jeudi 25 avril 2024
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Salim Zeghdar : « La rédaction de TVMonaco ne s’interdira aucun sujet »

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Le 1er septembre 2023, à 19 h 15, l’État monégasque lancera officiellement sa nouvelle chaîne publique nationale, baptisée TVMonaco. Ligne éditoriale, budget, organigramme… Son directeur général, Salim Zeghdar, dévoile à Monaco Hebdo les contours de cette chaîne de télévision, censée faire rayonner la principauté à l’international. Interview.

Quelle sera la diffusion de TVMonaco ?

TVMonaco est une chaîne nationale monégasque, qui a pour but d’être diffusée en principauté. Mais nous avons aussi décidé d’être diffusés à l’international. Pour cette diffusion, nous avons passé des accords avec des câblo-opérateurs tels que Bouygues, Orange, SFR, Free, Canal+… Leurs abonnés auront du coup accès à l’intégralité de notre chaîne, quel que soit l’endroit où ils se trouvent. Hors France, nous travaillons également avec des diffuseurs de satellite et des diffuseurs de contenus dans certains pays, comme aux États-Unis et en Asie. Par ailleurs, nous sommes en train de finaliser un partenariat avec un fabricant de téléphones, qui va mettre dans ses équipements (téléphones, tablettes, télévisions connectées) l’application de TVMonaco par défaut. Enfin, nous avons une diffusion internationale à travers la plateforme numérique, car TVMonaco est une chaîne « 360 », c’est-à-dire qu’elle est à la fois tournée vers le linéaire et vers la télé de demain avec les plateformes numériques.

Avec quel fabricant de téléphone allez-vous passer cet accord ?

Je ne peux pas encore vous dévoiler son identité, car nous sommes en train de finaliser l’accord [cette interview a eu lieu jeudi 20 avril 2023 — NDLR]. Mais c’est un fabricant asiatique, qui ne se trouve pas en Chine, et qui fait beaucoup de télés.

Quelles retombées attendez-vous de cette nouvelle chaîne de télévision ?

Nous voulons être vus le plus possible pour faire connaître Monaco et défendre les valeurs qui lui sont chères, comme l’environnement. Nous attendons également un rayonnement de cette chaîne et de la principauté à l’international. Et si à travers ce rayonnement, nous suscitons l’intérêt du public pour les fondations de la principauté, pour ses associations humanitaires, si ça leur donne envie de venir s’installer ou de commercer avec la principauté, alors je suis l’homme le plus heureux du monde.

Salim Zeghdar TVMonaco
© Photo Bruno Bebert / TVMonaco

L’objectif de TVMonaco, c’est donc d’en faire un outil supplémentaire de promotion de la principauté ?

Bien sûr, c’est l’un des objectifs. C’est ce que font aussi les autres pays, avec leurs médias. À partir du moment où vous voulez exporter ce qui se passe et ce qui se fait en principauté, c’est pour faire rayonner et en faire la promotion. Et donner, peut-être aussi, une autre image que certaines personnes ont de la principauté avec un vrai pays, un vrai gouvernement, un chef d’État, des institutions, un business, un système de santé, d’éducation, de sécurité, un système financier, des banques, un melting-pot international avec plus de 140 nationalités… Et pas toujours avoir l’image du glamour et du bling-bling.

« Nous misons tout sur le digital. Une grosse partie de notre budget est consacrée à la diffusion digitale, à la création et à l’animation de la plateforme, à la possibilité de voir du contenu en illimité… »

Avec le déclin de la télévision traditionnelle, le lancement d’une chaîne est aujourd’hui un vrai pari ?

Pour moi, la télévision linéaire est un média qui est terminé. La télé de demain, c’est la télé numérique. Ce sont les plateformes digitales, les réseaux sociaux. Aujourd’hui, plus personne, en tout cas la nouvelle génération, ne regarde la télévision. TVMonaco est une chaîne transgénérationnelle, elle s’adresse à tout le monde. Nous voulons donc aussi aller chercher les jeunes. L’avantage du numérique, c’est de pouvoir offrir aux gens la possibilité de faire, de choisir, de regarder, de télécharger ce qu’ils veulent. L’enjeu, c’est donc d’arriver à leur donner du contenu qui leur donne envie de rester et de regarder.

