jeudi 28 mars 2024
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Visite de Xi Jinping à Monaco : « L’enjeu est beaucoup plus économique que stratégique ou politique »

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Le président chinois sera en visite en Italie, à Monaco et en France du 21 au 26 mars. Xi Jinping rencontrera le prince Albert II le 24 mars en principauté. Quels sont les principaux enjeux de cette visite historique pour Monaco ? Barthélémy Courmont, professeur à l’université catholique de Lille et directeur de recherche à l’institut des relations internationales et stratégiques, a répondu aux questions de Monaco Hebdo.

Etes-vous surpris de voir le président chinois XI Jinping en visite officielle à Monaco ?

Compte tenu de l’écart entre ces deux pays, cela peut paraitre surprenant. Mais ce serait sous estimer l’importance que peut représenter Monaco en termes d’investissement, avec notamment la présence d’entreprises chinoises dans l’économie monégasque. Au cours des dernières années, les Chinois ont fortement investi dans l’activité des casinos (1). Il sera intéressant de comparer le volume des investissements réalisés à Monaco avec d’autres pays européens par la taille et la population. Donc, le regard que l’on peut porter, a priori, sur cette visite à Monaco est un peu trompeur. Car derrière, il y a sans doute des enjeux économiques beaucoup plus importants que dans d’autres régions. 

Qu’est-ce que la principauté peut espérer de cette visite, qui est donc historique pour Monaco ?

C’est effectivement une première. D’un point de vue diplomatique, c’est intéressant pour Monaco. Car cette visite officielle de Xi Jinping rappelle au monde que la principauté est un Etat souverain indépendant. Un Etat qui est, par conséquent, capable d’entretenir des relations bilatérales, et donc d’organiser des visites de ce type. Mais il faut rester méfiant.

Pourquoi ?

C’est une tendance que l’on retrouve dans d’autres régions et de manière assez sensible au sein de l’Union européenne (UE). On sait que cette présence grandissante de la Chine dans les investissements à l’intérieur de nos sociétés s’accompagne d’un rapprochement politique. 

« Le regard que l’on peut porter, a priori, sur cette visite à Monaco est un peu trompeur. Car derrière, il y a sans doute des enjeux économiques beaucoup plus importants que dans d’autres régions »

Un exemple ?

On sait que la Grèce, qui bénéficie de très importants investissements chinois, ne cache plus le fait qu’on ne peut plus, ou que l’on ne veut plus, se permettre de critiquer la Chine sur un certain nombre de questions politiques. Il y a donc un potentiel risque de dépendance politique ou, plus exactement, d’alignement politique. C’est là tout l’enjeu de ces investissements chinois. Tout en se réjouissant de ce type de visite, on peut donc s’interroger sur la finalité pour la Chine.

Que vient faire Xi Jinping à Monaco et quel est l’intérêt de cette visite pour la Chine ?

Même si cette visite s’inscrit dans le cadre d’une vaste tournée européenne et que Monaco n’est évidemment pas la destination principale de cette tournée de Xi Jinping, on peut se demander s’il n’y a pas une stratégie qui consister à viser non pas les plus faibles, mais les plus vulnérables. C’est-à-dire des pays qui peuvent potentiellement être des portes d’entrées pour ces investissements chinois et cette vaste initiative de la ceinture et de la nouvelle route de la soie. 

Comment réagissent les autres pays face à la Chine ?

En France et en Allemagne, il existe de fortes réticences, et on avance de façon très prudente avec la Chine. En Europe centrale et orientale, la Chine est beaucoup plus offensive, ce qui lui permet de renforcer ses positions dans ces régions. 

Et l’Italie, qui fait partie des pays visités par Xi Jinping ?

Récemment, on a vu que l’Italie s’était rangée au projet chinois, et on sait quelle est la vulnérabilité de l’économie italienne à l’heure actuelle. Il y a donc, là aussi, un certain nombre d’inquiétudes, ou en tout cas, de questionnements.

« Il y a un potentiel risque de dépendance politique ou, plus exactement, d’alignement politique. C’est là tout l’enjeu de ces investissements chinois »

Mais alors, quelle est la finalité de cette visite de Xi Jinping à Monaco ?

