jeudi 28 mars 2024
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Masques FFP2 « Je ne pense pas qu’il faille redouter une pénurie »

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Le président de la commission des intérêts sociaux et des affaires diverses du Conseil national, Christophe Robino, estime que le port d’un masque FFP2 ne se justifie pas en toutes circonstances.

À l’heure actuelle, quels sont les différents types de masques disponibles sur le marché ?

Il faut rappeler qu’il existe trois types de masques : les masques à usage médical ou encore appelés masques chirurgicaux, les appareils de protection respiratoire filtrant ou masques FFP2 ou encore équipement de “Protection individuelle” et les masques à usage non sanitaire ou masques grand public. Les premiers offrent une protection entre 95 et 98 % contre les particules de 3 micromètres (μm), les deuxièmes de 94 % contre des particules de 0,6 µm (efficace contre la plupart des aérosols : particules infectieuses ou poussières dangereuses), et les derniers, généralement en tissu, offrent une protection d’au moins 90 % pour des particules de 3 µm pour les masques de catégorie 1, et d’au moins 70 % pour les masques de catégorie 2.

Comment jugez-vous la politique du gouvernement vis-à-vis du masque FFP2, qui est plus efficace que le masque chirurgical, notamment face au variant Omicron ?

La stratégie actuelle, consistant à réserver les masques FFP2 aux professionnels de santé réalisant des actes aérosolisants, est conforme aux recommandations notamment du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP), qui indique, de plus, que pour être totalement efficients, ces masques doivent être associés au port de lunettes de protection. C’est d’ailleurs ce qui est déjà fait pour la protection des soignants prenant en charge des patients atteints de maladies à propagation principalement aérienne, comme la tuberculose. Le bénéfice dans le cas d’infections respiratoires virales, comme la grippe ou les bronchiolites, n’est pas significatif entre un masque chirurgical et un masque de type FFP2. Et il ne se justifie probablement pas dans le cas du Covid, sauf dans les situations de soins particulièrement à risque d’aérosolisation, et probablement en atmosphère très confinée. Notamment lorsque l’apport d’air neuf et le renouvellement d’air des locaux sont insuffisants, lorsqu’il y a un recyclage de l’air ou une forte densité de population.

En France, le plan grippal de 2009 militait en faveur d’une généralisation du FFP2 à « tous les professionnels de santé, les professionnels de la sécurité placés dans les mêmes situations et les professionnels chargés des secours aux victimes » mais aussi à tous les « salariés placés au contact permanent et rapproché du public et de personnes vulnérables » : Monaco doit-il suivre ces recommandations ?

Effectivement, le plan grippal 2009 allait dans ce sens, mais, pour les raisons que j’exposais plus haut, en tenant compte de la pénibilité du port des masques FFP2, exposant à un mauvais usage de ces derniers, la généralisation de ce type de masques ne me semble pas opportune. Le bon usage du masque chirurgical pour les professionnels de santé et les personnels au contact des plus vulnérables, et de masques grand public dans les autres situations, apparaît, dans la plupart des cas, suffisant pour assurer la protection contre le Covid, à la condition, bien sûr, que l’on continue d’appliquer strictement les autres mesures de protection : lavage des mains, distanciation, aération/ventilation des locaux, nettoyage des surfaces… Sans oublier l’importance de la vaccination.

« Le bénéfice dans le cas d’infections respiratoires virales, comme la grippe ou les bronchiolites, n’est pas significatif entre un masque chirurgical et un masque de type FFP2. Et il ne se justifie probablement pas dans le cas du Covid, sauf dans les situations de soins particulièrement à risque d’aérosolisation, et probablement en atmosphère très confinée »

À votre connaissance, les stocks de masques FFP2 constitués par l’État monégasque sont-ils suffisants ?

Je ne connais pas l’état des stocks en masques de type FFP2, mais je suppose que l’on a tiré les leçons du début de la pandémie, et que les stocks ont été dimensionnés en conséquence. Ce que je peux vous confirmer, c’est qu’actuellement nous n’avons plus de pénurie dans les établissements de santé, et que la Direction d’action sanitaire (DASA) procède à des approvisionnements réguliers.

