mardi 23 avril 2024
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Le pari de la SBM

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Joueur du poker
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Depuis le 6?juin, le marché français des jeux en ligne est ouvert à la concurrence. Un marché estimé à 4?milliards d’euros sur lequel s’est lancé la Société des bains de mer (SBM) avec le businessman Stéphane Courbit. Ce qui impose d’investir beaucoup d’argent alors que la sortie de crise se fait attendre.

Pour le moment, l’info est presque passée inaperçue. A Monaco, peu de salariés de la Société des bains de mer (SBM) ont suivi le feuilleton SBM-Mangas Gaming. Certains ne sont même pas au courant. Ce qui explique la réaction d’un délégué syndical?: «?Par rapport à l’investissement de la SBM dans le marché des jeux en ligne, je n’ai pas ressenti d’inquiétude particulière. D’ailleurs, pour le moment, je n’en entends jamais parler.?» Ce qui n’empêche pas quelques salariés de s’interroger. Et même de s’inquiéter. Car au total, la SBM a déjà investi 170?millions d’euros pour se lancer avec le patron de Financière Lov, Stéphane Courbit?: 140?millions sur l’exercice clos au 31?mars 2010 et 30?millions sur l’exercice en cours pour financer notamment le rachat d’Everest Gaming, un site de poker en ligne. Or, la SBM vient d’annoncer un chiffre d’affaires en baisse de 6?% à 374?millions d’euros, pour un résultat net à 1,1?million. Alors que le bénéfice était de 40,6?millions en 2008-2009.

“Pertes”

En tout cas, la SBM est associée à 50/50 avec Courbit dans le holding Mangas Gaming depuis novembre?2008. Un holding qui contrôle aujourd’hui plusieurs sites, comme BetClic bien sûr. Mais aussi Poker.fr, Expekt, Bet-at-home ou Everest Poker. Ce qui a entrainé de lourds investissements pour racheter certains de ces sites. «?On a investi 70?millions d’euros au départ, en mai?2009, raconte Yves de Toytot, le directeur financier de la SBM. En fait, avant l’arrivée de la SBM, Mangas Gaming possédait seulement 75?% de BetClic, mais avait pas mal de projets de rachats d’entreprises du secteur des jeux en ligne. Du coup, en entrant au capital de Mangas Gaming, la SBM a apporté l’argent nécessaire pour aider à financer ces rachats. Ce qui a permis une augmentation de capital. Et aujourd’hui, la SBM possède 50?% de Mangas Gaming.?» Beaucoup d’argent pour une rentabilité qui ne sera pas immédiate. Ce que confirment beaucoup d’experts contactés par Monaco Hebdo?: «?Tous les opérateurs engagés sur ce nouveau marché ont anticipé des pertes. Reste à savoir pendant combien de temps chaque opérateur sera capable de résister?», se demande un spécialiste du secteur.

