vendredi 29 mars 2024
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Cap sur 2013

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Le Conseil National
© Photo Monaco Hebdo.

Pour les forces en présence pour les élections de février 2013, le compte à rebours est lancé. Après l’assemblée générale de R&E, celles de l’UDM et de l’UP, le 29 mars et le 17 avril, donneront le ton de la bataille électorale. Et permettront de jauger les forces en présence.

Moins d’un an avant les élections nationales de février 2013, les formations politiques qui se présenteront devant les Monégasques sont déjà dans les starting-blocks. « Nous sommes à 11 mois du but. Je suis prêt. Votre mouvement est en ordre de marche », a ainsi lancé Laurent Nouvion, lors de l’assemblée générale de Rassemblement & Enjeux. Le 15 février dernier, l’opposition a clairement affiché ses ambitions électorales, dénigrant le « bilan politique et humain » de la majorité UDM, qualifié par Laurent Nouvion de « chemin de ruines depuis 2008. » Au Novotel, 200 sympathisants et adhérents avaient fait le déplacement pour entendre une attaque en règle contre leurs adversaires?: « La majorité est à bout de souffle. Affrontement, exclusion, crise, anathème. Cette législature se termine dans une précipitation législative. Dans le passage en force sur tous les thèmes, sans débat, sans confrontation d’idées », a critiqué un Laurent Nouvion optimiste sur l’échéance de 2013.

AG test
Aujourd’hui, c’est une autre assemblée générale qui se prépare. La première de l’Union des Monégasques. Il y a un an, 11 conseillers nationaux UP avaient claqué la porte du mouvement présidé par Anne Poyard-Vatrican pour fonder l’UDM. Et pour cause. Depuis le départ de Stéphane Valeri pour le gouvernement début 2010, ça battait sérieusement de l’aile à l’UP. La crise interne dans le premier parti politique de la Principauté, au départ latente, s’est intensifiée au fil des mois, au point d’aboutir à une scission du mouvement. Guerre de succession à la tête de l’assemblée (entre Poyard et Robillon), divorce avec l’Unam, tensions autour de l’organisation ou non de primaires, immobilisme du parti… Autant d’ingrédients qui ont conduit, début 2011, les « schismatiques » à voler de leurs propres ailes. « Pour nous, cette crise a été un élément déclencheur qui nous a permis de renverser la tendance. On est passé de la position logique de challenger ultra-minoritaire au conseil national à celle de première force du pays », analyse Jean-Charles Allavena, vice-président de R&E.
S’il est évident que l’opposition parlementaire a marqué des points ces derniers mois, en l’absence de sondages à Monaco, il est impossible d’établir un classement des formations politiques. C’est pourquoi l’assemblée générale de l’UDM est capitale. Elle permettra de jauger la force d’un parti né il y a un an. Combien pèse aujourd’hui l’UDM auprès de la population?? A quelques mois des élections nationales, c’est en effet une des inconnues de l’équation. Son président actuel Alexandre Bordero annonce 450 adhérents, disputant à R&E la première place dans le paysage politique monégasque. A voir. On verra bien si c’est le cas au Monte-Carlo Bay le 29 mars au soir… Ce qui est certain, c’est que si l’on ajoute les près de 450 adhérents revendiqués par R&E, les 349 affichés par l’UP et tous ceux qui seraient « encartés » à l’Unam ou à Synergie monégasque, en plus de ceux qui se déclarent « indépendants », Monaco, avec à peine 8?000 Monégasques, serait proportionnellement l’un des Etats les plus politisés au monde… « Il n’est pas exclu que certains gens prudents prennent leur carte dans les deux camps pour être sûr d’être du côté des vainqueurs », reconnaît Jean-Charles Allavena, pour qui tout de même « l’opportunisme a ses limites… »

