vendredi 29 mars 2024
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Election nationale 2023 – Daniel Boeri : « Nous voulons préparer dès maintenant le “Monaco dans 10 ans” »

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A quelques jours du scrutin du 5 février 2023, Daniel Boeri, tête de liste des Nouvelles Idées Monégasques, a répondu aux questions de Monaco Hebdo. Mise en place de la semaine de quatre jours pour les salariés afin de permettre à Monaco de gagner en attractivité, logement et vote lors des élections communales pour les enfants du pays, création d’une maison de vie pour lutter contre les violences faites aux femmes, lancement d’un théâtre national… Daniel Boeri évoque sa vision de la principauté en 2033.

Election 2023 : le contexte politique

Pourquoi vous présenter à cette élection nationale du 5 février 2023 ?

La liste des Nouvelles Idées pour Monaco (NIM) se présente aux élections, car nous pensons que, dans un monde en mutation profonde, nous ne pouvons plus nous permettre de faire du sur-place. Il en va de l’avenir de la génération des enfants qui ont 10 ans aujourd’hui. Il ne faut pas oublier non plus que les sujets qui concernent notre vie quotidienne doivent être traités dans leur globalité, et non de manière isolée, comme cela est le cas aujourd’hui.

Quels sont les sujets prioritaires pour cette mandature 2023-2028 ?

Notre projet politique vise à proposer un ensemble cohérent, et préparer dès maintenant le « Monaco dans 10 ans », de l’éducation au travail, en passant par l’environnement et la mobilité, nos relations dans le monde, sans oublier la thématique fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous apportons notre vision : innover, inspirer, anticiper, encourager, motiver ! Et nous souhaitons aller au-delà du court terme.

Avec une liste de seulement 14 candidats, l’hypothèse d’être éliminé ou minoritaire est grande : comment peser efficacement en étant minoritaire au Conseil national ?

Concernant les élections, l’Histoire nous apprend qu’il ne faut jamais préjuger de ses résultats. Les NIM veulent proposer une alternative à nos compatriotes, et ils ne partent pas défaitistes, au contraire ! Nous y allons car nous avons la conviction que nous pouvons apporter notre pierre à l’édifice. Comme le disait Georges Clemenceau (1841-1929) : « Il n’y a qu’une seule façon d’échouer, c’est d’abandonner avant d’avoir réussi. »

Logement des Monégasques et des enfants du pays

Quelles sont vos propositions pour assurer le logement des Monégasques sur les cinq années à venir et au-delà, alors que le parc domanial va bientôt dépasser 3 700 appartements ?

La priorité au logement aux Monégasques est la règle ! D’ailleurs, le plan national pour le logement est en marche. Comme toute action de longue haleine, la construction subit des à-coups, et l’expérience montre qu’ils sont souvent inévitables. Il ne s’agit pas de s’en contenter, mais d’optimiser les différentes contraintes urbanistiques du quotidien pour les diminuer, ou même s’en affranchir.

« Lors des nouvelles constructions, il convient d’intégrer les enfants du pays. Nous avons partagé avec eux les bancs de l’école et du lycée. Ce sont des Monégasques de cœur […]. Au point d’envisager, dans le futur, leur participation aux élections communales »

Le plan national pour le logement annoncé par le prince Albert II début 2019 prévoit la construction de 1 500 appartements réservés aux Monégasques en 15 ans : ce rythme de construction est-il respecté ?

Je suis conscient que chaque retard dans les livraisons est une difficulté pour les familles qui les attendent. Concernant le logement, la pénurie semble un mot d’esprit.

Les charges locatives pèsent trop lourd estiment un certain nombre de Monégasques : comment remédier à cela, alors que l’Etat assume déjà jusqu’à 50 % des charges ?

La crise énergétique d’un côté, la verticalité des immeubles de l’autre, entraînent naturellement une hausse des coûts des charges locatives. Il s’agit donc de plafonner ces charges, tout en favorisant la sobriété énergétique. De plus, pour éviter les mauvaises surprises du « rappel des charges annuelles », il conviendrait de leur en donner une vision trimestrielle, pour que les familles et les syndics puissent s’adapter.

Comment améliorer le mode d’attribution des logements réservés aux Monégasques ?