Le succès de TVMonaco passera donc par le digital ?

Tout ce que nous faisons pour la TV linéaire, on le retrouve sur la TV digitale. Aujourd’hui, nous misons tout sur le digital. Une grosse partie de notre budget est consacrée à la diffusion digitale, à la création et à l’animation de la plateforme, à la possibilité de voir du contenu en illimité…

Quel est votre budget de fonctionnement ?

Le budget de fonctionnement de TVMonaco est d’environ 15 millions d’euros par an. Cette année, nous avons embauché les équipes, nous avons fabriqué les infrastructures, le contenu, nous travaillons la communication, les émissions, la grille… Tout ça se fait depuis début janvier 2023.

Comment est ventilé ce budget ?

Faire une télé, c’est un budget. Ce qui coûte, ce sont les infrastructures pour pouvoir diffuser à l’international, mais c’est aussi le contenu. La plus grosse partie de notre budget est dévouée à la fabrication de contenus, car nous voulons maîtriser nos droits et vendre nos productions à l’international pour récupérer des recettes, mais surtout pour contrôler les diffusions.

Où sont situés vos locaux et combien ont coûté les travaux d’aménagement ?

Nous avons récupéré les locaux de l’ancienne Sodexo, dans le quartier de Fontvieille. De cet ancien restaurant d’entreprise, nous avons fait une chaîne de télé moderne. Nous avons tout cassé et effectué des travaux pour y installer également toute la technique. La livraison de ces locaux est prévue pour début juin 2023. L’État prend aussi en charge cette partie, qui ne rentre pas dans le budget d’exploitation. Concernant le coût, nous sommes à un peu moins de 10 millions d’euros.

« Nous aurons un journal télévisé quotidien de 30 minutes. Il va parler de l’info monégasque et de ce qui se fait en principauté en matière de politique, sport, culture, éducation, sécurité, économie, patrimoine, histoire… Il y a également le Monaco qui s’exporte en sport, culture, business, politique, en organisations humanitaires… »

Quelle sera la ligne éditoriale de TVMonaco ?

TVMonaco repose sur quatre piliers. Le premier, c’est l’environnement. Nous avons beaucoup de contenus sur cette thématique, produits seul ou co-produits avec des chaînes et diffuseurs internationaux. Nous voulons que TVMonaco soit porteuse de solutions et valeur d’exemple, mais sans faire culpabiliser. Nous parlerons de tout : des voitures électriques, de l’intelligence artificielle, de déforestation, de la haute mer, de la Méditerranée, de la protection des océans, de l’humanité d’une manière globale avec le concept du « one health » [une seule santé — NDLR] que nous allons développer. L’idée, c’est vraiment à chaque fois d’expliquer une thématique, d’essayer de donner aux téléspectateurs les moyens de bien l’entreprendre et d’agir.

Quel est le second pilier ?

Le second pilier, c’est l’actualité. Nous aurons un journal télévisé quotidien de 30 minutes. Il va parler de l’info monégasque et de ce qui se fait en principauté en matière de politique, sport, culture, éducation, sécurité, économie, patrimoine, histoire… Il y a également le Monaco qui s’exporte en sport, culture, business, politique, en organisations humanitaires… Enfin, nous choisirons toujours dans le JT deux ou trois thématiques en fonction de l’actualité. Pour le reste, il sera question de santé, de culture, d’événementiel, de sujets internationaux.

Le troisième pilier ?

Il s’agit du sport. Nous voulons parler de tous les sports et de toutes les catégories. Bien sûr les sports de la principauté seront représentés, mais pas que. Pour nous, le sport est aussi valeur d’exemple et porteur de solutions. Nous évoquerons également le handisport, car il y a de véritables talents et des histoires qui forcent le respect.

Quel est le dernier pilier ?

