mercredi 24 avril 2024
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Jean-Charles Allavena : « Je n’ai jamais adopté une stratégie de la peur ou du repli »

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Monaco Hebdo a décidé de donner la parole à l’ensemble des présidents de commission du Conseil national. Cette semaine, c’est Jean-Charles Allavena qui s’exprime. Le président de la commission des relations extérieures évoque les négociations avec l’Union européenne, les risques d’une ratification de la Charte sociale, et ses relations avec Rassemblement & Enjeux.

 

En séance législative le 26 mai, le ministre d’Etat a estimé que le travail législatif du Conseil national était trop lent : c’est une critique justifiée ?

Je trouve que c’est abusif. Il a été attaqué sur ce thème, il a choisi de répliquer sur le même terrain. Pourquoi pas, mais il ne peut ignorer que, à la différence des fonctionnaires, les élus ne sont pas professionnels, qu’ils ne peuvent pas assister à trois commissions par jour, et que s’ils veulent travailler correctement, il doivent passer du temps sur les textes. Je ne prendrai qu’un seul exemple, la loi sur la modernisation de la fonction publique.

 

C’est-à-dire ?

Nous aurions pu nous en « débarrasser » très vite et passer à autre chose. Vu les lacunes de ce texte par rapport à ses ambitions, nous avons préféré y consacrer beaucoup de réunions en commission, le lire et l’étudier très en détail pour argumenter notre rejet. Il me semble que c’est beaucoup plus sérieux, que c’est respectueux des fonctionnaires et que le gouvernement devrait apprécier le sérieux de son partenaire institutionnel.

 

Quatre personnes ont voté contre le renouvellement de Laurent Nouvion à la présidence du Conseil national : vous êtes parmi les 4 ?

Non. Il n’y a aucune ambiguïté sur mon vote. J’avais dit depuis longtemps que je voterai Laurent Nouvion. Je l’ai fait.

 

Le 23 avril, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a décidé de lever la procédure de post-suivi appliquée à Monaco. C’était une anomalie que Monaco figure parmi les pays surveillés ?

Une douzaine de pays sont aujourd’hui en procédure de post-suivi. Notamment l’Azerbaïdjan, la Macédoine, la Moldavie, la Turquie, l’Albanie, le Monténégro, ou encore l’Ukraine. Il s’agit surtout de pays issus du bloc de l’Est, dans lesquels le fonctionnement démocratique et les droits de l’homme ne sont pas franchement exemplaires… Et Monaco était au milieu de tout cela. De ce point de vue, on peut donc considérer que c’était une anomalie. Mais il est vrai aussi que la Principauté n’est pas vraiment en phase avec un certain nombre de critères du Conseil de l’Europe. Il y avait donc une forme de logique.

Quels critères ?

Clairement notre système politique. La monarchie constitutionnelle n’est pas le modèle que préconise et aime l’APCE, qui n’a d’yeux que pour la démocratie parlementaire. Le modèle norvégien ou suédois si possible ! Pour beaucoup, nous sommes donc une anomalie ou un anachronisme. A côté de cela, faut-il rappeler qu’il n’y a pas de prisonniers politiques à Monaco, que la liberté de la presse est relativement bien respectée… Sur les sujets fondamentaux, Monaco respecte la plupart des critères APCE. Monaco est devenu un non-sujet. Et c’est une bonne chose.

 

Pourquoi avoir déclaré que le rapporteur espagnol de l’APCE, Jordi Xucla, a donné « une vraie leçon de politique » ?

Jordi Xucla avait évidemment une feuille de route de l’APCE. Mais il a aussi essayé de comprendre le fonctionnement monégasque et pas de nous donner des leçons de démocratie et de droits de l’homme. Depuis sa désignation en février 2014, Jordi Xucla est venu trois fois en Principauté, pour constater les avancées réalisées par Monaco et pour bousculer un peu ses interlocuteurs, afin qu’ils aillent plus vite sur les points en suspens. Je pense qu’il a aussi établi une relation de confiance très forte avec le Prince.

 

Que s’est-il passé le 17 mars en commission de suivi, à Paris ?

Jordi Xucla a bien sûr fait le constat que tout n’était pas réglé. Mais alors que d’autres rapporteurs auraient dit « en progrès, doit terminer son travail, on poursuit », il a fait le pari de convaincre ses collègues qu’on traiterait mieux le dernier point en mettant fin au post-suivi qu’en le poursuivant. Et il a gagné… Une leçon donc.