Cela donne l’impression que la Chine essaie de disperser les acteurs européens, d’agir systématiquement de manière bilatérale, avec forcément des initiatives qui ne peuvent être qu’avantageuses pour les petits pays. Cet ensemble va progressivement asseoir la place de la Chine en Europe. Je ne dis pas que cela est une mauvaise chose, car on a besoin de bonnes relations avec la Chine et on a besoin des investissements chinois. Mais cela pose un certain nombre de questions.

Lesquelles ?

Cela pose des questions sur la dépendance, et sur notre capacité à nous entendre et à nous accorder sur la politique chinoise, ce qui fait aujourd’hui vraiment défaut. 

Qu’est-ce que la « nouvelle route de la soie » ?

La nouvelle route de la soie a été officiellement lancée en 2013 par Xi Jinping, au début de son mandat. Mais, dans les faits, ce processus remonte déjà à une bonne quinzaine d’années, avec une intensification de la présence chinoise dans un certain nombre de régions. Ils ont alors commencé à fortement investir dans les infrastructures. Dans le cadre de l’UE, en 10 ans, les investissements chinois dans les infrastructures ont été multipliés par plus de 10. Il faut aussi noter la présence de plus en plus marquée d’entreprises chinoises dans les économies d’autres régions. Le fait que Huawei soit présent en principauté, au sein de Monaco Telecom, s’inscrit clairement dans cette dynamique. Il y a donc une double tendance : des investissements directs et des acquisitions, des fusions ou des partenariats avec des entreprises chinoises. 

Cela représente quoi pour nos économies ?

Cet enjeu est une opportunité, parce que cela représente des possibilités de développement et d’échanges qui sont sans doute inédites à ce niveau dans l’histoire de nos économies. Et cela débouche aussi sur un certain nombre de questionnements quant à notre dépendance à cette économie chinoise. C’est précisément la situation dans laquelle nous nous trouvons à l’heure actuelle en Europe, où nous sommes incapables de répondre de manière claire à cette question : les investissements chinois sont-il totalement positifs ou faut-il mettre des barrières, et se méfier de cette présence chinoise ? 

« La Chine essaie de disperser les acteurs européens, d’agir systématiquement de manière bilatérale, avec forcément des initiatives qui ne peuvent être qu’avantageuses pour les petits pays »

Les conséquences de cette absence de réponse claire à cette question ?

Il faut en discuter et essayer de se mettre d’accord, afin de pouvoir parler d’une seule voix. Tant que nous ne serons pas arrivés à ce stade, nous aurons une multiplication d’initiatives, comme celle que nous pouvons voir à Monaco, comme celle que nous avons vue avec l’Italie, et comme celles qui surviendront bientôt dans d’autres pays. Nous aurons une Chine qui renforce ses partenariats bilatéraux et qui profite d’un vide laissé par cette absence de consensus au niveau européen. 

Mais la Chine n’est pas forcément malintentionnée !

Il ne faut évidemment pas crier au feu. Il faut se réjouir d’avoir des investisseurs chinois, car c’est une économie qui est en train de monter en puissance. La Chine est une économie qui compte. Le fait qu’elle soit de plus en plus présente dans nos économies, est aussi à notre bénéfice.

Monaco peut donc en tirer des bénéfices ?

Pas en termes d’infrastructures. Car la principauté ne présente pas un intérêt particulier dans les projets d’infrastructures chinois. Je pense ici aux infrastructures  portuaires ou aux infrastructures de transport. Dans la région, d’autres cibles sont privilégiées. Le fait que l’Italie ait donné son feu vert pourrait faire d’un port comme celui de Gênes, une destination privilégiée. Il y a aussi Bari ou Brindisi et une multitude de possibilités de ce côté-là. En revanche, la présence d’entreprises chinoises dans l’économie monégasque peut présenter de réelles potentialités. On peut donc s’attendre à ce que le secteur des télécommunications, des jeux et d’autres encore pourrait intéresser l’économie chinoise. 

« A l’heure actuelle en Europe, nous sommes incapables de répondre de manière claire à cette question : les investissements chinois sont-il totalement positifs ou faut-il mettre des barrières, et se méfier de cette présence chinoise ? »

A Monaco, l’opérateur chinois Huawei est présent depuis plusieurs années : faut-il s’en inquiéter, alors que plusieurs pays l’accusent d’espionnage ?

