vendredi 19 avril 2024
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Laurent Puons : « Le festival de télévision de Monte-Carlo est “the place to be” »

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Vingt-et-une créations en lice pour une Nymphe d’Or, quatre avant-premières mondiales et une pléiade de stars sur le tapis rouge… La 61ème édition du festival de télévision de Monte-Carlo, qui se déroulera du 17 au 21 juin 2022 au Grimaldi Forum, promet d’être forte en émotions et en découvertes. Laurent Puons, vice-président délégué du festival, en dévoile le programme et les nouveautés. Interview.

Après une édition 2021 très « européenne » en raison de la pandémie de Covid-19, à quoi faut-il s’attendre pour ce festival de télévision 2022 ?

L’an dernier, c’était un véritable cauchemar. Je ne sais même pas encore aujourd’hui comment mes équipes ont pu organiser un festival, certes plus français et européen, mais nous avions voulu maintenir le même format que par le passé donc il y avait quand même un grand nombre d’événements dédiés au public. Et organiser des événements publics dans les conditions du Covid, c’était un cauchemar. Cette année, ça va beaucoup mieux. On espère que ça va durer et que la situation va encore s’améliorer pour que certaines restrictions soient levées.

Vous espérez un assouplissement des mesures d’accueil d’ici le début du festival, prévu le 17 juin prochain ?

L’idéal serait de revenir comme en 2019, comme cela se passe aujourd’hui en France. En intérieur, il n’y a plus de masque alors qu’au Grimaldi Forum, le masque est encore imposé. On nous impose aussi le nettoyage des fauteuils à chaque passage ce qui représente une vraie perte de temps quand on dédie plus de vingt événements au public. J’espère vraiment que ces conditions vont s’assouplir pour nous permettre de travailler dans de meilleures conditions.

« La compétition, c’est vraiment le cœur du festival. Il est important pour nous qu’elle soit toujours à son meilleur niveau »

Laurent Puons

Quels seront les moments forts de cette 61ème édition du festival de télévision de Monte-Carlo ?

Ce festival se présente dans de très bonnes conditions avec en ouverture une série de MGM en avant-première mondiale Last Light, en présence du “cast” [ensemble des acteurs et des actrices de la série — NDLR] et notamment de Matthew Fox. Nous aurons également d’autres avant-premières telles que Ze Network avec David Hasselhoff, et également Toutes ces choses qu’on ne s’est pas dites avec Jean Reno, qui sera présent au festival. En dehors de ces moments forts, nous aurons une très belle compétition avec quatre avant-premières mondiales (1). Nous avons réformé la compétition il y a deux ans et désormais, nous projetons toute la sélection officielle durant le festival.

laurent puons
« À nous de mettre en place une stratégie pour démontrer qu’il y a aussi des talents en France et en Europe. C’est d’ailleurs ce que nous avons démontré lors de l’édition 2021. Car nous avons pu mettre en avant des productions de très grande qualité et des acteurs de très haut niveau. » Laurent Puons, vice-président délégué du festival. @ Iulian Giurca / Monaco Hebdo

Pourquoi avoir choisi la série Last Light pour votre projection d’ouverture ?

Depuis 2018, le festival a gardé une véritable indépendance. Nous n’avons pas scellé de partenariat ce qui nous permet de travailler avec toutes les chaînes et tous les studios. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les plus grands studios internationaux viennent chaque année pour annoncer leur nouvelle série et communiquer sur leurs talents. À l’origine, nous étions en discussions avec Sony, qui voulait nous présenter une série pour l’ouverture. Nous leur avions communiqué une “deadline” [date butoir — NDLR] pour avoir une réponse ferme et définitive mais le délai n’a malheureusement pas été tenu. Et nous disposions d’une proposition très intéressante de MGM, Last Light, qui garantissait la présence du cast. Surtout le thème de cette série est d’actualité puisqu’elle est sur le pétrole. Le trailer [la bande-annonce — NDLR] est fantastique, je pense que de par l’actualité et sa qualité, cette série va être très populaire. Il faut s’attendre à plusieurs saisons.