 

Vous avez déclaré que la collaboration avec l’ex-rapporteur de l’APCE, Anne Brasseur, a été « un rendez-vous raté » et même « un accident » ?

J’ai en effet dit que ce fut un long rendez-vous raté, que c’était dommage, et que c’était sans doute un accident, comme il en arrive à tous. Car Anne Brasseur est depuis janvier 2014 une excellente présidente de l’APCE. Sa compétence n’est donc pas en cause. Visiblement, son dialogue avec tous ses interlocuteurs monégasques était très difficile, peu fructueux. C’est la raison pour laquelle, en septembre 2013, j’avais proposé que l’on change de rapporteur. J’avais la conviction qu’avec Anne Brasseur, le dialogue était dans une impasse. Force est de constater que Jordi Xucla a su faire bouger les lignes…

 

Quelles sont les avancées qui ont convaincu l’APCE ?

Par rapport à nos engagements initiaux, cinq ou six points restaient à régler : comme l’adoption d’une nouvelle loi sur le fonctionnement et l’organisation du Conseil national, la réforme du code pénal et du code de procédure pénale, la ratification de la convention sur la cybercriminalité, ou encore la consultation du Conseil national sur les traités internationaux. Sur tous ces points, Monaco a rempli ses engagements.

 

Le dernier gros point litigieux reste la ratification de la charte sociale européenne révisée ?

Effectivement. Mais Jordi Xucla n’a pas souhaité en faire un point de tensions. Son message du 17 mars est très fort : « Je vous demande de faire confiance au Souverain [pour régler ce dernier point] et de ne pas donner l’occasion aux anti-européens de se déchainer contre l’APCE à ce motif. »

 

Pourquoi les autorités monégasques et le Conseil national sont si réticents à l’idée de ratifier cette charte sociale ?

Demandons-nous plutôt pourquoi, à l’occasion des négociations d’adhésion, les représentants de Monaco ont pu promettre qu’on ratifierait la charte sociale et les protocoles 1 et 12 ? Cela reste très mystérieux pour moi. Car si elle est ratifiée telle quelle, c’est un vrai danger pour Monaco. Cela signifie qu’un certain nombre de nos spécificités deviennent attaquables devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Je pense notamment au droit du travail ou au droit au logement.

 

Un exemple concret ?

La charte stipule par exemple que les individus qui travaillent dans un pays ont aussi le droit d’y habiter. Cela me paraît absolument normal chez tous nos grands voisins. Mais cette disposition est évidemment inenvisageable à Monaco. Ce n’est pas un dogme. D’un point de vue purement logistique, c’est juste impossible sur le territoire monégasque. La discussion sur la charte sociale n’est toutefois pas fermée.

 

C’est-à-dire ?

Un groupe de techniciens et d’experts juristes va être créé pour trouver des alternatives : soit ils trouvent une solution fiable à 100 % pour faire une « charte sociale à la carte », avec un certain nombre de réserves exprimées par Monaco. Mais j’en doute. Soit on oublie le texte et on montre à l’APCE, article par article, tout ce qui est déjà fait à Monaco et qui, sur beaucoup de points, va au-delà des standards réclamés.

 

A Strasbourg, vos collègues européens connaissaient mal Monaco ?

Oui, c’est sûr. Et notre délégation a fait un énorme travail de pédagogie. Mais il est certain que l’on partait de loin. A titre d’exemple, certains élus européens ne savaient pas que la Principauté avait une constitution et un parlement. Il a fallu aussi longuement expliquer que les Monégasques sont minoritaires dans leurs pays : 8 000 seulement sur 38 000 habitants. Et que si l’on n’accordait pas un minimum de protection à nos concitoyens, le modèle risquait d’exploser. Je crois que c’est une particularité désormais bien comprise.

 

Les clivages politiques sont forts à Strasbourg ?

Je ne trouve pas. Il y a cinq groupes politiques qui vont de la vraie gauche à la vraie droite, avec deux ou trois groupes intermédiaires. Mais toutes ces personnes sont capables de discuter et de dépasser les clivages politiques. Le vrai clivage que je ressens n’est pas Est/Ouest, mais plutôt Nord/Sud.

 

C’est-à-dire ?