Dans un monde qui change, dans le pays aussi, il convient de faciliter la mobilité à l’intérieur du parc domanial. Les familles changent aussi. Dans cette perspective, nous proposons la création, sous les auspices de l’administration des domaines, d’un site Internet facilitant l’échange d’appartements domaniaux à deux, trois, ou plusieurs.

« Il convient de faciliter la mobilité à l’intérieur du parc domanial. Les familles changent aussi. Dans cette perspective, nous proposons la création, sous les auspices de l’administration des domaines, d’un site Internet facilitant l’échange d’appartements domaniaux à deux, trois, ou plusieurs »

Quelles propositions concrètes faire pour assurer le logement des enfants du pays pendant la mandature 2023-2028, alors que le foncier est plus que rare en principauté ?

Lors des nouvelles constructions, il convient d’intégrer les enfants du pays. Nous avons partagé avec eux les bancs de l’école et du lycée. Ce sont des Monégasques de cœur ! Ils ont participé, et ils participent, au développement de Monaco. Ils sont présents dans le pays avec toutes leurs familles, parfois depuis des lustres. Au point d’envisager, dans le futur, leur participation aux élections communales.

Pour rendre Monaco plus attractif sur le marché de l’emploi, le logement de salariés de la principauté dans les communes limitrophes est en discussion : quelle est votre position, alors que la loi française solidarité et renouvellement urbain (SRU) rend ce projet complexe ?

En ce qui concerne le logement de salariés dans les communes limitrophes, il nous appartient de respecter les règles du jeu de la France, et notamment les logements sociaux. Il m’apparaît tout à fait naturel que les communes limitrophes, au même titre que nous avec les logements domaniaux, se préoccupent de leurs logements sociaux.

Europe – international

L’accord d’association sur lequel travaille le gouvernement monégasque avec l’Union européenne (UE) est-il vital pour l’avenir de Monaco ?

Monaco a toute sa place dans le monde et, naturellement, en Europe. La base des négociations avec l’UE repose globalement sur les quatre libertés : de circulation des marchandises, des personnes, des services, et des capitaux. Par ailleurs, il convient de souligner le poids des échanges extérieurs des marchandises et de services de notre pays qui, hors France, dépassent les 3 milliards d’euros annuels. Une grande part de notre économie comporte l’échange de biens et de services. Il s’agit de sommes importantes, ainsi que de recettes de TVA.

Le prince Albert II a évoqué une série de « lignes rouges » que son gouvernement ne doit pas franchir dans le cadre de ces négociations : cela vous satisfait-il ?

Dans ce cadre, la priorité au logement et d’emploi des Monégasques dans leur pays sont naturellement une ligne rouge. De plus, le prince Albert II ayant défini les lignes rouges, le gouvernement, naturellement, les défendra.

Les prérogatives du Conseil national ne lui permettent pas de participer directement à ces négociations : quel rôle peuvent jouer les élus dans un tel cadre ?

Comme pour tout traité en cours de négociation, les informations sont confidentielles. Il nous appartiendra donc, une fois le projet de négociation mis à jour, de donner notre appréciation des conditions de l’accord avec l’UE.

Société

Le modèle social monégasque est-il satisfaisant ?

Le modèle social à Monaco est performant, nous le savons tous. Néanmoins, il s’agit de faciliter, en plus, pour les personnes qui en ont besoin, le contact parfois unique pour obtenir une aide, une réponse à un problème qui se pose naturellement. Chaque cas est particulier. « Pour la santé, la priorité c’est vraiment d’être en mesure de recruter du personnel dans ce secteur. Il s’agit d’une tâche difficile. Le secteur de la santé est en proie lui-aussi aux mêmes doutes que dans d’autres secteurs, dans un environnement qui lie soignants et patients, médical, et social »

Comment favoriser davantage l’égalité femmes-hommes en général ?

En ce qui concerne l’égalité femmes-hommes, c’est une question d’autant plus prioritaire qu’elle masque parfois des inégalités plus fortes. Ainsi, l’inégalité de salaire aujourd’hui se perpétue au moment de la retraite. C’est une question extrêmement importante. Nous devrions retrouver les mêmes éléments que l’on retrouve dans l’administration en ce qui concerne les salaires du privé. Nous sommes dans une société libérale ; il convient de le rester. Mais les entreprises doivent aujourd’hui se préoccuper de cette question essentielle.