« Je ne veux pas créer de polémique, ni faire preuve de prétention, mais je ne me compare pas vraiment à ces festivals [Monte-Carlo film festival de la comédie et Monaco streaming film festival – NDLR]. Nous avons 61 ans d’existence. Le festival a été créé par le prince Rainier III, qui a été visionnaire quand on voit aujourd’hui ce qu’est devenue l’industrie de la série »

La thématique environnementale sera-t-elle encore à l’honneur cette année ?

Oui, nous allons projeter au cours du festival un documentaire sur la protection des océans et des mammifères marins. Jean-Charles Vinaj est venu me voir l’an dernier et m’a proposé ce documentaire. Nous l’avons accepté tout de suite, puisque c’est aussi une cause très importante pour notre président d’honneur, le prince Albert II. Nous sommes très contents de l’accueillir.

Quelles sont les nouveautés du festival ?

Dans notre profession, il est très important de se remettre en question et d’évoluer systématiquement avec son temps et avec l’industrie que nous accompagnons. Cette année, nous avons décidé de mettre en place deux nouveaux prix. Tout d’abord, la Nymphe d’or du meilleur espoir qui sera décernée à Théo Christine qui est un acteur français que nous avons eu la chance de voir notamment dans Skam et dans La guerre des mondes. Mais aussi dans Suprêmes, où il incarne de manière éblouissante le rôle de JoeyStarr.

Il y aura aussi cette année un prix du public ?

Oui, ce prix du public a été créé en partenariat avec BetaSeries. Le public occupe une place importante au niveau du festival. Chaque année, un grand nombre de fans se déplace pour rencontrer leurs actrices et acteurs préféré(e)s. Cette année, nous allons leur offrir l’opportunité de se positionner comme de vrais jurys car ils pourront juger parmi la sélection officielle, donc les 9 programmes en compétition, lequel est pour eux le plus marquant.

Quel sera le casting de cette édition 2022 ?

Notre jury sera présidé par l’acteur et producteur Neal McDonough. Il sera entouré dans cette mission par un panel de professionnels, d’actrices et d’acteurs, parmi lesquels Darko Peric (La Casa de Papel) et Adriana Karembeu. Nous avons aussi un grand nombre de professionnels de façon à équilibrer notre jury.

Comment sélectionnez-vous les membres du jury ?

C’est un choix stratégique. Il faut d’abord que ce jury soit international. Deuxièmement, il faut qu’il y ait un panel entre professionnels, acteurs et actrices. C’est important pour la crédibilité de notre compétition. La compétition, c’est vraiment le cœur du festival. Il est important pour nous qu’elle soit toujours à son meilleur niveau. Et les reformes que nous avons faites il y a deux ans portent leurs fruits. Le fait d’avoir désormais une sélection beaucoup plus restreinte de neuf programmes que l’on projette durant la manifestation nous permet d’avoir des avant-premières mondiales supplémentaires mais aussi d’avoir les casts sur place.

Les stars américaines seront-elles de retour cette année ?

Oui, nous avons la chance d’avoir un gros soutien de la part des studios américains et des plateformes digitales. Un grand nombre de studios américains seront de retour au festival de télévision. Sans aucune prétention, nous allons retrouver un niveau très important sur le festival 2022. Pour célébrer la dernière décennie, nous avons souhaité inviter les présidents des dix dernières éditions. Nous aurons ainsi la chance d’avoir sur le tapis rouge Ricky Whittle, Michael Hirst, Ron Perlman, Eric Close, Jason Priestley, ou encore Jane Seymour…

« Il y a sept ans, lors d’une interview, j’avais dit que le futur c’était les plateformes digitales. C’est une évidence. Aujourd’hui, on a envie de consommer comme on veut, quand on veut et où on veut »

Le festival de télévision de Monte-Carlo a souvent été taxé d’événement pro-américain : cela vous agace-t-il ?

Il est vrai que chaque fois que nous avons remis un prix spécial, soit une Nymphe d’honneur, soit une Nymphe de cristal, cela a été à un acteur ou une actrice américaine. Nous ne sommes pas pro-américains. Aujourd’hui, nous avons un gros avantage sur les autres événements, c’est que les États-Unis veulent venir chez nous. Ils ont confiance dans le festival de télévision, car nous avons gardé une véritable indépendance. En revanche, à nous de mettre en place une stratégie pour démontrer qu’il y a aussi des talents en France et en Europe. C’est d’ailleurs ce que nous avons démontré lors de l’édition 2021, qui aura été très importante. Car nous avons pu mettre en avant des productions de très grande qualité qui s’internationalisaient et des acteurs de très haut niveau.

