samedi 27 avril 2024
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Corinne Bertani : « Monaco permet de combiner plusieurs activités en un seul et même lieu »

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Alors que Monaco cherche à doper son attractivité, la principauté dispose-t-elle d’une offre commerciale suffisamment séduisante, face aux centres commerciaux « poids lourds » que sont Cap 3 000 et Polygone Riviera dans les Alpes-Maritimes, et The Mall, en Italie, à Sanremo ? C’est l’une des questions que Monaco Hebdo a posé à la vice-présidente pour le commerce et l’attractivité de la commission des finances et de l’économie nationale du Conseil national, Corinne Bertani.

Globalement, l’offre commerciale à Monaco est-elle cohérente dans sa structuration et suffisamment attractive ?

Dans sa globalité, l’offre commerciale à Monaco est présente dans tous les quartiers de Monaco, avec notamment plusieurs supermarchés, diverses boulangeries-pâtisseries, de nombreux magasins de vêtements et accessoires, et encore plein d’autres types de commerces. Toutefois, il est important de constater que concernant le boulevard des Moulins, qui remonte jusqu’à la place des Moulins, il y a besoin d’une réelle rénovation. Il devient nécessaire de moderniser l’ensemble des aménagements extérieurs de ce quartier, pour les remettre au goût du jour. De plus, il faut repenser le cheminement pédestre entre le One Monte-Carlo, le boulevard des Moulins et la place des Moulins, pour inciter les promeneurs à ne pas s’arrêter uniquement aux magasins présents dans le Carré d’Or. Il faut que le gouvernement réfléchisse à des solutions pour apporter un nouvel élan dans cette zone.

Que fait le Conseil national à son niveau ?

Le Conseil national a déjà sensibilisé à de nombreuses reprises le gouvernement à ce sujet, et nous mettrons tout en œuvre pour que ce dossier avance. Pour exemple, d’autres quartiers se sont redynamisés, comme le quartier de la Condamine, qui possède de nombreuses enseignes d’habillement porteuses, qui lui ont donné un nouveau souffle, ainsi qu’une offre de restauration très variée. On peut aussi prendre pour exemple le quartier du Larvotto, qui depuis la fin des travaux de restructuration, possède une offre de restauration de qualité, avec des concepts différents, mais aussi de nouvelles boutiques, très à l’écoute des consommateurs, ce qui en fait un quartier très vivant pour les résidents et les touristes.

Les commerces du Rocher ont souffert : quelle est la situation aujourd’hui ?

Nous le savons, le commerce est une activité qui évolue et se renouvelle sans cesse. Lors de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, les commerçants de Monaco-Ville ont énormément souffert. Toutefois, cette épreuve leur a permis de prendre conscience de la nécessité de se diversifier et de repenser pour certains leur offre commerciale. Ainsi, même s’ils continuent à proposer des souvenirs pour les touristes, ils font désormais beaucoup d’efforts pour se renouveler. Concernant le taux de fréquentation, je pense pouvoir dire qu’ils ont enfin retrouvé une réelle activité cette saison.

« Concernant le boulevard des Moulins, qui remonte jusqu’à la place des Moulins, il y a besoin d’une réelle rénovation. Il devient nécessaire de moderniser l’ensemble des aménagements extérieurs de ce quartier, pour les remettre au goût du jour »

Alors que Cap 3 000 et Polygone Riviera s’agrandissent régulièrement et captent l’essentiel de la clientèle dans les Alpes-Maritimes, et que The Mall à Sanremo capte aussi une partie de la clientèle [à ce sujet, lire l’interview du directeur de The Mall Luxury Outlets, Giorgio Motta : « Monaco est une cible très importante pour nous »], Monaco peut-il vraiment rivaliser ?

Il est avéré que ces deux centres commerciaux attirent de nombreux consommateurs, mais Monaco a fait déjà beaucoup d’investissements pour continuer à attirer les clients. Je pense par exemple au One Monte-Carlo. Bien entendu, notre centre commercial de Fontvieille actuel est vieillissant, et il ne peut donc pas réellement concurrencer ces deux complexes. Au Conseil national, nous sommes persuadés que lorsque le nouveau centre commercial sera livré, il sera un véritable atout pour la principauté. De plus, Monaco possède de nombreux autres atouts.

De quels atouts dispose Monaco ?

Comme c’est une ville-État, la principauté permet de combiner plusieurs activités en un seul et même lieu. Permettez-moi d’imaginer une journée-type pour un touriste : il peut tout à fait venir passer la journée à Monaco et commencer sa journée par visiter l’un de nos nombreux musées, puis se faire un bon déjeuner parmi l’un de nos nombreux restaurants, pour ensuite continuer son après-midi en faisant du shopping, et terminer sa journée par un spectacle. Ce n’est qu’un exemple, mais vous conviendrez que cela n’a plus rien à voir avec un simple centre commercial !