En France, le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, Jean-Michel Blanquer, a annoncé jeudi 13 janvier 2021 que 5 millions de masques FFP2 seraient distribués dans le système scolaire : Monaco doit-il faire de même ?

Il semble effectivement que cette décision, parmi bien d’autres sujets qui ont été abordés, ait été prise suite à la réunion avec les syndicats d’enseignants et de parents d’élèves. Ces masques seront essentiellement destinés aux enseignants de maternelle et aux accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), pour celles et ceux qui le souhaitent, le protocole sanitaire actuellement en vigueur dans les écoles restant, par ailleurs, inchangé.

« La gratuité découle soit d’une obligation mise en place par les pouvoirs publics, soit d’une aide à caractère social pour les plus démunis. Ainsi, elle pourrait s’appliquer aux employés des établissements publics, et en fonction du contexte, aux personnes les plus à risques. En effet, les masques FFP2 coûtent plus chers, ils sont à usage unique, et ils ne peuvent être portés plus de huit heures. » Christophe Robino. Président de la commission des intérêts sociaux et des affaires diverses du Conseil national. © Photo Conseil National.

« Si l’on devait élargir l’utilisation des masques FFP2, je ciblerais en premier les autres professionnels de santé, les personnels médico-sociaux et les aidants, au contact de personnes fragiles. Et, bien sûr, les personnes à risques de formes graves de Covid-19 »

Alors que le variant Omicron a renforcé la contagiosité du virus, faut-il généraliser le port de masques FFP2 à d’autres professions que les soignants qui pratiquent des gestes invasifs ?

Il convient de rappeler que les deux principaux modes de contamination pour le Covid-19 se font soit par  l’émission de gouttelettes, notamment en cas de toux, soit par contact direct entre personnes ou avec des surfaces contaminées, le virus étant capable de subsister pendant plusieurs heures sur ces supports. La contamination par voie aérienne survient essentiellement en cas d’aérosolisation. C’est le cas pour certains soins. C’est probablement aussi le cas lorsque trop de personnes se retrouvent dans des locaux de petites tailles, insuffisamment aérés, mal ventilés, en atmosphère humide… D’où l’intérêt d’aérer, de mettre des jauges, de suivre les taux de CO2 qui sont un témoin de la qualité du renouvellement d’air, et, en dernier recours, d’utiliser des unités mobiles de purification d’air par filtration HEPA H13 ou H14, ou équivalent, pour en limiter le risque. Quoi qu’il en soit, si l’on devait élargir l’utilisation des masques FFP2, je ciblerais en premier les autres professionnels de santé, les personnels médico-sociaux et les aidants, au contact de personnes fragiles. Et, bien sûr, les personnes à risques de formes graves de Covid-19. En sachant que celui qui bénéficie le plus du FFP2 est celui qui le porte, et que, pour un maximum d’efficacité, les deux personnes doivent porter un masque.

L’État doit-il distribuer des masques gratuitement, notamment aux personnes fragiles et aux personnes immunodéprimées ?

La gratuité découle soit d’une obligation mise en place par les pouvoirs publics, soit d’une aide à caractère social pour les plus démunis. Ainsi, elle pourrait s’appliquer aux employés des établissements publics, et en fonction du contexte, aux personnes les plus à risques. En effet, les masques FFP2 coûtent plus chers, ils sont à usage unique, et ils ne peuvent être portés plus de huit heures. Enfin, pour être parfaitement efficaces, ils doivent être remplacés après avoir été retirés, pour pouvoir s’adapter à la forme du visage, et ainsi éviter les fuites latérales.

Le grand public s’est jeté sur les masques FFP2 ces dernières semaines : craignez-vous une pénurie, y compris dans les pharmacies de la principauté ?

Je ne pense pas qu’il faille redouter une pénurie. En effet, les masques grand public restent largement majoritaires, en tout cas à Monaco. Et à terme, la question qui va se poser, c’est plutôt celle du maintien, ou non, de l’obligation du port du masque en extérieur, avec la fin de la vague actuelle, que l’on espère dans les prochaines semaines.

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