samedi 20 avril 2024
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Un monde coupé en deux

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Shangai © Photo DR

Lors d’une présentation à Monaco mi-septembre, Vincent Treulet, responsable de la stratégie d’investissement de BNP Paribas IP, a préconisé de privilégier les Bourses émergentes, notamment la Chine et la Russie.

Critiqué en pleine crise financière, le thème de la décorrélation entre les économies occidentales et émergentes est revenu en force. Vincent Treulet, responsable de la stratégie d’investissement de BNP Paribas Investment Partners, a ainsi insisté lors d’une présentation à Monaco mi-septembre sur l’état de l’économie mondiale en cette sortie de crise et sur les conclusions à en tirer pour la gestion de son portefeuille. « Le monde nous apparaît aujourd’hui coupé en deux, souligne Vincent Treulet. Avec d’un côté des économies occidentales qui vont rester prisonnières d’une phase de croissance lente, et, d’autre part des économies émergentes qui apparaissent en bien meilleure santé. » Le stratège explique cette déconnexion par la nature de la crise que les économies occidentales traversent. « La crise entamée en 2007, et dont nous subissons encore les conséquences, est en premier lieu la résultante d’un problème d’endettement trop élevé des agents économiques, notamment des ménages dans certaines économies importantes comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou l’Espagne, rappelle-t-il. Et cet endettement reste aujourd’hui bien plus élevé qu’il ne l’a été, en moyenne, au cours des dernières décennies. »

Effort des ménages

Les ménages doivent donc poursuivre leurs efforts de désendettement, « ce qui limite leur consommation, l’investissement des entreprises, et ne permet pas d’espérer le retour à une croissance vigoureuse avant plusieurs années », poursuit-il. Dans un tel contexte, il sera difficile de faire baisser un taux de chômage qui a retrouvé des niveaux élevés dans toutes les grandes économies. A quoi s’ajoute l’endettement des Etats. « Le contrôle de leurs déficits devrait les pousser à alourdir la fiscalité et à réduire les dépenses, ce qui pèsera également sur la conjoncture », prévient Vincent Treulet. L’endettement des ménages et des Etats reste donc un élément de fragilité pour les marchés financiers. « C’est à la fois un risque pour la croissance économique, un élément qui brouille la visibilité future sur l’économie, et une menace potentielle pour le secteur financier qui est porteur de toute cette dette », précise le stratège. Une situation qui tranche avec celle des pays émergents. « N’étant pas handicapés par une accumulation trop importante de dette, et même au contraire en situation de prêteurs nets vis-à-vis du reste du monde, ces pays ont moins souffert de la récession mondiale, en sont sortis rapidement, et peuvent désormais poursuivre le rattrapage des économies industrialisées, explique Vincent Treulet. Ils devraient encore afficher des taux de croissance supérieurs à 5 %, en moyenne, dans les années à venir. »

Réserve sur les emprunts d’Etat

Vincent Treulet préconise ainsi pour le moyen terme la prudence sur les marchés d’actions des pays “développés” et privilégie les bourses émergentes. « Celles-ci ne sont aujourd’hui pas plus chères, ont de meilleures perspectives de croissance, et apparaissent de moins en moins risquées par comparaison avec les marchés occidentaux », souligne-t-il. Sa préférence va notamment à la Chine et la Russie. « Il est probablement encore trop tôt pour s’y positionner agressivement, mais les perspectives de valorisation sont attractives à moyen terme », précise-t-il.
Concernant les obligations, la préférence de Vincent Treulet va, pour des raisons de rendement, à celles des entreprises plutôt qu’à celles des Etats. « Les premières continuent en effet d’améliorer leurs bilans et ne devraient pas souffrir d’un environnement de croissance modéré, explique-t-il. Nous sommes en revanche plus réservés sur les emprunts d’Etats, dont les taux apparaissent aujourd’hui trop peu rémunérateurs. » Là encore, Vincent Treulet estime que la dette des pays émergents offre des opportunités de diversification pour les investisseurs européens. Tout en estimant que les métaux et le pétrole devraient être bien orientés à moyen terme, le stratège conseille encore aujourd’hui d’attendre de meilleures opportunités pour se repositionner sur les matières premières. « A l’horizon des quelques mois qui viennent, notre préférence va encore à l’or », conclut-il.

Des marchés d’actions toujours très erratiques
« Les marchés valorisent aujourd’hui un scénario de croissance molle durable et accordent donc une prime de risque structurellement plus élevée aux actions, souligne Jean-Marie Mercadal, directeur général adjoint en charge des gestions d’OFI AM. Nous avons toutefois le sentiment que les scénarios négatifs sont déjà intégrés dans les cours actuels. En revanche, il n’y a toujours pas de flux d’investisseurs finaux. Nous risquons donc de voir encore des évolutions très erratiques. Néanmoins, il semble aujourd’hui clair que la performance des actions lors de la prochaine décennie sera probablement supérieure à celle des obligations et de l’immobilier. »
A la recherche du rendement
« Dans le contexte actuel de faibles taux monétaires, de faibles rendements des obligations d’Etat et de forte baisse des taux des obligations d’entreprises, la quête de rendement est appelée à s’intensifier et à sortir du domaine obligataire, font valoir les experts d’ING Investment Management. Dans plusieurs secteurs, le rendement du dividende est en outre supérieur au rendement des obligations d’entreprises. L’importance des dividendes dans le rendement total d’un portefeuille d’investissements ne manquera pas d’augmenter dans l’environnement de faible croissance et de faible rendement que nous prévoyons ».