Le quatrième pilier est dédié à l’art de vivre, plus basiquement appelé “life style”, sur la principauté et la Riviera. C’est une sorte de promotion de Monaco et de sa région pour attirer les gens, mais aussi et surtout pour leur expliquer la richesse que nous avons sur cette côte qui va de Gênes jusqu’à Perpignan. L’idée, c’est de montrer tout ce qui s’y fait en termes de culture, de patrimoine, d’Histoire, de gastronomie, de business, de santé… Ce sont des documentaires que nous donnerons en priorité à TV5 Monde.

« Le budget de fonctionnement de TVMonaco est d’environ 15 millions d’euros par an. Cette année, nous avons embauché les équipes, nous avons fabriqué les infrastructures, le contenu, nous travaillons la communication, les émissions, la grille … »

Pour produire les contenus internationaux, vous allez faire appel à des envoyés spéciaux ?

De par notre appartenance à TV5 Monde, nous avons déjà passé des partenariats. Nous aurons tous les correspondants de TV5 Monde dans le monde, tous les correspondants de France Télévisions dans le monde, et tous les correspondants de RFI et de France 24 dans le monde. Pour certains sujets d’actualité, concernant le prince souverain par exemple, nous enverrons peut-être une équipe sur place. Sinon l’idée, c’est de travailler avec tous ces correspondants sous forme de pigistes. Au niveau de la chaîne, de manière tout à fait moderne, nous avons des partenariats aussi bien avec les universités comme celles de Laval au Québec ou de Boston, qu’avec des associations, des fondations ou des organisations internationales… Nous sommes par exemple en train de travailler sur un partenariat très fort avec l’Unesco sur la défense des océans et de la haute mer.

Où en êtes-vous dans la production de contenus à quatre mois du début de la diffusion ?

Nous avons 18 mois d’avance. Nous avons une centaine d’heures de production propre, qui sont lancées à ce jour. Sur notre grille, cela correspond à peu près à 1 600 heures de programmes et 300 heures de programmes sur la plateforme numérique, en réseau monde.

Qui incarnera les programmes de TVMonaco ?

Nous n’avons pas décidé de prendre des incarnants connus. Nous en avons quelques-uns sur certains magazines, mais nous avons privilégié le « fait-maison ». Nous avons organisé des castings de locaux, de Monaco et de la région, pour créer nous-mêmes nos propres incarnants.

Salim Zeghdar TVMonaco
« Pour moi, il n’est pas question de fusion, ni de disparition de Monaco Info, bien au contraire, elle a son rôle. Il y aura peut-être une réorientation de certaines choses, car nous allons travailler différemment. » Salim Zeghdar. Directeur général de TVMonaco. Sur la photo, de gauche à droite : Virginie Lavagna, secrétaire générale, Marie-Pierre Gramaglia, présidente du conseil d’administration, Salim Zeghdar, directeur général, et Nathalie Biancolli, directrice générale adjointe. © Photo Bruno Bebert / TVMonaco

La diffusion de TVMonaco aurait dû démarrer en 2022 : comment expliquez-vous ce retard à l’allumage ?

Ces échéances ont été annoncées dans la presse à un moment donné, mais en réalité nous étions toujours partis sur un lancement en 2023. Pourquoi ? Un, parce qu’il fallait d’abord trouver des locaux que nous n’avions pas. Deux, il fallait le temps de faire les travaux, et cela a pris plus d’un an. Il était difficile de tout faire.

« Il est important que Monaco Info continue. Cette chaîne représente aujourd’hui un vrai service au sein de l’État pour la population monégasque. Elle fait très bien son job et il est important qu’elle continue. TVMonaco et Monaco Info seront deux chaînes différentes, avec deux vocations différentes »

Qu’est-ce qui est le plus difficile quand on lance une chaîne de télévision ?

