samedi 20 avril 2024
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Union Monégasque
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Union Monegasque
© Photo Sébastien Dana - Réalis

C’est à l’Auditorium Rainier III que Union Monégasque a présenté son programme le 10 janvier. En déclinant pour chaque thématique (logement, investissement, emploi, santé, etc) ses propositions.

Pour Union monégasque, c’était le grand soir. Le 10 janvier, devant un parterre de plus de 400 personnes, la liste menée par Jean-François Robillon a présenté son programme électoral à l’Auditorium Rainier III. Une soirée didactique démarrée sur une musique de U2 (Where the streets have no name) où la plupart des 153 propositions d’UM ont été égrenées par les 24 candidats. Pas d’attaque personnelle ou de polémique (voir encadré). La mise en scène, axée sur le principe de la table ronde où chacun répondait aux questions des 3 messieurs Loyal de la soirée (Jean-Louis Grinda, Jean-Charles Gardetto et Bernard Pasquier), a volontairement donné la part belle aux valeurs que dit vouloir incarner la liste de la majorité parlementaire. Soit « l’écoute, le dialogue et l’esprit d’équipe ». Une astuce scénique déjà employée lors de la soirée dédiée au logement du 20 décembre (voir MH n° 817 du 10 janvier). « Nous ne nous sommes pas mis derrière un pupitre pour attaquer l’opposition et avoir le lendemain notre tête dans le journal. Nous sommes restés avec vous, entre Monégasques, pour discuter, apprendre, écouter, échanger. C’est une certaine conception de la vie politique que nous voulons illustrer ainsi », a développé Jean-François Robillon. Avant de forcer le trait sur ce qui oppose selon lui les deux listes : « Nous évitons les slogans racoleurs ou les fausses bonnes idées. Ne vous laissez pas entraîner au bal des arrogants. » Et d’ajouter encore, un brin sarcastique : « Si l’opposition savait de quoi elle parlait, elle aurait déposé un peu plus qu’une seule proposition de loi en cinq ans… Ici, à l’Union Monégasque, nous ne nous payons pas de mots, nous travaillons dans la rigueur et l’exactitude. »

Carte de l’unité
Rigueur, humanité, compétence… Union monégasque a tout de même sorti les grands mots pour défendre sa liste et son programme. Tout comme « l’ambiance confiante » qui règne dans le groupe. « Lors de cette dernière mandature, nous avons affronté des clivages et des querelles au sein du conseil national. J’ai assisté à des guerres de clan qui m’ont choqué et attristé. La majorité actuelle est faite des élus qui ont dit non à la discorde et qui ont résisté à la désunion. Depuis quelques années, la majorité que je mène a reconstruit au conseil national l’unité et l’harmonie. La majorité UDM et UNAM travaille en bonne entente. Avec cette liste que je vous propose, c’est la même chose », a ainsi lancé le leader de UM. Alors que Laurent Nouvion accuse justement Robillon d’être responsable de ces querelles épiques et de l’éclatement de la majorité parlementaire, il était logique que le président de l’assemblée donne sa version de l’histoire. Et ce même si les observateurs de la vie politique monégasque y verront un raccourci du mandat et des divorces et remariages qui ont émaillé les 5 dernières années… Ce positionnement, c’était surtout une façon pour Jean-François Robillon d’incarner la carte de l’unité face à la liste composite d’union nationale de Laurent Nouvion, rassemblant les ennemis d’hier, l’UP et R&E, avec les conséquences éventuelles que cela implique à terme. « Je crois que tous ici, nous savons que les querelles d’hier sont encore brûlantes, que l’intérêt personnel les a mises pendant un temps sous le tapis, mais qu’elles resurgiront dès le lendemain de l’élection, et mettront le conseil national en situation de blocage », a d’ailleurs esquissé le chef de file.

