samedi 20 avril 2024
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Georges Marsan : « À Monaco, la culture est essentielle »

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À l’occasion de ses vœux à la presse, le maire de Monaco, Georges Marsan, a détaillé pour Monaco Hebdo ses priorités pour 2021. Interview.

Comment avez-vous vécu cette année 2020 et la crise sanitaire qui frappe Monaco depuis février dernier ?

Du côté de la mairie, cette crise sanitaire nous a quelque peu chamboulés. Pour les services qui relèvent des compétences de la mairie, comme la petite enfance, les seniors, ou les marchés, nous avons essayé de faire en sorte que la population de Monaco continue de bénéficier des mêmes services, afin qu’ils puissent continuer de vivre normalement.

Vos premières décisions ?

Très vite, pour assurer le maintien à domicile dans de bonnes conditions, nous avons étendu la distribution de repas à domicile, que nous avons presque doublée. Du coup, les gens étaient satisfaits car, en mars 2020, ils étaient confinés et ne pouvaient plus sortir. Ce service n’a pas été proposé qu’aux seniors, il a aussi été proposé aux personnes les plus fragiles. Avec le marché de Monaco, nous avons donc beaucoup travaillé sur les livraisons. Nous avons des camions frigorifiques pour assurer la livraison des repas à domicile. Nous avions changé ces camions et, heureusement, nous avons gardé les anciens, ce qui nous a donc permis de faire face à la demande.

Vous avez dû changer votre façon de travailler au sein même de la mairie ?

Nous avons mis en place le télétravail. Pour l’état civil, les mariages ça n’a pas été facile. Nous avons bien sûr des normes sanitaires à respecter, mais nous parvenons à travailler normalement, car le personnel de la mairie s’est bien adapté. Les salariés du Jardin Exotique, qui a été fermé, ont été replacés dans différents services de la mairie, comme par exemple la surveillance des marchés, notamment pour vérifier que le port du masque est bien respecté. Tout le monde a joué le jeu, et nous avons collaboré de façon efficace avec le gouvernement monégasque.

Avec le recul, qu’est-ce qui a été le plus difficile depuis février 2020 ?

Du point de vue de l’organisation, s’adapter à cette crise sanitaire n’a pas été facile. Notamment avec le déploiement du télétravail, mais aussi avec la réorganisation des services. Sans oublier la prise en compte des services qui ont dû monter en puissance.

Quoi d’autre ?

Il y a aussi l’utilisation nouvelle de l’espace Léo Ferré pour pouvoir y faire, dans un premier temps, les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD). Et aujourd’hui, pour faire les tests PCR et la vaccination. C’est une grosse machine qu’il a fallu mettre en route, mais tout s’est bien passé avec les services de la santé du gouvernement. Aujourd’hui, nous avons un système qui fonctionne bien. La population semble satisfaite, à la fois des tests et de la mise en place de la vaccination.

À cause de la pandémie de Covid-19, vous avez licencié ou vous allez le faire ?

Pas du tout. Nous ne comptons pas licencier. Nous essayons de replacer systématiquement les salariés qui travaillent dans des structures qui ont été fermées, comme sur la partie administrative, par exemple. Nous avons pu le faire en partie grâce à l’émergence de petits boulots qui ont vu le jour pendant cette crise sanitaire. Notamment pour la surveillance du village de Noël, de la patinoire, pour le village d’été…

Et les CDD saisonniers ?

D’habitude, nous embauchons des suppléants pour certains postes de surveillants. Du coup, ces postes, qui sont d’habitude occupés par des jeunes pendant leurs vacances, n’ont pas pu leur être confiés. Et on ne sait pas ce que l’on fera à partir du mois de juin 2021. Nous avons prévu nos activités habituelles, mais on ignore si on pourra reprendre une activité normale.

Cela représente combien de postes de suppléants ?

Une cinquantaine de postes de suppléants n’ont pas été ouverts. Nous avons 750 salariés à la mairie de Monaco et, avec ces postes de suppléants, on arrive à environ 800 personnes.

Vous avez dû revoir l’organisation de l’académie Rainier III qui a fermé ses portes en septembre 2020, suite à des problèmes techniques sur le bâtiment ?

