jeudi 25 avril 2024
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Inflation : coup de chaud sur les prix

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Exacerbée par la guerre en Ukraine, qui fait flamber les cours des matières premières, l’inflation continue de battre des records s’établissant à 8,6 % en juin 2022 dans la zone euro et à 9,1 % aux États-Unis pour la même période. Une hausse des prix inédite qui pousse les États à adopter différentes mesures pour doper le pouvoir d’achat de leurs concitoyens. À Monaco, en revanche, aucune décision n’a, pour le moment (1), été officiellement annoncée par le gouvernement princier, malgré l’appel lancé par les élus du Conseil national à la fin du mois de juin 2022. Monaco Hebdo fait le point sur ce dossier brûlant.

Le poncif selon lequel « tout augmente » n’a probablement jamais été aussi vrai. Énergie, alimentation, immobilier, carburant… La flambée des prix actuelle, due en partie à la guerre en Ukraine et aux sanctions, n’épargne aucun secteur. Au cours du mois de juin 2022, l’inflation s’élevait ainsi à 8,6 % dans la zone euro (2), pour établir un nouveau record depuis le début de la publication des taux en 1997. Même tendance aux États-Unis, où l’augmentation des prix à la consommation a bondi à 9,1 % le mois dernier, une première dans l’histoire du pays de l’Oncle Sam depuis 1981. Et cette crise inflationniste pourrait bien perdurer dans les mois à venir au grand dam des ménages, qui devraient voir leur pouvoir d’achat se contracter encore davantage. Les prévisions n’incitent en effet guère à l’optimisme. Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques français (Insee), l’inflation frôlera les 7 % en France d’ici la fin de l’année 2022, comme l’a annoncé Julien Pouget, chef du département de la conjoncture à l’Insee, sur le plateau de BFM Business le 24 juin 2022. « Nous avons regardé l’inflation sous toutes les coutures. Elle se stabiliserait en fin d’année, mais non sans avoir encore progressé de l’ordre de 6,5 à 7 % », estimait-il alors avant d’en expliquer les raisons : « Il s’agit d’une progression, et d’un élargissement. Comme nous l’avons vu ces derniers mois, l’inflation qui a concerné, et qui concerne toujours, les produits énergétiques, s’élargit désormais à l’alimentaire, aux biens manufacturés parce que les coûts de production ont augmenté, mais aussi aux services car les salaires ont augmenté et le SMIC a été revalorisé sur l’inflation ».

Au cours du mois de juin 2022, l’inflation s’élevait ainsi à 8,6 % dans la zone euro, pour établir un nouveau record depuis le début de la publication des taux en 1997

Les élus réclament des mesures

Ces prévisions, pour le moins pessimistes, ont trouvé un écho quelques jours plus tard à Monaco, où l’inquiétude est montée d’un cran. Face à une inflation galopante, et un pouvoir d’achat qui ne cesse de s’effriter, le Conseil national a en effet interpellé le gouvernement princier par le biais d’un communiqué, lundi 27 juin 2022, dans lequel il réclame une hausse des salaires pour les fonctionnaires, ainsi que pour les personnels du centre hospitalier princesse Grace (CHPG). « Dans un contexte de retour de l’inflation, les élus se préoccupent du maintien du pouvoir d’achat des fonctionnaires de l’État et de la commune, en activité et retraité », peut-on lire dans ce communiqué, qui nous apprend que les revalorisations du 1er janvier 2022 et du 1er juillet 2022 décidées par l’exécutif, « sans concertation avec le Conseil national (1,2 %, puis 2 %, soit 3,2 % en tout) », ne couvrent pas la hausse de l’inflation prévue à plus de 5 %. Il en est de même pour la revalorisation de 3,4 % de la valeur du point d’indice du personnel non médical — devenue effective en juillet 2022 — jugée « insuffisante » pour compenser l’inflation. La Haute assemblée s’inquiète tout particulièrement pour les « salaires les plus modestes affectés par les hausses des coûts de l’énergie, des transports et des produits alimentaires ». Afin de maintenir l’excellence du système de soins monégasque et l’attractivité de l’hôpital public, les élus ont donc demandé au gouvernement une réévaluation des rémunérations, afin que celles-ci soient enfin en adéquation avec l’évolution de l’inflation. Une demande restée lettre morte. Tout du moins, officiellement. Car en coulisses, l’exécutif suivrait avec beaucoup d’attention l’évolution de la crise inflationniste. Contacté par la rédaction de Monaco Hebdo, le gouvernement princier n’avait pas été en mesure de répondre à nos questions à l’heure où nous bouclions ces lignes, mardi 19 juillet 2022.