Retrouver le terrain
Depuis un an, l’UDM estime avoir accompli un travail de terrain pour rétablir le lien avec la population. Et supplanter ainsi l’UP dans le cœur des Monégasques. Lancement d’une tribune politique (comme R&E), organisation de cafés citoyens sur des thèmes porteurs (SBM, commerce, qualité de vie, etc)… Premier parti de la majorité sortante, l’UDM peut de plus miser sur la communication liée aux actions du conseil national et de la légitimité du président Robillon. Ce qui n’est guère négligeable en terme de visibilité. Surtout en période électorale. Dans ce combat médiatique, l’UP semble esseulée. D’autant que R&E a sorti une véritable machine de guerre, associant communication traditionnelle et 2.0. En dehors des interventions publiques ou médiatiques de sa présidente Anne Poyard-Vatrican (l’autre élue UP Brigitte Boccone-Pagès étant devenue pour le coup très discrète), du côté de l’UP, c’est plutôt le silence radio. En dehors d’une réunion sur la loi sur la nationalité et bientôt d’une autre le 4 avril prochain à la Chaumière, sur l’avenir de la Société des bains de mer, les rendez-vous politiques ont étés réduits à la portion congrue.

Rapports de force avec l’UP
C’est pourquoi le 17 avril représentera un autre test grandeur nature?: l’UP historique organise elle aussi son AG au Novotel. Anne Poyard-Vatrican sera-t-elle la seule candidate à sa réélection?? Pour l’heure oui mais « tout adhérent peut faire acte de candidature pour devenir membre du comité directeur et être élu le jour de l’AG. Nous sommes un parti démocratique et non autoproclamé », indique sa présidente. Une présidente qui affirme ne pas craindre la comparaison du nombre d’adhérents. Selon Anne Poyard-Vatrican, l’UP n’aurait pas subi d’hémorragie?: « A part deux démissions liées à des nominations au sein du gouvernement, un adhérent et un salarié du conseil national qui a dû démissionner sous la pression, la création de l’UDM n’a pas eu d’impact. » Une position qui frôle l’aveuglement pour les élus UDM. Peu importe pour Anne Poyard-Vatrican?: « Je comprends que les nouveaux partis aient à cœur de bomber le torse et de compter les adhérents. Je laisse à d’autres le soin de jauger les forces en présence, et d’en tirer des enseignements fumeux qui auront bien peu de valeur dans 12 mois. Voyez donc ce qui se passe en France pour les Présidentielles… » Avant d’affirmer?: « Pour l’UP, l’enjeu n’est pas là. Nous nous recentrons sur nos valeurs fondatrices, les lignes conductrices, la volonté d’agir, la capacité de réalisation pour construire un nouvel avenir pour les monégasques. » En clair, pas question de faire l’élection avant l’élection.

Clarté
Certes. Pourtant, comment penser que l’état des forces en présence ne jouera pas un rôle primordial pour les élections de février 2013?? Après des divorces et remariages à gogo au sein de la majorité, avec pour dernier épisode en date le rapprochement entre UDM et Unam, les Monégasques ont besoin de retrouver un peu de clarté. Aujourd’hui, on ignore encore si avant 2013, la majorité actuelle retrouvera les frontières passées (en clair, en ajoutant l’UP, l’UDM et l’Unam). Même si lorsqu’on écoute Anne Poyard, cela semble mal engagé.
Seule certitude?: le rapprochement entre UP et Unam semble se confirmer. Le 3 avril prochain, lors de l’ouverture de la session qui procèdera à la réélection du président du conseil national Jean-François Robillon, Claude Cellario devrait retrouver la présidence de la commission de législation. Même si ce dernier affirme « ne pas avoir été approché ». Alors que Michèle Dittlot vient de retrouver la tête de la commission Culture, cette relève d’un UDM (Gardetto) pour un Unam devrait contribuer à entériner un accord électoral pour une liste commune en 2013. D’ailleurs Claude Cellario, président de l’Unam ne s’en cache pas?: « Élue sur la liste d’union UPM en 2008, fidèle aux engagements pris devant les monégasques, l’Unam se situe dans la majorité du conseil national. Pour les prochaines échéances nationales, elle fera partie d’une liste d’union aux côté de l’UDM. » Pour les modalités et le nombre de candidats Unam, que Nouvion avait qualifié d’« opportuno-centristes », c’est encore trop tôt pour le dire. En attendant, la majorité aura sans doute à gérer les négociations avec un autre groupe?: celui des « indépendants ». Constitué des élus Pierre Svara et Philippe Clérissi, mais aussi de Bernard Pasquier, président du Parti monégasque, en sommeil depuis 2008, il pourrait compter dans les discussions finales. Pour Claude Cellario, « les prochaines élections sont l’occasion d’un nouveau départ dans la vie politique de notre pays. Il est souhaitable de rassembler, au delà de toute exclusive, tous ceux qui nous ont soutenus en 2008 et plus. » Oui mais jusqu’où??