Il ne faut pas non plus tomber dans le fantasme qui associe nécessairement toute entreprise chinoise à la nature du régime politique chinois. Il faut donc prendre avec beaucoup de précautions toutes les accusations dont Huawei fait l’objet. Il y a sans doute des zones d’ombre et une incapacité de la part du régime chinois et des entreprises chinoises à faire preuve d’une grande transparence quant à leurs activités et à leurs objectifs, ce qui nourrit ce fantasme. Il faut s’interroger sur le gain potentiel et sur ce qui pourrait justifier ce type de comportement. Dans le cas d’un pays comme les Etats-Unis, avec les implications au niveau stratégique, les inquiétudes sont sans doute légitimes. Mais dans le cas de Monaco, l’enjeu est beaucoup plus économique que simplement stratégique ou politique. 

Voir Emmanuel Macron contraint de se déplacer à Beaulieu-sur-Mer, près de Monaco, pour rencontrer le président chinois (2), cela semble assez incroyable ?

Ça ne me surprend qu’à moitié. La Chine est de plus en plus décomplexée dans son rapport aux autres grandes puissances. La dernière visite officielle de Xi Jinping en France a été accompagnée d’un grand cérémonial, avec notamment une grande cérémonie au château de Versailles. C’est, semble-t-il, le gouvernement chinois qui avait demandé cela. L’objectif, c’était de se mettre au niveau des plus grands, et donc, d’avoir tout le faste entourant cet événement. De la même manière, la visite d’Etat d’Emmanuel Macron il y a un peu plus d’un an en Chine, a également été extrêmement médiatisée. Cette visite était très attendue en Chine, parce qu’on espérait qu’Emmanuel Macron se fasse un peu le porte-parole de ces nouvelles initiatives chinoises, avec les nouvelles routes de la soie. Mais les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes de Pékin. 

Les conséquences ?

Macron avait promis de faire un déplacement annuel à Pékin, mais, à ce jour, il n’y a pas de déplacement prévu. Donc la relation qui semblait idyllique en janvier 2018, lorsque le président français est allé en Chine, l’est beaucoup moins aujourd’hui. Aujourd’hui, il y a, en plus, les réticences et les craintes quant au projet chinois que Macron a exprimé à Paris. Ce déplacement à Monaco est aussi un moyen pour la Chine de dire : « On fait ce qu’on veut. Et si vous voulez nous voir, c’est à vous de vous déplacer. Les rôles se sont inversés et nous ne sommes finalement pas demandeurs. » C’est aussi une petite humiliation diplomatique que la Chine souhaite infliger à la France.

« Il y a des zones d’ombre et une incapacité de la part du régime chinois et des entreprises chinoises à faire preuve d’une grande transparence quant à leurs activités et à leurs objectifs, ce qui nourrit ce fantasme »

Ce n’est pas la première fois ?

La Chine est coutumier du fait. Il faut se souvenir de la présidence de Nicolas Sarkozy de 2007 à 2012. Le président français était alors assez vindicatif sur la question des droits de l’homme notamment. Or, à plusieurs reprises, Pékin a humilié publiquement Nicolas Sarkozy, parfois lors de déplacement en Chine. Par exemple, en s’assurant que le président français arrive sur un certain nombre de lieux après le moment important. Cela montrait que sa présence était tolérée, mais qu’il n’était pas un roi en son royaume. Pour toutes ces raisons, voir aujourd’hui Emmanuel Macron obligé de se déplacer aux portes de Monaco pour rencontrer Xi Jinping ne me surprend donc qu’à moitié.

Si la Chine fait souvent peur, c’est à cause de son expansionnisme économique et politique ?

Au  niveau économique, ce n’est pas tant liée au fait que la Chine est puissante, qu’aux conséquences qui sont directement liées au regard que l’on porte sur le modèle international. On s’interroge légitimement sur le fait que la Chine change les règles du jeu et bouleverse un système libéral auquel nous nous sommes habitués et dans lequel nous avons un certain nombre de bénéfices. Ces inquiétudes sont manifestées par les pays développés, pas par les pays en développement qui, eux, n’ont évidemment pas du tout le même regard et ne sont pas inquiets de voir la Chine grandir aussi vite économiquement. 

Et au niveau politique ?

Les inquiétudes sont liées à la nature du régime chinois. La Chine, première puissance mondiale et pays le plus influent du monde, est un pays non-occidental, mais c’est aussi un pays non-démocratique. Et cela soulève un certain nombre de questionnements qui, forcément, nourrissent là aussi des fantasmes et des craintes. Par conséquent, on est un peu dans l’expectative. Du coup, tout va dépendre de l’attitude de la Chine dans les prochaines années. 

