jeudi 25 avril 2024
AccueilEconomieAlberte Escande : « Ma proposition était de fermer bars et restaurants à 22 heures »

Alberte Escande : « Ma proposition était de fermer bars et restaurants à 22 heures »

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Outre la mise en place du couvre-feu, le gouvernement princier a annoncé, vendredi 30 octobre 2020, la fermeture des bars à Monaco pour une durée minimum d’un mois.

Il s’agit d’un nouveau coup dur pour les tenanciers, qui avaient déjà dû baisser le rideau pendant près de trois mois au printemps 2020. Alberte Escande, présidente de l’association des industries hôtelières monégasques (AIHM), revient sur les conséquences de cette mesure pour Monaco Hebdo. Interview.

Comment avez-vous accueilli la décision du gouvernement de fermer les bars de la principauté ?

Les mesures annoncées en France nous avaient préparés à des annonces en principauté. Le gouvernement princier a pris des décisions, qui modifient nos façons de travailler. Il est évident que toute mesure qui vous prive de revenus, est toujours prise avec amertume. Les bars étant considérés comme des rassemblements festifs, ils constituent des repères dans la vie d’un quartier, des relais de solidarité.

Comprenez-vous cette décision ?

Au vu de la situation sanitaire, nous comprenons le besoin de maîtriser la diffusion du virus.

Avez-vous été consultée par le gouvernement, en tant que présidente de l’association des industries hôtelières monégasques ?

J’ai été consultée par le gouvernement, ma position était de fermer bars et restaurants à 22 heures. Ma proposition n’a pas été retenue, le gouvernement a souhaité mettre le couvre-feu à 20 heures. Cette mesure nous oblige à repenser notre offre, nos horaires. Le fait d’accueillir nos clients de 19 à 20 heures nous pénalise fortement. Si les déjeuners nous permettent de faire les frais, les soirées sont catastrophiques en termes de chiffre d’affaires. Nous devrons trouver une solution pérenne avec le gouvernement, car la clientèle n’est pas au rendez-vous.

Comment ont réagi les gérants de bars à l’annonce de cette mesure ?

Avec amertume et résiliation.

Le gouvernement a justifié cette fermeture administrative en précisant que les règles sanitaires n’étaient pas suffisamment respectées dans les bars : qu’en pensez-vous ?

Je ne conteste pas le fait qu’une minorité d’exploitants ait pu peut-être transiger avec certaines règles de distanciation sociale. Mais l’immense majorité de nos adhérents ont fait preuve d’une rigueur exemplaire.

Des foyers de contamination ont-ils été recensés dans les bars à Monaco ?

Je ne peux pas répondre à cette question car les établissements restent discrets sur ce sujet.

Combien d’établissements sont concernés par cette fermeture administrative ?

Tous les bars, tous les snack-bars ainsi que les salons de thé. Je n’ai pas eu le temps de faire le point sur le nombre de fermetures.

Quelle est la situation des bars aujourd’hui à Monaco ?

Les établissements fermés bars, snack-bars toucheront 100 % du Chômage total temporaire renforcé (CTTR), ainsi que les compléments financiers annoncés par le conseiller-ministre, Jean Castellini, lors de la conférence de presse [lire Monaco Hebdo n° 1172 – N.D.L.R.].

Cette décision met-elle en péril ces établissements ?

Nous avons passé le premier confinement avec difficultés, le gouvernement princier et le Conseil national nous ont aidés. Et nous passerons le second confinement avec les mêmes aides et les mêmes écoutes. Je pourrai répondre à cette question sur les bars menacés de faillite si cette situation perdurait.

Les aides de l’État seront-elles suffisantes pour éviter les faillites et les plans sociaux ?

Ces aides sont très utiles à court terme pour régler les salaires des employés. En revanche, de nombreuses charges pèsent sur les exploitations comme les loyers, les crédits en cours…

Les bars proposant de la restauration sont-ils autorisés à ouvrir ?

Non.

Quels sont les critères à remplir pour pouvoir ouvrir ?

Avoir un objet social compatible avec la restauration traditionnelle.

Les restaurants ont en revanche obtenu une dérogation jusqu’à 21h30. Êtes-vous satisfaite ?

Non car nous avions proposé une fermeture des bars et restaurants à 22 heures.

Quelle est aujourd’hui la situation des restaurants en principauté ?

La situation des restaurants en principauté est moins pire que celle du pays voisin [la France – N.D.L.R.]. Cela étant dit, la situation financière et la conservation des emplois sont très compliquées étant donné la baisse drastique des revenus de tous les exploitants.

Fermeture des bars « Il faudra deux ans pour s’en remettre », estime le patron du Before

«Aujourd’hui, je ne dors pas aussi bien qu’avant », reconnaît Giovanni Castaldi. Le propriétaire du Before a accueilli l’annonce de la fermeture des bars, comme la majorité de ses homologues, avec beaucoup de résignation et d’amertume : « C’est comme ça. Il faut fermer donc on ferme ». S’il comprend la décision du gouvernement princier dans ce contexte de rebond épidémique, il réfute toutefois l’idée selon laquelle les bars de la principauté ne respecteraient pas suffisamment les règles sanitaires. « C’est totalement faux. Au Before, on a la chance d’avoir une très grande terrasse, on a fait en sorte qu’il y ait pas mal d’espacement. C’est vrai qu’au bout du troisième verre, c’est un peu plus difficile de faire respecter les règles. Ça a été difficile les quinze premiers jours. Mais après, les gens instinctivement mettaient leur masque, allaient aux toilettes se laver les mains… Je n’ai pas vu, très sincèrement, de débordements à Monaco », confie le patron du Before qui rappelle au passage qu’aucun cas de Covid n’a été recensé dans son établissement. Cette fermeture administrative représente en tout cas un nouveau coup dur pour le tenancier, qui sait qu’il pourra compter sur les aides de l’État pour y faire face (chômage total temporaire renforcé, aides de la commission d’accompagnement de la relance économique…). Giovanni Castaldi espère également avoir le soutien des banques, qui avaient accepté des reports d’échéances au moment du confinement au printemps dernier : « Pour le moment, il n’y a rien d’annoncé. J’ai interpellé les banques pour le report. Nous avons au Before des prêts en cours. Pour le moment, il n’y a pas de report d’échéances », regrette-t-il. Quant à la question du loyer, le Before étant installé dans des locaux domaniaux, Giovanni Castaldi ne s’inquiète pas outre mesure. « Je pense, sans trop m’avancer, qu’il y a toujours une très bonne volonté de la part des domaines. Je pense qu’ils feront un geste comme ils l’ont fait au mois de mars, ainsi que la mairie », estime le patron de l’établissement conscient d’avoir un certain avantage par rapport à ceux se trouvant dans le privé. En revanche, ce qui inquiète le plus Giovanni Castaldi, c’est l’incertitude qui plane autour de la durée de cette mesure : « La question, c’est est-ce qu’on rouvre le 2 décembre ou en a-t-on pour trois ou quatre mois ? C’est le gros dilemme ». Car bien qu’« aujourd’hui, il n’y a pas de risque pour les emplois parce qu’ils (les employés) seront tous au chômage », si la fermeture venait à se prolonger, « il est évident qu’il faudra qu’il y ait une prise de position au niveau économique » admet Giovanni Castaldi sans donner davantage de détails. En attendant, le propriétaire du Before veut rester optimiste. « On sortira de cette crise au mois d’avril », espère-t-il. Avant d’ajouter : « D’un point de vue économique, il faudra deux ans pour s’en remettre. Mais il faut tenir jusqu’au mois d’avril ».

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