Alexandre Bordero et Jean-Sébastien Fiorucci
Alexandre Bordero?: « Ce sera un programme UDM présenté par un socle UDM. Notre objectif est de présenter en octobre notre liste ainsi que les grandes idées du projet. » © Photo DR

L’UDM change de tête

C’est la surprise de la semaine. Jean-Sébastien Fiorucci, chef de cabinet du président du conseil national Jean-François Robillon, est candidat à la présidence de l’Union des Monégasques. En exclusivité pour Monaco Hebdo, et à la veille de l’assemblée générale de l’UDM, Alexandre Bordero et son successeur s’expliquent sur cette passation de pouvoir. Et évoquent le calendrier de la campagne pour les élections de 2013. Interview relue et amendée.

PASSATION DE POUVOIR


Monaco Hebdo?: L’assemblée générale de l’Union des Monégasques (UDM) sera pour vous le moment de jauger la force du mouvement en terme de mobilisation des adhérents, notamment deux semaines avant celle de l’UP??
Alexandre Bordero?: L’état du mouvement, on le connait. Nous sommes arrivés, après un an d’existence, à 450 adhérents à jour de cotisation. Nous ne sommes pas partis de 0. La moitié sont des anciens adhérents de l’UP et l’autre moitié est faite de nouveaux adhérents. C’est la preuve que nos 10 élus représentent une part significative de la population… L’UDM, née en 2011, est jeune et ce sera notre première assemblée générale. Nous allons bientôt élire un comité directeur de 24 personnes, signe de l’engagement de nos adhérents dans notre mouvement.

M.H.?: Comme vous, R&E revendique aussi près de 450 adhérents et donc d’être la première force politique du pays. Mais en même temps, que ce soit de votre côté comme du leur, personne ne peut vérifier…
Jean-Sébastien Fiorucci?: Je pense que l’UDM est clairement la première force politique du pays. Quand les élus ont quitté l’UP, l’UP avait encore 380 adhérents… Il est certain que la seule manière de vérifier notre comptage serait de publier la liste des adhérents mais ce n’est pas dans nos méthodes.

M.H.?: L’AG permettra d’élire le comité directeur qui, lui-même, élira le président de l’UDM dans les jours qui suivent. Pouvez-vous annoncer quelques noms??
J.S.F.?: Claude Cottalorda, contrôleur général des dépenses qui part à la retraite au 31 mars, en fait partie. Il remplacera probablement Pierre Lorenzi en tant que trésorier de l’UDM. Nous pouvons également citer Pascale Olivié-Dastakian, Jean-Michel Cavallari, Josette Gauthier et Jean-Pierre Gasparotti. Ce sont des figures connues et respectées de la communauté monégasque, que nous sommes fiers d’accueillir.

M.H.?: Alexandre Bordero, il se murmure que vous allez passer la main pour la présidence de l’UDM. Pourquoi??
A.B.?: J’avais pris la présidence de l’UDM lors de la création du mouvement l’an passé. Ma mission était de porter le mouvement sur les fonts baptismaux, et c’est ce que j’ai fait. Cette mission étant accomplie, nous pouvons entamer une nouvelle phase de la vie de l’UDM. Pour ma part, je reste évidemment très actif au sein du mouvement, mais je suis aussi président de la commission des finances du conseil national, et la fin de l’année va être particulièrement chargée. Nous devons donc nous répartir les tâches. Je rappelle d’ailleurs qu’en 2007, avant les élections, Jean-Michel Cucchi, alors président de la commission des finances, avait agi de la même manière et laissé la présidence de l’UP à Gérard Bertrand.
J.S.F.?: A l’UDM, nous ne voulons pas d’une personnalisation excessive des rôles. Le président joue un rôle d’animateur du mouvement, mais tout le monde peut s’exprimer, et nous n’aimons pas focaliser le débat autour d’un « leader maximo ». On accepte la confrontation et le dialogue entre gens talentueux et respectueux.