4 licences sur 23

En tout cas, à l’ouverture de ce marché, le 6?juin, 11 opérateurs ont été autorisés à se lancer (voir tableau) par l’autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel). Une structure présidée par Jean-François Vilotte, l’ancien directeur de cabinet de Jean-François Lamour au ministère des sports (2002-2006). L’Arjel, dont le rôle est de contrôler les jeux et les opérateurs installés dans le marché français, fonctionne avec 45 salariés et un budget annuel de 10?millions d’euros. Tout en étant structuré en 4 départements?: information, contentieux, agréments et juridique. Concrètement, le collège de l’Arjel, composé de 7 membres élus pour 6 ans, décide donc de l’obtention d’un agrément, tout en exerçant un contrôle sur le marché. Avec la possibilité de saisir la commission des sanctions, en cas de problème. Une commission des sanctions totalement indépendante du collège qui fonctionne avec 6 magistrats élus pour 5 ans?: 2 membres de la Cour des comptes, 2 du Conseil d’Etat et 2 de la Cour de cassation. «?Sur 11 licences, Everest et BetClic en ont eu 4. Pour les paris sportifs, dès le départ, on a eu face à nous les deux anciens monopoles, la Française des jeux (FDJ) et le Paris Mutuel Urbain (PMU). Mais aussi Bwin, Eurosportbet et France Pari. En fait, la surprise, c’est qu’Unibet, qui est l’un des 5 plus grands groupes européens, n’ait pas eu sa licence le 6?juin. Mais il semblerait qu’ils n’étaient pas prêts techniquement?», indique la vice-présidente de Mangas Gaming, Isabelle Parize.
Depuis le 6?juin, l’Arjel a délivré 23 licences à 16 opérateurs français et étrangers. Alors que le 30?juin, le décret autorisant le poker en ligne a été publié au journal officiel. Résultat, l’Arjel a publié une nouvelle liste d’opérateurs qui pourront travailler sur le marché français. Parmi eux, on retrouve les sites Everest Poker et BetClic Poker qui appartiennent à Mangas Gaming. Mais aussi le leader mondial PokerStars, Bwin, Partouche Gaming, la filiale du groupe Iliad (Free) ChiliPoker ou Electraworks avec PartyPoker. Sans oublier Sajoo Poker, PMU Poker et EurosportPoker. Bref, beaucoup de monde. Avec à chaque fois de grands groupes derrière ces sites. Notamment TF1, avec Eurosportbet ou le groupe Amaury qui possède L’Equipe et Le Parisien pour SAjOO. fr.

“Le timing a été extrêmement difficile”

En tout cas, impossible pour la France de continuer à refuser l’ouverture de son marché des jeux en ligne. Car la Commission européenne réclame depuis 2007 la libéralisation de ce marché. En n’hésitant pas à menacer avec d’éventuelles poursuites devant la Cour européenne de justice. Du coup, la France a fini par céder. Résultat, aujourd’hui, les paris sportifs en ligne, les paris hippiques et le poker en ligne sont ouverts à la concurrence. En revanche, les jeux de casino, le spread betting et le bingo en ligne ne sont pas concernés par cette ouverture. Ce qui permet donc à la FDJ de conserver une partie de son monopole.
«?Le timing a été extrêmement difficile, raconte Isabelle Parize. Car on a obtenu notre licence seulement 2 jours avant le début de la Coupe du monde de foot. Mais on a tenu le choc. Même si nos équipes ont beaucoup travaillé pour qu’on soit prêt. En tout cas, leur travail a permis d’absorber l’afflux de nouveaux joueurs français sur notre site. Autre contrainte?: l’équipe de France jouait dès la première journée de cette Coupe du monde. Du coup, il fallait vraiment être prêt dès le début?!?» En revanche, aucun opérateur ne communique sur le nombre de joueurs qu’il a réussi à fidéliser. Chez Mangas Gaming, on explique ne «?pas avoir assez de recul?» pour donner des chiffres pertinents. On s’avoue «?content?», en refusant d’en dire plus. En 2009, Mangas Gaming a réalisé un chiffre d’affaires de 200?millions d’euros. Et vise une progression cette année.

D’abord les paris sportifs et le poker

Pourtant, face à des géants comme la FDJ, TF1 ou Amaury, la concurrence s’annonce dure pour Mangas Gaming. Ce qui ne semble pas vraiment inquiéter Yves de Toytot?: «?C’est vrai qu’avec 1?030 salariés dans le groupe Mangas Gaming, on est un peu plus petit que les autres. Mais on gagne en réactivité, car on n’est pas encore une grosse machine. Et puis, on a une croissance plus rapide. Autre atout?: on est présent sur tous les segments. C’est-à-dire les paris sportifs, le poker et les jeux de casino. De plus, Mangas Gaming possède des équipes multinationales. Ce qui est un plus, car d’un pays à l’autre, chaque marché est très spécifique. Enfin, on a des équipes qui sont expérimentées, avec des marques qui sont connues.?» Suffisant pour s’imposer?? Paul Bougnoux, associé-fondateur de Largillière Finance, estime que «?la stratégie de Mangas Gaming n’est pas de s’imposer comme le leader dans le secteur. Car les ex-monopoles ne seront sûrement pas détrônés, même à moyen terme. L’objectif, c’est d’établir sur différents marchés européens un portefeuille de marques majeures dans les paris sportifs et le poker. Et par la suite dans les jeux de casinos en ligne.?»