Le week-end, malgré le retour de la Monaco Sunday Experience, la principauté sonne creux : que faire ?

Le concept de Monaco Sunday Experience est une opération ponctuelle pendant toute la période estivale en principauté, pour que les commerces restent ouverts le dimanche. C’est un bon concept, qui fonctionne. Mais peut-être faudra-t-il réfléchir à une évolution de cette initiative pour les prochaines années. Le Conseil national n’est pas l’exécutif, mais nous sommes à la disposition du gouvernement pour apporter notre soutien dans ce type d’actions, pour redynamiser Monaco.

Corinne Bertani Commerce Attractivité Conseil National
© Photo Conseil National

Alors que l’on en parle depuis 2016, la grande restructuration du centre commercial de Fontvieille, qui a été inauguré le 20 novembre 1992, est prévue pour 2027, avec un budget estimé à plus de 300 millions d’euros : pourquoi s’est-il écoulé autant de temps ?

Pour pouvoir démarrer les travaux pour ce projet d’envergure, il faut au préalable avoir déménagé l’ensemble des bureaux administratifs situés dans le centre commercial de Fontvieille, l’espace Léo Ferré, ainsi que la collection de voitures du prince Albert II. C’est chose faite concernant la collection de voitures depuis l’inauguration du nouveau musée sur le port Hercule. Concernant les bureaux et l’Espace Léo Ferré, il faut attendre la fin du chantier de l’îlot Pasteur, qui livrera le nouveau collège, la nouvelle salle Léo Ferré, ainsi que des milliers de m2 pour des espaces de bureaux. Cette opération doit être livrée d’ici 2024 et elle permettra enfin de lancer ces travaux tant attendus. Monaco ayant des contraintes d’espaces restreints, les opérations sont souvent imbriquées et nécessitent que certaines se terminent pour que d’autres démarrent. En attendant, nous restons persuadés que ces deux projets d’envergure seront de véritables atouts pour redynamiser la principauté.

Que sait-on du calendrier et du déroulé de ce chantier ?

A ce jour, les dernières informations que nous avons eu de la part du gouvernement nous indiquent un démarrage des travaux pour fin 2023, et une livraison prévue pour 2027.

Les 36 commerçants étaient dans le flou concernant le calendrier et le déroulé du chantier : sont-ils informés et rassurés, désormais ?

Les commerçants du centre commercial ont été reçus ensemble, tout d’abord, puis individuellement par la suite. Les élus du Conseil national ont régulièrement sensibilisé le gouvernement sur la nécessité d’accompagner, au cas par cas, l’ensemble des commerçants, notamment pendant la phase des travaux, mais aussi pendant la phase de réinstallation, lors de la livraison des nouveaux locaux. Nous resterons très vigilants sur ce sujet, jusqu’à la livraison du nouveau centre commercial de Fontvieille.

« Le concept de Monaco Sunday Experience est une opération ponctuelle pendant toute la période estivale en principauté, pour que les commerces restent ouverts le dimanche. C’est un bon concept, qui fonctionne. Mais peut-être faudra-t-il réfléchir à une évolution de cette initiative pour les prochaines années »

Avec pour seules locomotives Carrefour et McDonald’s, quels autres poids lourds faudrait-il attirer, pour rendre l’offre commerciale du centre commercial de Fontvieille plus attractive ?

Il est pour moi trop tôt pour parler de la future offre commerciale du centre commercial. Nous le voyons régulièrement dans la presse, le commerce évolue très vite, et les enseignes d’aujourd’hui ne seront peut-être pas celles de demain. Néanmoins, je peux vous indiquer que le gouvernement est en contact avec des professionnels du commerce qui pourront leur apporter leurs compétences pour permettre à ce futur centre commercial de répondre au mieux aux besoins des consommateurs, lors de sa réouverture.

Avec cinq étages et 34 000 m², le futur centre commercial de Fontvieille verra sa surface commerciale doublée : comment va s’articuler l’offre et qui choisira les commerçants ?

Comme pour votre précédente question, il est trop tôt pour discuter de l’offre commerciale et des futurs commerçants.

Un cinéma multiplexe de quatre salles est prévu : qui va hériter de sa gestion : la famille Tréhet qui exploite un cinéma à Monaco depuis 1973 [à ce sujet, lire l’interview d’Arthur Tréhet : « Le cinéma en principauté, c’est une affaire de famille »] ou un opérateur extérieur, comme Pathé, par exemple ?