M.H.?: Jean-Sébastien Fiorucci, vous êtes candidat à la présidence. Vous êtes le seul??
J.S.F.?: Je suis en effet le seul candidat à ce jour, mais il est possible pour tout membre du comité de se présenter d’ici la décision du comité directeur. En fait, nous sommes tous engagés dans la constitution d’une équipe, et l’élection du président n’est qu’une étape parmi d’autres.

M.H.?: Si vous êtes élu à la tête de l’UDM, vous savez parfaitement que l’opposition va fustiger une politisation du conseil national et crier à la confusion des genres. Votre fonction de chef de cabinet du président de l’assemblée est-elle compatible avec celle de président de l’UDM??
J.S.F.?: Pendant deux ans, j’ai été à la fois chef de cabinet ou faisant office de (sous les présidents Valeri puis Robillon) et membre du comité directeur de l’UP. A l’époque, personne, y compris dans l’opposition, n’a jamais rien trouvé à y redire. De plus, il n’y a aucune incompatibilité légale pour qu’un chef de cabinet du conseil national devienne le président d’un mouvement politique qui n’est qu’une association…
A.B.?: Depuis quelques années, au conseil national, il y a un secrétaire général, qui occupe une fonction administrative et qui dirige les services sous l’autorité du président et un cabinet politiquement lié au sort du président et de sa majorité.
C’est une chose qui se fait partout. Le chef de cabinet du premier ministre d’Irlande du Nord est président de son parti, Eric Ciotti, alors directeur de cabinet d’Estrosi, dirigeait la section locale de l’UMP…

M.H.?: Peut-être mais vous ne pouvez pas nier qu’à Monaco, c’est une première?!
A.B.?: Ce qui est nouveau, c’est que la transparence soit faite… Car cette situation existait dans le passé mais personne ne le disait. Quand nous sommes arrivés en 2003, le secrétaire général de l’ancienne majorité a démissionné car il ne souhaitait pas travailler avec la majorité UPM… Et ça se comprend. On ne peut pas être proche d’un élu et être neutre. D’ailleurs, l’ancien chef de cabinet (Anne Eastwood) a suivi au gouvernement l’ancien président du conseil national (Stéphane Valeri).
J.S.F.?: L’engagement politique n’est pas un défaut honteux. J’ai des convictions que je mets au service du président du Parlement. C’est ça, la vie parlementaire.

M.H.?: Vous avez déjà été attaqué comme chef de cabinet très influent auprès de Jean-François Robillon. Cette passation de pouvoir ne peut être que polémique…
J.S.F.?: Si l’on m’attaque parce que je connais parfaitement les dossiers et que j’épaule efficacement Jean-François Robillon, c’est plutôt pour moi un motif de fierté?! Le reste n’est que polémique stérile et attaques personnelles, indignes des vrais enjeux de Monaco et sans intérêt pour nos concitoyens.

ELECTIONS 2013

M.H.?: En tant que futur président de l’UDM, vous gagnez en visibilité. Est-ce un strapontin pour les élections de 2013?? Et encore une fois, est-ce compatible avec vos fonctions au cabinet??
J.S.F.?: A ce jour, je ne suis candidat qu’à la présidence de l’UDM. Ma candidature aux élections n’est pas à l’ordre du jour, même si j’y réfléchis. C’est un choix engageant à titre personnel. Si je devais être candidat, je quitterais bien entendu mes fonctions de chef de cabinet, car une campagne exige une disponibilité totale.

