vendredi 26 avril 2024
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Maguy Maccario-Doyle : « Des liens indélébiles entre Monaco et les États-Unis »

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S’il n’est pas dans les usages diplomatiques qu’un ambassadeur étranger commente la politique intérieure du pays dans lequel il effectue sa mission, Maguy Maccario Doyle a accepté pour Monaco Hebdo de revenir sur les liens qui unissent la principauté aux États-Unis.

Elle précise également les priorités qui seront les siennes pour les quatre années à venir, pendant la présidence de Joe Biden.

Avez-vous d’ores et déjà adressé vos félicitations à Joe Biden, ou devez-vous attendre que le président sortant, Donald Trump, reconnaisse sa défaite ?

Dès que le système électoral américain confirme les résultats, les félicitations au président élu peuvent être envoyées. Aussi, j’adresserai mes félicitations officielles au président élu Joe Biden, et à la vice-présidente Kamala Harris, prochainement. J’ai par ailleurs prévu d’assister le 20 janvier 2021 à la cérémonie d’inauguration du nouveau président, sauf cas de force majeure.

Quelles sont vos priorités pour la période de quatre ans qui s’ouvre, s’agissant des relations américano-monégasques ?

La première priorité, c’est la promotion des questions liées à l’environnement. Le combat inlassable que mène notre prince souverain depuis des années pour la préservation de l’environnement, notamment des fonds marins, et le développement durable, est reconnu et apprécié dans le monde entier. Je souhaite contribuer à cette action auprès de la nouvelle administration américaine, qui a d’ores et déjà signalé son intention d’intensifier ses efforts en matière de changement climatique, et multiplier les échanges dans ces domaines avec différentes institutions, fondations et décideurs américains.

Et la deuxième priorité ?

La deuxième priorité, c’est la promotion des questions humanitaires. En effet, la lutte en faveur de l’égalité des genres et celle pour l’amélioration de la condition des femmes et des filles demeurent des enjeux de taille de notre temps et un objectif politique majeur que nous soutenons, dans toute la mesure du possible, avec nos interlocuteurs américains.

D’autres domaines prioritaires ?

La troisième priorité, relativement nouvelle et particulièrement fascinante, c’est la promotion de nouveaux secteurs industriels, en particulier le secteur spatial, devenu aujourd’hui un élément incontournable de la vie quotidienne. La preuve, c’est que les télécommunications, la navigation par GPS, l’observation de la Terre dans l’étude de notre planète et la science dans l’espace (biologie, astrobiologie…) sont toutes tributaires du lancement de satellites. Consciente de l’importance de ce secteur économique et désireuse de diversifier ses activités à l’avenir, la principauté, qui, comme vous le savez, a déjà procédé à la mise en orbite de satellites, étudie à présent la possibilité de créer, dans un premier temps, un Bureau des Affaires spatiales, et, éventuellement, une véritable Agence spatiale. Une telle initiative permettrait à notre principauté d’affirmer son rôle actif dans le lancement et la réalisation de projets spatiaux innovants, tout en assurant une activité économique durable.

Quoi d’autre ?

Pour ma part, j’ai l’intention d’apporter mon écot à cette entreprise en attirant l’attention d’institutions, d’organismes et d’agences américaines spécialisés sur les efforts déployés en principauté dans ce domaine : à ce sujet, je ne peux que me réjouir de la récente nomination de Ellen Stofan, de l’institut Smithsonian, à la tête du groupe chargé de l’évaluation des activités spatiales de la NASA, par l’équipe du président élu. Ellen Stofan est très au fait de nos activités dans ce domaine pour être venue chez nous à plusieurs reprises dans le cadre de nos programmes sur l’espace.

Et dans le domaine culturel ?

La quatrième priorité concerne la promotion des activités culturelles, un facteur primordial de rayonnement culturel de la principauté dans le monde en général, et aux États-Unis en particulier. Pour commencer, je veux citer le fort engagement continu de la fondation princesse Grace dans la promotion des activités artistiques aux États-Unis, par la distribution de bourses aux artistes émergents et de prix aux artistes confirmés, notamment dans les domaines du film, de la danse et du théâtre. Par ailleurs, nos représentants artistiques bénéficient d’une grande cote de popularité ici. Je pense par exemple aux ballets de Monte-Carlo, très prisés aux États-Unis, même s’ils ont dû reporter, pour le moment, à septembre 2021 leur tournée dans la capitale américaine prévue pour février 2021, en raison de la pandémie.

D’autres structures culturelles de la principauté sont reconnues aux Etats-Unis ?

La qualité musicale réputée de l’orchestre philharmonique de Monte-Carlo (OPMC) suscite par ailleurs l’admiration de nombreux mélomanes américains, et, dans un autre registre, les fréquentes tournées américaines des Petits Chanteurs de Monaco reçoivent chaque fois un accueil très chaleureux partout où ils se produisent. Sans oublier l’importance qu’a acquise depuis plusieurs années la fondation de la princesse Charlène dans le domaine sportif, notamment la promotion du rôle des sports aquatiques et de la natation pour la sécurité et le bien-être physique et psychique des jeunes Américains. En somme, comme vous pouvez le constater, nous avons en perspective un bon nombre de tâches stimulantes à accomplir dans les années à venir.