Quelle sera la capacité de transparence et de dialogue de la Chine ?

Tant que la Chine continuera sur la base qui est la sienne actuellement, à savoir avancer de manière un peu bilatérale, sans véritablement s’engager des compromis à long terme, on ne pourra que nourrir davantage ce sentiment de crainte, de perte de contrôle. Avec le risque de voir nos institutions et le monde dans lequel nous vivons être un peu bouleversé par cet acteur chinois. A l’inverse, si la Chine, parvient à se montrer plus ouverte au dialogue, on pourra instaurer un climat de confiance, qui semble indispensable. 

Ce déplacement à Monaco est aussi un moyen pour la Chine de dire : « On fait ce qu’on veut […] ». C’est aussi une petite humiliation diplomatique que la Chine souhaite infliger à la France

Dans son livre Trump et Xi Jinping, les apprentis sorciers, l’économiste Christian Saint-Etienne indique que d’ici à 2050, la Chine représentera 20 % de la richesse mondiale, l’Inde 15 %, les Etats-Unis 12% et l’Union européenne (UE) 9 % : cette montée en puissance de la Chine est inéluctable ?

Ce sont effectivement les rapports de force vers lesquels on s’oriente. C’est ce que certains historiens qualifient de « grande convergence », en opposition à la « grande divergence », c’est-à-dire le moment où les puissances européennes surclassaient la Chine, au début du XIXème siècle. Pour les Chinois, il s’agit d’un retour à la normale. C’est en tout cas inéluctable, la Chine sera de toute façon la première puissance économique mondiale et le pays le plus influent du monde. On peut le craindre, on peut se poser des questions, mais on ne peut pas non plus être dans une posture qui consiste à se dire « on va faire en sorte que ça n’arrive pas ». Nous n’avons plus ce contrôle-là. Il faut l’accepter et essayer d’en tirer un maximum de profits et éviter que cela ne se traduise pas une trop forte dépendance.

Quelles seront les conséquences de cette domination annoncée ?

C’est là toute la question. Est-ce que la Chine est une puissance dite du statu quo, qui veut conserver les rapports internationaux tels qu’ils sont ? Et se contenter de retrouver sa place, en jouant un rôle sur la scène internationale ? Ou, au contraire, est-ce que la Chine est une puissance révisionniste, susceptible de remettre en cause à la fois les institutions internationales, mais aussi les équilibres mondiaux ? C’est une question à laquelle personne n’est capable de répondre actuellement avec certitude. 

Les conséquences pour un pays de la taille de Monaco ?

Aujourd’hui, en 2019, un pays comme Monaco a une multitude d’avantages à en tirer. On le voit avec cette visite officielle qui place la principauté au niveau des plus grands. En soi, c’est donc extrêmement positif. Monaco se retrouve en position de pouvoir générer des investissements de la part de la Chine, située à plus de 10 000 kilomètres. Cela doit être accueilli de manière favorable. 

Monaco n’a donc rien à craindre de la montée en puissance de la Chine ?

On n’est pas dans une affirmation idéologique à l’échelle mondiale. Donc, pour Monaco, les risques restent relativement limités. Les risques sont plus grands pour les puissances qui ont une forte capacité d’influence sur la scène internationale, comme les Etats-Unis bien sûr, mais aussi les pays les plus importants au sein de l’UE, ceux dont les économies, et la voix, à la fois diplomatique et politique porte le plus. Ces pays ont davantage de raisons de s’inquiéter.

« Je ne serai pas surpris que Xi Jinping fasse référence à l’AS Monaco quand il sera en principauté, et même qu’il reçoive un maillot à son nom de ce club »

Chaque pays a donc un regard différent sur la position dominante de la Chine ?

J’ai assisté récemment à un sommet en Belgique avec des collègues de différents pays d’Europe centrale et orientale. Ils sont très clairs. Pour eux, la montée en puissance de la Chine est une opportunité. La seule chose qui les gêne, et ça s’explique par leur passé, c’est que la Chine est un régime communiste. Si cela disparaissait de leur appellation, la Chine serait totalement la bienvenue, car les opportunités sont énormes. Mais le regard que ces pays portent sur cette montée en puissance n’est pas du tout le même que celui que l’on peut avoir en Europe occidentale, et notamment en France. Face à la Chine, chacun va donc trouver son compte et se poser un certain nombre de questions. Les réponses seront celles que nous donnerons, au moins autant que celles que la Chine nous donnera. 

