L’explosion des plus de 65 ans sera défavorable aux marchés d’actions. Les marchés obligataires devraient, en revanche, profiter de l’accroissement des 55-64 ans.
L’appétit pour le risque est inversement proportionnel à l’âge des investisseurs. L’explosion des plus de 65 ans dans de nombreux pays industrialisés aura donc un impact particulièrement négatif pour les actifs risqués, notamment les actions, car plus les investisseurs approchent de la retraite, plus la prise de risque est limitée. C’est en tout cas le fil conducteur de l’étude sur l’impact de la démographie sur les marchés financiers réalisée par Jean-Marc Buchalet et Pierre Sabatier, les cofondateurs du cabinet de recherche économiques et financière Primeview*. « Outre l’impact sur nos modèles économiques, sociaux voire politiques, les transformations démographiques à venir dans les prochaines décennies vont substantiellement changer la donne en ce qui concerne les prix des actifs via deux leviers?: les implications sur la demande et l’offre d’actifs au regard de la dynamique d’épargne des ménages, mais aussi une modification significative des comportements vis-à-vis de la prise de risque, conséquence du vieillissement généralisé des populations », expliquent les auteurs de l’étude. Tout comme les comportements consuméristes des ménages, ils soulignent en effet que l’attrait pour telle ou telle classe d’actifs varie selon l’âge des ménages, en fonction de deux facteurs principaux?: le niveau d’épargne disponible bien sûr, mais aussi le degré d’aversion pour le risque.
Les 45-54 ans?: l’âge d’or pour les actions
Pour les auteurs de cette étude, les marchés boursiers se comportent généralement le mieux, hormis bien évidemment éléments conjoncturels pénalisants, lorsque la tranche d’âge des 45-54 ans est numériquement la plus élevée et inversement. « C’est clairement la tranche d’âge la plus favorable sur le plan économique et des actifs risqués, font-ils valoir. Elle gagne plus, consomme plus et n’affiche qu’une faible aversion pour le risque. Elle porte ainsi avec elle la croissance du PIB vers son apogée, soutenue par les dépenses des ménages qui atteignent leur nirvana. En gonflant les chiffres d’affaires, les entreprises se portent de mieux en mieux, affichant des taux de marge de plus en plus impressionnants. Ajoutées à cela une aversion au risque toujours relativement faible et la disparition progressive du besoin immobilier, le premier achat immobilier se faisant autour de 31 ans, et le second autour de 41 ans, toutes les conditions semblent réunies pour que les actifs risqués en profitent, au premier lieu desquels les actions. » L’avenir devrait ainsi être particulièrement défavorable pour les marchés d’actions, notamment américains. « La classe d’âge des 45-54 ans atteint actuellement un sommet outre-Atlantique et dans une moindre mesure en Europe, soulignent les auteurs de l’étude. Le Japon, véritable laboratoire en ce qui concerne l’impact des modifications démographiques sur l’allocation d’actifs, nous donne une idée de la trajectoire que pourraient emprunter les marchés actions dans un horizon de long terme, et confirme notre scénario de « Bear Market »** en forme de tôle ondulée pour les bourses occidentales. »
Perspectives favorables pour l’obligataire
Le vieillissement de la population a également des effets sur les marchés obligataires et les taux d’intérêt, qui sont en moyenne d’autant plus bas que la classe d’âge des 55-64 ans est nombreuse. « L’âge de la retraite se rapprochant, l’aversion pour le risque pousse en général les ménages à arbitrer progressivement vers des actifs à plus grande visibilité, comme les actifs à revenus fixes que sont les obligations d’Etat », expliquent les auteurs. Or, une demande élevée pour les obligations pousse les prix de ces actifs à la hausse et leur rémunération – les taux d’intérêt – à la baisse. La forte hausse à venir des 55 à 64 ans aux Etats-Unis et en Europe, tranche de population particulièrement friande d’actifs obligataires, devrait donc favoriser, selon l’étude, les obligations d’Etat dans un horizon de 10 ans. « En conséquence, les taux d’intérêt devraient rester structurellement bas dans ces deux zones à moyen et long terme, même si des tensions ponctuelles ne sont pas à exclure », précisent-ils.