“Il reste quoi à la fin??”

Pas sûr que ça suffise, dans un premier temps, pour gagner de l’argent. Car tous les opérateurs sont d’accord sur un point?: la taxation sur les jeux en ligne est trop lourde. En clair, aujourd’hui, le chiffre d’affaires, c’est-à-dire l’ensemble des mises, est taxé à 7,5?% pour les paris sportifs et les paris hippiques. Alors que le poker est taxé à hauteur de 2?%. «?7,5?%, c’est beaucoup, surtout si on compare avec d’autres pays, estime Francis Merlin, délégué général du salon international des jeux et paris en ligne Monaco iGaming Exchanges. Exemple?: en Italie on est à 3,7?%, en Grande-Bretagne à 1,5?% et à 0,5?% à Malte?!?» Autre problème?: le plafonnement des gains des joueurs, limités entre 80 et 85?% des mises. Une mesure prise pour éviter que les joueurs deviennent accro. Ce qui n’a d’ailleurs pas vraiment convaincu l’European gaming and betting association (EGBA, une association qui rassemble les principaux opérateurs de paris en ligne européens), qui ne voit pas de lien direct entre l’addiction et le taux de retour pour les joueurs. Autre frein à la rentabilité de ce nouveau marché?: les jeux de casino et de bingo qui sont toujours interdits en France. Ce qui représenterait, selon Francis Merlin, une perte de 30?% du chiffre d’affaires du marché des jeux en ligne en France?: «?Sans oublier l’obligation pour chaque opérateur de payer des droits aux détenteurs de droits sportifs. Ce qui est unique au monde?!?» En tout cas, le gouvernement français espère récolter environ 5?milliards de recettes fiscales, grâce à l’ouverture de ce marché.
Mais la taxation actuelle pose un sacré problème aux opérateurs. «?Il reste quoi à la fin?? s’interroge Isabelle Parize. Pas grand-chose. Résultat, toutes nos hypothèses concluent que c’est un marché où on va perdre de l’argent. Mais on espère que la taxation sera revue d’ici 18 mois.?» Un espoir partagé aussi par le directeur général de la SBM, Bernard Lambert. Car dans 18 mois, la loi prévoit une «?clause de revoyure?» qui pourrait permettre de revoir cette taxation à la baisse. C’est en tout cas ce que tous les opérateurs espèrent. Reste à savoir si ça sera suffisant pour calmer les quelques salariés de la SBM qui s’inquiètent.

Bientôt une loi
En Principauté, aucune loi spécifique aux jeux en ligne n’existe. Du coup, c’est la loi n°?1103 sur les jeux de hasard qui s’applique. Une loi créée au départ pour les casinos “en dur” mais qui peut aussi s’appliquer aux jeux sur Internet «?car elle traite des jeux de hasard sans différencier les vecteurs de jeux par voie informatique des jeux traditionnels?», explique le conseiller pour les finances et l’économie, Sophie Thévenoux. Sans fermer la porte à la mise en place d’un texte de loi spécifique qui permettrait «?d’apporter une meilleure sécurité juridique aux joueurs sur Internet. D’ailleurs, le projet sur le commerce électronique qui devrait être remodelé par le gouvernement pour tenir compte des évolutions en la matière, permettra d’aller dans le sens d’une meilleure protection du consommateur.?» Quant au projet de loi qui modifiera la loi sur les jeux de hasard, «?il prévoit que les jeux en ligne sont exploités dans le respect des dispositions applicables aux maisons de jeux. Dans la logique d’une démarche éthique, sont introduits des principes de sécurité et de transparence concernant les opérations de mise en ligne, ainsi que le règlement des gains obtenus à la suite de l’activité de jeux en ligne.?» Reste à savoir quand ces textes seront votés et appliqués.
Les Monégasques interdits de jeux en ligne
I?nterrogée par Monaco Hebdo, le conseiller pour les finances et l’économie, Sophie Thévenoux, explique pourquoi les Monégasques qui n’ont déjà pas le droit de jouer au casino, sont aussi interdits de jeux en ligne?: «?En l’absence de texte spécifique, le principe de l’interdiction de jeux édicté par l’article?350 du Code pénal, en vigueur pour le casino traditionnel, vaut pour les casinos virtuels. Car il vise toute opération offerte au public et faisant naître l’espérance d’un gain qui n’a pas reçu l’autorisation préalable du gouvernement, sans en préciser le support (maison de jeux traditionnelle ou réseau Internet). A l’heure actuelle, le projet de loi déposé au Conseil national pour adapter la loi sur les jeux de hasard aux jeux en ligne prévoit d’étendre expressément l’interdiction de jeux des Monégasques à ceux-ci. Mais impossible de présumer de la teneur du texte qui sera adopté tant que le processus législatif n’est pas arrivé à son terme.?»