Monaco est très loin de l’idéologie communiste : ce n’est pas un frein pour entretenir de bonnes relations avec Pékin ?

N’oublions pas qu’au sein de l’UE, les Etats d’Europe centrale et orientale sont, du fait de leur passé, les pays les plus farouchement anti-communistes. Or, ce sont aussi les pays les plus engagés dans un dialogue avec Pékin. On voit donc à quel point la dimension idéologique ne pèse plus du tout dans les rapports de force internationaux. 

On dit que le président chinois, Xi Jinping, tient à l’intérieur de son pays un discours radical et un discours ouvert et compréhensif lorsqu’il est à l’extérieur ?

Comme tous ces prédecesseurs, Xi Jinping doit constamment asseoir sa légitimité. Or, à l’intérieur du pays, la légitimité des dirigeants chinois est nourrie par un discours assez fort, avec une forme de nationalisme “soft“. Cela consiste à mettre en avant les vertus, les opportunités qui sont celles de la Chine, tout en critiquant assez souvent le modèle occidental. On va aussi se moquer des déboires des puissances occidentales, quand il y en a. En interne, il y a donc effectivement ce discours qui n’est pas toujours très agréable à entendre.

« Monaco est aussi un symbole d’opulence, de richesse. Or, on sait à quel point la richesse obsède la société chinoise aujourd’hui » 

Et sur la scène internationale ?

Sur la scène internationale, on voit au contraire Xi Jinping qui se montre généralement plutôt affable et agréable. Il ne cesse d’ailleurs de rappeler l’attachement de la Chine aux institutions internationales. 

Il s’agit donc d’un double discours ?

Oui et non. Cela fait partie de cette spécificité chinoise de faire la distinction entre l’intérieur du pays et l’extérieur. C’est donc quelque-chose que l’on peut qualifier de culturel. Par ailleurs, la Chine se méfie et s’inquiète beaucoup de son déficit d’image sur la scène internationale. Aujourd’hui, l’un des plus grands défis de la Chine dans le monde, c’est précisément de se faire accepter et de ne pas être considéré comme un intrus dans les relations internationales. La Chine avance donc de manière très mesurée, avec une volonté de ne pas heurter lorsqu’on est à l’extérieur. Cela explique donc peut-être ce double langage, cette posture qui semble parfois un peu schizophrène. 

Les Etats-Unis ont poussé en faveur de l’entrée de Pékin à l’organisation mondiale du commerce en 2001 : ils le regrettent aujourd’hui ?

Semble-t-il, oui… Les Etats-Unis ont fait entrer le loup dans la bergerie. Du côté des Américains, on est très certainement moins enthousiaste aujourd’hui, qu’on ne l’était il y a une vingtaine d’années. 

Comment est vu Monaco depuis l’Asie ?

Les Chinois, et Xi Jinping d’ailleurs, adorent le football. Je ne serai donc pas surpris que Xi Jinping fasse référence à l’AS Monaco quand il sera en principauté, et même qu’il reçoive un maillot à son nom de ce club. Monaco est aussi un symbole d’opulence, de richesse. Or, on sait à quel point la richesse obsède la société chinoise aujourd’hui. Elle en a été privée pendant une très longue période et la Chine décomplexée, c’est aussi une Chine qui se prend à rêver de vivre comme les sociétés occidentales. Du coup, en Chine, on rêve sans doute plus de la vie à Monaco que de la vie dans les pays Baltes ou dans d’autres pays d’Europe centrale et orientale. 

  1. Galaxy Entertainment Group (GEG), dont le siège social est situé à Hong Kong, est entré au capital de la Société des Bains de Mer (SBM) en juillet 2015. GEG possède 5 % du capital de la SBM.
  2. C’était l’hypothèse évoquée alors que Monaco Hebdo bouclait ce numéro, le 19 mars 2019. Une séance de travail devrait se dérouler le 25 mars au palais de l’Elysée. Elle sera suivie d’une déclaration à la presse et d’un dîner d’Etat, a indiqué la présidence française.
  3. Trump et Xi Jinping, les apprentis sorciers de Christian Saint-Etienne (éditions L’Observatoire), 256 pages, 18 euros.

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