Tout. J’ai créé des sociétés, des activités nouvelles en partant de zéro. Là, j’ai le sentiment d’être dans une machine à laver en mode essorage à 1 800 tours. Ça part dans tous les sens, mais c’est passionnant, à tous les niveaux. Je n’ai jamais pris autant de plaisir, mais c’est compliqué. Sur les travaux, sur la technique qui évolue, il faut recruter, trouver les bonnes personnes. Il faut organiser le système de diffusion, passer les partenariats avec les plus gros, si on veut une diffusion internationale, il faut travailler le contenu, en acheter, négocier, définir la grille, les productions, réunir autour de soi des partenaires, des réalisateurs à la fois monégasques, français et internationaux pour filmer là où vous avez envie de créer un documentaire… Il faut aussi s’occuper de la partie communication, de la partie habillage d’antenne, travailler la ligne éditoriale, l’histoire de la chaîne. Au fur et à mesure des embauches, il faut également s’assurer que tout le monde est dans le même état d’esprit, il faut établir des partenariats avec la presse internationale, avec les confrères de télé… Ça n’arrête jamais.

Avez-vous pu compter sur le soutien de professionnels ?

Heureusement, je suis super bien entouré. J’ai une équipe en or. Tout d’abord, j’ai le soutien de TV5 Monde et de toutes les chaînes qui appartiennent au réseau TV5 Monde. Et pas les moindres, puisque on parle de Radio Canada, TV Québec, le groupe France Télévisions, le groupe France 24-RFI, TV5 eux-mêmes, la RTBF, la télé suisse… Tout le monde nous a beaucoup aidés. D’ailleurs, la partie technique a été mise en place avec la RTBF. Nous avons aussi travaillé la partie liée à la gouvernance de la chaîne avec nos amis suisses. Pour le contenu, nous avons pu compter sur nos amis canadiens et TV5. Ensuite, j’ai eu la chance depuis deux ans de faire des rencontres de personnes qui sont venues travailler avec moi.

À commencer par Nathalie Biancolli, votre directrice générale adjointe ?

Nathalie est extraordinaire. Elle a 35 ans de carrière derrière elle, en matière de télé. À l’international aussi, parce que quand je lui ai proposé de venir nous rejoindre, elle était en poste chez France Télévisions en charge des acquisitions à l’international. Poste qu’elle avait déjà occupé auparavant chez TF1. C’est une femme qui gérait plus d’un milliard d’euros de budget, et qui connaît toute la planète TV, à la fois digitale et linéaire. C’est elle qui nous a apporté sur un plateau toutes ces grandes collaborations à l’international avec les chaînes étrangères. C’est elle aussi qui a ramené les diffuseurs, les partenariats avec les câblo-opérateurs, et le fabricant de téléphonie.

Quel est le reste de l’organigramme ?

Virginie Lavagna est notre secrétaire générale. Sofian Biouti qui gérait auparavant la plateforme digitale chez Canal+ nous a rejoints, en tant que responsable de la communication marketing digital. Nadia Morin, notre responsable des droits à l’antenne et des ventes, a elle aussi une expérience de plus de 30 ans. Notre patron du sport est Pierre Classen. Sylvain Bottari est lui en charge de la technologie et de l’antenne. Il est auparavant passé par LCI et TMC.

« Quand l’État voudra faire passer un certain nombre de messages, que nous ne prendrons pas sur TVMonaco, il pourra le faire sur Monaco Info. Enfin, par définition, une chaîne nationale doit être financée par l’État »

Vous avez aussi bénéficié de conseils de consultants, comme Jacques Legros ?

Oui, Jacques Legros nous aide beaucoup en matière de journal télévisé. Il est consultant, car il est toujours chez TF1. Et il n’est pas question d’incarner la chaîne. Et puis, nous avons aussi le soutien de Marie-Pierre Gramaglia qui est présidente du conseil d’administration. Elle s’investit et nous aide beaucoup.

Combien de salariés comptez-vous aujourd’hui ?

Nous sommes une trentaine, avec des personnes qui viennent de tous horizons et de toutes chaînes de télé. D’autres travaillaient auparavant chez des producteurs. Tous ont pris cette chaîne comme la leur, avec beaucoup d’envie. Car créer une chaîne nationale, ça ne se fait plus. Donc pour beaucoup, c’est historique. Ils veulent tous faire partie de cette aventure. Après, il y a des gens que j’ai regrettés.