« Pour la santé, la priorité c’est vraiment d’être en mesure de recruter du personnel dans ce secteur. Il s’agit d’une tâche difficile. Le secteur de la santé est en proie lui-aussi aux mêmes doutes que dans d’autres secteurs, dans un environnement qui lie soignants et patients, médical, et social »

L’égalité femmes-hommes se heurte aussi à la problématique des salaires dans le secteur privé ?

J’ai souvent l’occasion de le dire, « on ne change pas la société par décret » : encore faut-il s’atteler à la tâche par le dialogue, les rencontres et discussions, et je compte sur les partenaires sociaux pour avancer dans cette direction. Nous devons travailler sur les nombreuses études passées, et en cours, sur les causes de ces inégalités salariales, pour proposer les solutions les plus adaptées à notre pays, et faire de Monaco un pays exemplaire en la matière. Nous savons, par exemple, que le tissu économique monégasque est composé à plus de 75 % d’entreprises de moins de 5 salariés, si l’on compte les employeurs de gens de maison. Et à plus de 60 %, si les employeurs de gens de maison sont exclus. Toutefois, nous pouvons nous pencher sur les mesures de transparence salariale dans les autres cas, et les entreprises de plus d’un certain nombre de salariés pourraient réfléchir à l’utilité de cette mesure. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), les mesures globales de transparence salariale pourraient réduire les inégalités de 1,65 % à près de 4,5 %. Ce n’est pas assez, mais cela pourrait constituer un début. Des mesures en vigueur ailleurs pourraient nous inspirer.

Comment lutter plus efficacement contre les violences dans le couple ?

Les violences conjugales sont importantes à Monaco, souvent masquées à travers le concept, lui-même. Les chiffres publiés récemment montrent qu’au fond, on observe près d’un cas par semaine. C’est énorme. Voilà pourquoi nous souhaitons créer une « maison de vie », un lieu d’échange, d’accueil et de soutien, avec un numéro vert pour faciliter l’expression. Je pense qu’il ne faut pas être dogmatique sur cette question. Toutefois, les récentes analyses sur l’égalité chez notre grand voisin montrent que les questions se posent de façon plus accrue chez les moins de 34 ans.

Santé

Quelles sont vos propositions pour le secteur de la santé à Monaco ?

Pour la santé, la priorité c’est vraiment d’être en mesure de recruter du personnel dans ce secteur. Il s’agit d’une tâche difficile. Le secteur de la santé est en proie lui-aussi aux mêmes doutes que dans d’autres secteurs, dans un environnement qui lie soignants et patients, médical, et social. Ce milieu est profondément humain, profondément stressant aussi. Après la gestion exemplaire de la crise du Covid par nos soignants que nous avons applaudis lors du confinement, mais que nous avons tendance à un peu oublier aujourd’hui, les personnels aspirent à des conditions de travail plus sereines. Ils aiment leur travail, mais il doit pouvoir rester attractif, en particulier lorsque le pays voisin met progressivement en place des conditions de rémunération qui réduisent l’écart avec celles de notre pays. Ce métier perd en attractivité.

Les structures de santé monégasques peinent de plus en plus à recruter, notamment à cause des problèmes d’accessibilité à Monaco, que ce soit en voiture ou en train : que faire ?

Nous devons travailler sur l’accueil, par exemple pour les accès à des places de stationnement proches, et surtout donner envie au personnel soignant de rester dans nos structures. C’est une priorité qui le sera encore plus lorsque le nouvel hôpital sera livré. Il s’agit de faire le point rapidement, pour identifier avec le secteur de la santé des meilleures pratiques pour attirer des soignants.

Et pour le secteur libéral ?

Cela vaut également pour le secteur libéral : il nous est parvenu des témoignages de manque d’infirmiers libéraux masculins à Monaco, pour prendre en charge des patients aux pathologies lourdes à domicile. Nous devons travailler sur ces aspects. C’est impératif, car il en va à la fois de notre qualité de vie, de notre tissu social et de notre attractivité.

Que faire face au manque de lits en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) à Monaco ?

Dans le même sens, l’hébergement des personnes âgées dépendantes doit être développé. L’allongement de la durée la vie, et c’est heureux, doit être également mis en avant. Les rencontres que nous avons avec les Monégasques montrent que nous devons réajuster rapidement nos pratiques. Encore faut-il définir des priorités urgentes, et trouver des solutions à mettre rapidement en place pour pallier les pénuries actuelles.