Qu’avez-vous prévu pour le public cette année ?

Le programme dédié au public sera encore très très riche. Un épisode inédit d’Amour, gloire et beauté sera diffusé pour célébrer les 35 ans de la série. Les Feux de l’amour seront aussi présents. Nous aurons également un grand nombre de séances d’autographes avec des séries françaises [Un si grand soleil, Plus belle la vie, Ici tout commence — NDLR]. Sans oublier la projection du documentaire sur la protection des océans et des mammifères marins.

Vous avez décidé de faire appel à Amandine Petit et Éric Antoine pour la présentation de la cérémonie de clôture : pourquoi ce choix ?

Nous voulons essayer de nous différencier chaque année. Nous avons eu l’opportunité d’avoir le magicien-humoriste Éric Antoine et Miss France 2021. Nous sommes convaincus que ce duo va très bien fonctionner. Cette remise des prix sera rythmée différemment de ce qui a été fait par le passé. Car Éric Antoine a quelques idées et une façon particulière de présenter la soirée. On peut s’attendre à de grands moments.

Quel regard portez-vous sur les autres festivals (Monte-Carlo film festival de la comédie, Monaco streaming film festival…) organisés en principauté, et basés sur le même créneau que le vôtre ?

Je ne veux pas créer de polémique, ni faire preuve de prétention, mais je ne me compare pas vraiment à ces festivals. Nous avons 61 ans d’existence. Le festival a été créé par le prince Rainier III. Il a été visionnaire quand on voit aujourd’hui ce qu’est devenue l’industrie de la série. Nous avons un contenu qui est très riche. Les plus gros studios se battent pour faire l’ouverture du festival de télévision de Monte-Carlo. Je ne sais pas si c’est le cas sur le festival de la comédie et sur le festival du streaming qui vient de se lancer. Nous avons une indépendance qui est mondialement connue et reconnue, nous avons récompensé au travers la Nymphe d’honneur les plus grands professionnels de cette industrie Jerry Bruckheimer, Ted Turner… La Nymphe de cristal que nous avons créée en 2012, nous a permis de récompenser des stars comme Michael Douglas, Tchéky Karyo, Helen Mirren, Patricia Arquette… Chaque année, nous ouvrons le festival avec une avant-première mondiale et nous avons quand même été très précurseurs parce que nous avons été le premier festival en 2018 à ouvrir avec une avant-première mondiale d’un contenu émanant d’une plateforme digitale alors que les autres festivals les mettaient auparavant de côté [Jack Ryan diffusée sur Prime Video — NDLR].

La télévision suscite moins d’engouement aujourd’hui, notamment chez les jeunes générations : partagez-vous ce constat ?

Il y a sept ans, lors d’une interview, j’avais dit que le futur c’était les plateformes digitales. C’est une évidence. Aujourd’hui, on a envie de consommer comme on veut, quand on veut, et où on veut. Les plateformes digitales l’ont très bien compris. Amazon et Netflix perdent des abonnés, mais je ne suis pas inquiet pour eux. Désormais, il y a une forte concurrence : Disney+, Salto en France… Tous les gros studios créent leur plateforme digitale, ce n’est pas un hasard. La façon de consommer n’est plus du tout la même mais ça ne date pas d’aujourd’hui. Je ne dis pas que c’est la mort des chaînes linéaires mais c’est sûr que ça risque de ne pas durer très longtemps encore. Même s’il y a certains contenus qu’on continuera à regarder sur les chaînes linéaires comme les JT [journaux télévisés — NDLR] ou certaines émissions. En revanche, les films, les mini-séries…

laurent puons
@ E-mages

Cela vous inquiète pour le futur du festival ?