M.H.?: Côté programme, vous avez avancé??
J.S.F.?: Chaque jour, nous sommes à pied d’œuvre pour améliorer le quotidien des Monégasques. Notre premier programme, c’est de poursuivre cette action qui a porté ses fruits. Mais nous voulons aussi profiter des mois qui viennent pour nous mettre à l’écoute de nos concitoyens. Nous ferons donc la synthèse des cafés citoyens que nous avons organisés pour formuler des propositions sur les questions sociales qui intéressent prioritairement les monégasques?: le logement, l’éducation, l’emploi des jeunes, la santé, la SBM. Mais aussi sur les finances publiques. Bien évidemment, le logement restera au cœur de notre programme. Nous sommes d’ailleurs les plus crédibles sur cette question et les seuls à avoir fait des propositions. Officiellement, le programme sera débattu au sein du comité directeur qui sera élu jeudi.
A.B.?: Ce sera un programme UDM présenté par un socle UDM. Notre objectif est de présenter en octobre notre liste ainsi que les grandes idées du projet.

M.H.?: R&E a fait des propositions d’opérations mixtes impliquant des logements pour les Monégasques??
J.S.F.?: Ce n’est pas le rôle d’un parti politique de promouvoir les opérations de promoteurs même s’il y a des intérêts financiers… On a l’impression pénible que pour R&E, l’identité monégasque se résume au béton, et encore au béton de grand luxe. C’est complètement décalé et ce n’est pas notre façon de voir les choses.
A.B.?: R&E propose de plus un immeuble avec uniquement des deux pièces. Il faut leur dire que c’est déjà prévu?: c’est l’opération Tamaris à laquelle ils s’étaient d’ailleurs opposés…

M.H.?: Vous n’allez pas partir seuls aux élections?? Vous allez pactiser à nouveau avec l’Unam voire l’UP et le groupe d’indépendants formé par Philippe Clérissi, Bernard Pasquier et Pierre Svara??
A.B.?: Nous avons un comité directeur de 24 personnes mais tout le monde ne se présentera pas. Nous comptons rassembler toutes les forces progressistes de la Principauté en formant une alliance avec différents partenaires comme l’Unam et des indépendants.

M.H.?: Anne Poyard-Vatrican, la présidente de l’UP, affirme qu’elle songe présenter une liste aux élections même si elle n’exclut aucune hypothèse. Une alliance dans ces conditions est-elle envisageable??
A.B.?: Nous, nous sommes ouverts. Nous verrons bien ce qui se passera. Au-delà des questions d’alliances électorales, notre priorité est de rétablir le lien avec les Monégasques. C’est ce que nous avons fait depuis un an. Quand nous étions encore à l’UP, ce lien avait été coupé car il n’y avait plus aucune réunion publique en dehors de l’AG annuelle obligatoire. Aujourd’hui nos cafés citoyens réunissent à chaque fois entre 60 et 80 personnes, et ce ne sont pas toujours les mêmes, au contraire c’est une grande variété de gens.
J.S.F.?: Les valeurs de l’UDM sont claires et connues. Nous tendrons la main le moment venu à ceux qui les partagent. En attendant, nous nous occupons des Monégasques. Cela fait un an qu’on travaille sur le terrain. Quel mouvement politique à Monaco peut se vanter d’avoir organisé 7 réunions publiques en une année?? La cuisine électorale est le cadet de nos soucis et ce n’est pas autour de petites manœuvres qu’on rassemblera nos concitoyens.

M.H.?: Il y a tout de même un principe de réalité. Trois listes c’est trop dans le système électoral actuel qui pousse à une bipolarisation de la vie politique?? Et cela pénaliserait l’UDM??
J.S.F.?: Tout est possible. On peut imaginer une liste des ennemis de Robillon comme il y a eu une liste des ennemis de Valeri en 2008… Nous avançons sur notre chemin et nous verrons bien comment s’organise la donne électorale. Il est bien trop tôt pour nous y intéresser.

ELECTION AU CONSEIL NATIONAL

M.H.?: Le 3 avril, le conseil national va élire son président et renouveler les présidences de commission. Jean-Charles Gardetto ne peut conserver la double présidence de la législation et des Relations extérieures. Signe d’alliance avec l’Unam, vous avez déjà cédé la présidence de la commission culture à l’Unam Michèle Dittlot. Allez-vous faire de même avec Claude Cellario pour la législation??
J.SF.?: Jean-Charles Gardetto va en effet quitter la présidence de la commission législation. Comme il l’a déjà déjà laissé entendre dans vos colonnes il n’est pas exclu que Claude Cellario lui succède.

