mardi 23 avril 2024
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Thierry Villette : « Ce que je fais, ce n’est pas nébuleux »

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Ancien chef à l’hôtel Fairmont, Thierry Villette se consacre pleinement à son activité de guérisseur-magnétiseur depuis maintenant dix ans, en principauté et dans les communes limitrophes. Il explique à Monaco Hebdo pourquoi, selon lui, le projet de loi n° 1032 est nécessaire. Interview.

Comment êtes-vous devenu guérisseur ?

C’est une longue histoire. J’ai quitté mon travail de chef de cuisine en 2011, car je n’étais pas heureux. Depuis tout petit, j’ai toujours eu ce besoin viscéral d’aider les gens, d’être bienveillant envers les autres. Et au fil du temps, on se rend compte que l’on a « quelque chose ». Ce sont des pratiques auxquelles il faut croire, alors qu’elles existent depuis que le monde existe. Nous n’inventons rien. Pour moi, c’est à la portée de tout le monde. Après, il faut y être ouvert. Notre corps est vraiment notre outil de travail. On travaille nos sens, nos perceptions, notre ressenti. Ce que les gens n’utilisent plus, malheureusement.

Vous exercez à Monaco ?

J’interviens à domicile sur Monaco, et jusqu’à Cannes. Je vais là où on m’appelle. Durant le Covid, j’ai aussi aidé l’association Jusqu’au terme accompagner la vie (JATALV) pour assister les gens en fin de vie au Centre hospitalier princesse Grace (CHPG). Mais sans rien faire, je ne faisais évidemment aucun soin. Je les accompagnais verbalement. Ce que je fais, ce n’est pas nébuleux : c’est propre, c’est clair.

Quel est le profil des personnes qui font appel à vos services ?

Je vois aussi bien des gens qui suivent des traitements contre le cancer que des personnes qui font des angoisses ou qui sont perdues dans leur tête. C’est très aléatoire. On peut tomber soit dans la maladie ou dans le mal-être. À partir du moment où une personne se présente devant moi, c’est qu’il y a quelque chose à faire. Je préviens bien la personne que je ne pourrai jamais la guérir, mais je peux amener un mieux-être.

« Heureusement que la médecine est là, mais elle permet juste d’éteindre des feux et des symptômes. La cause n’est pas désamorcée »

Certaines pratiques sont décriées, on parle parfois de charlatanisme : y a-t-il des abus ?

Ce sont de très belles pratiques quand elles sont faites avec le cœur. Pas quand elles sont pratiquées pour se remplir les poches. Évidemment, il faut bien manger, mais on ne fait pas ça pour s’enrichir. Dans l’absolu, on ne devrait même pas faire payer. J’ai connu deux abus, avec des séances à 250-300 euros. Moi, j’adapte mes prix en fonction des revenus des personnes qui viennent me voir. Et même parfois, c’est très rare, je ne fais pas payer non plus. Mais ce n’est pas bien, car c’est se manquer de respect envers soi-même.

Comprenez-vous les critiques et les doutes exprimés sur ces pratiques, dont l’efficacité n’est pas prouvée scientifiquement ?

Aujourd’hui, je les accepte, mais je ne les comprends pas. Heureusement que la médecine est là, mais elle permet juste d’éteindre des feux et des symptômes. La cause n’est pas désamorcée. Quand on dit cela à quelqu’un qui a fait 15 ans d’étude en médecine, c’est un peu dur à accepter. On nous prend pour des hurluberlus, mais moi, j’ai quitté mon boulot où je gagnais allègrement ma vie pour aider les gens. C’est plutôt honorable. Quand on est honnête et intègre, on est souvent très mal compris.

Constatez-vous un engouement grandissant pour ces médecines dites non conventionnelles ?

Nous sommes toujours la dernière roue du carrosse. Les gens se tournent vers nous quand ils ont écumé tout le système allopathique, quand ils ont tout fait. Oui, j’ai pas mal de clients sinon je n’en vivrais pas. Mais je ne vais pas vous cacher non plus qu’il y a des jours où je vais peut-être avoir un client, et le lendemain zéro… Après, on travaille beaucoup sa confiance en soi. Moi, je n’ai pas peur de l’avenir. Je suis vraiment serein, et je vis au jour le jour.

Qu’attendez-vous de ce projet de loi ?

Le projet est magnifique. Mais le gouvernement va-t-il savoir l’entendre ? Je sais que c’est compliqué. D’après ce que j’ai compris, ce n’est même plus patte blanche qu’il faut montrer. Les gens se protègent dans ces cas-là. Mais au pire du pire, dans un soin, il ne se passe rien. J’aimerais que ce texte ne soit pas retiré.

Pourquoi ce texte est nécessaire ?

Il permet de légiférer, d’officialiser les choses, que tout soit propre. C’est aussi un moyen de savoir combien de personnes pratiquent sur Monaco, qu’est-ce qu’ils font, quels sont leurs antécédents, comment ils travaillent… Je trouve cela très bien. C’est une manière d’encadrer pour éviter les dérives. Et puis, ça fait du bien aussi de se sentir reconnu dans ce que l’on fait.

« C’est sûr qu’il y a des abus. À Monaco, je ne sais pas s’il y en a déjà eu. Mais il en suffit d’un pour que tout se casse la figure. Il y a forcément des gens qui doivent abuser. Mais quand on parle d’abus, si on se retourne sur l’allopathie, là, on rigole »

On constate deux approches différentes entre le gouvernement et le Conseil national [à ce sujet, lire notre article Couac législatif autour des pratiques de soins non conventionnelles publié dans ce numéro — NDLR] : qu’en pensez-vous ?

J’en ai entendu vaguement parler. Je trouve que c’est triste. C’est un grand manque d’ouverture d’esprit [de la part du gouvernement – NDLR]. Avant de dire qu’on n’aime pas les brocolis, il faut déjà goûter. Et après, on porte un jugement. C’est dommage que le gouvernement ne se donne pas la peine de nous concerter, de nous parler. Je sais que le Conseil national y est très favorable, et le gouvernement est moins chaud.

Les abus constatés n’alimentent-ils pas la crainte du gouvernement ?

C’est sûr qu’il y a des abus. À Monaco, je ne sais pas s’il y en a déjà eu. Mais il en suffit d’un pour que tout se casse la figure. Il y a forcément des gens qui doivent abuser. Moi je n’en connais pas. Mais quand on parle d’abus, si on se retourne sur l’allopathie, là, on rigole. Nous serons toujours moins reconnus qu’un médecin établi, c’est évident, et c’est ce qui est malheureux. L’habit ne fait pas le moine. Moi, je rêve que la médecine allopathique marche main dans la main avec nous. Car là, il se produirait de plus grands miracles encore.