Vision à long terme
Au-delà des justifications, sur le fond, il s’agissait d’exprimer « une vision à long terme, d’un Monaco qui n’est pas fermé sur lui-même ». « Il ne faut pas rester spectateur mais acteur, ouvrir des perspectives pour nos jeunes », ajoute Jean-Louis Grinda, pour qui l’élection du 10 février arrive à un moment économique très délicat. Lors de cette soirée — du coup assez longue (2h30) —, les candidats ont tapé large. Déclinant toutes les thématiques (logement, investissements, fonction publique, institutions, environnement, loisirs, etc) sous le triptyque « fierté, unité et ambition ». Le programme liste, pour chaque chapitre, ce que la majorité a accompli et ce que Union monégasque propose pour les 5 prochaines années. Avec une mention sur le rôle de l’opposition du genre « en s’abstenant pour le vote de chacun des budgets depuis 2008, l’opposition n’a soutenu aucune des avancées obtenues par la majorité et a tenté, à chaque fois, de faire entrave à ces projets ». Une phrase répétée maintes fois dans le programme qui a d’ailleurs du mal à passer chez Horizon Monaco…
Pour chaque volet, les candidats proposent des mesures concrètes (construction de logements domaniaux, plan choc pour l’investissement, introduction d’un schéma d’orientation sanitaire, création d’un contrat études-emploi, séparation du budget de l’Etat et du fonds de réserve, attribution de la notion de chef de famille indistinctement aux hommes et aux femmes, création d’un Monaco Valley, etc) aussi bien que des déclarations de bonnes intentions proches de l’incantation (lutter contre les disparités salariales), introduites par un « nous voulons » qui remet en perspective les pouvoirs du conseil national dans une monarchie constitutionnelle comme Monaco. Plus surprenant, pour la première fois, les colistiers ont parlé de certains sujets qui passent en général à la trappe comme la sécurité — le taux de délinquance étant très bas à Monaco —, en exprimant l’idée de « faire mieux » en la matière. UM veut lancer, par exemple, une campagne contre les incivilités dans les établissements scolaires. L’autre point innovant proposé par la liste majoritaire se situe dans la méthode : on entrevoit presque une forme de démocratie participative avec la création, si UM est élue, d’un conseil national des jeunes et d’un comité des sages pour les personnes âgées. Un pendant démocratique, pour l’expression de la société civile, au conseil économique et social (CES) ou au conseil pour l’attractivité (CSA)…
Enfin, si les meetings servent toujours à mettre en lumière les candidats (en l’occurrence parmi les nouveaux, Jean-Louis Grinda, Bernard Pasquier et Valérie Bernard se sont largement distingués), Union monégasque souhaitait également imposer son timing. Son programme, posté ce week-end, arrivait en effet quasiment 3 semaines après celui de ses adversaires, présenté à la salle du Canton le 19 décembre. Mais au final, il est arrivé plus tôt dans les boites aux lettres : Horizon Monaco n’enverra en effet le sien que samedi prochain aux Monégasques. C’est ainsi la première élection pour laquelle les électeurs auront loisir de décortiquer les programmes des deux listes principales aussi tôt. Il ne reste plus qu’à attendre les propositions de la liste Renaissance pour que les Monégasques puissent déterminer leur choix pour le 10 février. Si elle se présente, bien sûr…

Fini le climat délétère ?
Le meeting du 10 janvier arrivait après l’envoi, pendant les fêtes de fin d’année, du journal de campagne de la liste Union monégasque. Une édition qui ressemblait fort à un brûlot contre Horizon Monaco. UM se défendant sur tous les sujets où elle avait été attaquée (notamment sur la commission de Venise du conseil de l’Europe) et revenant sur l’épisode du clash Gardetto-Spiliotis. « Nos adversaires ont poussé le bouchon trop loin et nous avons dû répondre, pour faire taire les contre-vérités et pour défendre la dignité de nos candidats, de nos élus et du conseil national », a justifié Jean-François Robillon à la tribune. Avant d’ajouter : « J’espère sincèrement que nous n’aurons plus à le faire. Ce soir, je veux en finir avec ces querelles et ce climat. Beaucoup d’entre vous ne veulent pas d’une campagne basée sur l’agression et la haine. Je vous le dis franchement, moi non plus. » On espère que ce ne sera pas une simple promesse électorale…