M.H.?: Pour R&E, le bilan de la majorité ressemble à « un champ de ruines ». Sa division a en tout cas perturbé bon nombre de Monégasques qui ne comprennent rien au feuilleton des divorces et remariages de l’UDM, l’UP et l’Unam??
J.S.F.?: De quoi l’opposition parle-t-elle lorsqu’elle parle d’un « champ de ruines »?? De la légalisation dans certains cas extrêmes de l’interruption médicale de grossesse, de la loi sur les violences particulières, de l’égalité dans la transmission de la nationalité ou de l’instauration du contrat habitation-capitalisation?? Pour nous au contraire, ce sont des avancées de l’intérêt général et de la justice. Mais l’intérêt général n’est peut-être pas la priorité de l’opposition. Chacun sa vision des choses.
A.B.?: Nous avons vécu une recomposition du paysage politique, c’est vrai. Cela arrive périodiquement. Désormais, la stabilité est revenue.

M.H.?: Selon l’opposition, le contrat habitation-capitalisation est un flop qui ne peut intéresser que leurs sympathisants??
J.S.F.?: Est-ce à dire qu’il n’intéresse que les riches?? (sourire)
A.B.?: 500 foyers en ont bénéficié. Le CHC concerne donc au minimum 1?500 Monégasques. Il y a pire comme flop?!

M.H.?: Vous ne craignez pas que R&E ait gagné du terrain, notamment en avec des prises de positions musclées sur Odéon ou en ne votant pas le budget??
A.B.?: D’abord sur Odéon, je tiens à rappeler que tous les élus ont voté la loi de désaffectation. L’Etat avait deux terrains minables inutilisables. Or, cette opération va permettre de construire 177 appartements pour les Monégasques?! Le problème de l’Odéon, c’est que l’équilibre du contrat a été modifié après le vote de la loi de désaffectation. Ne pas voter le budget rectificatif à ce moment là n’aurait servi à rien puisque l’opération était financée hors budget, par le fonds de réserve…

M.H.?: Pourtant la majorité a souvent menacé de ne pas voter le budget??
J.S.F.?: Est-ce qu’on emploie l’arme atomique pour écraser une mouche?? Si je prends le dernier budget pour exemple, pouvait-on vraiment voter contre le budget parce que le gouvernement est passé outre l’avis des élus qui s’étaient prononcés contre le tunnel descendant alors que cela aurait empêché de facto les autres avancées de ce budget comme la revalorisation du pouvoir d’achat des fonctionnaires?? Etre un responsable politique, c’est savoir établir les priorités, et non pas tout mélanger par seul souci de faire des coups médiatiques.
A.B.?: Voter contre un budget équivaut dans d’autres pays à la censure du gouvernement. Ce qui n’intervient que pour des affaires rares et graves.

RETRAITES

M.H.?: Etes-vous prêt à voter le projet de loi de réforme des retraites en septembre??
A.B.?: Nous ne connaissons toujours pas la teneur de ce projet, qui fait bondir patronat et syndicats. Je ne vais donc pas faire de politique fiction sur un sujet très technique et complexe.
J.S.F.?: La réforme des retraites ne fait pas partie du programme de la majorité. Nous n’avons donc aucune pression politique à ce sujet. Nous devons répondre à d’autres exigences comme le code de l’économie, que le gouvernement n’a toujours pas déposé alors que le Ministre d’Etat avait annoncé que nous l’aurions avant la fin 2011. Ce code doit être au mieux déposé en mai pour que nous puissions le voter avant la fin 2012. Ce qui semble acquis, c’est que la session extraordinaire de juillet n’aura pas lieu.

Anne Poyard-Vatrican
Anne Poyard-Vatrican © Photo Darasse.

Deux ou trois listes pour 2013??

