vendredi 29 mars 2024
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Monaco Télécom garde le monopole, mais sous contrôle

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L’État monégasque vient de renouveler sa concession publique avec Monaco Télécom pour vingt ans.

Mais l’opérateur devra désormais rendre des comptes à un comité de suivi, chaque année, sur sa stratégie. L’idée étant, selon le gouvernement et le Conseil national, de garantir des tarifs compétitifs aux usagers, malgré le monopole accordé.

C’est reparti pour vingt ans. Monaco Télécom va conserver son monopole en principauté pour les vingt prochaines années, dans les secteurs de la télédistribution et des télécommunications. L’État vient en effet de renouveler sa concession publique avec l’opérateur, ce lundi 17 mai 2021, en présence d’Etienne Franzi, président de Monaco Télécom, et Martin Peronnet, directeur général. Le précédent accord datait de 2011. Cette nouvelle signature s’accompagne de remises accordées aux « clients fidèles ». Autrement dit, les Monégasques, les résidents de longue date et les entreprises, qui, mis à part les offres mobiles proposées par la concurrence frontalière, n’ont pas vraiment le choix d’aller voir ailleurs à Monaco, notamment en ce qui concerne les abonnements Internet et fibre.

« C’est vrai qu’au départ, nous avons clairement posé la question du renouvellement du monopole, constatant un certain nombre d’insatisfactions des résidents et des entreprises, vis-à-vis des offres de services et des tarifs pratiqués » Stéphane Valeri. Président du Conseil national

Tarifs renégociés

Suite à cette nouvelle concession publique, l’opérateur s’engage donc à accorder 50 % de remise sur ses tarifs pour les entreprises et professionnels de Monaco, pour une durée de trois ans. Il s’engage également à accorder 30 % de remise sur les offres d’abonnement fibre, à quatre catégories de personnes à Monaco : les Monégasques, leurs enfants, parents et conjoints, les personnes nées en principauté, et les personnes justifiant d’au moins quarante ans de résidence à Monaco. Il s’agit, finalement, des nationaux et des résidents dits « protégés », reconnus par la loi 1470 du 17 juin 2019. Les autres, par contre, continueront à payer plein tarif. Cette baisse des prix a été négociée par le gouvernement et les élus du Conseil national pour conclure la signature de la nouvelle concession publique avec Monaco Télécom. C’était même, si l’on en croit Stéphane Valeri, président du Conseil national, la condition nécessaire pour poursuivre le partenariat avec l’opérateur, faute de pouvoir revenir sur sa position de monopole à Monaco : « C’est vrai qu’au départ, nous avons clairement posé la question du renouvellement du monopole, constatant un certain nombre d’insatisfactions des résidents et des entreprises, vis-à-vis des offres de services et des tarifs pratiqués, a-t-il déclaré devant l’hémicycle, en conférence de presse le 17 mai 2021. Sans effort concret de la part du concessionnaire, cette question du renouvellement était donc parfaitement légitime. Pour autant, le gouvernement a fait de ce renouvellement une ligne rouge non négociable. À partir de là, nous avons donc demandé des contreparties fortes, dont certaines avaient déjà été mises en œuvre depuis notre élection, et qui concernent non seulement un plus grand choix dans les offres, une amélioration de la qualité de service, mais aussi une baisse des prix. » Les prix affichés par Monaco Télécom ont en effet longtemps cristallisé les mécontentements à Monaco, car jugés plus élevés que la moyenne européenne, à qualité équivalente. Cette prochaine baisse des tarifs, si elle n’est pas généralisée à l’ensemble des résidents de la principauté, est toutefois perçue comme un bon point d’étape par les élus du Conseil national, dont Franck Lobono, président de la commission du logement au Conseil national : « Vingt euros par mois, c’est l’économie que va réaliser un client qui a un abonnement Internet à 1 Go. Aujourd’hui, il paye 59,99 euros par mois, avec le câble et une technologie ancienne. Demain, il paiera 39,99 euros par mois avec la fibre à 1 Go, une Apple TV 4K et la technologie WiFi Mesh. Ce sera encore moins cher qu’Orange en France, avec une qualité de service incomparable. »

Franck Julien © Photo Conseil National.

« Je rappelle, qu’il y a trois ans, au début de notre mandature, Monaco Télécom ne proposait qu’un seul débit d’accès à Internet à 1Gb/s. Un monopole sans contrôle est insupportable » Franck Julien. Élu Primo !