Le logement toujours en pole position

«La meilleure garantie que nous ferons ce que nous vous annonçons aujourd’hui, c’est notre bilan », a lancé Jean-François Robillon dans son discours de clôture. Et le bilan, pour la majorité parlementaire, passe évidemment par son action en matière de logement. « Aujourd’hui, des livraisons de logements sont programmées au-delà de la mandature. C’est une première dans l’histoire du Conseil National. Je vous le redis, 413 appartements neufs seront livrés jusqu’en 2014, sans compter les appartements libérés et rénovés. Nous avons facilité l’accès des Monégasques à la propriété. C’est, là aussi, historique. Notre bilan parle pour nous : nous sommes la majorité qui aura fait le plus pour le logement. Et nous continuerons à nous battre. L’Union Monégasque, c’est la liste du logement », a tonné le leader de la liste UM. Pas question de partager ce bilan avec les anciens collègues de l’UP. « Anne Poyard-Vatrican est venue à peine à deux réunions de la commission que je préside », souffle ainsi Gérard Bertrand, président de la commission logement au conseil national pour stigmatiser l’intérêt de l’opposition sur cette question. Pour le futur, c’est le président de l’Union des Monégasques qui a d’ailleurs listé les propositions de UM. Flexibilité dans l’attribution des logements avec instauration d’une prime à la mobilité domaniale, programme de construction à partir de 2014, création d’un vrai secteur intermédiaire, formalisation de la colocation dans les domaines…

Un plan pour l’investissement et les entreprises

«Il faut libérer les énergies et ne pas sacrifier les investissements », ont martelé les candidats. Face au déclin de l’industrie, du commerce et du bâtiment, Union monégasque propose un Monaco terre d’entreprises, génératrice de recettes en TVA. Avec la volonté d’investir dans les équipements pour relancer l’économie et de développer le parc des surfaces commerciales de l’Etat ainsi que l’offre domaniale de bureaux pour l’implantation de nouvelles sociétés. C’est un « plan choc » que préconise UM à partir de 2013. C’est le doyen de l’équipe, Maurice De l’Arbre, qui a développé une bonne partie du programme économique de la liste. En proposant notamment de « créer un fonds d’investissement pour les petites et moyennes entreprises ainsi que les artisans. » Mais le cheval de bataille de ce médecin biologiste est avant tout de créer un Monaco Valley, à l’image de la Silicon Valley en Californie. « Il faut développer les activité liées à l’économie numérique en plein essor comme les coffre-forts numériques et les nouvelles technologies du clouding et faire évoluer notre législation. Il est nécessaire de créer à Monaco un rassemblement des jeunes de la planète et créer un concours des 50 meilleurs projets. » Cette Maison de l’innovation accueillerait des incubateurs de start-ups liées à la recherche scientifique ou aux nouvelles technologies ainsi que des entreprises innovantes ayant déposé des brevets. Monaco deviendrait alors, pour De L’Arbre, un pôle mondial d’innovation à moindre coût. « Un crédit de 30 000 euros, c’est peu de choses pour l’Etat mais pas pour un jeune de talent. Avec une offre fiscale appropriée, le succès de l’opération est garanti. Cela créerait au moins 1 000 emplois pour les jeunes Monégasques », s’est engagé le médecin personnellement. Pour Union monégasque, ce choix stratégique serait global, de l’enseignement à l’emploi, en passant par la recherche.
Plus prosaïquement, au-delà de cette pépinière technologique, Alberte Escande propose, elle, de créer un institut du commerce pour en finir avec des rues entières peuplées de banques et apporter une plus grande cohérence dans l’urbanisme de la Principauté. Voire de « reconnaître une forme de propriété commerciale dans les domaines à l’image du contrat habitation-capitalisation. » Au programme de l’UM, est également inscrite l’introduction de nouvelles formes de structures d’entreprises : fonds professionnels, fonds libéraux, EURL, société d’exercice libéral…