On sent de la part des élus nordiques — et le nord commence déjà au Luxembourg… — une conception de la démocratie et des droits de l’homme nettement différente de la nôtre. Ils ont cette idée que les pays du sud ou de l’est sont moins stricts et ont tendance à transiger avec les principes fondamentaux.

 

La majorité martèle qu’elle n’a pas une posture anti-européenne : c’est discutable, non ?

Je n’ai pas le souvenir que pendant la campagne électorale de 2013, il y ait eu des attaques anti-européennes sur le fond. Ce que nous avons attaqué à l’époque, c’est l’ingérence ponctuelle, mais réelle, d’Anne Brasseur dans cette campagne. Et surtout le mensonge politique de la majorité sortante.

 

Quel mensonge politique ?

La saisine de la commission de Venise a eu lieu au début du mois d’octobre 2012. Les élus de notre délégation à Strasbourg ont tenu cela secret pendant trois semaines. Ils n’ont pas jugé utile de communiquer cette information. Ce que nous avons dénoncé, c’est cette faute politique.

 

Vous aviez parlé de « haute trahison » : c’est un peu fort non ?

Le mot a semblé fort, mais reprenez la définition de la haute trahison, sur Wikipédia par exemple : « L’acte ou l’action méritant la qualification de haute trahison est un crime qui consiste en une extrême déloyauté à l’égard de son pays, de son chef d’État, de son gouvernement ou de ses institutions. Il s’agit d’une infraction politique. » Que ça ait choqué ou non, n’est-ce pas exactement ce qu’il s’est passé ?

 

La saisine de la commission de Venise, c’était si grave que ça ?

La saisine n’est pas un drame en soi. Ce qui est grave en revanche, c’est d’avoir menti aux Monégasques. Comme pour l’affaire du sondage Opinionway : je me fiche complètement que Jean-François Robillon ait commandité un sondage. Ce qui est fortement dérangeant, c’est encore une fois, le mensonge. Il a affirmé haut et fort que ce n’était pas lui. Et puis je veux aussi rappeler que le contexte de campagne était plus que tendu. Et qu’on a tendance, à ces moments, à utiliser des mots forts.

 

Le président du Conseil national, Laurent Nouvion, a parfois tenu des propos assez alarmistes sur l’Europe ?

Le président a exprimé un certain nombre de positions protectionnistes et défensives. Il a indiqué en conférence de presse qu’il avait été élevé dans l’anti-européisme… Est-ce que ses propos doivent engager toute la majorité ? Je n’en suis pas sûr. Il a lui-même dit que non. Est-ce que ses propos sont partagés par toute la majorité ? Je ne le crois pas.

 

L’opposition a dénoncé une « stratégie de la peur » ?

Pour ma part, je n’ai jamais adopté une stratégie fondée sur la peur, l’angoisse ou le repli. Et je suis heureux d’avoir lu les mêmes mots prononcés par le Prince Albert. Je rappelle que le débat n’est pas d’adhérer à l’Union européenne (UE). L’UE ne veut pas de nous. Et nous ne voulons pas d’elle… Tout le travail consiste à déterminer comment travailler avec l’UE. Nous ne sommes pas dans le même monde qu’en 1960… Monaco ne peut plus être tout seul. Que cela plaise ou non.

 

Quand l’opposition compare les propos de la majorité à l’extrême droite, cela vous inspire quoi ?

L’opposition fait un raccourci un peu facile… L’extrême droite française a une part xénophobe et raciste qui n’existe évidemment pas à Monaco. En revanche, si l’on dépasse ce niveau nauséabond et que l’on s’élève un tout petit peu, la priorité nationale, vue de l’extérieur, est effectivement une thèse défendue par le Front national (FN). Mais cette thèse, polémique et inutile en France, a du sens à Monaco.

 

Pourquoi ?

L’opposition est d’accord comme moi sur le fait que l’on ne peut pas se passer de la priorité nationale à Monaco. Si l’on veut rentrer dans ce petit jeu, ils sont donc autant d’extrême droite que moi…

 

Le président de l’Union pour la Principauté (UP), Patrick Rinaldi, a indiqué que l’élu d’opposition Bernard Pasquier et vous, aviez travaillé « main dans la main. » C’est le cas ?

On a passé beaucoup de temps ensemble à Strasbourg. Et oui, Patrick Rinaldi a raison : nous avons bien travaillé. Nous avions un objectif commun à défendre : la sortie de Monaco du post-suivi. Mais pas une sortie à n’importe quel prix. Il n’y avait donc pas un élu de l’opposition et un élu de la majorité. Nous étions deux élus monégasques travaillant dans l’intérêt de leur pays, avec des discours différents, mais complémentaires.