Des raisons  d’espérer??

Quel est le potentiel réel du marché français des jeux en ligne?? C’est la grande question à laquelle les opérateurs aimeraient avoir une vraie réponse. Sauf que personne ne sait. Même si certains parlent d’un gros potentiel avec 30?millions de joueurs occasionnels ou réguliers et 37,5?milliards d’euros de chiffre d’affaires, selon une étude signée Francis Merlin, le délégué général du salon international des jeux et paris en ligne Monaco iGaming Exchanges. Mais en fait, ce qui pourrait vraiment faire exploser ce marché, ce sont les jeux en ligne sur les téléphones mobiles. Notamment sur les smartphones, ces téléphones high tech, comme l’iPhone d’Apple. D’ailleurs, depuis 2007, la marque à la pomme a vendu 3,5?millions d’iPhone en France et environ 35?millions dans le monde. Et les ventes ne devraient pas faiblir. Car Apple vient de sortir son nouveau téléphone, l’iPhone 4, décrit par le patron de l’entreprise de Cupertino (Californie) comme «?le lancement le plus réussi dans l’histoire d’Apple.?»

“Effet de curiosité”

En France, seul Orange a communiqué ses chiffres, en expliquant avoir déjà vendu 50?000 iPhone 4 le premier jour de sa sortie, le 24?juin. Ce qui explique en partie pourquoi Francis Merlin estime que le chiffre d’affaires pourrait passer de 2,2?milliards cette année à environ 4?milliards en 2011. Il faut dire que sur les paris hippiques en ligne, le marché français est numéro?1 en Europe et deuxième au monde, avec 7?millions de joueurs et un chiffre d’affaires de 9,4?milliards d’euros. Si l’étude de Merlin souligne que le passage des parieurs hippiques vers Internet ne se fera pas rapidement, les courses hippiques pourraient attirer en revanche 25?% de joueurs venant d’autres jeux en ligne. «?Grâce à un effet de curiosité?», indique Merlin. En 2010, les paris hippiques en ligne devraient dégager un chiffre d’affaires de 800?millions. Sachant que le PMU a réalisé en 2009 un chiffre d’affaires de 660?millions.

“Il y aura des morts”