Economie

Quelles sont vos propositions pour l’économie monégasque ?

Monaco a fait face à la crise du Covid, parfois mieux qu’ailleurs, et les résultats économiques sont là. Un grand bravo à nos entreprises, à nos salariés, à nos fonctionnaires et agents publics dans le rebond de notre économie et, bien sûr, au soutien de l’Etat. Comme je l’ai dit, il convient maintenant de faire face à de nouveaux défis, d’anticiper leurs conséquences, et, en particulier, aux nouveaux concurrents du pays, éloignés ou pas. Nous devons donc continuer à nous adapter à cette mutation fondamentale du monde. C’est vrai pour les entreprises, c’est vrai aussi pour le commerce.

Avec un chiffre d’affaires record de 8,7 milliards d’euros publié en septembre 2022 par l’Institut monégasque de la statistique et des études économiques (IMSEE), comment Monaco peut-il encore faire mieux ?

Nous devons aussi définir de nouveaux métiers à valeur ajoutée. Je pense à la recherche, notamment. Je rappelle aussi que notre commerce extérieur est fort, et que cela montre le dynamisme des entreprises. D’ailleurs, on le voit, avec nos 60000 salariés : c’est considérable. Notre taille est un atout : elle encourage notre agilité et notre réactivité.

Faut-il réformer le mode de fonctionnement du fonds de réserve constitutionnel ?

Le fonds de réserve constitutionnel est un élément fantastique de notre pays. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une réserve. Il s’agit surtout de travailler sur la partie liquide du fonds de réserve constitutionnel, car c’est elle qui définit les marges de manœuvre. C’est l’occasion de réaffirmer que le fonds de réserve doit être géré avec prudence. Faut-il rappeler qu’en 2003, cette partie liquide permettait de faire face à 4,5 années de dépenses ordinaires de l’État. En 2021, elle est en mesure de n’en financer plus que 2,5 années.

« Le rythme d’utilisation des liquidités de notre fonds de réserve constitutionnel doit être vu avec prudence. D’autant que notre indicateur doit alarmer : sur la même période, l’État pouvait faire l’acquisition de 148 000 m² à Monaco. Aujourd’hui, ce ne sont plus que 48 000 m². Cela n’a rien à voir avec la qualité de gestion du fonds, mais seulement du changement de l’économie »

Le rythme d’utilisation des liquidités doit donc être vu avec prudence. D’autant que notre indicateur doit alarmer : sur la même période, l’État pouvait faire l’acquisition de 148 000 m² à Monaco. Aujourd’hui, ce ne sont plus que 48 000 m². Cela n’a rien à voir avec la qualité de gestion du fonds, mais seulement du changement de l’économie. C’est dans cette perspective que nous abordons la question des emplois de demain : ils seront la clé de voûte de la diversification de notre économie, et donc de recettes fiscales supplémentaires qui pourront venir l’abonder, et ainsi rester en phase avec notre dogme du « 0 dette ». La crise du Covid l’a montré : nous n’avons pas eu recours à l’endettement pour financer notre modèle social, et protéger nos salariés et nos entreprises.

Quels sont les grands chantiers dans lesquels l’Etat monégasque va ou doit investir pour cette mandature 2023-2028 ?

Le grand chantier, si j’ose dire, est à la fois de s’assurer de la construction de logements pour les Monégasques et les enfants du pays. Et, dans le même temps, de donner la priorité à la qualité de vie dans le pays sur les questions de circulation, de bruit, de l’air. Bref, donner envie de vivre à Monaco. L’autre grand chantier, c’est évidemment de réfléchir à des projets structurants pour notre pays : repenser nos quartiers pour recréer des lieux de vie et, partant, renforcer notre tissu social. Mais aussi, faire de Monaco un endroit agréable pour nos compatriotes, nos résidents, nos salariés, et les touristes.

Jeunesse

Que proposez-vous pour les jeunes ?

