Coup de théâtre dans le paysage politique monégasque?: Jean-François Robillon et une majorité d’élus UP claquent la porte de l’Union pour la principauté… pour créer l’Union des Monégasques.
On savait que l’UP était divisée. Le divorce est aujourd’hui pleinement consommé. Le 21 mars dernier, c’est un coup de théâtre qui s’est produit dans la salle de conférence du Novotel?: Jean-François Robillon et six autres élus UP ont annoncé qu’ils démissionnaient en bloc de l’Union pour la Principauté… pour créer leur propre parti?: l’Union des Monégasques (UDM). Pourquoi opérer une scission du premier parti de Monaco?? « Nous ne sommes plus en accord avec la gestion de l’UP de Madame Poyard, indique fermement le président du conseil national. L’idée germait depuis plusieurs mois, car nous avons eu quelques échauffourées dans le parti. Et c’est Anne Poyard-Vatrican qui a envoyé les premiers missiles. » Depuis plus d’un an, c’est en effet une guerre larvée puis ouverte que se livrent les deux camps de l’UP. Le clan Robillon, bordé par une majorité d’élus UP contre celui de Poyard, épaulée par l’appareil politique de l’UP. Communiqués fratricides, piques assassines et lettres ouvertes incendiaires ont fait imploser au fur et à mesure l’Union pour la principauté, créée le 11 septembre 2001. La faute à Poyard-Vatrican pour Nicole Manzone?: « Malheur à celui par qui le malheur arrive. Je trouve minable la publicité qui a été faite à nos désaccords. » En clair, l’UP aurait du laver son linge sale en famille. Mais c’est surtout au sujet de la défense du programme UPM de 2008 que le iatus se serait accentué?: Anne Poyard avait brisé le consensus des élus de la majorité sur le programme de logements domaniaux des Tamaris et sur la proposition de loi de Gardetto sur la discrimination.
Tensions depuis fin 2009
Pour Gérard Bertrand, ex-président du parti, la plaie est ouverte depuis la succession de Stéphane Valeri à la tête de l’assemblée à la fin 2009?: « La seule chose que l’on peut nous reprocher, c’est de ne pas avoir suivi Stéphane Valeri qui souhaitait que la présidence du conseil national soit confiée à Poyard. Depuis ce soir-là, l’ambiance s’est détériorée. » Un prétexte pour Bernard Marquet, qui en profite pour envoyer un message des plus clairs au conseiller de gouvernement pour les affaires sociales?: « M. Valeri a fait le choix d’aller au gouvernement et de défendre les thèses gouvernementales, c’est très bien, mais le conseil national est élu par les Monégasques. Chacun à sa place et ce sera mieux pour tout le monde. » Pour les élus UP fondateurs de l’Union des Monégasques, le mot d’ordre est en effet l’indépendance. « Le bon fonctionnement de l’assemblée est aujourd’hui mis à mal par les manœuvres d’Anne Poyard-Vatrican, ajoute Jean-Charles Gardetto. Soucieux de l’indépendance du conseil national et de la défense de l’intérêt des Monégasques comme de l’avenir de Monaco, nous voulons lancer une initiative forte d’union qui vise à rassembler les Monégasques. » Soit créer l’union en se replaçant à l’écoute des Monégasques. Notamment par le biais de cafés citoyens, une fois par mois.
Coup politique
Annoncer la création de son parti, quasiment à la veille de l’assemblée générale de l’UP, le coup est bien joué politiquement puisque le clan Robillon a pris de vitesse la présidente de l’UP. D’autant que le secret avait été bien gardé?: les élus avaient fait acte de candidature à l’AG et tout était calé pour la grand-messe du 24 mars, y compris le temps de parole de 20 minutes accordé à chaque courant. Mais le coup est également risqué, l’appareil de l’UP ayant beau jeu de se gausser du courage à géométrie variable des dissidents. « Devant le scrutin démocratique des militants, c’est courage fuyons », réagit à chaud Anne-Poyard Vatrican. Avant d’ajouter?: « Je ne comprends pas leur logique. Ils créent un parti sans adhérents… » Pour les fondateurs de l’UDM — sigle qui sonne étrangement comme UPM-, il n’y avait pas le choix. « Nous n’avons pas peur de la confrontation. Depuis qu’il a été décidé d’organiser l’assemblée générale, il y a eu manipulation à outrance, des pressions directes et indirectes, du chantage voire des menaces sur les adhérents, on ne pouvait pas fonctionner ainsi. Les gens doivent faire leur choix librement », justifie Jean-François Robillon. Qui rappelle?: « Quand on s’est lancé en politique, c’est justement parce qu’on ne voulait pas courber la tête. »
Pour les élus ex-UP, il n’était surtout pas question de transformer l’UP en PS à la française, avec son lot de courants politiques. « A quoi ça sert de faire une AG où deux listes se critiquent les unes les autres?? Est-ce comme cela que l’on veut faire de la politique?? Non, aller se quereller devant les Monégasques et diviser les familles, ce n’est pas notre philosophie », affirme ainsi Alexandre Bordero, fondateur de l’UP, qui dénonce les « tripatouillages » du parti?: « L’appareil de l’UP a changé les règles du jeu électoral 15 jours avant les élections ».
Exit le clientélisme
Désormais, il appartient aux ex-UP et nouveaux-UDM de faire comprendre leur choix aux Monégasques. Faire comprendre que cette nouvelle UP compte défendre le programme UPM sur lequel les conseillers nationaux ont été élus, tout comme l’ancienne UP ou l’Unam. Il y a en effet désormais trois partis qui défendent le même socle de valeurs. Qui a dit que la politique monégasque était simple??
Pour Robillon, ce qui fera la différence, c’est la méthode. Exit le clientélisme?: « Notre but est de régler les problèmes des Monégasques. On ne va pas se targuer de nommer Madame Truc à telle fonction ou d’aider Monsieur Machin. Nous ne voulons rentrer ni dans la politique spectacle ni dans la politique magouilles. » Pour le président du conseil national, la création de l’UDM représente surtout l’occasion de fermer le boulevard ouvert depuis des mois à Rassemblement & Enjeux. « Nous allons être une force de proposition en connexion avec les Monégasques. Ce qui permettra d’arrêter de valoriser l’opposition », espère Robillon. A voir.