Des chiffres prometteurs mais qui ne font pas oublier aux opérateurs de jeux en ligne que la rentabilité ne sera pas là avant plusieurs années. En attendant, il faudra donc éponger les pertes. Ce qu’a d’ailleurs confirmé à Reuters Christophe Blot, le directeur général de SAjOO.fr?: «?Les premiers résultats montrent qu’on ne gagnera pas d’argent avant l’année 3. Ce n’est pas lié au nombre de joueurs qui est très bon. Cela confirme ce que tout le monde craignait?: ce n’est pas une activité lucrative à court terme. C’est dommage que l’ouverture d’une nouvelle industrie en France ne génère pas plus de créations d’entreprises et d’emplois. Mais les conditions d’ouverture ont fait qu’il y avait une barrière très forte à l’entrée.?» Une analyse partagée par Isabelle Parize, qui estime aussi qu’il faudra patienter?: «?On équilibrera nos comptes d’ici 2 ou 3 ans.?»
Reste à savoir qui sera assez solide pour digérer des pertes sur plusieurs années. Une question sensible sur laquelle personne ne communique bien sûr. «?Seuls les dirigeants Mangas Gaming peuvent indiquer si les fonds levés permettent d’absorber les pertes annoncées ou s’il faudra à nouveau lever des fonds. Si c’était le cas, les actionnaires historiques, c’est-à-dire Financière Lov et la SBM, seront appelés à verser des fonds. Sinon ils devront faire appel à de nouveaux investisseurs. Ce qui provoquera alors une baisse de leur participation, bien entendu?», souligne Paul Bougnoux, expert chez Largillière Finance.
Or, pour le moment, la SBM compte bien maintenir sa participation à 50?% dans le holding Mangas Gaming. Jusqu’à quand?? Difficile à dire. Mais Isabelle Parize pense déjà à la suite?: «?Il n’y aura pas de la place pour tout le monde. Car on va tous perdre de l’argent pendant quelques temps. Or, tout le monde ne pourra pas résister à la pression financière. Donc oui, il y aura des morts. A terme, je pense qu’il y aura 3 ou 4 opérateurs sur les jeux en ligne. Et 2 ou 3 sur le poker.?»

Rouleaux compresseurs

Parmi les favoris pour s’imposer, la FDJ et le PMU bien sûr. De véritables rouleaux compresseurs contre lesquels il sera difficile de lutter. Surtout que, selon Isabelle Parize, les deux anciens monopoles ont un sacré avantage par rapport aux autres opérateurs?: «?Les concurrents les plus redoutables, ce sont la FDJ et le PMU. Car ils ont une énorme puissance marketing. D’ailleurs, ils utilisent l’argent gagné sur la partie «?physique?» de leur activité pour financer les pertes sur la partie Internet.?» Mais impossible de revenir en arrière.
Maintenant que Mangas Gaming est lancé, il faut avancer. Et donc continuer à investir de l’argent. Beaucoup d’argent. Exemple?: d’après une étude signée par l’institut d’études et de veille des médias Kantar média, les opérateurs ont dépensé environ 22?millions en publicité entre le 8 et le 27?juin. «?Avec la Coupe du monde et l’ouverture du marché, ça faisait deux facteurs exceptionnels. Ce qui explique que tout le monde a dépensé de l’argent en publicité. Maintenant, chacun va gérer ce type de dépense selon son business plan. Mais il faudra poursuivre l’effort. A quel niveau?? Ce sera à chacun de juger, selon l’argent que pourra mettre chaque actionnaire?», ajoute Parize. Reste à savoir si le prix payé pour entrer sur ce marché est justifié. Premiers éléments de réponse dans quelques mois.

“Impossible d’éliminer les sites pirates”
Selon une étude signée Francis Merlin, il existerait dans le monde entre 10?000?et 15?000 sites de jeux illégaux, dont 10?% français. Ce qui rapporterait aux pirates environ 1,5?milliard d’euros. Ce qui représente pour la France un manque à gagner de 112?millions. Il faut dire que 2?millions d’internautes jouent en France sur des sites illégaux. Environ 2?700 sites pirates viseraient le marché français. Ce qui rend la concurrence avec les opérateurs autorisés, comme Mangas Gaming par exemple, encore plus dure. «?Avec l’ouverture des marchés de jeux en ligne dans une trentaine de pays dans le monde, le nombre de sites illégaux va augmenter?», estime Merlin. Bref, l’Arjel a du boulot pour coincer les tricheurs qui risquent des poursuites pénales?: 3 ans de prison et 90?000?euros d’amende. Voire 7 ans de prison et 700?000?euros d’amende dans le cas d’une bande organisée.
Du coup, l’Arjel vient de lancer une campagne de communication pour sensibiliser les consommateurs. Alors que son président, Jean-François Vilotte, a adressé 19 mises en demeure de cesser leur activité en France à des opérateurs illégaux qui risquent donc de voir leurs sites bloqués. «?Mais ces sites pirates sont impossibles à éliminer, explique Merlin. Car Internet permet toujours aux pirates de trouver des moyens pour échapper à la répression. Et les mesures prises par chaque pays sont soit difficiles à appliquer, soit très coûteuses.?» Reste deux solutions?: «?Réduire la fiscalité pour pousser les opérateurs pirates à prendre une licence en France par exemple. Et permettre aux joueurs de trouver les jeux qu’ils désirent avec les gains qu’ils espèrent.?» Ce n’est pas gagné.
Monaco “capitale des jeux en ligne”??
«?Faire de Monaco la capitale des jeux en ligne. C’est ambitieux, mais réaliste.?» C’est Francis Merlin qui parle. Du 11 au 13?octobre se déroulera la première édition du Monaco iGaming Exchanges au Grimaldi forum. Avec, dans le rôle du délégué général de ce salon international des jeux et paris en ligne, Francis Merlin. Un salon réservé aux professionnels du secteur des jeux en ligne. Avec au programme, des colloques et des intervenants qui évoqueront les problématiques de ce marché prometteur?: l’évolution des marchés actuels et futurs, les stratégies, les jeux sur les mobiles, les sites pirates, la protection des joueurs… A noter que les Monaco iGaming Awards viendront récompenser les meilleurs. Avec comme prix les plus convoités, le prix du meilleur opérateur et celui du meilleur site de jeux en ligne. Réponse le 13?octobre.

