vendredi 29 mars 2024
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Gratuité des bus : le Conseil national
réclame un test sur tout le réseau

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Le Conseil national a réactivé le débat sur la gratuité des bus en principauté.

Par un courrier adressé au ministre d’Etat, les élus réclament un test sur l’ensemble du réseau, pour évaluer l’impact de la gratuité. Le gouvernement devrait recevoir les conseillers nationaux pour discuter des modalités de mise en œuvre de l’expérimentation.

Le sujet de la gratuité des bus revient dans le débat public, à la faveur d’un courrier adressé au ministre d’État par le Conseil national. Les parlementaires réclament une expérimentation sur tout le réseau de bus, pendant deux semaines. Une proposition inverse à celle émise par le gouvernement lors des débats budgétaires de décembre 2019. Celui-ci prévoyait un test d’une durée de six mois seulement sur la ligne 4 du réseau qui va de Fontvieille à Saint-Roman. Si la fréquentation a augmenté dans toutes les villes où la gratuité a été mise en place, c’est surtout le report modal qui intéresse les autorités monégasques. C’est-à-dire, mesurer si cette hausse de la fréquentation est due, tout ou partie, à un délaissement des voitures au profit du bus. Rien n’est moins sûr à Monaco…

Deux semaines sur tout le réseau ou six mois sur une seule ligne ?

Le Conseil national demande à ce que ce test soit réalisé autour de la semaine européenne de la mobilité, du 12 au 27 septembre 2020. « Seul ce test grandeur nature sur l’ensemble du réseau et sur une durée représentative, permettra de tirer des conclusions objectives sur les effets concrets de la gratuité », explique Guillaume Rose, élu Priorité Monaco (Primo !) et président de la commission environnement et qualité de vie, dans le communiqué diffusé par le Conseil national à la presse monégasque. Deux semaines peuvent paraître courtes à première vue pour disposer d’indicateurs statistiques suffisamment pertinents pour évaluer une politique publique. Dans le courrier envoyé au ministre d’Etat Serge Telle, les élus justifient la durée « très courte » de l’expérimentation proposée, afin de « prendre en considération la préoccupation évoquée par le gouvernement et la compagnie des autobus de Monaco (CAM), de ne pas pouvoir revenir à un système payant, après un test de gratuité de plusieurs mois, dont nous continuons de penser qu’il serait plus fiable. En raison de cette même durée très limitée, la mesure aurait, en outre, un coût très faible ». Un compromis des représentants nationaux peut-être insuffisant pour augurer de l’impact de la gratuité sur une si courte période.

© Photo Conseil National.

Un manque à gagner de 5 millions d’euros

Les élus de la majorité demandent aussi un lot de mesures d’accompagnement à cette instauration de la gratuité. « Bien sûr, des mesures complémentaires doivent accompagner cette gratuité pour la rendre la plus efficace possible : création de nouveaux couloirs de bus, priorisation des feux à l’approche des autobus, augmentation des fréquences notamment », recommande le Conseil national dans son communiqué. Questionnée au sujet du test de gratuité, Marie-Pierre Gramaglia, conseillère-ministre à l’équipement, l’environnement et l’urbanisme, a annoncé des réunions de concertation prochaines avec le Conseil national pour résoudre cette problématique. « Comme le gouvernement s’y était engagé lors des séances publiques de l’examen du budget primitif 2020, nous allons étudier avec le Conseil national les modalités d’une expérimentation sur la gratuité du bus à Monaco. Lors de cette réunion, nous allons bien sûr regarder, ensemble, les propositions du Conseil national formulées par courrier. La priorité du gouvernement est de faire baisser le nombre de voitures. L’objectif est de réduire le trafic de véhicules légers de 20 % à l’horizon 2030, par rapport à la situation actuelle, et revenir ainsi à un trafic équivalent à celui du début des années 1990. » A noter, que 18 000 personnes bénéficient déjà d’un titre de transport gratuit pour le réseau de bus : retraités de plus de 65 ans touchant une pension de la Caisse autonome des retraites, les résidents et Monégasques de plus de 60 ans, les scolaires, les moins de 5 ans. Dès lors, certains diront que la gratuité est déjà une réalité observable à Monaco. D’autres, qu’il ne manque qu’un petit effort pour la généraliser totalement. Le manque à gagner de la gratuité est estimé à 5 millions d’euros par an, comme l’avait rappelé Marie-Pierre Gramaglia lors d’un point presse sur la smart mobilité le 1er octobre 2019.

« Un test sur l’ensemble du réseau me paraît pertinent »

Aubagne a mis en place la gratuité de ses transports depuis 2009. Interview de Philippe Barrau, directeur du syndicat d’économie mixte en gestion du réseau de transports du pays d’Aubagne.

Quelle échelle vous parait la plus pertinente pour expérimenter la gratuité des bus ?

En termes purement techniques, il me semble qu’une expérimentation à l’échelle du réseau est la plus pertinente. Il n’y a que sur un ensemble qu’on peut voir comment les gens vont s’approprier un réseau de transports gratuits. On a un certain nombre d’exemples, comme Dunkerque, qui est passé en gratuité le 1er septembre 2018, et qui avait fait des tests sur le week-end, mais sur la totalité du réseau. La gratuité a toujours un effet de fréquentation spectaculaire. A mon sens, et je n’ai de conseil à donner à personne, c’est juste le regard d’un technicien, un test sur l’ensemble du réseau me paraît pertinent.

Avez-vous opéré des tests à Aubagne avant l’instauration de la gratuité ?

Il n’y a pas eu de tests à Aubagne. Il y a eu une bascule, c’était un engagement de campagne de 2008. Cette promesse électorale s’est faite en 2009. On est passé de 1,9 million à 6,5 millions d’usagers en 10 ans.

Avez-vous réussi à analyser le report modal ?

Dans la métropole Aix-Marseille-Provence, seul le territoire du pays d’Aubagne voit la part de voitures ne pas augmenter, et se stabiliser. Elle est restée stable, malgré l’augmentation de la population. On a fait nos petits calculs. On avait fait modéliser tout ça par des ingénieurs. C’est l’équivalent de 11 000 tonnes de CO2 non rejetées dans l’atmosphère. Il y a un impact sur l’environnement indéniable. La spécificité du réseau de transport du pays d’Aubagne, c’est d’avoir plus de 40 % d’actifs. Dans les réseaux comparables, il y a rarement plus de 20 %. On a eu une augmentation très forte chez les actifs, qui préfèrent les transports en commun. On a vraiment un report modal clair et net de la voiture vers le transport en commun.

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