Il est clair qu’avec les principes de notre démarche, la jeunesse est le point clé. D’abord, il faut reconnaître l’excellence de l’éducation à Monaco. Je saisis l’occasion de cette tribune pour féliciter et remercier tous les acteurs de l’éducation nationale, qui, par leur travail, hissent les établissements scolaires de la principauté parmi les meilleurs. Toutefois, il convient de la compléter, à l’égard à ce qu’il se passe dans le monde en matière d’éducation, et qui doit être relié au travail à distance, soudain devenu un concurrent pour l’ensemble du travail mais, plus encore, pour les jeunes.

Comment donner davantage de chances de réussite aux jeunes monégasques, que ce soit en principauté ou à l’étranger ?

Un complément de formation est nécessaire, au-delà des apprentissages naturels développés chez les jeunes : un esprit critique qui leur permettra de choisir par eux-mêmes les offres proposées par les réseaux sociaux, entre autres, en complément, évidemment, de la formation par les familles qui sont les mieux placées pour leurs enfants. L’esprit critique accompagné devrait permettre aux jeunes, dans un premier temps, de s’auto-alerter sur les conséquences du harcèlement sous toutes ses formes. Il me paraît sans doute plus long et plus efficace que d’interdire. Il convient également de développer à l’école les concepts « d’apprendre à apprendre », ou encore « apprendre à comprendre ». De plus, il va falloir favoriser aussi les stages, les voyages à l’étranger, non seulement pour découvrir le monde, mais aussi pour y acquérir de l’expérience et rencontrer les autres cultures. Ces opportunités permettront à notre jeunesse d’apporter un vrai plus à notre pays.

« Certaines entreprises ont peur d’embaucher des Monégasques, comme d’autres ont peur de participer aux élections ! Voilà pourquoi l’investissement dans la formation montrera aux chefs d’entreprises, et aux recruteurs, qu’un Monégasque, c’est une force humaine formidable pour leur entreprise »

Comment permettre aux jeunes monégasques de mieux accéder au secteur privé à Monaco ?

Evidemment, nous souhaitons que les Monégasques trouvent leur place dans le secteur privé. Si je puis me permettre un parallèle, certaines entreprises ont peur d’embaucher des Monégasques, comme d’autres ont peur de participer aux élections ! Voilà pourquoi l’investissement dans la formation montrera aux chefs d’entreprises, et aux recruteurs, qu’un Monégasque, c’est une force humaine formidable pour leur entreprise. En réalité, il s’agit de préserver le principe de priorité nationale, en le renforçant par l’acquisition des compétences de demain.

Justice – sécurité

Quelles sont vos propositions concernant la justice et la sécurité à Monaco ?

La sécurité dans notre pays est un élément essentiel de notre attractivité, mais aussi de la qualité de vie qui en résulte. Il faut saluer l’engagement et le dévouement de nos forces publiques, qui veillent sur nous 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Culture

Quelles sont vos propositions concernant la culture à Monaco ?

D’abord, il convient de souligner qu’avec environ 5 % du budget de l’État, la culture a une place forte à Monaco, avec une notoriété internationale pour nos institutions culturelles. Je n’y reviens pas, d’autant que, comme je l’ai souvent dit, « la culture est un investissement et non une dépense ». Je voudrais surtout insister sur l’aide et l’amélioration que nous devons apporter aux associations. Elles sont la culture au quotidien. Elles font, si j’ose dire, un travail de fourmi, moins visible.

Pourquoi ?

Il suffit de regarder et de suivre comment les différents ateliers de théâtre, de danse, de chant — et je ne suis pas exhaustif — permettent à chaque participant un développement personnel que l’on souhaiterait voir partout. « Travailler avec d’autres, apprendre un texte, répéter une chorégraphie, un comportement, se coordonner avec les autres… », c’est une rencontre formidable avec la vie, et un développement en complément de l’école et des parents évidemment.

Et pour le théâtre ?

En ce qui concerne le théâtre, développé par plusieurs associations plus ou moins grandes, c’est un public formidable qui participe aux représentations. Il serait souhaitable, et c’est notre proposition, de créer un théâtre national de Monaco qui permette de coordonner, de consolider, et de développer ce magnifique art, au même titre que les grandes institutions internationales que nous connaissons tous.

« Il serait souhaitable de créer un théâtre national de Monaco qui permette de coordonner, de consolider, et de développer ce magnifique art »

Qualité de vie – écologie

Quel tableau dressez-vous de l’évolution de la qualité de vie à Monaco ?