Non pas du tout. Parce que nous avons justement la chance d’avoir ouvert la porte à ces plateformes digitales depuis 2018. Nous avons chaque année en compétition des œuvres émanant de ces plateformes digitales. Nous avons encore du travail à faire, nous avons d’excellentes relations avec le studio Disney. Aujourd’hui, nous savons qu’il y a une tendance qui va vers la plateforme digitale. Mais ça ne signe pas non plus la fin des studios traditionnels. Il faut bien faire la distinction entre la production et la diffusion.

laurent puons
@ Iulian Giurca / Monaco Hebdo

C’est-à-dire ?

Il y aura toujours des studios comme NBC, CBS, Disney ou Warner qui vont produire des films. En revanche, la diffusion c’est autre chose. Aujourd’hui, les plateformes digitales ont beaucoup d’argent. S’ils l’achètent pour diffuser sur leur plateforme digitale, moi ça ne me pose pas de souci. Le studio viendra sur le festival pour le promouvoir. Nous devons en tenir compte. Il faut en être conscient et être précurseur.

« Game of thrones, Lost, Grey’s anatony, Glee, Empire, Crossing lines… Toutes ces séries ont été lancées au festival. Nous sommes “the place to be” »

Vous n’êtes donc pas inquiet ?

Le festival a un très bon positionnement acquis depuis des dizaines d’années. Nous avons réussi à mettre en place un événement qui permet à tous ces studios, à toutes ces plateformes, à toutes ces chaînes de promouvoir leurs séries, leurs talents auprès des médias et du public. Ils ont besoin d’une place comme celle-ci. Ne serait-ce que sur les vingt dernières années, toutes les plus grosses séries à succès ont fait leur avant-première mondiale au festival : Game of thrones, Lost, Grey’s anatony, Glee, Empire, Crossing lines… Toutes ces séries ont été lancées au festival. Nous sommes “the place to be” [l’endroit idéal — NDLR]. En plus, Monaco c’est magnifique. Nous sommes le seul festival qui arrive à mettre en contact le public avec leurs stars préférées dans des conditions optimales. C’est gagnant pour tout le monde.

Bientôt un Sportel à Bali et en Amérique du Sud ?

Durement frappé par la crise liée à la pandémie de Covid-19, Monaco Mediax se cherche de nouvelles sources de revenus. Cette entreprise monégasque spécialisée dans l’évènementiel est en discussions avancées avec plusieurs pays pour exporter son Sportel, hors des frontières nationales. Et après Miami, c’est vers l’Asie que ce rendez-vous du sport-business pourrait bien prendre racine. « Il y a quatre ans, j’ai souhaité lancer une nouvelle division, Monaco Mediax Events, pour faire de la prestation de services. Nous avons aidé à organiser certains petits événements, certaines projections compte tenu de notre savoir-faire. Et nous avons été contactés par Bali pour organiser un Sportel », confie le vice-président de l’entreprise, Laurent Puons. Des pourparlers ont alors été entamés entre les parties pour aboutir dans les prochains jours à la signature d’un contrat. « C’est un événement qui se déroulerait au mois de février 2023 », précise Laurent Puons qui ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Nous sommes aussi en discussions avec un pays d’Amérique du Sud pour organiser un Sportel là-bas en décembre ». Mais pas question pour autant de faire de l’ombre à l’événement automnal monégasque : « Ce ne sera pas le même format, ni les mêmes stands qu’à Monaco. On va proposer du clé en main à des prix totalement différents, et avec une stratégie marketing et une communication différentes, pour bien faire la différence entre Monaco qui reste le main event [événement principal — NDLR] et les Sportel rendez-vous qui vont permettre à ces continents de rencontrer notre communauté », insiste le vice-président de Monaco Mediax. Le festival de télévision de Monte-Carlo, dont l’entreprise monégasque est l’organisatrice, pourrait-il alors lui aussi s’exporter à l’avenir ? « Pourquoi pas, répond Laurent Puons. J’avais discuté avec les Golden Globes [récompenses de cinéma et de télévision américaines — NDLR] et nous avions envisagé une collaboration pour projeter notre sélection. C’est quelque chose dont nous pouvons peut-être rediscuter. Parce que cela nous ferait une super promotion ». Affaire à suivre.

1) Retrouvez la sélection officielle de cette 61ème édition sur le site du festival de télévision de Monte-Carlo : https://www.tvfestival.com/fr.