Pour les composantes de l’ancienne majorité divisée UPM, doubler les listes est un pari risqué pour 2013. Une réconciliation entre UP et UDM est-elle vraiment impossible??

Certains élus UDM l’admettent sans détours. Realpolitik oblige, la réconciliation avec l’UP est inévitable?: « Avec deux listes en lice en 2013, on gagne. On n’a pas d’autres choix que de faire front commun ». Un avis partagé à l’UP par le militant Jo Déri?: « Si on veut avoir une chance d’être majoritaire l’année prochaine, une liste commune et unie des différentes composantes UDM, UP, Unam et indépendants, est indispensable. Et je pense que cela devrait se concrétiser. D’autant que l’UP ne pourrait même pas, matériellement, présenter une liste de 13?! »

Discussions tendues
Si aujourd’hui, personne ne peut se targuer de savoir qui l’emportera en 2013, un constat s’impose. La loi électorale de 2002, qui donne une position ultra-dominante à la majorité issue des urnes, pousse à une bipolarisation de la vie politique. Et ne pardonne aucun éclatement des voix dans un camp. L’expérience l’a encore montré lors des dernières élections de 2008 où 3 listes s’étaient affrontées. Avec pour résultat une liste UPM ultra-majoritaire avec 52 % des suffrages (21 sièges au conseil national), une liste R&E ramassant les miettes avec 40,5 % des voix (3 sièges) et la troisième, Monaco Ensemble, exclue du jeu de facto. A l’époque, Stéphane Valeri avait annoncé que la majorité réélue modifierait la loi électorale avant la fin du mandat pour la rendre plus équitable. Cela semble aujourd’hui exclu d’ici à 2013…
Pour autant, si du côté de l’UDM, on ouvre grands les bras à d’éventuelles négociations, Anne Poyard-Vatrican, elle, freine des quatre fers?: « L’UP va faire ce qu’elle sait faire et a déjà réussi brillamment en 2003 et 2008?: rassembler les personnes que ce soit au sein même de l’UP ou au sein d’autres groupes proches par les idées pour présenter une équipe de 24. » Quand on évoque une stratégie de réconciliation avec l’UDM, la présidente de l’UP est très claire?: « Si certains sont très préoccupés par « qui se marie avec qui » grand bien leur fasse?! D’ailleurs, je vous rappelle que ce sont les membres de l’UDM qui ont quitté l’UP. Aujourd’hui, l’UP propose un travail sur une communauté d’idées et les moyens de les mettre en œuvre. La porte est ouverte pour ceux qui le souhaitent. » Ce qui augure des discussions tendues avec l’UDM… Dans ce contexte, pour le militant historique Jo Déri, il n’y a qu’une solution pour la paix des ménages?: que ce soit l’ancien président de l’UP Jean-Michel Cucchi qui joue le rôle de négociateur pour définir une liste commune et convaincre Robillon que Anne Poyard-Vatrican fasse partie de l’aventure en 2013. Le radiologue et «?fils spirituel?» de Stéphane Valeri, que certains pressentaient pour mener la liste UP aux prochaines élections, pourrait d’ailleurs ne pas se présenter en 2013.

Passer son tour??
Pour Jo Déri, faute de combattants ou d’union avec l’UDM, l’UP n’aurait qu’une alternative?: « passer un tour et se présenter dans 5 ans?! Mais dans ce cas, il sera impossible de relancer la machine pour 2018… »
Dans toutes les hypothèses, à R&E, on se frotte les mains. « Ce serait un sketch formidable si UP et UDM se réconciliaient. Du pain béni pour nous?! La majorité bouclerait la boucle du ridicule et cela arrêterait la mort définitive pour ce groupe », juge jean-Charles Allavena, pour qui R&E continue son petit bonhomme de chemin?: « Nous avons marqué des points durant tous ces mois grâce à des prises de position cohérentes. De plus, l’image de Laurent Nouvion, déformée il y a quelques années, a changé. On n’est plus dans une logique où il pouvait apparaître potentiellement comme un repoussoir vis-à-vis des électeurs. Lui-même a fortement évolué vers un mode de fonctionnement plus à l’écoute », affirme Jean-Charles Allavena. Le noyau de la liste R&E (soit 15 à 18 noms) devrait, lui, être annoncé avant les vacances d’été…

Femme enceinte
© Photo D.R.