La qualité de vie est évidemment un axe essentiel pour la vie dans le pays et pour l’attractivité. Nous connaissons ce que j’appellerais « les trains qui n’arrivent pas à l’heure ». Alors, évidemment, il ne faut pas le sous-estimer. Cela concerne la mobilité, les nuisances sonores, la qualité de l’air… J’en passe, évidemment. Les nuisances sonores sont abordées avec des précautions prises pour les chantiers. Reste que le développement du pays, avec les constructions, rend chaotique l’objectif. D’autant que, parfois, fermer les fenêtres s’avère insuffisant pour se protéger. Il faudra revoir, avec des experts, comment améliorer la situation.

Et la qualité de l’air ?

Les mesures de la qualité de l’air semblent satisfaisantes. Reste qu’il convient de s’assurer de la pertinence de l’indicateur. Une des causes appartient aussi aux croisières, moins fréquentes. Néanmoins, mais avec un fuel léger, il contribue aux difficultés. Heureusement, la Méditerranée, qui était pratiquement la seule zone au monde non contrôlée, va l’être en 2025. Toutefois, nous ne pouvons ignorer l’impact des croisiéristes sur le commerce, et nous devons travailler à des solutions alternatives.

Comment parvenir à diminuer la fréquence et la durée des bouchons qui asphyxient Monaco le matin et le soir ?

C’est la partie la plus visible, la plus vécue : les embouteillages, quotidiens et quasi permanents. Des actions sont entreprises, comme le covoiturage, qui augmente légèrement. Néanmoins, leur poids est très faible par rapport à la réalité. En revanche, ce qui, à notre avis, est une question forte, c’est le mélange des flux automobiles externes et les flux internes. Les quelque 50 000 véhicules par jour venant et repartant de Monaco aux heures de pointe sont également une question, mais surtout pour les automobilistes eux-mêmes. Quand on met près de trois quarts d’heure pour venir de Nice à Monaco, et presque autant au retour, pour huit heures de travail, c’est un vrai souci. On peut construire des parkings, d’ailleurs insuffisants, et des trémies. Mais la solution évidente, c’est de favoriser et d’augmenter les transports collectifs : train et bus.

Comment jugez-vous la qualité de la desserte de Monaco opérée par les TER de la SNCF, et par les bus des lignes 607 et 608 de la Région Sud ?

Le train, en particulier, peut apporter une grande contribution. Pour ceci une seule règle : « Augmenter leur fréquence aux heures de pointe », c’est-à-dire le matin et le soir. Actuellement il y a quatre trains à l’heure de pointe. Il s’agit clairement de passer progressivement à huit trains par heure dans cette période. Je rappelle qu’à Paris, certes il s’agit du métro, il y a 15 métros à l’heure. Cela veut dire un enjeu de l’ordre de 15 000 véhicules en moins tous les jours. Je rappelle cependant que les pendulaires n’utilisent pas leurs véhicules en journée. Ils ne sont donc pas la cause principale des embouteillages en journée. Cela implique évidemment un changement de comportement dans notre mobilité interne.

Comment mesurer l’efficacité des différentes mesures prises pour améliorer la qualité de vie et pour favoriser l’écologie ?

Dans le même temps, il convient de donner une couleur au budget : le budget vert. Cela veut dire, à l’instar des entreprises, avec le concept Environnement, social et gouvernance (ESG), d’évaluer et mesurer l’impact « durable » des décisions et des actions. Cette pratique permettra, au long cours, d’identifier les progrès écologiques.

Que pensez-vous du projet de création d’une navette maritime Nice-Monaco-Menton ?

Ah la navette maritime ! Elle fait partie des fausses bonnes idées. Il s’agit de se souvenir de l’arrêt des « poissons volants », il y a longtemps. Contrairement à ce que l’on croit en général, la Méditerranée n’est pas une mer calme. Après quelques retards pour le travail, cette navette sera délaissée, sauf pour les touristes. Sans compter la gestion du débarquement des passagers…

Attractivité

Monaco est-il suffisamment attractif, que ce soit pour séduire de nouveaux résidents, des salariés, ou des touristes ?

