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Culture Sélection de juin 2020

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Monaco Hebdo sélectionne pour vous le meilleur de la culture du moment. Retrouvez nos coup de cœur Blu ray, livres, bandes-dessinées et albums.

Nina Wu de Midi Z

Chantage. Lorsque Nina Wu quitte tout pour s’installer à Taipei, c’est avec l’objectif de réussir dans le monde du cinéma. Elle veut devenir actrice, et lorsqu’on lui propose de rejoindre les premiers rôles d’un film d’espionnage, elle accepte, malgré les scènes de sexe et de violence. Nina Wu, cinquième long-métrage de Midi Z, réalisateur birman né en 1982 et installé à Taïwan, s’appuie sur un scénario écrit par l’actrice et premier rôle de ce film, Wu Ke-Xi. Pour cela, elle a consulté beaucoup de témoignages issus du mouvement #metoo, de l’affaire Weinstein, tout en s’inspirant aussi de sa propre expérience. Le suicide de la comédienne sud-coréenne Jang Ja-yeon, victime de chantage sexuel, a dû peser aussi. Ce thriller psychologique détaille de façon saisissante la descente aux enfers de Nina Wu, porté par un montage qui rejette la linéarité.

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Nina Wu de Midi Z, avec Wu Ke-Xi, Vivian Sung, Kimi Hsia (TAI/MAL/BIR, 2020, 1h43), 19,99 euros (DVD seulement, pas de sortie blu-ry). Sortie le 7 juillet 2020.

Vivarium de Lorcan Finnegan

Absurde. « Une maison pour l’éternité ». C’est en ces termes que l’agent immobilier (l’inquiétant Jonathan Aris) présente au jeune couple formé par Imogen Poots et Jesse Eisenberg, la maison qu’il leur fait visiter, quelque part en banlieue, dans un lotissement où toutes les maisons se ressemblent. Mais après la visite, impossible de repartir. L’agent immobilier a disparu et les rues de ce lotissement sont un dédale sans fin. Résigné, le couple s’installe dans cette maison témoin. Tout leur est livré : les courses, et même un bébé, qu’ils sont condamnés à élever pour avoir une chance de partir. Chaque jour est identique, et ce quotidien insipide devient rapidement totalement aliénant et absurde. Présenté à la Semaine de la critique à Cannes, en 2019, Vivarium, de l’Irlandais Lorcan Finnegan, est un film fantastique qui délivre une intelligente critique du consumérisme.

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Vivarium de Lorcan Finnegan, avec Jesse Eisenberg, Imogen Poots, Jonathan Aris (IRL/BEL/USA, 2020, 2h08), 19,99 euros (blu-ray), 19,99 euros (DVD).

Sortie le 8 juillet 2020.

Monos d’Alejandro Landes

Enfants. Pour son troisième long-métrage, le Colombien Alejandro Landes s’intéresse à une petite bande d’enfants-soldats membres d’une armée de guérilla. Ils sont chargés de surveiller une femme, un médecin américain, qui a été prise en otage. Une partie du film d’Alejandro Landes repose sur la description méthodique du fonctionnement d’une société d’enfants pour lequel la guerre est aussi un jeu. On pense bien sûr au livre de William Golding (1911-1993), Sa Majesté des mouches (1954), qui évoquait l’organisation sociale d’un groupe d’enfant sur une île déserte du Pacifique. Mais, peu à peu, les règles et l’unité volent en éclat sous la pression des supérieurs et les ambitions des uns ou des autres. La situation s’aggrave encore lorsque l’otage s’évade. Entre thriller d’aventures et film de guerre, Monos est une fresque aussi violente que captivante.

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Monos d’Alejandro Landes avec Julianne Nicholson, Moises Arias, Sofia Buenaventura (COL/ARG/HOL/ALL/SUE/URU/DAN/USA, 2020, 1h43), 19,99 euros (blu-ray), 19,99 euros (DVD). Sortie le 8 juillet 2020.