Salim Zeghdar TVMonaco
© Photo Bruno Bebert / TVMonaco

C’est le cas de Thibault Malandrin, que vous aviez désigné comme rédacteur en chef ?

Thibault n’a pas démissionné parce que ça partait en sucette, comme j’ai pu le lire dans la presse. Il avait une mission de six mois pour nous aider à lancer le projet, et il avait, ensuite, prévu de faire de la formation, ce qu’il fait aujourd’hui à Paris. Mais nous allons continuer à travailler ensemble, puisque ce garçon a un vrai talent sur tout ce qui est judiciaire. Nous allons consacrer une partie aux crimes qui ont eu lieu dans la région, à la fois historiques et contemporains. Et Thibault va nous aider à travailler dessus. D’ailleurs, nous ferons une conférence de presse le 5 juin 2023 en principauté, et je pense qu’il sera présent. Ça permettra de taire toutes les rumeurs.

Qui va assurer la rédaction en chef de TVMonaco ?

En fait, nous n’avons pas de rédaction en chef. Nous avons fait une télé un peu différente. Nous avons ce qu’on appelle dans le milieu un responsable des programmes et du développement, avec des chefs éditoriaux. Ce poste est occupé par Nicolas Deliez. Il est journaliste, auteur, scénariste. Il a aussi fait beaucoup de télé en production-réalisation. Il cochait plein de cases dans ce que nous avions en tête.

Quel sera son rôle ?

L’idée, c’est qu’il supervise l’intégralité de ce qui est fabriqué dans la chaîne. Que ce soit en matière de journaux télévisés, de sport, de santé, de science, de “life style”… pour que toutes les directions se parlent et que nous arrivions ensemble à avoir une cohésion dans ce que nous proposons. L’approche est un peu différente de ce qui se fait habituellement. L’équipe est très soudée, très motivée, elle en veut et a pris tout ça à bras-le-corps. Nous avons fait en quelques mois un sacré travail. Pour moi, ce qu’ils ont fait relève de l’exploit.

Quel sera votre rôle, en tant que directeur général de la chaîne ?

En tant que directeur général, je devrai animer tout ça. Je veillerai à ce que les objectifs soient atteints. Je me suis impliqué dans beaucoup de départements au niveau de la chaîne à la fois en matière de technique, de contenu, de réalisation, et de journal télévisé. Mais mon rôle sera de faire tourner la boutique, d’en assurer aussi son indépendance et son développement ainsi que ses partenariats à l’international.

Cette fonction est-elle compatible avec vos autres casquettes [Salim Zeghdar est également directeur de Monaco Live Productions, créateur des Sérénissimes de l’humour, et président-délégué de Top Marques — NDLR] ?

Dans toutes mes sociétés, il s’agit de jobs à plein temps. Aujourd’hui, ça roule, ça fonctionne. Pour certaines, depuis plus de 20 ans. J’aurai toujours un œil sur les Sérénissimes et Top Marques. Mais, dans mes autres sociétés, j’ai des personnes qui prennent le relais, et qui s’occupent du quotidien. Mon temps sera sur la chaîne, mais l’avantage sur TVMonaco, c’est que j’ai su m’entourer de personnes qui vont m’aider. Aujourd’hui, j’ai une casquette d’entrepreneur, ce que j’ai fait toute ma vie, parce que ça fait maintenant 30 ans que je suis ici. J’ai tout fait, j’ai commencé avec Monacair, j’ai développé plein de choses dans des domaines d’activité que je ne connaissais pas, et je pense m’en être pas trop mal sorti. J’ai toujours su bien m’entourer, et là encore, j’ai une équipe. Je continuerai donc à faire ce que je fais en plus de la chaîne de télévision.

Cet effectif de 30 salariés est-il appelé à évoluer ?

Oui, mais nous travaillons maintenant énormément avec des pigistes et des freelances, en fonction de nos besoins. Nous avons créé une technique qui permet de fonctionner à moindre coût, nous ne sommes pas obligés d’être 50 pour faire un plateau. À deux, ils peuvent lancer le plateau et le direct. Aujourd’hui, nous sommes dimensionnés pour ne pas dépasser la cinquantaine de salariés et une trentaine de freelances ou de contrats courts. Et ça tournera.