Bernard Lambert
Bernard Lambert, directeur général de la société des bains de mer © Photo Monte-Carlo SBM

“Pas le droit d’être absent de ce marché”

Le directeur général de la société des bains de mer (SBM), Bernard Lambert, explique pourquoi, malgré la crise, son entreprise s’est lancée sur le marché des jeux en ligne avec Mangas Gaming.

Monaco Hebdo?: Les jeux en ligne, c’est nouveau pour la SBM??
Bernard Lambert?: Début 2000, on a envisagé de lancer notre site Internet?: Monaco casino on line. Avec uniquement des jeux de casino, comme le black jack, la roulette ou des machines à sous. Du coup, pendant 2 ou 3 ans, on a travaillé sur ce dossier. Et puis, il y a 3 ans, on a été approché par de grands groupes spécialisés dans les jeux en ligne, comme Bwin ou PartyGaming. Ce qui nous a permis de nous apercevoir qu’on avait beaucoup de retard. Car il nous manquait à la fois les connaissances, la «?tuyauterie?» et les experts en informatique.

M.H.?: Pourquoi avoir choisi de vous lancer avec Stéphane Courbit??
B.L.?: En fait, on a étudié plusieurs stratégies. Et on a discuté avec 5 ou 6 groupes du secteur. Mais on a décidé de s’associer avec quelqu’un qui avait la même vision que nous. Notre vision, c’est bien sûr de devenir un grand groupe. Mais on voulait un partenaire qui, comme nous, se lançait. Voilà pourquoi on s’est associé avec Stéphane Courbit.

M.H.?: Mais c’est risqué??
B.L.?: C’est un vrai pari. Mais c’est aussi un véritable relais de croissance pour la SBM. D’ailleurs, entrer sur ce marché, je pense que c’est un bon choix stratégique.

M.H.?: La SBM n’a aucune expérience sur les jeux en ligne??
B.L.?: Les jeux en ligne, c’est une nouvelle vitrine pour la SBM. Car on est toujours à la recherche de nouveaux clients. D’ailleurs, on va organiser des tournois de poker sur Internet avec les phases finales qui se dérouleront en Principauté.

M.H.?: C’est un marché énorme??
B.L.?: En 2002, on parlait d’un chiffre d’affaires global de 15?milliards de dollars. Mais aujourd’hui, difficile de valider tous les chiffres qui circulent.

M.H.?: Investir 170?millions en pleine crise, ça inquiète certains salariés??
B.L.?: On a eu droit aux mêmes commentaires quand on a pris une participation dans Wynn Resorts en 2003. Or, on a acheté des actions à 15?dollars qu’on a commencé à revendre à 170?dollars. Ce qui nous a permis de largement récupérer notre mise de fonds. Et on a encore 1,3?% de Wynn Resorts. Même chose quand on a construit le Monte-Carlo Bay. Car c’était un très gros investissement. Ce qui a pu susciter quelques inquiétudes. Mais la direction et le conseil d’administration savent ce qu’ils font. On ne prend pas de risques inutiles.