En avant de Dan Scanlon

Jambes. Le nouveau Pixar nous plonge dans un univers qui emprunte aux codes de l’heroic fantasy. La famille Lightfoot, une famille d’elfes, peine à se remettre de la disparition du père. Le jour de leurs 16 ans, les deux fils apprennent de la bouche de leur mère que, grâce à un sceptre en bois, ils pourront faire revenir leur père le temps d’une journée. Mais, faute de réaliser le tour de magie correctement, ils se retrouvent avec la moitié de leur père, à savoir seulement les jambes. Ils partent donc à la recherche de la moitié manquante, et s’embarquent dans un voyage mouvementé. Comme souvent chez Pixar, rien ne vient effacer le deuil, et le jeune Ian ne sera pas consolé. Tout juste apprendra-t-il à s’intéresser de plus près aux vivants, qu’il négligeait parfois. Sans être le meilleur Pixar, En avant tire son épingle du jeu, grâce à quelques séquences émouvantes. Comme quoi, même un Pixar mineur vaut souvent le coup d’œil.

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En avant de Dan Scanlon, avec Thomas Solivérès, Pio Marmai, Tom Holland (USA, 2020, 1h42), 24,99 euros (blu-ray), 19,99 euros (DVD). Sortie le 31 juillet 2020.

Noir, des grottes de Lascaux à Pierre Soulages de Hayley-Jane Edwards-Dujardin

Présence. « Le noir, c’est la reine des couleurs » disait Auguste Renoir (1841-1919), alors qu’Henri Matisse (1869-1954) estimait que « le noir est une couleur en soi qui résume et consume toutes les autres ». En un peu plus de 100 pages, l’historienne de l’art et de la mode, Hayley-Jane Edwards-Dujardin, évoque toutes les sortes de noir, car, bien évidemment, il n’en existe pas qu’un seul. Des grottes de Lascaux, en Dordogne, au peintre maître du noir Pierre Soulages, qui a fêté ses 100 ans le 24 décembre 2019, à peu près toutes les formes de noir y passent. Son utilisation, et sa présence quasi-permanente dans l’histoire de l’art, sont scrutées sur un panel d’œuvres très diverses. Captivant.

Noir, des grottes de Lascaux à Pierre Soulages de Hayley-Jane Edwards-Dujardin (éditions du Chêne), 108 pages, 14,90 euros.

Nous errons dans la nuit dévorée par le feu de Jules Grant

Féministe. Au début des années 2 000, Donna et Carla sont à la tête d’un gang qui ne compte que des femmes à son actif. En évitant soigneusement la violence et les guerres de clans, elles parviennent à se faire une place dans le trafic de drogue, à Manchester. Jusqu’au jour où Carla est assassinée pour avoir attirée la femme d’un caïd local. La paix est brisée et la guerre est alors totale. Dans ce chaos, Donna doit veiller sur Aurora, la fille de Carla, 10 ans seulement, mais bien décidée à ne pas se laisser faire. Née à Manchester, aujourd’hui installée à Brighton, Jules Grant a travaillé pendant 20 ans comme avocate, avant de signer ce premier roman, qui est aussi noir que féministe.

Nous errons dans la nuit dévorée par le feu de Jules Grant, traduit de l’anglais par Maxime Berrée (Inculte), 348 pages, 19,90 euros.

La Nuit d’avant de Wendy Walker

Succès. La carrière de Wendy Walker continue son ascension. Depuis la sortie des Apparences en 2012 aux Etats-Unis et deux ans plus tard en France, cette ancienne avocate spécialisée dans le droit de la famille n’en finit pas d’empiler les livres à succès. David Fincher a adapté au cinéma Apparences avec le très bon Gone Girl (2014) et, là encore, le carton a été total. Dans La Nuit d’avant, Wendy Walker met en scène Laura qui, pour oublier une rupture compliquée, s’inscrit sur un site de rencontre. C’est là qu’elle croise Jonathan Fields, 40 ans et fraîchement divorcé, qu’elle décide de rencontrer physiquement. Sauf qu’elle ne revient jamais de ce rendez-vous. Les producteurs de Gone Girl ont déjà réservés les droits de La Nuit d’avant. Succès garanti ?

La Nuit d’avant de Wendy Walker, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Karine Lalechère (Sonatine), 352 pages, 21 euros.

Calfboy 2 de Rémi Farnos

Chamane. Publié en janvier 2019, le premier volume de Calfboy avait déjà été remarqué. On y suivait les aventures de Chris Birden qui avait beaucoup de mal à se souvenir à quel endroit exact il avait enterré le butin de son dernier braquage, ce qui provoquait la colère de son comparse et frère. Cette fois, pendant que Chris continue de chercher où il a bien pu cacher l’argent du braquage, son frère, Burt, fait la connaissance d’une chamane. Pour se remettre de ses émotions, elle lui propose de se recentrer sur lui-même. Ajoutez à cela une voleuse de chevaux et, bien sûr, comme dans tout bon western, des indiens, et vous avez une excellente BD à lire de toute urgence.