En effet, dans le futur centre commercial, il y aura bien un cinéma dernière génération comme nous l’avons demandé au Conseil national depuis 2018. Mais en ce qui concerne la gestion, nous n’avons pas encore d’information à ce sujet. Je pense que c’est aussi un sujet pour lequel il est trop tôt d’en parler, pour l’instant.

Sur les documents de présentation, un télécabine entre le Rocher, Fontvieille et le Jardin exotique était mis en scène : c’est une bonne idée qu’il faut maintenir dans le projet final ?

Au vu des dernières informations fournies par le gouvernement, le projet de télécabine est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît, et il n’est pas prévu, pour le moment.

Une tour domaniale de 41 appartements fait aussi partie de ce projet : ce nombre de logements pour les Monégasques est-il satisfaisant ?

Lors de la précédente mandature, le logement était l’une de nos préoccupations principales. En effet, nous étions dans une période de pénurie vraiment conséquente. Ainsi, nous avions demandé au gouvernement de réfléchir à de nouvelles possibilités d’opérations domaniales, en plus de celles initialement prévues. C’est ainsi qu’a été proposé de profiter de la restructuration du centre commercial pour implanter une nouvelle opération domaniale. Cette opération sera donc plus que bienvenue.

Corinne Bertani Commerce Attractivité Conseil National
© Photo Conseil National

Un parc de presque deux hectares, avec environ 2 000 arbres est aussi prévu : végétaliser les villes c’est bien, mais c’est aussi gourmand en eau, donc comment gérer cette contradiction, à l’heure où l’eau s’impose de plus en plus comme un bien extrêmement précieux ?

Le réchauffement climatique est la plus grande problématique du XXIème siècle. Pendant longtemps, nous avons minéralisé les villes, alors que nous savons bien désormais qu’il est nécessaire de maintenir une certaine végétalisation pour permettre de réguler naturellement la température ressentie en ville. Il me semble donc que d’inclure un parc de presque deux hectares dans ce projet est une excellente idée. Toutefois, il faut bien réfléchir à la gestion de l’eau pour entretenir cet espace vert. Il existe à ce jour de nombreuses solutions permettant une meilleure gestion de l’eau, comme, par exemple, prévoir la récolte des eaux de pluies pour les réutiliser pour l’arrosage, intégrer du goutte-à-goutte sur l’ensemble du parc pour pouvoir irriguer de manière très contrôlée, et encore plein d’autres solutions, je n’en doute pas. Le prince Albert II est très préoccupé par la préservation de notre planète et par l’écologie. Je suis donc persuadée que ces contraintes font partie du cahier des charges qu’il a fourni au gouvernement pour la construction de ce projet.

« Au niveau de l’offre commerciale, les deux priorités actuelles sont la rénovation du boulevard des Moulins, ainsi que le démarrage des travaux du centre commercial de Fontvieille »

Le chiffre d’affaires du centre commercial de Fontvieille dépasse 120 millions d’euros par an : après travaux, à combien se montera le futur chiffre d’affaires ?

Il est beaucoup trop tôt pour pouvoir annoncer des chiffres concrets, mais nous pouvons en effet supposer que si le centre commercial de Fontvieille actuel possède un chiffre d’affaires de plus de 120 millions d’euros par an, en doublant sa surface, et en proposant de nombreux nouveaux services, il est évident que nous pourrons espérer des recettes nettement supérieures.

D’une manière générale, quelles sont les grandes réformes à entreprendre pour doper l’activité commerciale à Monaco ?

L’un des sujets majeurs qui préoccupe l’ensemble des élus du Conseil national est notre attractivité. Nous avons déjà participé à des réunions menées par le délégué interministériel à l’attractivité et à la transition numérique, Frédéric Genta, pour échanger sur l’ensemble des sujets liés à l’attractivité de notre pays. En effet, c’est un sujet important, et qui impacte de nombreux secteurs, que ce soit le tourisme, l’offre commerciale, notre attractivité pour recruter, etc. Il est primordial que nous ayons des échanges réguliers avec le gouvernement à ce propos, car nous sommes là pour relayer les attentes et les besoins de la population et des pendulaires. L’attractivité est un sujet global et très vaste, et nous savons que Frédéric Genta avance sur les points les plus stratégiques. Au niveau de l’offre commerciale, les deux priorités actuelles sont la rénovation du boulevard des Moulins, ainsi que le démarrage des travaux du centre commercial de Fontvieille. La livraison des nouvelles boutiques du One Monte-Carlo a été un réel succès, mais elle répond uniquement à une offre haut de gamme. Il faut donc désormais permettre au reste de l’offre commerciale en principauté de se restructurer, et de se rénover, pour inciter touristes, résidents, Monégasques et pendulaires à vouloir effectuer l’ensemble de leurs achats en principauté.