jeudi 28 mars 2024
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« Une loi essentielle de la mandature 2013-2018 »

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Aider les jeunes monégasques à obtenir un prêt pour leurs études. C’est l’objectif d’une loi votée le 27 avril. Les explications de Christian Barilaro, rapporteur de ce texte.

Que change cette loi ?

Tout ! C’est un outil qui n’existait pas jusqu’à présent. Aujourd’hui, les étudiants pourront financer leurs études et ne payer que le capital. L’Etat paiera les intérêts du prêt et en sera caution.

 

Qui est concerné ?

Tous les étudiants monégasques qui veulent faire des études supérieures débouchant sur une formation diplomante, quel que soit le pays dans lequel ils la font. Autre impératif : avoir maximum 30 ans l’année civile où on emprunte.

 

Ce texte va concerner combien d’étudiants ?

On ne le sait pas encore vraiment. C’est un dispositif qui va être mis en place j’espère rapidement. Le conseiller de gouvernement pour l’Intérieur, Patrice Cellario, s’est engagé dès le lendemain du vote de la loi à faire des réunions sur le sujet. Grosso modo, en 2015, 73 étudiants monégasques ont obtenu le baccalauréat. Mais ce dispositif concerne tous les étudiants, même ceux qui poursuivent déjà leurs études supérieures, pas seulement ceux qui ont obtenu leur bac.

 

Quels sont les critères ?

Il faut d’abord vérifier que les études correspondent à un diplôme reconnu et qualifiant. Il ne faut pas que ce soit quelque chose de farfelu.

 

Il y a un plafond pour l’emprunteur ?

Cela dépendra de l’arrêté ministériel qui sera voté. Mais dans la loi, il n’y a pas de plafond prévu. Ce sera une décision du gouvernement de mettre un plafond ou non. J’espère que cela interviendra à la rentrée de septembre 2016. C’est mon souhait, mais ce n’est pas une certitude.

 

Quel processus va suivre cette loi ?

La loi va être promulguée au Journal de Monaco par le Prince Albert dans les jours qui viennent. Comme n’importe quelle loi. Et ensuite, Patrice Cellario s’est engagé à faire des réunions pour que les arrêtés ministériels soient votés avant l’été.

 

Quel sera le rôle joué par les banques dans cette loi ?

Une fois la loi votée, le gouvernement va tout organiser pour mettre en forme cette loi. Dans l’arrêté ministériel, le gouvernement va se rapprocher de banques. Charge à elles de proposer des contrats-types pour cette loi. Il s’agira forcément de banques monégasques.

 

Comment convaincre les établissements bancaires de participer ?

Je pense que ce sera basé sur le volontariat. J’espère qu’il y aura le plus grand nombre de banques qui seront concernées et qui auront envie de contracter avec des étudiants. D’abord, parce que ce sont de nouveaux clients. Et puis, il est normal que les banques du pays aident les jeunes compatriotes.

 

Quel intérêt pour ces banques ?

Elles en retirent le fait de pouvoir aider des jeunes monégasques à se former à l’étranger, pour ensuite revenir en Principauté. Revenir ou pas, car les gens sont libres de travailler où ils veulent… De plus, pour l’économie du pays, c’est une bonne chose. Je pense que c’est bien que les banques se positionnent en candidate pour supporter ce prêt.

 

Avez-vous eu des contacts avec les banques ?

Ce n’est pas mon rôle. C’est au gouvernement de s’en charger. Je sais qu’il a déjà entamé des discussions avec une banque.

 

Quel sera rôle le Conseil national dans le suivi de cette loi ?

Je pense que Christophe Robino, le nouveau président de la commission Education et Jeunesse, a évidemment un rôle de suivi auprès du gouvernement pour voir où en sont les rédactions des arrêtés ministériels. Le Conseil national sera toujours là pour vérifier que la loi ne reste pas lettre morte.

 

Quel est le coût pour l’Etat ?