Quelle est la moyenne d’âge de l’équipe ?

Elle est très jeune, mais avec de l’expérience. Nous sommes entre 25 et 30 ans.

Vous postez beaucoup d’offres d’emploi sur vos réseaux sociaux : est-ce difficile de recruter dans le secteur audiovisuel ?

Je pense qu’aujourd’hui, il est difficile de recruter dans tous les domaines. Et la télé, c’est encore un peu plus technique. La chance que nous avons, c’est que sur la partie technique, nous avons été sur de nouvelles technologies qui nous permettent de former des gens sans avoir besoin de personnes ayant une expérience dans un domaine ou dans un système particulier. Mais oui, le recrutement est difficile. Il faut trouver des gens qui ont envie de travailler.

À quatre mois du début de la diffusion, votre effectif n’est pas complet : est-ce que cela vous inquiète ?

Non. L’effectif est quasi-complet. Je ne suis absolument pas inquiet. Au contraire, je suis très confiant.

Y aura-t-il des synergies entre TVMonaco et Monaco Info ?

Il pourra y avoir des synergies et des passerelles avec Monaco Info. En tout cas, nous y travaillons avec Geneviève Berti [directrice de la communication du gouvernement princier – NDLR], parce que j’ai lu tout et son contraire. Pour moi, il est important que Monaco Info continue. Cette chaîne représente aujourd’hui un vrai service au sein de l’État pour la population monégasque. Elle fait très bien son job et il est important qu’elle continue. TVMonaco et Monaco Info seront deux chaînes différentes, avec deux vocations différentes. Nous ne parlerons pas forcément des mêmes choses, en revanche sur un certain nombre de sujets, nous nous retrouverons. Nous ferons ensemble des éditions spéciales lors de la fête nationale, du Grand Prix et sur d’autres événements en principauté. Nous avons également prévu de travailler ensemble certains reportages, documentaires et magazines. Et quand l’État aura besoin de faire passer ses messages, il le fera au travers de Monaco Info. En matière de sport, sur certains événements, ils enverront leurs moyens et nous y contribuerons, et vice versa. L’idée, c’est que les budgets soient réutilisés pour faire plutôt du contenu que des doublons sur de la technique. Avec Geneviève, nous nous connaissons depuis plus de 30 ans, et, croyez-moi, nous travaillons en bonne intelligence, malgré ce que les uns et les autres peuvent dire.

À terme, une fusion des deux chaînes peut-elle être envisagée ?

Non. Si une fusion doit se faire, il faudra que Monaco Info perde son caractère de chaîne d’État, et ce n’est pas possible. Ça n’a pas de sens. Monaco Info a sa place. Aujourd’hui, il faut juste nous laisser un peu démarrer et montrer ensemble comment nous allons travailler. Après, nous reprendrons ces discussions. Mais pour moi, il n’est pas question de fusion, ni de disparition de Monaco Info, bien au contraire, elle a son rôle. Il y aura peut-être une réorientation de certaines choses, car nous allons travailler différemment. À TVMonaco, nous avons aussi d’autres missions. Nous serons plutôt tournés sur l’international que ne l’est Monaco Info.

Comment allez-vous garantir l’indépendance d’une chaîne subventionnée exclusivement par l’État monégasque ?

L’État est un actionnaire. Posez la même question à Delphine Ernotte sur France Télévisions par rapport à l’État français. Je pourrais tout dire à ce sujet, le seul moyen sera de voir comment on fonctionne. Nous avons réussi à mettre en place un système de gouvernance sur justement la transparence et l’indépendance de la chaîne. Ces outils ont été mis en place en accord avec le gouvernement et le prince. Et ce sont d’ailleurs ces outils qui nous ont permis d’adhérer à TV5 Monde. Car pour y adhérer, et défendre la francophonie, il faut montrer patte blanche en matière d’indépendance. Ce que nous avons apporté a démontré que nous avions cette indépendance. D’ailleurs, la continuité de Monaco Info justifie notre indépendance. Car quand l’État voudra faire passer un certain nombre de messages, que nous ne prendrons pas sur TVMonaco, il pourra le faire sur Monaco Info. Enfin, par définition, une chaîne nationale doit être financée par l’État.