Monopole sous contrôle

Outre le « geste commercial » demandé à Monaco Télécom, un nouvel organe de contrôle a aussi été mis en place pour veiller à ce que la qualité du service et les tarifs proposés restent compétitifs tout le long de la concession publique. Cet organe prendra la forme d’un comité de suivi du plan industriel, composé de trois membres du gouvernement, trois autres de Monaco Télécom, et deux représentants du Conseil national, dont son président, en certaines occasions. Ce comité sera chargé de vérifier, au moins une fois chaque année, que Monaco Télécom tienne bien ses engagements en matière de politique commerciale et d’orientations stratégiques, chacun inscrit dans son plan industriel revu tous les trois ans, contre cinq auparavant. En cas de manquements constatés par Monaco Télécom, ce comité pourrait demander au gouvernement princier d’imposer des sanctions financières contre l’opérateur. Ces pénalités pourraient atteindre les 12 millions d’euros de hausse de redevance si l’opérateur s’écarte du plan en question. Une somme conséquente, mais nécessaire selon Franck Julien, élu de la majorité Priorité Monaco (Primo !), pour que le monopole accordé à Monaco Télécom ne se conclue pas, à l’avenir, par une baisse de qualité des services proposés aux usagers. Car, toujours selon lui, la qualité n’a pas toujours été au rendez-vous chez Monaco Télécom : « Si les gouvernements successifs avaient correctement fait valoir leur prérogative de tutelle, la fibre aurait été lancée il y a de cela plus de dix ans, du temps de Cable&Wireless. Nous avions aussi reproché à Monaco Telecom ses tarifs peu compétitifs, une qualité de service parfois médiocre, et surtout, une offre commerciale pas assez diversifiée. Je rappelle qu’il y a trois ans, au début de notre mandature, Monaco Télécom ne proposait qu’un seul débit d’accès à Internet à 1 Gb/s. Un monopole sans contrôle est insupportable. » Cependant, en termes de statut juridique, cette commission n’aura qu’un rôle consultatif. Si les sanctions financières pourront bel et bien s’appliquer, il faudra tout de même compter sur l’effort de dialogue et d’entente cordiale entre les différents partis pour que les engagements du plan industriel soient suivis. Autant dire que, dans ce contexte, la menace de sanctions promet avant tout d’être dissuasive : « Nous ne voulons pas en arriver là, d’autant que la direction de Monaco Télécom est à l’écoute de nos propositions depuis le début de notre mandat [la mandature de la majorité Primo ! a débuté en 2018 — NDLR], la situation s’est améliorée, explique Franck Julien. La création, au sein du gouvernement d’une délégation interministérielle chargée de la transition du numérique a permis d’accorder aux infrastructures télécom et plus globalement numériques, toute l’importance qui doivent être les leurs. Nous parlons aujourd’hui de fibre optique, mais nous pourrions dans le domaine aussi parler de 5G, de cloud souverain et de diverses plateformes numériques. »

« Si les gouvernements successifs avaient correctement fait valoir leur prérogative de tutelle, la fibre aurait été lancée il y a de cela plus de dix ans, du temps de Cable&Wireless. Nous avions aussi reproché à Monaco Télécom ses tarifs peu compétitifs, une qualité de service parfois médiocre, et surtout, une offre commerciale pas assez diversifiée » Franck Julien. Élu Primo !

La fibre et la 5G s’étendent

Selon Monaco Télécom, la nouvelle concession publique prévoit de déployer le réseau fibre sur tout le territoire, dès 2022 à tous les foyers et toutes les entreprises, contre deux tiers aujourd’hui. Monaco Télécom prévoit également de généraliser la couverture du réseau 5G à l’intérieur des bâtiments de la principauté, mais aussi de continuer à déployer le réseau WiFi public, et de le rendre gratuit pour tous dès cette année 2021, en plus des 72 hots spots disponibles. « Je remercie le gouvernement princier et le Conseil national pour leur confiance. L’ensemble de l’entreprise est mobilisé avec passion et respect pour offrir à l’ensemble de ses clients, particuliers, entreprises et institutions le meilleur dans le domaine des communications numériques. Après le déploiement de la 5G, l’arrivée de la fibre en est une étape majeure », a ainsi conclu Martin Péronnet, directeur général de Monaco Télécom, ce lundi 17 mai 2021, en conférence de presse.