Face à une inflation galopante, et un pouvoir d’achat qui ne cesse de s’effriter, le Conseil national a en effet interpellé le gouvernement princier par le biais d’un communiqué, lundi 27 juin 2022, dans lequel il réclame une hausse des salaires pour les fonctionnaires, ainsi que pour les personnels du CHPG

Hausse du SMIC, bouclier tarifaire, remise carburant… en France

De l’autre côté de la frontière, on n’a en tout cas pas attendu longtemps pour prendre à bras-le-corps le problème de la baisse du pouvoir d’achat. Ce thème a d’ailleurs été au cœur de la dernière campagne présidentielle, remportée en avril dernier par Emmanuel Macron. Conscient de l’inquiétude des Français à ce sujet, le président de la République avait alors promis une série de mesures pour doper le pouvoir d’achat des foyers les plus modestes face à la hausse des prix. Parmi celles-ci, figurait la prolongation de deux aides déjà mises en place avant sa réélection, à savoir le bouclier tarifaire sur l’énergie, qui vise à encadrer les tarifs du gaz et de l’électricité, et la remise de 18 centimes sur le carburant qui devrait régresser progressivement dans les mois à venir avant de totalement disparaître en décembre. À partir d’octobre 2022 une « indemnité carburant », pouvant atteindre jusqu’à 300 euros, sera versée, sous conditions de ressources, aux salariés qui utilisent leur voiture pour aller travailler. D’autres mesures de soutien, sur la table au moment de la campagne, devraient aussi bientôt être adoptées. On citera par exemple le retour du chèque alimentaire dont devraient pouvoir bénéficier 9 millions de foyers, la suppression de la redevance audiovisuelle, le plafonnement de la hausse des loyers à 3,5 % pendant un an ou encore l’augmentation de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat défiscalisée et désocialisée, dite prime Macron, qui sera triplée. Les pensions de retraite et les prestations sociales ont par ailleurs été revalorisées de 4 % depuis le 1er juillet. De même que le point d’indice des fonctionnaires augmenté de 3,5 %. Compte tenu de la réévaluation à 5,8 % de l’inflation sur un an en juin, le gouvernement d’Élisabeth Borne a également annoncé, mercredi 13 juillet, une nouvelle augmentation automatique du SMIC — la troisième de l’année après celles du 1er janvier et du 1er mai 2022 — de 2,01 %, soit 26 euros net en plus, à compter du 1er août 2022. Dans le même temps, les taux du livret A et du livret d’épargne populaire (LEP) devraient doubler, passant de 1 % à 2 % pour le premier et de 2,2 % à 4,6 % pour le second.

Si les mesures adoptées dans les pays voisins ne sont évidemment pas toutes transposables en principauté, certaines d’entre elles pourraient toutefois mettre un peu de beurre dans les épinards des foyers monégasques les plus modestes. Mais aussi dans ceux des quelque 50 000 pendulaires confrontés à la hausse du prix des carburants et des transports

