Edito n° 1189 : Indépendante

Quelle place occupe le livre et la littérature, au sens large, à Monaco ? C’est la question posée par Monaco Hebdo cette semaine. On sait qu’il n’y a plus de librairie indépendante en principauté depuis longtemps. Depuis quand ? Les différentes personnes que nous avons interrogées n’ont pas pu donner de date précise. Michèle Dittlot, vice-présidente de la commission de la culture et du patrimoine du Conseil national se souvient en tout cas que « Monaco a compté plusieurs librairies dans le passé », et elle regrette cette époque aujourd’hui révolue. Nous avons aussi interviewé Charlotte Casiraghi qui, elle aussi, déplore l’absence d’au moins une librairie indépendante en principauté et aimerait voir émerger un tel projet. La présidente et fondatrice des Rencontres philosophiques de Monaco a expliqué à Monaco Hebdo qu’elle ne pourrait qu’« encourager une telle initiative » et que, sans être « un projet concret » pour elle « pour l’instant », elle y pensait « très souvent ». En tout cas, du côté du gouvernement monégasque, on n’est pas non plus fermé à cette idée, bien au contraire. Mais ce sont les candidats déclarés qui semblent manquer : « Les derniers appels à candidatures publiés en vue de l’attribution de locaux domaniaux ne comportaient aucun dossier pour pareil projet, nonobstant les loyers préférentiels pratiqués. » Pendant ce temps, à Beausoleil, aidés par la mairie, les frères Sinnah ont ouvert la Librairie du D., une librairie-café indépendante spécialisée dans le manga et la bande dessinée. Avec ce coup de pouce municipal, ce projet semble viable, nous ont expliqué les trois fondateurs, qui disent « marcher à la commande. Et les clients comprennent que nous ne sommes pas plus chers qu’Amazon. » Jean-Yves Mollier, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université Paris Saclay/Versailles Saint-Quentin et spécialiste de l’histoire de l’édition, du livre et de la lecture, estime pour sa part que les librairies indépendantes sont en forme ascendante depuis 2010, et que le public plébiscite ces lieux de culture, en raison notamment du contact humain et de la qualité du conseil. Une position partagée par Charlotte Casiraghi : « Je trouve cela vraiment dommage qu’aucune librairie indépendante n’existe à Monaco. La lecture appelle un lieu intime, et échanger avec son libraire est important. Une librairie ne se résume pas à la vente de livres. C’est aussi un lieu d’accueil et de vie, où l’on vous conseille et vous oriente dans le choix de vos prochaines lectures. Car chaque librairie fait un choix, propose une sélection de livres, et c’est cela qui est intéressant. […] C’est cela que je recherche en allant flâner dans les librairies. » Reste à savoir quand sera-t-il possible de flâner dans les rayons d’une librairie indépendante monégasque. Pour le moment, la question reste posée.