Cela dépendra du montant qui est emprunté par l’étudiant, de la durée de remboursement et du nombre de candidats qui ont envie de contracter ce prêt.

 

Vous avez une estimation ?

Honnêtement, ce n’est pas parce qu’on ne s’est pas renseigné, mais parce que c’est très difficile à estimer. Il va d’abord falloir que ce dispositif soit connu par les étudiants. Donc, j’espère que la direction de l’Education nationale va faire de la publicité auprès des jeunes étudiants et lycéens pour dire que ça existe. On verra au bout d’une année si cette loi est une réussite ou non.

 

Cette loi peut être un levier pour aider les jeunes ?

C’est pour cela qu’on l’a faite. On sait, par le témoignage de certains étudiants, qu’il y a un réel besoin. Le lendemain du vote de la loi, j’ai reçu un courrier de remerciement d’un jeune compatriote qui étudie l’architecture à Harvard, aux Etats-Unis. Cela lui coûte 75 000 dollars de frais chaque année et ses parents ne sont pas en mesure de payer. Il espère donc souscrire à cette possibilité.

 

Quelles contraintes vivent les étudiants monégasques ?

Le problème des étudiants monégasques, c’est qu’ils ne font pas partie de l’Union européenne (UE), ni assimilés. Du coup, quand ils vont dans certains établissements, ils sont considérés comme non communautaires. On leur applique des frais de scolarité qui sont exorbitants.

 

Par exemple ?

Le Canada, dans les universités publiques, faisait payer 2 500 euros une année universitaire à un étudiant français, contre 12 500 euros pour un Monégasque ! Il y aussi un problème avec Erasmus, car parfois les Monégasques ne sont pas éligibles à ce système.

 

Pourquoi ?

Parce qu’en tant que Monégasque, ils ne font pas parti de l’UE.

 

Un mot sur le cautionnement de l’Etat ?

C’est un super geste de l’Etat qui comprend que les Monégasques, selon le vœu du Prince, ont besoin de se former pour être efficace et apporter quelque chose à leur pays. Quand la majorité Horizon Monaco (HM) a décidé de cette proposition de loi, c’était pour permettre aux jeunes monégasques de partir pour revenir formés et utiles.

 

Le vote de cette loi coïncide avec la fin de votre présidence à la tête de la commission Education et Jeunesse du Conseil national : qu’en retenez-vous ?

Je suis très fier parce que c’est quelque chose que j’ai mené de bout en bout. Cela représente pour moi une satisfaction et une réussite. Mais il y a encore beaucoup d’autres sujets à traiter pour les jeunes.

 

Des exemples ?

Les problèmes sociétaux, l’alcool chez les jeunes, les problèmes spécifiques à Monaco, avec la difficulté de se loger pour les jeunes. J’espère que le nouveau président de commission va prendre tout cela à bras le corps.

 

Quel rôle gardez-vous depuis le changement de majorité au Conseil national ?

Aujourd’hui, nous sommes dans l’opposition. Même s’ils ne veulent pas nous traiter ainsi… Le but est de prouver aux compatriotes qu’on a été écartés, mais qu’on reste présents. On le sera dans toutes les commissions qu’elles soient Education et Jeunesse ou les autres. C’est le devoir que l’on a en tant qu’élu par rapport aux Monégasques qui nous ont fait confiance.

 

Votre sentiment le jour du vote de ce texte ?

J’étais déçu… C’est peut-être les circonstances du vote précédent sur le changement de président, mais la loi est passée en 5 minutes chrono. C’était une proposition de loi de la majorité HM élue en 2013. Si le nouveau président se réclame de cette majorité, il y aurait dû avoir un peu plus d’interventions de la part des élus, toutes sensibilités confondues.

 

Votre conclusion ?

C’est une loi essentielle de la mandature 2013-2018. Aujourd’hui, on n’a pas encore la mesure de comment elle va être retranscrite dans les faits. Mais on verra rapidement que ce texte va changer la vie des étudiants.