 

Cela ne veut pas dire que vous partagez les mêmes idées politiques ?

Dois-je rappeler que nous avons été élus sur des listes différentes, et qu’on a en effet un certain nombre de désaccords ? Quand il parle d’amendement budgétaire, je ne suis pas du tout d’accord. Quand il parle de la problématique des femmes chefs de foyer, je suis plus ou moins d’accord. Et sur d’autres sujets je suis complètement d’accord. Bernard est quelqu’un avec qui il est très agréable de discuter, de débattre et qui a beaucoup de bonnes idées pour Monaco. Au cours d’un mandat, c’est comme ça qu’on fait avancer les choses.

 

Vous envisagez de devenir indépendant ou de rejoindre l’opposition ?

Non. Si j’ai pu avoir et si j’ai exprimé des divergences avec le président, je crois au programme de la majorité HM. Et je travaille pour qu’on le mette en œuvre.

 

Quel sera le rôle du Conseil national dans les négociations avec l’UE ?

Quand Laurent Nouvion a laissé entendre fin 2014 qu’il devait être à la table des négociations, j’ai dit dans la foulée que je pensais que ce n’était pas notre rôle. Je ne dis pas que ce n’est pas notre envie. Mais institutionnellement, ce n’est pas notre place.

 

Pourquoi ?

Nous sommes dans un régime de monarchie constitutionnelle. Pas dans un régime parlementaire. Les négociations internationales incombent uniquement au Prince et au gouvernement. On ne peut pas d’un côté flinguer l’amendement budgétaire, qui met en péril le régime, et demander de l’autre côté, parce que ce sujet nous intéresse, de faire une entorse aux textes institutionnels.

 

Vous aurez tout de même votre mot à dire ?

Il est évidemment important que le Conseil national soit informé et que l’on ait des explications sur les avancées des négociations. Le président a d’ailleurs adressé un message fort au gouvernement : il ne faudra pas attendre d’avoir le projet de ratification entre les mains pour associer le Conseil national. A priori, il a été entendu.

 

Les avocats ont raison de s’inquiéter par rapport à ces négociations ?

C’est légitime. Il est normal que les professions réglementées soient vigilantes et se préoccupent de leur avenir. Même si, selon les professions, le péril semble plus ou moins grand. Mais cessons de toujours faire croire que le pire va arriver. Personne ne sait aujourd’hui si Bruxelles va essayer ou pas d’imposer à Monaco le dogme de la libre circulation et de la libre installation. Le gouvernement va évidement défendre les spécificités monégasques. Et cette fameuse « ligne rouge » à ne pas franchir.

 

En revanche, pour d’autres professions à Monaco, ces accords avec l’UE sont indispensables…

Absolument. Dans la communication publique, on ne voit que les professions qui agitent le chiffon rouge et qui crient au loup. Or, de nombreuses entreprises à Monaco ont des capacités d’exportation et sont aujourd’hui bridées dans leur développement. Ces entreprises ont absolument besoin d’un bon accord, pérenne, pour éviter de se retrouver dans une situation de chantage. Je suis étonné et je regrette qu’on les entende assez peu. Et je regrette que le Conseil national parle surtout de la protection des professions réglementées et si peu de l’expansion, voire de la survie, de nos entreprises.

 

La majorité HM a demandé une étude d’impact économique sur ce sujet. C’est vraiment utile ?

Cela me semble, tout à fait nécessaire. Je conçois qu’une telle étude soit extrêmement difficile à réaliser. C’était d’ailleurs la réponse spontanée que le conseiller pour les finances et l’économie, Jean Castellini, nous avait donnée pour l’OCDE. Mais savoir si la libre installation est un drame ou pas, mesurer ce que l’on a à y gagner ou à y perdre, personne n’est capable de le dire sans étude d’impact.

 

Un accord potentiel avec San Marin et Andorre est définitivement enterré ?

Je crois que ce n’est plus à l’ordre du jour. L’approche initiale de l’UE était en effet de conclure un accord-cadre avec ces trois petits pays. Mais l’UE semble avoir compris que la situation de ces Etats était très différente. Notamment au niveau économique. Cela n’empêche pas Monaco, Andorre et San Marin de discuter ensemble de manière très étroite. Ce n’est pas du tout du chacun pour soi dans ces négociations.

