Edito n°1282 : « Nudes »

Depuis quelques années, les affaires de cyber-harcèlement se multiplient. Menaces, insultes, diffusion de photos intimes, intimidation… Quels que soient les milieux sociaux, que l’on soit présent ou non sur Internet et les réseaux sociaux, tout le monde peut être victime de ce fléau. Cette semaine, Monaco Hebdo consacre un dossier au cyber-harcèlement chez les jeunes, chez qui les violences en ligne, souvent sexistes et sexuelles, peuvent devenir une réalité quotidienne. Pour détruire une réputation et faire mal, les cyber-harceleurs n’hésitent pas à réaliser des montages de photo, avec le visage de la personne harcelée ajouté sur le corps d’une femme ou d’un homme nu par exemple, et à les publier ensuite sur les réseaux sociaux. Ils diffusent aussi des “nudes”, c’est-à-dire des photos dénudées faites par leurs victimes dans un cadre privé. Souvent passionnés de nouvelles technologies, ils peuvent aussi faire appel à des logiciels d’intelligence artificielle. Entre leurs mains, ces derniers deviennent de redoutables outils pour créer de fausses, mais très réalistes, photos ou vidéos, permettant de salir la personne que l’on souhaite. A cela, le chantage, et même des menaces de mort et de viol, peuvent venir s’ajouter. L’adresse personnelle de la victime est diffusée, des incitations au suicide peuvent survenir. Bref, il n’y a plus de limites. La frontière entre monde virtuel et physique devient floue et tend à disparaître. Derrière le “slut-shaming”, le “deepfake”, le “sextorsion”, le “revenge porn”, le “doxing”, ou le “flaming” se cachent autant de manières différentes d’humilier et de blesser, à travers Internet et les réseaux sociaux. D’après des chiffres communiqués par Stopfisha, une association qui lutte contre le cybersexisme et les cyberviolences sexistes et sexuelles, 73 % des femmes ont déjà été victimes de violences sexistes ou sexuelles en ligne. Face à cet inquiétant phénomène, des associations se dressent contre les cyber-harceleurs, et poussent les victimes à porter plainte. Mais identifier les coupables n’est pas simple. Cela nécessite des moyens techniques et des compétences très pointues que la police et la justice n’ont pas toujours. En France, d’après une étude réalisée par Ipsos en partenariat avec l’association Féministes contre le harcèlement, 67 % des victimes de cyberharcèlement qui ont porté plainte ont fait face à un refus de ce dépôt. Résultat, les sanctions restent peu nombreuses, ce qui vient conforter le sentiment d’impunité des cyber-harceleurs. Pourtant, l’arsenal juridique existe. En France, depuis 2016, la diffusion de contenus intimes non consentie est punie par deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. Et jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros pour les dossiers où la victime est mineure. A Monaco, les élus du Conseil national ont voté à l’unanimité, le 24 novembre 2021, la loi sur le harcèlement et la violence en milieu scolaire. Ce texte allie prévention et répression, avec des peines de prison qui vont de trois mois à deux ans, et de 9 000 à 90 000 euros d’amende. Pour les cas où une incitation au suicide a pu être démontrée, les sanctions peuvent s’étendre jusqu’à cinq ans d’emprisonnement. Enfin, pour les cas de harcèlement à caractère sexuel, comme le “revenge porn”, la peine peut atteindre dix ans de prison et 180 000 euros d’amende. Reste désormais à poursuivre le travail de sensibilisation et d’éducation aux outils numériques. Pour faire comprendre que dans le monde virtuel, les règles sociales sont les mêmes que dans le monde physique.

Au sommaire de ce numéro :

SOCIETE/ Santé mentale des jeunes : combattre le fléau du cyber-harcèlement
– Frédérique de Chambure : « En cas de harcèlement, l’effet peut être dévastateur »
– Serge Tisseron : « Une jeune victime est plus vulnérable qu’une victime majeure »
– Mathilde Le Clerc : « Il faut aussi libérer la parole »

POLITIQUE/ Création d’une caisse de retraite complémentaire monégasque 
Franck Lobono : « A Monaco, en matière d’emploi et de retraite, nous avons les capacités d’être autonomes »

INTERNATIONAL/ Groupe d’États contre la corruption du Conseil de l’Europe
Thomas Brezzo : « Il y a un équilibre à trouver »

SOCIETE/ Accès automobile à la principauté, Bretelle de Beausoleil : fin des travaux en vue

SOCIETE/ Trains bondés, routes engorgées… Les premiers signaux d’alerte, avant la pleine saison

SOCIETE/ Département de l’équipement, de l’environnement et de l’urbanise : « Le plan de transport reste inchangé »

SPORT/ Le MBA prêt à rebondir après sa relégation

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