assemblée de l’OSCE, Jean-Charles Gardetto est intervenu en tant qu’auteur du projet de résolution sur les démocraties émergentes du monde arabe. Il s’était déjà exprimé sur le cas égyptien fin juin devant l’assemblée du Conseil de l’Europe. Il s’était alors interrogé sur « l’équilibre des pouvoirs », « la place de l’armée » dans la nouvelle Egypte ainsi que sur « la conciliation de la charia avec l’Etat de droit et le respect des droits de l’homme ».
Et Monaco dans ce grand raout géopolitique, quelle a été sa place, outre celle du pays hôte?? Un texte se rapportait particulièrement à la Principauté puisqu’il traitait de l’action des petits Etats au sein de l’OSCE. La contribution de ceux-ci aux organisations internationales y était soulignée et l’organisation de la 21ème assemblée par Monaco saluée. Le projet, proposé par la délégation du Liechtenstein, reconnaissait qu’il était « essentiel de maintenir et de garantir la sécurité et l’identité des petits Etats pour assurer le maintien de leur souveraineté et de leur stabilité ». La résolution indiquait de plus que « les différents systèmes économiques et sociaux » des petits Etats devaient « être respectés dans leur diversité ». Ce texte renforcera peut-être la conviction des autorités monégasques de ne pas sacrifier les spécificités de la Principauté au prix d’une éventuelle intégration dans certaines unions comme l’Espace économique européen.