M.H.?: Quel impact a eu cet investissement pour la SBM??
B.L.?: Cet investissement dans Mangas Gaming et dans les jeux en ligne a baissé le résultat de la SBM. Mais on attend sereinement la suite. Car on a une équipe très professionnelle qui est en place.

M.H.?: Vous comprenez les inquiétudes des salariés??
B.L.?: Je comprends ces inquiétudes. Mais les salariés n’ont pas tous les éléments en main. En tout cas, la prise de risque est nécessaire. D’ailleurs, on vient d’ouvrir le Buddha Bar. Ce qui est aussi une prise de risque. Et on va ouvrir un cabaret. Mais pour être crédible sur les marchés internationaux, il faut continuer à créer l’événement. Car les nouvelles destinations et les nouveaux produits se multiplient. Il faut continuer à avancer en innovant.

M.H.?: Impossible pour la SBM de ne pas être présent sur ce nouveau marché français??
B.L.?: La SBM est un acteur dans les jeux. Donc on n’avait pas le droit d’être absent de ce marché. C’est d’ailleurs un avis partagé par le gouvernement. Et si on avait attendu 2 ou 3 ans pour se lancer, ça aurait été un échec assuré. C’est vrai que le timing de lancement correspond à une période économique difficile. Mais le marché des jeux en ligne est une industrie qui se développe rapidement. Du coup, c’est très intéressant pour la SBM. De plus, ça représente aussi une ouverture pour le groupe à l’international.

M.H.?: Etre à la fois actionnaire de l’AS Monaco et d’un site qui fait des paris sportifs, ça ne pose pas de problèmes??
B.L.?: Il n’y a pas de conflit d’intérêt entre la SBM, les paris sportifs avec BetClic et l’AS Monaco. Car on possède seulement 40?% du club. Donc on respecte la loi.

M.H.?: BetClic va devenir sponsor maillot de l’AS Monaco??
B.L.?: Il faut savoir que BetClic est déjà partenaire de l’OM et de l’OL en France. Et de la Juventus de Turin en Italie. Donc on a déjà une exposition médiatique très importante. De plus, BetClic n’a pas vocation à sponsoriser tous les clubs français. Maintenant, il faut voir ce qu’il se passera dans les années à venir.

Bientôt un marché à 4?milliards??
2,2?milliards d’euros. C’est ce que devrait peser le marché des jeux en ligne en France cette année. Selon l’expert des jeux en ligne Francis Merlin, l’effet Coupe du monde aura un impact assez fort. Alors que le chiffre d’affaires des sites de la Française des jeux (FDJ) et du Paris mutuel urbain (PMU) était déjà de 1,4?milliard en 2009. Selon Merlin, la clé de répartition de ces 2,2?milliards sera la suivante?: 1,1?milliard pour les paris sportifs, ce qui inclut le chiffre d’affaires de la FDJ qui était de 783?millions en 2009. Ensuite 800?millions pour les paris hippiques (le PMU a réalisé un chiffre d’affaires 2009 de 600?millions). Et 300?millions pour le poker.
Pour 2011, Merlin estime que le chiffre d’affaires français pourrait atteindre 4?milliards d’euros, grâce notamment à une forte hausse du chiffre d’affaires du poker. Avec 4?milliards, le chiffre d’affaires du marché français se rapprocherait de celui de l’Italie, qui est estimé à 3,7?milliards, deux ans seulement après l’ouverture de son marché. Il faut dire que cet expert estime que le marché français possède un véritable potentiel de développement. Avec un nombre de joueurs de 1,8 à 2?millions cette année. Et de 2,7 à 3?millions dès 2011. Ce qui explique que beaucoup d’opérateurs n’aient pas hésité à se lancer sur ce nouveau marché. Quitte à prendre des risques.