La question de l’attractivité de Monaco est essentielle. Il s’agit d’un concept global qui charpente notre projet politique. La question est courte, la réponse beaucoup moins. C’est en quelque sorte la réponse à toutes les questions qui ont été abordées jusqu’à présent, que ce soit la qualité de vie et le climat, la technologie, la formation professionnelle, la concurrence, le travail à distance, les questions de société, et, évidemment, la culture. Fondamentalement il s’agit d’attirer de nouveaux talents dans tous les domaines, et de leur donner envie de travailler, de vivre, et de rester dans le pays. Il convient de créer des emplois à haute valeur ajoutée. Et, dans le même temps, de leur donner envie de vivre à Monaco.

« Rendre la principauté plus attractive, implique, entre autres, le logement, et notamment de travailler avec les partenaires sociaux sur les conditions nécessaires à la mise en œuvre de la semaine de quatre jours »

Quelles solutions concrètes adopter pour rendre la principauté plus attractive ?

Rendre la principauté plus attractive, implique, entre autres, le logement, et notamment de travailler avec les partenaires sociaux sur les conditions nécessaires à la mise en œuvre de la semaine de quatre jours. En effet, de plus en plus, vie privée et vie professionnelle doivent se côtoyer. Cela est d’autant plus intéressant qu’une étude récente pour la France dans les entreprises passées à quatre jours par semaine, montre une augmentation de la productivité, et une baisse de l’absentéisme. Ce passage à la semaine de quatre jours apparaît un saut nouveau dans l’organisation du travail. Nous proposons donc d’organiser un débat sur l’avenir du travail à Monaco, qui englobe ce concept, mais aussi d’autres, en réunissant les acteurs économiques, les partenaires sociaux, des experts, et le gouvernement. Au final, il appartiendra aux partenaires sociaux de tracer les contours de cette proposition du travail à Monaco demain. Je le rappelle, il s’agit de démocratie sociale.

Débat démocratique et vie politique

Trois listes de 24 candidats engagées en février 2018, seulement deux listes, dont une de 14 candidats, en 2023 : pourquoi les Monégasques semblent-ils se désengager de la vie politique de leur pays ?

Je ne crois pas que les Monégasques se désengagent de la vie politique. Les compatriotes que nous rencontrons sont unanimes, si j’ose dire : ils sont heureux de notre présence aux élections. Constituer la liste des NIM n’a pas été simple. Mais nous sommes arrivés à rassembler 14 candidates et candidats autour d’un projet : quel Monaco voulons-nous offrir aux enfants qui ont 10 ans aujourd’hui ? Concernant la participation à la liste, c’est autre chose. Quand bien même c’est la première fois que je participe directement à la création d’une liste, je ne m’attendais absolument pas à rencontrer une peur infondée, ou réelle, qui rend compliquée la constitution d’une liste de 24 candidats. Le calcul est simple : pour deux listes, il faut trouver 48 candidats. Pour trois listes… Comme vous pouvez le constater, les nouveaux entrants sont en petit nombre, également dans la liste d’Union.

Cela vous étonne ?

Ce n’est malheureusement pas un hasard. D’abord, comme dans tout village, une partie de la population s’inquiète du « qu’en-dira-t-on ? ». Personne n’y peut rien. En revanche, pour les autres, les pressions, réelles ou imaginées, l’emportent de façon épouvantable sur le débat politique. Globalement, on peut configurer Monaco en trois pôles. Le pôle de l’administration, celui de la Société des bains de mer (SBM), et celui des professions indépendantes. Pour ces dernières, très souvent, comme nous étions 14 alors, la peur vis-à-vis de leurs clients a pris le pas sur la politique.

Et pour les deux autres pôles que vous citez ?

Dans les deux autres cas, la pression des chefs, directe ou imaginée, est extrêmement importante. Ceci n’est pas acceptable. Voilà pourquoi je me suis permis de rappeler Hergé (1907-1983) en 1929, avec Tintin au pays des Soviets. Du point de vue sociologique, c’est le pire. La pression est imaginée. Comment est-ce possible ? Alors, il y a des cas, bien réels, pas besoin de les citer, qui montrent que cette crainte n’est pas uniquement psychologique. Pour les prochaines élections, nous devons absolument réfléchir à un recours indépendant pour tous ceux qui souhaiteraient faire de la politique, et appartenir à une liste.

Nouvelles idées pour Monaco

Tête de liste : Daniel Boeri

NIM Trombinoscope Monaco Hebdo