Ambassade de Monaco aux Etats-Unis © Photo DR

« A l’occasion de sa visite aux États-Unis, en 1921, le prince Albert 1er avait été reçu à la Maison Blanche par le président américain Warren Gamaliel Harding (1865-1923), dont la résidence personnelle à Washington accueille aujourd’hui, détail amusant… la résidence de l’ambassadeur de Monaco aux États-Unis ! »

Comment évaluez-vous l’importance des relations entre Monaco et les États-Unis ?

Les liens indélébiles qui unissent l’histoire de la principauté à celle des États-Unis remontent à la fin de la Guerre civile américaine, même si ce n’est qu’en octobre 2006 que nos deux pays ont élevé leurs relations diplomatiques du niveau consulaire au niveau ambassade. Ces liens ont encore été soulignés dans un chaleureux message qui nous a été adressé le 19 novembre 2020 par le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, à l’occasion de la fête nationale monégasque.

Il y a également eu le mariage de Grace Kelly avec le prince Rainier ?

En effet, nos liens affectifs avec les États-Unis se sont véritablement scellés lors du mariage de l’égérie du cinéma américain, l’actrice Grace Kelly (1929-1982), avec le prince Rainier III (1923-2005), en avril 1956, soit il y a plus de 60 ans. Le prince Albert II, très attaché à son héritage américain de par sa mère, la princesse Grace, est très engagé dans le renforcement des liens privilégies entre nos deux pays. Aujourd’hui, certaines traditions américaines sont observées en principauté, comme Thanksgiving par exemple.

Certains liens entre les Etats-Unis et Monaco sont moins connus du grand public ?

Mais le public est peut-être moins familier avec le fait que son aïeul, le prince Albert 1er (1848-1922), qui faisait déjà de nombreux séjours aux États-Unis au début du siècle dernier, a prononcé son fameux discours sur l’océan le 21 avril 1921 devant les membres de l’académie nationale des sciences à Washington, où il mettait déjà en garde contre le danger que représentait la surexploitation des ressources marines par les nouvelles technologies, à l’époque les chalutiers à vapeur. À ce propos, pour en marquer le 100ème anniversaire en 2021, nous nous proposons de célébrer cet événement avec le concours du comité de commémoration du prince Albert 1er (lire notre article publié dans Monaco Hebdo n° 1174) et en collaboration avec l’académie nationale des sciences de Washington. Et, enfin, ce que l’on ignore peut-être aussi, c’est qu’à l’occasion de sa visite aux États-Unis, en 1921, le prince Albert 1er avait été reçu à la Maison Blanche par le président américain Warren Gamaliel Harding (1865-1923), dont la résidence personnelle à Washington accueille aujourd’hui, détail amusant… la résidence de l’ambassadeur de Monaco aux États-Unis !

Election américaine : Joe Biden – Donald Trump A Monaco, la prudence des résidents américains

La personnalité controversée d’un candidat républicain pour le moins excentrique ? L’attente d’une validation définitive de résultats qui envoient tout droit le démocrate Joe Biden à la Maison Blanche ? Un « effet Covid-19 », qui a contribué à développer le vote par correspondance ? Le symbole d’une rupture marquée dans la société américaine, entre deux camps qui semblent irréconciliables ? Toujours est-il qu’à Monaco, les résidents originaires des États-Unis ne se précipitent pas pour donner leur avis sur la récente campagne électorale. « No comment, indique par exemple Tania [son prénom a été modifié], qui gère une entreprise. Cette élection a été particulière à plus d’un titre. Je ne souhaite pas me brouiller en m’affichant, en tant que simple citoyenne, en faveur de Joe Biden ou de Donald Trump. » George [son prénom a été modifié], qui travaille dans le secteur bancaire, est sur la même longueur d’onde : « Aujourd’hui plus qu’hier, prendre position publiquement, notamment pour Donald Trump, peut être mal vu. Cette élection a généré beaucoup de tensions entre les deux camps. Tout le monde espère que Joe Biden parviendra à les apaiser, et que Donald Trump saura contribuer à cette normalisation en reconnaissant sa défaite, pour une passation du pouvoir dans les règles de l’art. » Démocrate, Siri Trang Khalsa est, pour sa part, convaincue que le peuple américain a « fait le bon choix ». « C’est une période passionnante qui s’ouvre, estime-t-elle. L’image des États-Unis a été abîmée par la présidence de Donald Trump. Je suis persuadée que Joe Biden et Kamala Harris vont faire ce qu’il faut pour que le pays retrouve son aura et ses valeurs. La campagne a été longue, marquée par la crise du coronavirus, épuisante parfois, et incertaine malgré ce que prédisaient les sondages. Mais une page se tourne, celle de la présidence Trump. Enfin. »