Ce bâtiment appartient à l’État monégasque et, à cause du confinement, l’académie Rainier III est restée fermée quelques mois. Des problèmes de ventilation et d’infiltration sont survenus, donc il a fallu délocaliser l’ensemble des cours de cette académie sur plusieurs sites de la principauté. Nous avons loué une quarantaine de chambres à l’hôtel Columbus qui ont été réaménagées en salles de cours. L’école de la Condamine nous a prêté des salles de cours. Le centre de la jeunesse princesse Stéphanie et la maison diocésaine nous ont aussi aidés. Enfin, nous avons aussi utilisé la salle de répétition de la caserne des pompiers de la Condamine. Là encore, il y a eu une bonne réactivité et une collaboration efficace avec le gouvernement princier. Ce qui nous a permis de maintenir l’enseignement musical en principauté.

Qu’est-ce qui est prévu en 2021 pour l’académie Rainier III ?

Le bâtiment qui abrite l’académie Rainier III doit rouvrir pour la rentrée de septembre 2021. Des travaux colossaux ont été entrepris, puisque tous les murs ont été cassés. Un seul plateau sera créé et les salles de cours seront réorganisées et recréées. Il s’agit donc d’une restructuration quasi-totale. Le budget, assumé par l’État, est estimé à 6 millions d’euros, hors amphithéâtre et aménagements.

Où en est le chantier du Jardin Exotique ?

Là aussi, il s’agit d’un gros chantier qui a débuté à la fin du confinement, début mai 2020. Il s’agit de travaux de sécurisation et de rénovation des rochers artificiels, mais aussi des différentes passerelles. Et puis, on s’est aperçu au fur et à mesure de l’avancée de ce chantier que des travaux beaucoup plus importants devaient être réalisés. En enlevant les faux rochers, on s’est rendu compte que les rochers situés en dessous étaient abîmés. Du coup, nous avons lancé des travaux beaucoup plus importants et le Jardin Exotique restera fermé jusqu’à la fin de l’année 2021. La réouverture est prévue courant 2022. Pour l’instant, le calendrier précis n’est pas encore arrêté.

Quel est le coût de ce chantier ?

En 2020, la mairie a débloqué 700 000 euros pour ce chantier. Mais comme il s’agit d’un budget très important, le gouvernement va nous aider. Au départ, nous avions évoqué une rénovation du Jardin Exotique, mais il s’agira finalement d’une restructuration complète de ce site.

Il y a aussi la Villa Lamartine qui va entièrement être transformée pour devenir une maison de vie intergénérationnelle : de quoi s’agit-il exactement ?

On parle souvent de rénovation de la Villa Lamartine, mais en fait il s’agit, là encore, plutôt d’une restructuration totale. Courant février 2021, la sonothèque et la vidéothèque qui se trouvaient dans cette villa, seront transférées à côté de la bibliothèque Louis Notari. À la frontière entre Monaco et Cap-d’Ail se trouve le club Le temps de vivre. Une fois les travaux terminés, ce club sera transféré dans cette Villa. De plus, le restaurant La Pignata et l’espace de relaxation Snoezelen, deux structures qui sont logées dans l’immeuble de l’ex-foyer Sainte Dévote à Monaco-Ville, seront aussi transférés dans la future Villa Lamartine. À terme, d’autres salles seront mises à disposition pour les plus jeunes, ce qui fera vraiment de cette villa un lieu intergénérationnel.

Quelle sera la surface utilisable pour cette Villa Lamartine ?

On exploitait le niveau -1, où se trouvait le fonds régional. La sonothèque et la vidéothèque se trouvaient en rez-de-chaussée, une salle de conférence, qui était devenue une salle de stockage. Une fois les travaux finis, on exploitera la totalité du plateau, soit environ 1 000 m2. Nous appliquons des normes de construction éco-responsables Bâtiments durables méditerranéens de Monaco (BD2M). La Villa Lamartine est le premier bâtiment public à avoir ce label BD2M.

Quel est le calendrier et le budget de ce chantier ?

Les travaux devraient durer environ trois ans, et devraient donc prendre fin en 2024. Le budget est de l’ordre de 8 millions d’euros, financé intégralement par la mairie de Monaco.