Calfboy 2 de Rémi Farnos (La Pastèque), 72 pages, 18 euros.

Peuple invisible de Shôhei Kusunoki

Précieux. A l’origine, les nouvelles compilées dans ce volume par la maison d’édition Cornélius ont été publiés dans la revue Garo, un célèbre mensuel japonais de BD créé par Katsuichi Nagai en juillet 1964 et disparu en décembre 2002. Né à Tokyo, Shôhei Kusunoki (1944-1974) a écrit ces histoires entre 1968 et 1974. Il s’intéresse à la description de la vie du peuple, qui est alors l’oublié dans le Japon de ces années-là. Kusunoki détaille aussi la mécanique des relations humaines, comment les sentiments naissent et se délitent parfois, pourquoi les gens sont attirés les uns par les autres et finissent par se détester. Les récits publiés aujourd’hui dans Peuple invisible viennent compléter La promesse, et rendent donc disponible l’intégralité de l’œuvre imaginée par Shôhei Kusunoki. Précieux, donc.

Peuple invisible de Shôhei Kusunoki (Cornélius), 336 pages, 26,50 euros.

III

Auscultation

Jalons. On vous recommande de commencer l’écoute de cet album non pas par le début, mais par Turn Down These Voices, soit la piste 4. Très accessible, très entraînant, ce titre est une excellente invitation à écouter le reste de ce très bon disque. En seulement 6 titres, Joel Shanahan distille une electro qui oscille entre ambient et techno, dans un style à la fois aérien et dansant, incarné par le très bon Flottant. Connu aussi pour son travail avec Golden Donna, Joel Shanahan a sorti le précédent album d’Auscultation en 2015. Ce disque, L’étreinte imaginaire, posait, en quelque sorte, les jalons pour III. D’ailleurs, le premier titre de ce nouvel album, Glowing Hearts in the Rainbow Room, semble être une suite directe de L’étreinte imaginaire. Pour le reste, III est sans doute plus varié, avec ses moments d’agitation, puis de calme.

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III, Auscultation (100 % Silk/Rough Trade), 6 euros (MP3).

All Visible Objects

Moby

Engagé. Richard Melville Hall, soit Moby, est de retour. All Visible Objects est son 17ème album, et il permet de se replonger avec plaisir dans une house et une techno qui n’a rien perdu de son efficacité. One Last Time convoque avec réussite le style qui a fait son succès lors de la sortie de l’album Play, en 1999. Moby s’autorise aussi une reprise, My Only Love (1980) de Roxy Music. Plutôt réussie, elle devrait séduire Bryan Ferry pour son élégance et sa légèreté. Très engagé depuis 2016, Moby reversera l’intégralité des bénéfice de cet album à des associations qui défendent diverses causes, des droits humains en passant par l’écologie, ou les animaux. Né le 11 septembre 1965 à New York, Moby n’a rien perdu de son sens du rythme. Les années 2020 lui appartiennent.

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All Visible Objects, Moby (Little Idiot/Because), 9,99 euros (MP3), 13,99 euros (CD), 22,99 euros (vinyle).

All Things Being Equal

Sonic Boom

Fascinant. C’est le premier album de Pete Kember sous le nom de Sonic Boom depuis 1990 et la sortie de Spectrum. Soit une éternité pour ce producteur et chanteur anglais, connu aussi pour avoir été membre du groupe de rock Spacemen 3 entre 1982 et 1991, ou encore pour avoir été à la production du second album de MGMT, Congratulations (2010). L’excellent, mais pas très gai, Spinning Coins and Wishing on Clovers, convoque des nappes synthétiques et une voix monocorde, qui a le goût des regrets. Plus enjoué, Tawkin Techno laisse Pete Kember s’amuser avec un orgue, un rythme répétitif et des voix robotiques. En 10 titres, All Things Being Equal démontre que si tout est peut-être égal, tout est surtout fascinant quand on a le talent de Pete Kember.

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All Things Being Equal, Sonic Boom (Carpak Records/Rough Trade), 7,99 euros (MP3), 12,37 euros (CD), 22 euros (vinyle).

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