Vous serez donc libres de traiter tous les sujets que vous souhaitez, y compris ceux qui ne mettront pas forcément en valeur la principauté ?

Bien sûr. D’ailleurs nous avons des sujets sur la construction, sur les problèmes de circulation… Pourquoi ne pas en parler ? Ça fait partie de notre quotidien. Nous sommes une chaîne de télé nationale, et on se veut indépendant. Nous parlerons de ce dont nous avons envie de parler. Y compris des problèmes, si demain il y a des grèves et des manifs… comme toute chaîne nationale. À Monaco, il y a des choses qui s’améliorent, d’autres qui sont à améliorer, mais c’est le travail du gouvernement, du Conseil national, de nous tous. Nous diffuserons ce que nous jugerons pertinent à diffuser, mais sans qu’on nous le demande. La rédaction ne s’interdira aucun sujet, et moi je veillerai simplement à ce qu’il y ait du respect de la dignité, et que notre info soit vérifiée. Nous serons réellement indépendants. Attendez que nous commencions et vous verrez bien.

Pour garantir l’indépendance de vos journalistes, vous avez également créé une commission de déontologie ?

Oui, cette commission de déontologie est composée de trois membres. Deux ont une expérience de l’audiovisuel et de la communication à l’international, et le dernier a une expérience avérée en matière de juriste. L’idée de cette commission est de pouvoir à la fois nous permettre de nous contrôler, de contrôler la chaîne à n’importe quel moment, mais également sur les contenus, de s’assurer que ce soit bien conforme à l’éthique. Ces membres sont nommés pour trois ans. Ils ne sont pas rémunérés, donc il n’y a pas de problème d’argent. Cette commission pourra être saisie par n’importe quel téléspectateur qui a un problème, pour diligenter une enquête. Tout un cahier des charges a été édité et sera publié sur nos sites au moment où la chaîne sera lancée.

Vous avez longtemps communiqué sur Monte-Carlo Riviera TV, qui est ensuite devenu TVMonaco : pourquoi ce changement de nom ?

Tout simplement parce que moi, j’avais à la base créé une société qui s’appelait Monte-Carlo Riviera. Et nous co-produisions des émissions qui s’appelaient Monte-Carlo Riviera et qui étaient diffusées sur TV5 Monde. Pour éviter toute confusion de genre, sachant que nous étions co-producteurs, car il y avait un autre producteur avec nous, et pour être certain de notre indépendance, nous avons décidé de changer de nom. Aussi, le nom de Monte-Carlo Riviera faisait moins « chaîne nationale ». La volonté était vraiment d’avoir plus le nom Monaco que Monte-Carlo. Nous l’avons donc tout naturellement appelée Monaco Télévisions et TVMonaco.

Pourquoi ne pas l’avoir d’emblée appelée ainsi ?

Parce que je n’avais pas de raison d’en parler avant. Il était opportun pour moi de révéler le nom de la chaîne au moment de l’annonce du lancement de la chaîne.

Quels sont vos objectifs, en termes d’audience ?

Je me suis fixé des objectifs, mais je ne peux pas encore les révéler. Reposez-moi la question le 5 juin [2023 — NDLR]. Quand on se fixe des objectifs, il faut qu’ils soient cohérents, logiques, et atteignables. Il y a l’objectif que moi, je me fixe, mais j’ai besoin d’avoir l’adhésion de l’équipe avec cet objectif. Et je veux être sûr que l’objectif que j’ai en tête, tout le monde va l’atteindre. Il est atteignable, il est ambitieux, puisque j’ai toujours visé assez haut dans tout ce que j’ai fait. Mais avant de dire quoi que ce soit, j’ai besoin de le valider avec l’équipe, car c’est collégial.