L’année 2021 continuera d’être marquée par la transition numérique ?

Nous sommes toujours dans une période de restrictions sanitaires. Mais la mairie continue de fonctionner normalement. Donc la transition numérique se poursuit également. Par exemple, la nouvelle carte d’identité monégasque permettra à chaque Monégasque qui le souhaite de disposer de son identité numérique sécurisée. Cela permettra aussi d’avoir accès à des actes administratifs qui ne relèvent pas seulement de la mairie et de l’état civil. Nous travaillons sur ce sujet main dans la main avec le gouvernement. Cette expérience nous servira de support pour la carte de résident. Cette nouvelle carte d’identité sera lancée au premier semestre 2021.

Quels sont les autres dossiers qui concernent le numérique pour l’année 2021 ?

Depuis 2018, nous modernisons le réseau publicitaire de la mairie de Monaco. Le numérique est plus simple à utiliser et nous permet aussi un gain esthétique. Aujourd’hui, nous avons installé deux écrans grand format, un au stade Louis II et un autre sur la place du Canton.

Quoi d’autre ?

Dès le mois de février 2021, nous allons développer chez les personnes qui bénéficient d’un médecin à domicile et qui le désirent, un module qui transforme le son en lumière. Ces modules permettent à la personne malentendante de voir si c’est le téléphone qui sonne, si c’est la sonnerie de la porte… Nous allons donc envoyer un courrier aux bénéficiaires qui pourront profiter de cette installation gratuitement, car ce système est financé par les dons de nos résidents en faveur du secteur social de la mairie de Monaco.

La culture, dont la mairie a la gestion, est très touchée par la pandémie de Covid-19 ?

La mairie gère plusieurs entités culturelles. Notamment une école supérieure d’art plastique qui a continué de donner ses cours malgré la crise sanitaire. D’ailleurs, en mars 2021, nous proposerons un concours d’entrée virtuel. Le 13 février 2021, nous ferons une journée portes ouvertes virtuelle, afin de mieux faire connaître l’école supérieure d’arts plastiques (Esap). Nous ferons également un enregistrement de jazz et de musiques actuelles les 28 et 29 janvier 2021. Ces concerts seront diffusés sur les réseaux sociaux et YouTube. La médiathèque continue aussi de fonctionner. Nous proposons des conférences, des ciné-clubs, avec un nombre limité de participants, par souci du respect des règles sanitaires. Même chose pour la bibliothèque Caroline, qui continue d’être ouverte le samedi matin jusqu’aux vacances de printemps 2021, ce qui n’était pas le cas avant.

Le ministre d’État, Pierre Dartout, a confirmé dans Monaco Hebdo n° 1180 qu’à Monaco la culture était « essentielle » et que les spectacles assis et à jauge réduite continuaient en principauté : quelle sera votre programmation pour 2021 ?

L’espace Léo Ferré, qui dépend de la mairie de Monaco, est mis à disposition pour les tests PCR et la vaccination de la population. Cette opération va durer au moins jusqu’au mois de juin 2021. L’été, nous avons un partenariat avec le Grimaldi Forum, dans le cadre duquel nous faisons une animation sur la rotonde, en lien avec leur exposition estivale. Nous avons donc déjà tout prévu : les animations, le village d’été, toutes les activités, la foire, le village de Noël… Mais aujourd’hui, l’incertitude règne.

En France, les salles de spectacle sont fermées depuis de longs mois, et Monaco fait office d’exception en Europe, avec l’Espagne, notamment : cette position vous semble-t-elle justifiée ?

Monaco a mis en place des normes sanitaires strictes, et la principauté a aussi réalisé beaucoup de tests. Notamment avec le Grimaldi Forum ou l’opéra, où parfois jusqu’à 250 personnes ont été testées pour pouvoir les faire travailler ensemble. Monaco est un petit territoire, où il a donc été possible d’organiser une vie presque normale. Dans les salles de spectacle, il y a aussi de la distanciation sociale. Je trouve ça très bien. En respectant ces règles sanitaires, on peut préserver la culture, qui est primordiale pour le bien-être de notre population. À Monaco, la culture est essentielle. Car la culture contribue à rendre la principauté attractive.