Une taxe sur les « surprofits » en Italie

La France n’est pas le seul État à soutenir le pouvoir d’achat de sa population. L’Allemagne offre par exemple une ristourne de 35 centimes à la pompe, en plus de proposer un abonnement mensuel aux transports en commun à tarif réduit (9 euros). Le chancelier allemand Olaf Scholz a également promis le versement d’une prime de 300 euros pour tous les salariés imposables auxquels s’ajouteront 100 euros supplémentaires pour les ménages les plus pauvres. Au Royaume-Uni, englué dans une crise politique depuis la démission du Premier ministre Boris Johnson le 7 juillet 2022, 15 milliards de livres ont été débloqués pour soutenir les plus défavorisés. Ce plan d’aides sera, en partie, financé par une taxe exceptionnelle sur le secteur de l’énergie. Un dispositif déjà adopté par l’Italie, qui enregistre une hausse des prix à la consommation de 8,5 % en juin 2022. Pour financer ses aides (bonus de 200 euros destiné aux foyers italiens dont les revenus sont inférieurs à 35 000 euros, baisse des taxes sur les carburants…), le gouvernement de Mario Draghi s’appuie en effet sur les « surprofits » des entreprises du secteur de l’énergie. « Ces mesures représentent 14 milliards d’euros, qui s’ajoutent aux 15,5 milliards déjà prévus, on arrive donc à un total de près de 30 milliards d’euros, soit deux points de pourcentage du PIB », avait déclaré le Premier ministre italien, à l’issue d’un conseil des ministres, précisant que ces décisions avaient été prises « sans recourir à une rallonge budgétaire ». Si les mesures adoptées dans les pays voisins ne sont évidemment pas toutes transposables en principauté, certaines d’entre elles pourraient toutefois mettre un peu de beurre dans les épinards des foyers monégasques les plus modestes. Mais aussi dans ceux des quelque 50 000 pendulaires confrontés à la hausse du prix des carburants et des transports [à ce sujet, lire notre encadré, par ailleurs — NDLR]. L’État monégasque pourrait-il leur accorder un petit coup de pouce pour compenser le manque à gagner ? Impossible de le savoir en l’état actuel, compte tenu du mutisme du gouvernement princier sur le sujet. Mais la question mérite d’être posée, à l’heure où Monaco souffre d’un manque d’attractivité dans certains secteurs d’activité.

Transport : les tarifs des TER pourraient encore augmenter en 2023

Si les prix des carburants ne cessent d’affoler les compteurs à la pompe, les tarifs des trains express régionaux (TER) ont, eux aussi, augmenté depuis le 1er avril 2022 : + 2,82 % pour les billets achetés à l’unité et + 4,57 % pour les abonnements monomodaux. Une augmentation que la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca) impute à la hausse des prix de l’énergie. « Les tarifs des billets unitaires régionaux TER et LER sont restés inchangés depuis quatre ans, la dernière revalorisation du barème datant du 1er janvier 2018. Les tarifs des abonnements sont eux, inchangés depuis 7 ans », rappelle par ailleurs la région, qui pourrait toutefois ne pas en rester là. Vendredi 24 juin 2022, les conseillers régionaux ont, en effet, adopté une nouvelle gamme tarifaire qui devrait entrer en vigueur à compter de janvier 2023. Concrètement, le prix du billet à l’unité passera de 1,50 euro à 2,30 euros, alors que la carte Zou 50-75 %, qui offre des réductions sur les déplacements, devrait tout bonnement disparaître. Les moins de 26 ans pourront en revanche toujours bénéficier du pass Zou Études à 90 euros par an. Selon le vice-président de la région en charge des transports, Jean-Pierre Serrus, cette nouvelle grille offrira aux usagers une meilleure lisibilité des tarifs, qui passeront de 230 à dix titres. Avec toujours le souci de proposer des prix « plus simples, plus justes et plus écologiques ». Cette décision est en tout cas loin de faire l’unanimité au sein de la région comme en témoignent les échanges musclés relayés par nos confrères de Nice Matin. La conseillère régionale du Rassemblement National (RN), Muriel Fiol, dénonce en effet « une augmentation qui ne dit pas son nom » : « Comment pouvez-vous imaginer augmenter les tarifs, enterrer la carte Zou et espérer que ça passe crème, s’est-elle emportée. Vous vous êtes mis à dos 22 associations d’usagers (1) : votre mépris est insupportable ! Dites la vérité ! Vous voulez augmenter les prix et vous choisissez la plus mauvaise période pour le faire. Les seuls sursitaires, ce sont les jeunes. Jusqu’à quand ? ». Des allégations immédiatement balayées par le président Renaud Muselier, qui réfute la recherche du profit à travers cette refonte : « Les usagers ne s’y retrouvaient pas. On ne supprime pas la carte Zou, on n’augmente pas les prix. Ce sont des mensonges ». Nul doute que les milliers de pendulaires qui empruntent chaque jour le TER pour rejoindre la principauté seront attentifs à toute nouvelle augmentation de leur abonnement.

1) Une pétition en ligne réclamant le maintien des cartes Zou 50-75 % et avantage avait déjà réuni plus de 4 000 signatures à l’heure où Monaco Hebdo bouclait ce numéro, mardi 19 juillet 2022.

1) Monaco Hebdo bouclait ce numéro le mardi 19 juillet 2022.

2) Chiffres officiels communiqués par Eurostat, l’institut européen de statistiques. Lire leur rapport en cliquant ici.