« Pas de dette, ni d’impôt sur le revenu »

Bernard Pasquier est sorti de son rôle de Monsieur Loyal pour défendre les propositions de UM sur le Fonds de réserve constitutionnel. Logique pour celui qui a passé 25 ans à la Banque mondiale. « Ce fonds est le garant de notre indépendance financière par rapport au reste du monde. Nous voulons le conserver car nous ne voulons pas de dette, ni d’impôt sur le revenu. » Un leitmotiv répété et très applaudi. Pour UM, le FRC ne doit pas être utilisé comme un budget bis et le conseil national doit pouvoir contrôler l’ensemble des dépenses. En revanche, pas question de le transformer en FRC souverain comme le propose Horizon Monaco : « C’est une bêtise d’enfant gâté. Ils voudraient en faire un magot que les copains géreraient à coup de produits toxiques. Les profits pour eux, les dettes pour nous pauvre peuple monégasque. Ces gens-là sont des aventuriers. Nous nous voulons gérer le FRC en bon père de famille avec des règles claires et transparentes. »

Des nuits blanches pour la culture

« 50 % du temps d’antenne du Secrets d’Histoire de Stéphane Bern était dédié à Monaco. La culture, c’est l’ADN de la Principauté. Y renoncer serait une faute politique et stratégique. Notre pays n’est pas un resort mais un Etat », a rappelé Jean-Louis Grinda, avant d’appeler à ne pas suivre le chemin des nombreux Etats qui ont sabré le budget qui lui est dédié : « Celui qui poursuit le vent a le destin d’une feuille morte. » Pour le directeur de l’opéra, il faut au contraire doper les initiatives en la matière. Notamment en coordonnant les acteurs culturel et en lançant un festival permanent. Tout en gardant à l’esprit que « la culture c’est aussi de l’emploi ! » Pour Michèle Dittlot, chargée au conseil national de la commission de la culture, il s’agissait forcément de poursuivre le combat mené pour la loi sur la préservation du patrimoine. En créant, par exemple, des nuits blanches de la culture et du patrimoine et en soutenant les initiatives locales.

Les jeunes ont la parole

Pour cette campagne, Union monégasque a visiblement souhaité se tourner vers les jeunes. Lors du meeting, un clip baptisé la Minute jeune, s’est chargé de balayer, avec humour, les idées reçues, appelant chacun à tirer profit de ce que les nouvelles générations ont à apporter. Valorisation des formations professionnelles ainsi que de l’expérience des 500 compatriotes résidant à l’étranger, création de filières « made in Monaco », notamment dans le domaine de l’esthétique, de la santé, de la petite enfance, du tourisme, du yachting et de l’environnement, validation des acquis, playground dédiés… De nombreux candidats ont listé les mesures à prendre en faveur de la jeunesse. Sur le plan économique, Guillaume Rose a aussi proposé d’« assouplir les règles de création d’entreprise pour les Monégasques ».

Pour un dossier médical informatisé

Le nouvel hôpital sera opérationnel au mieux dans dix ans, mais le futur CHPG alimente forcément les promesses électorales. C’est un hôpital attractif, reconnu à l’international et bien dimensionné qu’a défendu Valérie Bernard. En attendant, il est capital pour le médecin d’investir dans les services actuels pour le maintenir aux normes. Pour la médecine en ville, c’est le dentiste Raphaël Rigoli qui a prôné une complémentarité avec la médecine hospitalière, notamment dans le développement des dépistages préventifs. « On pourrait également créer un carnet de santé pour l’adulte et se doter de dossiers médicaux informatisés. »