Concubinage, garde alternée… Avantage UDM

Si R&E a gagné des points au fil des mois sur les questions économiques, l’UDM a pris une longueur d’avance sur un thème moteur de campagne?: les problèmes de société.

Sauvetage du fonds de réserve constitutionnel et restriction des dépenses de l’Etat. Depuis que l’an passé, crise oblige, le gouvernement a décidé de restreindre son train de vie et annoncé qu’il arrêterait de puiser dans le fonds de réserve constitutionnel, R&E a beau jeu de rappeler que le mouvement a martelé un discours de prudence budgétaire depuis des années. « La capitalisation du fonds de réserve représente l’un des enjeux principaux relevé dès juin 2007 par Laurent Nouvion dans le cadre du cercle de réflexion Valeurs & Enjeux, et d’un axe fort de la politique préconisée depuis encore plus longtemps par l’UND », se targuent régulièrement les élus Rassemblement & Enjeux, dénonçant, a contrario, « la politique du « toujours plus » de la liste UPM ».
S’il faut rendre à César ce qui lui appartient, on constate de la même manière que sur les questions de société, les propositions motrices sont du côté de la majorité. Comme le montre encore le dernier Café citoyen de l’UDM, organisé le 19 mars. Garde alternée des enfants en cas de divorce, concubinage transformé en partenariat de vie commune par Nicole Manzone-Saquet (y compris pour les homosexuels), encadrement législatif de la procréation médicale assistée, cellules souches ou encore euthanasie et suicide assisté… C’est sur ce patchwork de questions primordiales que près de 70 adhérents de l’UDM étaient appelés à se prononcer au Café-théâtre des Bougainvilliers, en présence, pour les questions de l’accompagnement en fin de vie, de l’association JATALV. Des questions délicates intimement liées à l’éthique et à la religion qui ont le mérite d’être posées une bonne fois pour toutes. « Monaco n’est pas une théocratie et l’archevêque n’est pas le chef d’Etat. Ce sont les élus qui font la loi », a rappelé le président Jean-François Robillon.

Jusqu’où aller??
Jusqu’où Monaco est-il prêt à aller?? Que faut-il interdire où autoriser?? Et doit-on légiférer?? Si l’UDM s’est bornée à ébaucher certaines solutions (égalité de traitement des parents divorcés en cas de garde alternée en terme d’allocations familiales, établissement d’un fichier centralisé pour autoriser les dons d’organes, reconnaissance d’un partenariat de vie commune devant le juge préservant les droits des concubins, etc), il était surtout essentiel de tâter le pouls de la population sur les curseurs à proposer in fine en 2013. « Un mouvement politique n’est pas là pour asséner une vérité. Nous ne sommes pas des ayatollahs. La dialectique doit s’instaurer avec la population », a indiqué en amorce Jean-Sébastien Fiorucci, qui prenait alors sans doute ses marques pour porter sa candidature à l’assemblée générale du 29 mars. Certes ce café citoyen n’a pas dégagé de position claire des adhérents — ce qui est d’ailleurs logique pour une première salve (1). Mais ce qui compte, c’est de provoquer à terme un vrai débat démocratique.

Ligne de fracture
Ces questions de société représentent sans doute l’une des lignes de fracture les plus visibles avec l’opposition. Car ces problématiques, R&E ne compte pas en faire des thèmes de campagne. « A tort ou à raison, nous estimons que la plupart de ces questions font appel à des positions plus personnelles que politiques. Il n’est pas question, par exemple, de légiférer pour instaurer l’euthanasie », indique Jean-Charles Allavena, vice-président de R&E, qui reconnaît pourtant, à titre personnel, la pertinence de cette réunion publique?: « C’est une bonne chose que les gens débattent et d’associer les associations. » Conscient que la campagne de 2013 ne devrait pas échapper à ces débats-là.

(1) L’UDM a inauguré un « cahier citoyen » où chaque adhérent peut coucher ses réflexions.