 

Le gouvernement fait toujours de la rétention d’informations ?

Je ne sais pas si « rétention d’information » est le mot juste. J’ai parlé plutôt de « communication a minima. » Et surtout, généralement, très tardive. J’avais dit que si on veut rechercher l’accord des volontés prévu par notre constitution, il valait mieux le faire au début et au cours d’un dossier, plutôt que tout à la fin, lorsque tout est bouclé et qu’il ne reste plus qu’à voter.

 

Il y a du progrès ?

Je ne sais pas si on progresse vraiment sur ce terrain. Car il faut beaucoup de temps pour changer les habitudes. En revanche, grâce aux discussions avec l’APCE, le gouvernement a accepté une lecture plus ouverte de l’article 14 de la Constitution.

 

Que dit cet article ?

Il dit que le Conseil national doit être consulté sur le contenu d’un traité ou d’une convention internationale uniquement si ces textes ont des conséquences budgétaires ou législatives. J’ai fait plusieurs interventions pour demander une application plus ouverte de cet article.

 

Avec quel résultat ?

Le ministre d’Etat m’avait à chaque fois opposé une réponse très ferme et une lecture stricto sensu. Mais le gouvernement nous a récemment écrit — et a écrit au Conseil de l’Europe — pour nous signifier que tous ces textes internationaux seront désormais envoyés, pour avis, au Conseil national. Ce n’est pas une modification de la constitution, mais une lecture plus ouverte de l’article 14. Cela méritait de se battre.

 

Pourquoi vouloir créer des séances publiques régulières, en dehors des séances budgétaires ?

C’est du pur pragmatisme. Les séances budgétaires sont interminables, car il s’agit de la seule occasion d’échange public avec le gouvernement. Les élus veulent poser toutes leurs questions, et ils cherchent souvent la ligne budgétaire qui leur servira de prétexte. J’estime que les Monégasques ont droit à un débat public régulier, pour qu’ils constatent aussi notre travail d’élus. Qu’à partir de là, on ait essayé de m’exécuter en disant que ce serait du changement institutionnel… Soyons sérieux !

 

Ce n’est pas le cas ?

Comme pour l’article 14, c’est simplement un changement d’organisation pour travailler mieux. Je ne suis pas un partisan du système parlementaire. lI n’est pas question de marcher sur le pouvoir du gouvernement. On y est arrivé pour l’article 14. Ne désespérons pas sur ce point.

 

Vous avez démissionné de Rassemblement & Enjeux (R&E) sans regrets ?

Si j’avais voulu rester président de R&E jusqu’au terme de mon mandat, en février 2016, personne n’aurait pu l’empêcher, car les statuts de R&E ne permettent pas d’écarter un président en fonction. Mais c’était la seule issue de bon sens possible. Nous étions dans une situation de blocage.

 

Vraiment ?

A l’origine, R&E est un mouvement politique fondé sur le dialogue et le débat. Or, une majorité du groupe a voulu en faire le fan club du président et n’a pas accepté une voix ou une approche différente. Ça a commencé par l’exigence de mise à l’écart de notre conseiller en stratégie et communication de campagne : au prétexte qu’il ne travaillait plus pour le Conseil national, il ne devait plus travailler pour le mouvement. Pourquoi ?

 

Et ensuite ?

Ça s’est poursuivi par le conflit interne systématique, manipulé et plus ou moins artificiel. Je n’ai vu aucun intérêt à continuer dans ces conditions et à perdre mon temps. J’ai donc pris mes responsabilités. Pour autant je n’oublie rien. Certains appellent politique ce qui n’est que bassesses…

 

Comment évolue le parti, désormais présidé par Alain Ficini ?

Alain Ficini est un ami, qui fait dans le cadre de la commission des Relations Extérieures un gros travail à la tête des délégations que je lui ai proposées, Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et Union interparlementaire (UIP). On lui a demandé de reprendre R&E. Ce n’était sans doute pas son ambition et il l’a fait.

 

Le calme est revenu chez R&E ?

On me dit que l’ambiance est redevenue sereine et que tout va pour le mieux. J’en suis ravi. Mais au-delà de ça, depuis mon départ je n’ai pas vu l’ombre d’une proposition et d’une expression publique. R&E est discret. Trop discret à mon goût. Ce n’est pas ma vision du rôle d’un mouvement politique.